52. Un des principaux risques de la volonté d’harmonisation au niveau européen est un possible nivèlement par le bas des systèmes de contrôle des pays mieux fournis en matière d’évaluation de la transparence. Ainsi dans un pays comme la France qui s’est doté d’une législation élaborée pour évaluer et améliorer la transparence des sociétés de gestion collective, certaines mesures de la proposition de directive peuvent poser des problèmes d’application.
53. Les sociétés de gestion collective déplorent le fait qu’il n’existe pas d’égalité de traitement entre le public et les sociétés de gestion collective dans la proposition de la Commission. En effet la proposition de directive n’envisage la survenance des litiges que du point de vue des utilisateurs et non de celui des sociétés de gestion collective. L’article 35 qui traite de la résolution des litiges concernant les utilisateurs, prévoit que les Etats membres mettent en place un « organe de règlement des litiges indépendant et impartial ». La création d’une instance pré-judiciaire obligatoire est considérée comme une source de difficulté. La pratique dans le cadre de la propriété littéraire et artistique a révélé un usage dilatoire des instances de conciliation ou de médiation, entraînant une augmentation des coûts. La plupart des systèmes judiciaires permettent de recourir à la médiation.
54. Concernant les procédures d’information pour prévenir un alourdissement des coûts, les sociétés de gestion collective estiment que les mesures prévues par la proposition de directive sont excessives et très coûteuses. Le texte devrait prévoir un renvoi au droit national si celui-ci dispose déjà d’obligations équivalentes, ce qui permettrait d’éviter plusieurs couches juridiques qui traiteraient un même sujet.
Par exemple, les articles 16 et 18 de la proposition de directive qui sont relatifs à la communication obligatoire ou sur demande de certaines informations renvoient à des mécanismes existants en droit français. L’article 16 prévoit par exemple la mise à disposition systématique et annuelle de nombreuses informations individuelles récapitulatives. La faculté d’obtenir des informations comparables à la demande de chaque membre existe en droit français(55).
55. L’article 8 de la directive prévoit une fonction de surveillance pour le contrôle permanent des activités et de l’accomplissement des missions des personnes investies de responsabilité de direction au sein de la société. La mise en place de cette fonction de surveillance au sein des sociétés de gestion collective met en exergue la question de la création d’un organe spécifique qui serait doté de cette fonction. Dans l’article 7 il est expressément fait mention de l’existence et de la compétence d’un conseil de surveillance. Cette vision pourrait imposer aux sociétés de gestion collective françaises un remaniement en profondeur de leurs statuts, car une grande majorité d’entre elle fonctionne avec un organe de direction unique sous le contrôle direct de l’assemblée des associés, et où le conseil d’administration prend les actes de décision de la société et contrôle le directeur général. La mise en place d’un organe spécial pourrait poser des problèmes.
56. Pour la gestion des produits de droits d’auteur de nombreuses sociétés françaises utilisent les produits financiers provenant des placements des sommes en instances de répartition pour contribuer au financement de leurs activités. Une remise en cause de ces pratiques provoquerait selon elles une hausse corrélative des prélèvements pour frais de gestion supportés par les ayants droits, notamment en raison des coûts de gestion d’une distribution individualisée de ces produits, en particulier en raison de la complexité du calcul des affectations. Ces coûts pourraient excéder individuellement le montant à distribuer.
57. La volonté d’amélioration de la transparence des sociétés de gestion collective en Europe peut parfois conduire à des conflits entre les propositions de la directive et la législation nationale. En France la démarche d’amélioration de la gestion collective a débuté depuis quelques années et pourra être renforcée par la proposition de directive du 11 juillet 2012 si elle s’articule bien avec les systèmes de contrôle déjà mis en place.
55 Article R.321-6 du Code de la propriété intellectuelle.
