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A.Les fondements textuels

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Selon les professeurs A. et H.-J. Lucas, en matière de droit d’auteur, l’ancien article L.335-7
du CPI renvoyait au droit commun de la responsabilité civile pour l’évaluation du préjudice
subi par la victime de la contrefaçon(5). Dans cette perspective, le CPI invitait donc à se référer
aux principes généraux de l’évaluation judiciaire des dommages et intérêts. En droit français,
la responsabilité civile vise à réparer le dommage subi par une victime mais uniquement
celui-ci. En effet, l’on considère que les dommages et intérêts ne doivent pas être pour la
victime une occasion de s’enrichir. Leur fonction est de remettre la victime dans l’état où elle
se trouvait avant la survenance du dommage, ni plus, ni moins. Ainsi, pour évaluer le montant
des indemnités à allouer, les juges du fond s’inspiraient de deux textes essentiels du Code
civil : les articles 1382 et 1149. Le premier, disposition phare de la responsabilité délictuelle
pose le principe de réparation intégrale du dommage par celui qui le cause.

Le second provient du droit de la responsabilité contractuelle et pose en principe que « les
dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain
dont il a été privé (…) ». C’est de cette dernière disposition que les juges s’inspiraient le plus
souvent pour évaluer le préjudice et allouer une indemnité à l’aune du gain manqué (lucrum
cessans) et de la perte subie (damnum emergens) par la victime de la contrefaçon. Les
éléments du préjudice étaient ainsi distingués et évalués.

En droit de la propriété industrielle, en l’absence de dispositions spécifiques dans le CPI, les
auteurs(6) admettaient que l’évaluation des montants à allouer à titre de réparation à la victime
d’actes de contrefaçon était également inspirée par les articles 1382 et 1149 du Code civil,
tant en matière de brevets qu’en matière de signes distinctifs ou de dessins et modèles.

Le renvoi du CPI à la responsabilité civile délictuelle ne fondait pas seulement l’allocation de
dommages et intérêts mais aussi d’autres mesures prononcées par les juges comme la
publication de la condamnation prononcée aux frais du condamné qui, elle aussi, peut
s’analyser comme une sanction réparatrice. En effet, s’efforcer de remettre la victime de la
contrefaçon dans l’état où elle se trouvait auparavant peut nécessiter d’informer le public de la
condamnation prononcée. Le public a pu être trompé en attribuant faussement une oeuvre ou
un produit à une personne, il convient donc de le détromper en l’informant des évènements(7).

De même, le juge prononce le cas échéant des sanctions dites « restitutives » en interdisant au
contrefacteur de poursuivre les actes illicites, au besoin sous astreinte, voire même en
ordonnant la confiscation des produits contrefaisants pour éviter leur dispersion.

Ces mesures, réparatrices (dommages et intérêts, publication de la condamnation…) ou
restitutives (interdiction de poursuivre les actes illicites, confiscation…) étaient donc
commandées par les principes de la responsabilité civile sur le modèle des article 1382 et
1149 du Code civil, l’idée étant réellement de réparer et de restituer pour compenser le mal
causé par la contrefaçon, mais sans jamais aller au delà.

5 Les professeurs A. et H.-J. Lucas s’appuient en effet sur la rédaction de l’article L.335-7 du CPI disposant que
« le matériel, les objets contrefaisants et les recettes ayant donné lieu à confiscation seront remis à la victime ou
à ses ayants pour les indemniser de leur préjudice ; le surplus de leur indemnité ou l’entière indemnité s’il n’y a
lieu à aucune confiscation de matériel, d’objets contrefaisants ou de recettes, sera réglé par les voies ordinaires ».
A. et H.-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, Litec, 3 éd. 2006, n°984.
6 Voir notamment J. Azéma et J.-C. Galloux, Droit de la propriété industrielle, 6e édition, Dalloz, n° 697
concernant les brevets et n° 1582 concernant les marques ou F. Pollaud-Dulian, Droit de la propriété
industrielle, Montchrestien, 1999 n° 733.
7 Une telle mesure, même prononcée par une juridiction civile, comporte nécessairement un aspect punitif en
plus de l’aspect « réparateur » puisque les mesures de publication font mention de la décision de justice, ce qui
peut conférer une très mauvaise image à l’entreprise ainsi condamnée. Ceci est d’autant plus vrai que la décision
est souvent publiée dans des périodiques au choix du titulaire de droits, afin de toucher le public pertinent. Voir
par exemple : Paris, 12 déc. 1995, RIDA, juill. 1996, p. 372.

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