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I- CONTEXTE ET PROBLEMATIQUE

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Après la chute de l’union soviétique et l’effondrement du mur de Berlin en 1989, symboles du déclin du Communisme, les arguments économiques de tendance libérale ont connu un essor remarquable dans les pays en voie de développement( PVD) avec la fin du système de Bretton Woods qui se traduisit par la baisse généralisée des droits de douane , la disparition des parités fixes entre monnaies et l’avènement du nouveau système financier international. Ces mutations sociopolitiques et idéologiques doivent leur origine à un contexte de perte par l’Etat dans plusieurs pays, de sa légitimité et de la démonstration de ses limites et de son inefficacité dans de nombreux domaines.

En effet, le discrédit de la doctrine keynésienne, la forte croissance du chômage et de l’inflation, l’endettement des gouvernements qui en ont résulté ont renforcé les limites du dirigisme étatique. En fait, au cours des années quatre-vingt, c’est tout un ensemble de prémisses de la gestion publique et de la politique économique qu’il fallut fortement reconsidérer, à une époque où le gaspillage des capitaux publics et la mauvaise gestion des ressources de la collectivité semblaient le lot des administrations publiques.

Mais très tôt, cet Etat providence, grand régulateur des marchés mais aussi opérateur économique qui a conduit dans de nombreux pays à une prolifération bureaucratique et une pléthore d’établissements publics a dû subir une cure d’amaigrissement en limitant ses tendances tutélaire et dirigiste. Dès 1980, l’essoufflement des économies nationales a permis aux institutions financières internationales de proposer de nouvelles régulations de l’action publique caractérisées par le néo-libéralisme.

Cette nouvelle approche, qui mise sur l’aptitude de la concurrence et de la liberté des marchés à pouvoir s’autoréguler sous le règne du droit afin de servir l’intérêt général bien mieux que l’Etat ne pourrait le faire semblait la solution indispensable pour permettre un retour à la croissance. Cette idée est du reste soutenue par de nombreux économistes néoclassiques mais aussi par des politiciens libéraux dont M. Thatcher(1979), R. Reagan(1991).C’est ainsi que pour Baumol, Panzar et Willig(1982), même si les marchés peuvent connaître des insuffisances, celles-ci sont moins graves que celles induites par l’Etat d’où l’importance de disloquer ce dernier afin de mettre fin aux systèmes productifs les plus faibles.

Ces libéraux fondent leur argumentation sur deux théories principalement à savoir la théorie des droits de propriété (Alchian, 1965 et Demsetz, 1967) et la théorie de l’inefficience-X (Leibenstein, 1978) qui accordent une supériorité de gestion de l’entreprise privée par rapport à l’entreprise publique. Il faut dire que cette argumentation peut se justifier dans le contexte africain par l’ensemble des mauvais résultats obtenus par le secteur public sur lequel l’Etat avait fondé beaucoup d’espoir.

En effet, aux lendemains des indépendances africaines, les entreprises publiques qui ont connu une forte expansion, loin de supporter adéquatement les élans autonomistes des pays africains n’ont véritablement pas été à la hauteur des attentes. Avec une gestion inefficace et peu transparente et une dégradation du cadre éthique au sein des administrations publiques, qui se sont fortement nourries d’une attitude de tolérance et d’une certaine « culture de l’impunité », ces entreprises sont très tôt apparues comme des « entités chaotiques » peu performantes, qui induisent des surcoûts bureaucratiques de fonctionnement de leur appareil de contrôle et de sanction. Ainsi l’inefficience accrue des entreprises publiques dans un environnement caractérisé par la fragilité macroéconomique et l’instabilité des finances publiques de nombreux pays africains a conduit la plupart de ces pays pendant la fin des années quatre vingt à adopter les Programmes d’Ajustement Structurels(PAS).

C’est du reste ainsi qu’après deux décennies de prospérité, le Cameroun, à la fin des années quatre vingt marquées par la crise économique et plus spécifiquement le 27 juillet 1989, signe avec les institutions financières internationales notamment le Fonds Monétaire International(FMI) et la Banque Mondiale(BM) les PAS. Ces programmes avaient pour objectifs principaux d’une part la stabilisation des finances publiques et d’autre part la mise en œuvre des réformes structurelles. Dans le cadre de ces réformes, le gouvernement camerounais a entrepris de rationaliser la gestion des entreprises publiques et parapubliques à travers la restructuration de certaines d’entre elles, la liquidation et la privatisation d’autres (MINEFI, 1995).

La privatisation, puisque c’est de ce dont il est question ici est un processus par lequel les prérogatives qui autrefois étaient attribuées à l’Etat sont désormais déléguées au secteur privé (Stiglitz, 2000). Au sens strict, elle désigne le transfert à titre définitif des entreprises du secteur public au secteur privé sous forme d’actifs, de titres ou de cessions de contrôle.

Au sens large, elle peut s’appréhender comme toute action ayant pour but le transfert temporaire au secteur privé d’activités auparavant exercées par une entité publique (Tamba, Banyanga et Nouikani, 2001). Elle vise principalement à garantir la pérennité de l’entreprise qui en est concernée à travers l’amélioration de son efficacité et de sa compétitivité tout en permettant la mobilisation des capitaux, la flexibilité de gestion et le transfert de technologies nécessaires à son développement, à consolider l’équilibre des finances publiques en réduisant d’une part les dépenses prises en charge par le budget de l’Etat au profit de certaines entreprises publiques et en procurant d’autre part à cet Etat des ressources additionnelles lui permettant de soutenir les efforts qu’il déploie notamment dans les domaines de l’éducation, de la formation, de la santé, des infrastructures etc.

C’est dans le sillage de ces principes directeurs de la privatisation et des considérations libérales qu’il est couramment déclaré que la privatisation améliore la performance des entreprises. Ainsi, face aux exigences de compétitivité, d’efficacité et d’efficience imposées par la mondialisation aux entreprises camerounaises, avec en l’occurrence la future signature définitive des Accords de Partenariat Economiques (APE) Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP) mais aussi vu les conséquences graves qui peuvent résulter de l’adoption de politiques économiques( la privatisation en l’occurrence) non idoines dans un environnement qui se veut de plus en plus concurrentiel, il convient, ce d’autant plus que Stiglitz (2000) affirme que : « Bien que les cas de gaspillage de l’Etat soient nombreux, les faits ne confirment pas toujours l’idée selon laquelle le secteur public serait fatalement moins efficace que le secteur privé », de se poser la question de savoir : Quel est l’impact de la privatisation des entreprises camerounaises sur leur performance ?

Toutefois, il convient un temps soit peu de s’appesantir sur cette notion de performance qui n’est ni facile à définir ni facile à mesurer ceci à cause de son caractère multiple qui la rend appréhendable de plusieurs manières. En effet, la notion de performance reste attachée à plusieurs critères variant selon le domaine de son application. En Economie, Gestion, Stratégie, Finance, elle n’a pas toujours les mêmes principes. Elle est définie par les praticiens et les adeptes de la vie organisationnelle de différentes manières : d’après (Paul et al, p41) on la conçoit toujours quand le consommateur abandonne une entreprise parce qu’elle n’a pas réussi à lui fournir un produit ou un service avec une fonction qualité-prix attractive. Pour un actionnaire ou un banquier, la performance de l’entreprise dépend du montant et du risque de ses cash-flows(1) futurs (Charles Henri d’Arcimoles, 1994, p.6).

Une autre définition de la performance de l’entreprise vient de (Goczol, Joseph et al.)(2). Ils conçoivent une entreprise performante comme celle qui a la capacité de gérer au mieux l’opposition dans le domaine de la production entre exigences de qualité et impératifs de rendements (Gauzente, Claire, 2000, p.146 (3)) considère que la performance de l’entreprise dans sa conception anglo-saxonne signifie l’accomplissement, pour évoquer par la suite l’exploit et le succès.

Dans l’optique de Gauzente, il existe quatre approches de performance : économique, sociale, systémique et politique ; la première approche repose initialement sur la notion des objectifs à atteindre, la deuxième, par son aspect humain, place l’Homme au centre de ses réflexions ; la troisième approche, en faisant opposition aux deux premières approches jugées partielles, met l’accent sur les capacités de l’organisation : l’efficacité organisationnelle est donc le degré auquel une organisation, en tant que système social disposant de ressources et moyens, remplit ses objectifs sans obérer ses moyens et ses ressources et sans mettre une pression indue sur ses membres (Georopoulous; Tannenbaum, 1957, p.535) (4).

Finalement, l’approche politique vient apporter ses critiques aux trois précédentes approches. D’après Gauzente, chacune de ces approches assigne à l’entreprise certaines fonctions et certains buts. Or, tout individu peut avoir ses propres critères pour juger de la performance d’une organisation. Vu donc le caractère disparate de cette notion de performance, nous nous appesantirons tout au long de notre étude sur les aspects microéconomiques de celle-ci en nous inspirant notamment de la définition de Millward et al.(1983) pour qui la performance peut être appréhendée en termes de rentabilité, de productivité et de coût ; et ce, en axant notre travail uniquement sur les aspects rentabilité et productivité de la performance.

1 Charles Henri d’ARCIMOLES « Le Bilan Social Clignotant ou Radar, pour Une Analyse externe de la performance Economique de l’Entreprise », Revue de Gestion des Ressources Humaines, n°12, Octobre 1994, p5-16.
2 GOCZOL Joseph ; BALASSE, Alain et SCOUBEAU, Chantel « Stratégie et Performances dans Un Contexte Concurrentiel » Revue de Gestion, 2000, n°4, Juillet-Août, 1998, p.107
3 GAUZENTE, Claire « Mesurer la Performance des Entreprises en l’absence d’Indicateurs Objectifs : quelle validité ? Analyse de la pertinence de certains indicateurs » Revue Finance, Contrôle, Stratégie, Vol.3, n°2, Juin 2000, p.145-165.
4 In GAUZENTE, C, OP.CIT, p.147.

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