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4. APERCU DES REGLES APPLICABLES A L’ASSURANCE DE GROUPE EMPRUNTEUR

Les contrats d’assurances de groupe emprunteur sont soumis en principe aux mêmes dispositions que les autres contrats d’assurances collectives et notamment sur l’obligation d’information et de conseil du souscripteur.
Les assurances de groupe souscrites par les établissements de crédit au profit de leurs clients emprunteurs, dites assurances de groupe emprunteur, sont soumises aux articles L. 141-1 et suivants du Code des assurances et aux lois SCRIVENER 1 et 2 respectivement des 10 janvier 1978 et 13 juillet 1979 qui ont été codifiées aux articles L. 311-8 et suivants du Code la consommation (crédit à la consommation) et L. 312-7 et suivants du même code (crédit immobilier).
Du fait de leur objet particulier, ils obéissent cependant sur certains points à un régime propre, le lien qui les unit aux opérations de crédit justifiant certaines spécificités.
Mais pour autant, la Cour de cassation ne considère pas que ces contrats sont soumis à la loi Evin dit loi prévoyance (Loi n° 89-1009, 31 décembre 1989, JO 2 janvier 1990).

Conditions d’adhésion

Qu’elle soit obligatoire ou facultative, l’adhésion de l’emprunteur au contrat d’assurance de groupe obéit aux mêmes règles de présentation et d’information.
En pratique, l’adhésion facultative est très marginale. Elle est le plus souvent dictée par des considérations commerciales, l’adhésion obligatoire se révélant parfois moins favorable, voire inadaptée, pour certaines catégories d’emprunteurs.
Dans le domaine des crédits à la consommation, lorsque l’assurance est facultative, « l’offre préalable rappelle les modalités suivant lesquelles l’emprunteur peut ne pas y adhérer », conformément aux dispositions de l’article L.311-12 du Code de la consommation (issu de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003, JO du 2 août 2003).

Lorsque l’adhésion est obligatoire dans le domaine des crédits à la consommation, l’octroi du crédit à l’emprunteur est alors subordonné à son adhésion à l’assurance de groupe proposée par la banque ou à celle de son choix qu’il pourra souscrire individuellement.
En effet, conformément à l’article L. 311-12 du Code de la consommation, « l’offre préalable rappelle que l’emprunteur peut souscrire une assurance équivalent auprès de l’assureur de son choix ».

En revanche, pour ce qui est des crédits immobiliers, c’est l’article L. 312-9 du Code de la consommation qui s’applique et celui-ci dispose : « Lorsque le prêteur offre à l’emprunteur ou exige de lui l’adhésion à un contrat d’assurance collective qu’il a souscrit en vue de garantir en cas de survenance d’un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant du prêt restant dû, soit le paiement de tout ou partie des échéances dudit prêt, les dispositions suivantes sont obligatoirement appliquées… ».
Ainsi, en ce qui concerne les crédits immobiliers, le prêteur peut non seulement imposer la souscription d’une assurance à l’emprunteur comme condition d’octroi du crédit, mais également imposer l’adhésion à son assurance de groupe emprunteur.
Dans cette hypothèse, l’emprunteur n’a pas le choix de son assurance.

C’est ce point précis qui va nous intéresser dans le cadre de notre développement.
Nous allons chercher à déterminer dans premier temps si l’établissement de crédit est autorisé à imposer à l’emprunteur la souscription d’une assurance garantissant le remboursement du prêt comme condition d’octroi du crédit.
Dans un second temps, nous chercherons à savoir si, de surcroit, l’établissement de crédit peut imposer la souscription de l’assurance de son choix et dans les faits cela revient à imposer à l’emprunteur l’adhésion à l’assurance de groupe que la banque a souscrit à cet effet.

Pour répondre à notre première question, nous nous appuierons sur la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 (JO du 12 décembre 2001) portant mesures urgentes de réforme de caractère économique et financier, dite loi Murcef.
Cette loi a fait entrer les établissements de crédit dans le champ de la réglementation des ventes subordonnées qui est au départ prévue par l’article L. 122-1 du Code de la consommation qui dispose : « Il est interdit de refuser à un consommateur la vente d’un produit ou la prestation d’un service, sauf motif légitime, et de subordonner la vente d’un produit à l’achat d’une quantité imposée ou à l’achat concomitant d’un autre produit ou d’un autre service ainsi que de subordonner la prestation d’un service à celle d’un autre service ou à l’achat d’un produit.
Cette disposition s’applique à toutes les activités visées au dernier alinéa de l’article L. 113-2.
Pour les établissements de crédit et les organismes mentionnés à l’article 518-1 du Code Monétaire et Financier, les règles relatives aux ventes subordonnées sont fixées par le 1 du I de l’article L ; 312-1-2 du même Code ».

En effet, l’article L. 312-1-2 du Code Monétaire et Financier sous lequel a été codifié le régime des ventes groupées applicable aux banques dispose : « est interdite la vente ou offre de vente de produits ou de prestations de services groupés, sauf lorsque les produits ou les prestations de services inclus dans l’offre groupée peuvent être achetés individuellement ou lorsqu’ils sont indissociables ».
Les dispositions de l’article L. 312-1-2 du Code Monétaire et Financier sont entrées en vigueur un an après la publication de la loi, c’est-à-dire le 13 décembre 2002 et s’appliquent aux ventes de produits ou de services conclues avant le 13 décembre 2002 et ce depuis le 1er janvier 2003.

Il convient immédiatement d’essayer de définir ce que sont les établissements de crédit.
L’article L.511-1 du Code Monétaire et Financier dispose : « Les établissements de crédit sont des personnes morales qui effectuent à titre de profession habituelle des opérations de banque au sens de l’article L.311-1. Ils peuvent aussi effectuer des opérations connexes à leurs activités, au sens de l’article L.311-2. »
L’article L.311-1 du même code dispose quant à lui : « Les opérations de banque comprennent la réception des fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que la mise à la disposition de la clientèle ou la gestion des moyens de paiement. »

La question qui se pose est de savoir si cette interdiction s’applique aux offres groupées de crédits et d’assurances et, si la réponse est positive, dans quelle mesure de telles offres pourraient s’inscrire dans l’une des deux exceptions prévues par la loi, soit au titre des offres groupées de produits ou de services indissociables, soit au titre des offres groupées dont chaque composants peut être achetés individuellement.
Et l’on en arrivera au problème clef qui est l’absence de définition légale de l’indissociabilité. Nous essayerons d’en apporter une définition afin de répondre à notre question.

A. le droit de présenter une opération d’assurance pour un établissement de crédit

Depuis la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005, dite loi DDAC, applicable depuis le 1er mai 2006 et codifiée sous les articles L. 500 et suivants, R. 511-1 et suivants du Code des assurances , les établissements de crédit qui présentent des opérations d’assurance de quelque nature qu’elles soient, sont soumis aux règles de droit commun applicables à tout intermédiaire en assurance (immatriculation, conditions d’honorabilité et de capacité professionnelle, assurance responsabilité civile et garantie financière).
L’établissement de crédit devra donc délivrer à l’emprunteur un bulletin d’adhésion à l’assurance de groupe qui n’est pas forcément un document distinct du contrat de prêt puisqu’il peut figurer sur le même formulaire.

B. remise de la notice d’information

Le souscripteur a l’obligation de remettre une notice d’information à l’emprunteur qui expose les conditions et limites de garantie de l’assurance (article L. 141-4 du Code des assurances).
En matière de crédits à la consommation et de crédits immobiliers, il existe des textes spéciaux qui s’appliquent en matière d’information et de protection des emprunteurs et qui reprennent exactement la même obligation.
Ainsi, les crédits à la consommation sont régis par l’article 5 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 codifié sous l’article L. 311-12 du Code de la consommation.
Et les crédits immobiliers sont régis par l’article 6 de la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 codifié sous l’article L. 312-9 du même code.

C. le devoir de conseil du banquier

Le devoir d’information et de conseil des adhérents s’inscrit dans la lignée de nombreux arrêts qui visent à protéger les consommateurs contre certains abus des professionnels.
Cela est particulièrement vrai dans le domaine de l’assurance emprunteur.
Le Comité consultatif du secteur financier a d’ailleurs rendu un avis sur le fonctionnement de l’assurance emprunteur dans sa séance du 7 avril 2006.
Il existe un lien entre la liberté de choisir son assureur lors d’une demande de prêt et l’obligation d’information et de conseil du banquier.
La raison en est que le banquier pourrait passer sous silence le fait que l’assurance de groupe n’est pas adaptée afin qu’on accepte d’y adhérer quand même.
Le devoir d’information peut être défini comme l’obligation faite au souscripteur de ne pas induire l’adhérent en erreur.
Cette obligation existe quelles que soient les compétences personnelles et professionnelles de l’adhérent.
Le devoir de conseil peut se définir comme l’obligation mise à la charge du souscripteur d’assister l’adhérent lors des différentes phases de l’opération d’assurance.
Ce devoir n’est dû qu’aux adhérents dont les compétences personnelles et professionnelles permettent de considérer que l’intéressé ne connait pas les techniques de l’opération contractuelle.

La Cour de cassation a posé le principe selon lequel : « le banquier, qui propose à son client auquel il consent un prêt, d’adhérer au contrat d’assurance de groupe qu’il a souscrit à l’effet de garantir, en cas de survenance de risques divers, l’exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l’éclairer sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation ».
Cette solution est désormais reprise par l’article L. 520-1-II-2° du Code des assurances qui institue depuis le 30 avril 2007 un devoir de conseil d’ordre général applicable à tous les intermédiaires en assurance exprimé selon les termes suivants : « préciser les exigences et les besoins du souscripteur éventuel ainsi que les raisons qui motivent le conseil fourni quant à un produit d’assurance déterminé ».

D. acceptation de l’assureur

Pour être effective, la demande d’adhésion émise par l’emprunteur doit être acceptée par l’assureur.
Ce dernier peut demander des informations complémentaires en matière médicale, décider d’accepter avec ou sans conditions ou même rejeter le dossier définitivement ou temporairement.
Des règles particulières sont applicables en cas de risques aggravés de santé.

En cas de rejet, l’emprunteur se trouve alors dépourvu d’assurance et peut alors renoncer à l’opération qu’il avait initialement projetée.
Il en est ainsi pour les crédits immobiliers puisque l’article L. 312-9-3° dispose : « lorsque l’assureur a subordonné sa garantie à l’agrément de la personne de l’assuré et que cet agrément n’est pas donné, le contrat de prêt est résolu de plein droit à la demande de l’emprunteur sans frais ni pénalité d’aucune sorte ».
Mais, si l’emprunteur n’use pas de cette faculté ou qu’elle ne lui est pas accordée compte tenu de la nature du prêt (prêt professionnel notamment), l’organisme prêteur se voit alors privé d’une garantie importante.
C’est pourquoi, la plupart du temps, les établissements de crédit insèrent dans les contrats une clause qui prévoit la révocation de leur offre en cas de refus de garantie de l’assureur.

En matière de risque aggravé de santé, il existe une convention particulière qui concerne les prêts immobiliers et les prêts professionnels.
Il s’agit de la convention AERAS du 6 juillet 2006 qui a aujourd’hui une assise légale.
Elle met en place une procédure particulière en cas de refus d’assurer la personne notamment grâce à la création de produits particuliers d’assurance.
Désormais, seuls 7 à 10% des personnes atteintes d’un risque aggravé de santé n’arrivent pas à emprunter en raison d’un défaut d’assurance.

Paiement de cotisations

Le débiteur des cotisations est, selon l’article L. 112-1 du Code des assurances, le souscripteur qui ici est l’établissement de crédit.
Cependant, les primes sont supportées par les emprunteurs auprès desquels les banques effectuent la collecte des sommes qu’elles reversent à l’assureur.
Généralement ces cotisations sont recouvrées en même temps que les échéances de prêt.

Durée de l’assurance

L’interdépendance entre le crédit et l’assurance emprunteur nécessite une prise d’effet simultanée de l’adhésion et de l’engagement de l’emprunteur à l’égard du prêteur.
Par la suite, la durée de l’engagement de l’assureur est autonome par rapport au terme de l’engagement de la banque .
Le prêteur peut exiger avant terme le remboursement du solde du prêt par l’emprunteur s’il est défaillant pour une raison autre que celles garanties au titre du contrat d’assurance.
Dans ce cas, soit le contrat d’assurance contient une clause notamment qui prévoit qu’il est mis fin à l’assurance dès la signification à l’emprunteur de l’exigibilité de son prêt et l’assurance prend fin.
Soit rien n’est prévu dans le contrat et alors, le contrat d’assurance ne prend pas fin selon les termes de la Cour de cassation : « la déchéance du terme du prêt garanti par le contrat d’assurance décès, incapacité de travail, invalidité, n’emporte pas, du seul fait de l’exigibilité immédiate de la créance de remboursement, l’extinction du contrat d’assurance ».
En cas de remboursement anticipé par l’assuré, il est mis fin au contrat de prêt et accessoirement au contrat d’assurance qui n’a plus d’objet.

Règlement des prestations

En cas de survenance d’un sinistre, il appartient à l’emprunteur ou à ses ayants droit de mettre en jeu la garantie d’assurance en déclarant le sinistre.
Et c’est « l’établissement de crédit qui va recueillir directement, au moment du sinistre, le bénéfice de l’assurance par l’effet de la stipulation pour autrui faite à son profit, ce qui vaut paiement de la dette de l’emprunteur et emporte libération de celui-ci ».

En pratique, nous avons vu qu’en assurance de groupe emprunteur, le bénéficiaire du contrat d’assurance est le souscripteur, à savoir l’établissement de crédit, et non l’adhérent.
Le bénéficiaire est nommé par une stipulation pour autrui donc il bénéficie d’une action contractuelle directe à l’encontre de l’assureur.
Par conséquent, il n’a pas besoin de demander à l’emprunteur d’agir contre l’assureur.
Cependant, le plus souvent, les banques n’utilisent pas cette possibilité et préfère assigner l’emprunteur en remboursement du prêt, à charge pour lui d’actionner l’assureur.
Le tiers adhérent agit dans ce cas en tant que stipulant de la stipulation pour autrui car il dispose d’un intérêt moral à l’exécution de cette stipulation.

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