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4.3.14 Le jeu contre la montre(204)

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Une nouvelle médiation africaine allait tenter de résoudre la crise politique qui venait de faire près de 200 morts, selon les Nations unies.
Abidjan avait commencé l’année dans un silence inquiétant. Dimanche est normalement un jour très animé, où les ivoiriens font leurs courses pour la semaine. Or, ce week-end-ci, les rues de la capitale étaient pratiquement désertes, car les gens avaient préféré ne pas sortir de chez eux.

Dans le quartier de Cocody, on circulait avec une facilité déconcertante. Pas le moindre «patriote» (jeune militant pro-Gbagbo) n’était présent aux barrages qui avaient été dressés la semaine dernière à l’appel du «général de la rue» Charles Blé Goudé, pour faire obstacle à la marche des partisans d’Alassane Ouattara vers le siège de la RTI (radiotélévision ivoirienne).

Constitués de cabines téléphoniques renversées et de matériel de construction volé sur les chantiers, ces barrages se traversaient comme de simples chicanes. En passant devant la «Cité rouge», un des habitants murmurait: «Voici la cité des gâteurs.» Ici, «gâter» signifie piller ou détruire.
La masse des bataillons de «patriotes» était faite de jeunes chômeurs, que Blé Goudé pouvait activer à sa guise pour les transformer en militants politiques, soit en leur donnant un peu d’argent, soit en les incitants à se servir sur le tas. Ce sont eux qui s’étaient livrés à la chasse aux Français en 2004, après que Jacques Chirac eut ordonné la destruction de l’aviation ivoirienne, que Laurent Gbagbo avait envoyée bombarder le camp militaire français de Bouaké (9 soldats français tués).

«N’est-ce pas le calme avant la tempête ?», se demandait une jeune ivoirienne, médecin, tout juste revenue de Paris, et peu réceptive à l’affiche publicitaire géante de la Vache-qui-rit, plantée au bord de la voie rapide longeant la lagune, invitant les ivoiriens à «faire le plein de calcium et de bonne humeur».

«Tout le monde a peur ; tout le monde attend prudemment : voici pourquoi Abidjan ressemble à une ville morte. C’est très triste parce que les Ivoiriens s’entendent parfaitement entre eux, au-delà des ethnies et des confessions. Le peuple, qui ne veut pas de la guerre, est l’otage des politiciens. Je ne comprends pas pourquoi Gbagbo, qui a été battu aux élections, mais avec un score très honorable, ne se retire pas dans la dignité !»

204 Lefigaro.fr – 03/01/11

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