Le principe général en matière de transport international des produits en transit est celui de
l’exonération fiscale et douanière. Dans une composition panachée des dispositions des Articles 3
de la Convention du 8 juillet 1965 et 127 de celle des Nations Unies du 10 décembre 1982
susmentionnées, il ressort en effet que dans le territoire de l’Etat de transit, le trafic en transit
n’est soumis à aucun droit de douane, taxe ou autre redevance du fait de l’importation ou de
l’exportation, ni à aucune taxe spéciale en raison du transit.
La consécration de cette règle au terme d´une évolution marquée par des conditionnalités
de réciprocité est la conséquence des craintes exprimées de manière constante par les Etats
enclavés de voir le passage en transit soumis à un lourd tribut réduisant ou annihilant tout effort
de développement.
L´Accord bilatéral tchado-camerounais susmentionné confirme du reste ce principe. Selon
les dispositions de son Article 19 (2) en effet : « Aucun droit, impôt, taxe, redevance et autre frais
de toute nature liés à l’importation ou à l’exportation de ces hydrocarbures ne sont dus par ces
Expéditeurs en République du Cameroun du fait de ces opérations, ni applicables à ces
hydrocarbures ».
L´application de ce régime « hors-taxe » n´a pas rencontré une appréciation favorable dans
certaines couches de la société camerounaise.(183)
Par ailleurs, le texte interdit formellement toute double imposition. Les dispositions liant
les deux Etats au plan sous-régional dans le cadre de l´Acte n°5/66-UDEAC-49 du 13 décembre
1966 relatives à la suppression de la double imposition trouvent ici un champ d´application. En
vertu de l´Article 37.2 de cet Acte, l´Accord énonce que le transporteur camerounais n´est
assujetti à l´impôt qu´en République du Cameroun, le transporteur tchadien l´étant uniquement au
Tchad. Le bénéfice de ces dispositions s´applique également aux personnes physiques engagées
dans ces activités.
En outre, en tant que transporteur des hydrocarbures tchadiens à travers le territoire
camerounais, la COTCO jouit, à côté du droit d´exonération, d´un traitement non
discriminatoire(184) et égal à celui réservé aux sociétés de même nature pouvant exercer dans les
mêmes conditions au Cameroun.
De plus, si elle estime qu´une société de transport de pétrole brut par pipeline bénéficie au
Cameroun d´une ou plusieurs conditions considérées par elle comme étant plus favorables que
celles prévues dans la Convention d’Etablissement du 20 Octobre 1998 susmentionnée, le
bénéfice de cette ou de ces conditions lui sera applicable à sa demande. Cette disposition fait
référence au traitement du plus favorisé.
Au demeurant le principe des exemptions fiscales dans l´acheminement des produits
destinés au transit ne doit pas être interprété comme l´expression de la gratuité même du passage.
Les Conventions déjà citées du 8 juillet 1965 et du 10 décembre 1982 admettent qu’un
prélèvement puisse être effectué, à une seule fin et à une seule condition. Ainsi, il ne peut être fait
de prélèvement que dans le « seul but de couvrir les dépenses de surveillance et d’administration
qu’impose le transit ».(185) Dans ce cas alors, les taxes prélevées ne peuvent être « plus élevées que
celles qui sont perçues pour l’utilisation de moyens de transport de l’Etat de transit » et « doivent
correspondre d´aussi près que possible aux dépenses qu´elles ont pour objet de couvrir ».(186)
A la lumière de ces dispositions, l´on pourrait juridiquement s´interroger sur le fondement
ou sur la finalité des droits de transit à percevoir par la République du Cameroun dans ce trajet.
Ces droits ambivalents(187) ne soulèvent pas à l´évidence d´objection de la part de l´Etat demandeur
de passage qui participe lui-même directement aux opérations.
183 Pour un point de vue, voir l’nterview avec Samuel Nguiffo, Responsable du Centre for Environmental and
Development (CED), ONG de protection de l´environnement, disponible dans
http://www.camerounlink.net/fr/news.php?nid=4136&kat=1&seite=541
184 Article 29 de la Convention d´Etablissement du 20 octobre 1998.
185 Article 3 de la Convention du 8 juillet 1965 sur le commerce en transit des Etats sans littoral et Article 127 de la
Convention des Nations Unies du 10 décembre 1982 sur le droit de la mer.
186 Ibid.
187 Voir nos développements sur cette question dans le chapitre suivant.