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B) LA VERSION ELECTRONIQUE.

1) LA CREATION DU SITE.

Le site L‘Equipe.fr est lancé le 9 Juin 2000, veille du coup d‘envoi du Championnat
d‘Europe des nations de football. C‘est Jean Hornain, alors directeur général de L‘Equipe TV
et ancien joueur international français de volley-ball qui hérite du projet en Novembre
1999. « Quand j‘ai repris le projet, la réflexion sur Internet était arrivée à maturation. Le
groupe avait compris que le web n‘était pas un phénomène de mode et qu‘il y avait là un
enjeu important pour l‘image et la marque »(13). Il prend la tête des deux supports et installe le
site à côté des studios télé.

Le développement du site s‘effectue par la création d‘une filiale Internet appartenant à 100%
à L‘Equipe. Au départ, l‘équipe se compose de 23 membres : journalistes, personnes en
charge de la base de données, infographistes et développeurs. Elle est autonome du quotidien
et dispose d‘un budget raisonnable de trois millions d‘euros pour les charges d‘exploitation.

2) LES MISSIONS INITIALES.

A sa création, L‘Equipe.fr s‘articule autour de quatre axes principaux :

• l‘information autour des compétitions spor tives à haut niveau (brèves d‘actualité,
statistiques fournies par de puissantes bases de données, interviews en audio et vidéo,…),
• des dossiers multimédias (reportages, portraits, …),
• des chats et forums,
• des services (version interactive du quotidien, billetterie, derniers flashes info de L‘Equipe
TV puis plus tard newsletter personnalisée).

3) LA NOTORIETE DU SITE.

Il est possible de mesurer la notoriété d‘un site Internet grâce à deux facteurs : la
fréquentation et le référencement d‘un site.

Premièrement, la fréquentation : 2,3 millions de visites sont espérées dès la première année,
soit autant que le site du Monde. « C‘est assez ambitieux mais nous sommes une marque
généraliste et connue » dixit J. Hornain(14) au lancement du site en 2000. Selon une étude de
1999, IPSOS-Médiangles, le site de L‘Equipe était placé en sixième position alors qu‘il n‘était
pas encore ouvert(15).

En Janvier 2004, selon Cybermétrie, L‘Equipe.fr comptabilise 67 millions de pages vues et
dix millions de visites. Il a même décroché le Clic d‘or du meilleur site média en 2003 et
confirme sa position de « leader incontesté de l‘information sportive en langue française »(16).
Et les chiffres du mois d‘Avril confirme ce leadership : L‘Equipe.fr est le premier site de
sport en terme de fréq uentation avec 663 000 visiteurs uniques, loin devant sports24.com
(438 000 visiteurs uniques) et Sports.fr (362 000).

Deuxièmement, le référencement : il n‘apparaît que très rarement bien placé lorsque l‘on
effectue une recherche par mots-clés relatifs au sport (information, actualité, résultats, …). Sur
vingt-quatre requêtes, L‘Equipe.fr ne figure qu‘à sept reprises dans les cinquante premières
réponses de six moteurs de recherche et seulement quatre fois dès la première page de résultat
(voir tableau n° 1). Il dispose malgré tout d‘une adresse intuitive puisqu‘il est le site du
journal du même nom et son repérage est donc facile.

Tableau n°1 : le référencement de L‘Equipe.fr par les principaux moteurs de recherche sur
Internet (réalisé le 28 Mai 2004).

* >50 : référencé au-delà de la cinquantième place

Il semblerait que L‘Equipe.fr se contente de son nom contrairement aux autres sites sportifs
qui apparaissent pour la plupart dès les premières pages (voir tableau n°2). Peut-être se
repose-t-il sur son adresse intuitive ? En tout cas, lé référencement ne semble pas être une
priorité pour le site.

Tableau n°2 : le référencement des trois sites d‘information sportive les plus visités (réalisé le
28 Mai 2004).

4) POURQUOI UN TEL RETARD ?

Historiquement, L‘Equipe.fr est arrivé tardivement sur le web. Plusieurs raisons
peuvent expliquer ce retard.

Tout d‘abord, la création du site a sans cesse été repoussée du fait du scepticisme de la
hiérarchie selon T. Dupont(17). « Nous nous so mmes posés beaucoup de questions sur le
modèle économique à suivre » reconnaissait J.Hor nain(18). « Il est vrai également que certains
dossiers ont été plus prioritaires que d‘autres. C‘est le cas de le chaîne TV »(19). Résultats :
projets avortés, hésitations successives. Mais cela traduit parfaitement les problèmes que pose
le passage du papier à l‘électronique.

En effet, il existe une relative frilosité de la presse face à l‘Internet, notamment au sujet de la
gratuité pour J. Miot(20) : les acteurs sont d‘accord pour investir et créer des sites, à condition
qu‘ils rapportent de l‘argent avec la publicité et les services (e-commerce). L‘internaute quant
à lui n‘acceptera pas de payer une prestation ou une information sur Internet que si le contenu
qu‘on lui propose contient une forte valeur ajoutée, toujours selon J. Miot.

Puis il pose deux conditions pour passer d‘un support à un autre : ne pas se contenter
de dupliquer sur l‘écran ce que l‘on a fait sur le support papier et apporter un complément
d‘information à l‘usager (à travers une interaction entre le papier et le site web). En définitive,
pour lui, « l‘un devra renvoyer à l‘autre »(21).

Enfin, il soulève le problème de la fiabilité de l‘information sur le net. J. Miot s‘appuie un
sondage de 2000(22) faisant apparaître que « les Français vont spontanément sur des sites
fournissant de l‘information labellisée, c‘est-à-dire ceux correspondant à un titre de presse
quotidienne, nationale ou régionale » (il en va de même pour les grandes chaînes de télévision
ou les stations de radio).

L‘information en ligne n‘est de plus pas validée par un filtre éditorial. E. Sutter parle de
« pollution informationnelle »(23) avec quatre déclinaisons :

1. une surabondance informationnelle,
2. de la désinformation,
3. une contamination des informations,
4. les effets pervers de la publicité envahissante et du r éférencement payant qui
promouvoit des sites qui ne sont pas les meilleurs.

Ce sont autant de facteurs qui amènent l‘internaute à se poser des questions sur l‘information
sur le web.

N‘oublions pas le problème des no ms de domaine. « Il a fallu faire un peu de « nettoyage »,
faire des transactions pour récupérer les noms de domaine co mme L‘Equipe.com » affirmait
J. Hornain(24). Mais le sujet semble sensible (« je n‘en dirais pas plus ») . Concernant les droits
d‘auteur, des négociations ont été entamées et tout a été réglé pour l‘ouverture du site.

5) UNE CONCURRENCE ACCRUE.

Contrairement à son pendant papier, le site de L‘Equipe n‘est pas le seul sur le marché
du traitement de l‘information sportive en ligne (voir tableau n°3). Il se heurte à trois types de
concurrents :

• Les sites appartenant à des groupes de communication (majoritairement des chaînes de
télévision) comme tf1.fr, eurosport.fr ou canalplus.fr voire france2.fr et france3.fr. Ils
consacrent une large place au sport parce qu‘il est relativement présent dans la grille des
programmes de leur chaîne respective. De plus, à l‘instar de L‘Equipe.fr, ils bénéficient
d‘une adresse intuitive (le nom de la chaîne de laquelle ils dépendent).

• Les sites spécialisés dans le sport : sport24.com, sports .fr, football365.fr, sport.fr, et
encore bien d‘autres. Ce sont les principaux concurrents de L‘Equipe.fr. Ils offrent à peu
près les mêmes services tout en cherchant à se démarquer les uns des autres.

• Les autres sites de sport tels ceux relevant de fédération nationale (comme celui de la
Fédération Française de football-FFF). Les sites commerciaux (de grandes chaînes de
magasins de sport ou de marques) sont eux aussi plutôt bien fréquentés via des liens
sponsorisés avec les sites des premières catégories. Idem pour les sites de certains
fournisseurs d‘accès et autres portails qui proposent à leur tour une rubrique « Sport » sur
leur page d‘accueil.

Tableau n°3 : les sites de sport les plus fréquentés au mois d‘Avril.
Source : 01.net, Panel Nielsen//Net_Ratings, l‘audience des sites en Avril, 26/05/2004.

13 DUPONT T., « L‘Equipe se lance (enfin) dans la course », transfert.net, Société de l‘information, 29/05/2000.
14 GUERRIER P., Interview de J.Hornain, le journaldunet.com/itws/it_hornain.shtml, 18/05/2000.
15 GUERRIER P., opp. cité
16 BITTON S., Pourquoi changer ? (A suivre sur L‘Equipe.fr-Nouvelle version), newsletter du 04/03/2004.
17 DUPONT T., opp cité.
18 GUERRIER P., opp cité.
19 GUERRIER P., opp cité.
20 MIOT J., « Internet ne tuera pas Gutenberg » in BAHU-LEYSER D. et FAURE P. (direc.), M édias, e-médias,
La Documentation Française, Paris, 2001, 181p., Collection Territoires de l‘Information.
21 MIOT J., opp cité.
22 MIOT J., opp cité.
23 SUTTER E., « Pour une écologie de l‘information », Documentaliste, 1998, 35 (2), p.83-86.
24 GUERRIER P., opp cité.

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