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2)c. Vers un partage des sphères

Cette séparation des sphères masculines et féminines est toujours perceptible dans la société aujourd’hui, étant précédée par une très longue tradition de hiérarchie confucianiste sur tous les plans sociaux, économiques et familiaux, régissant ainsi un ordre particulier des rapports hommes/femmes dans toutes les activités du quotidien. Cependant, depuis la Seconde Guerre et la dernière Constitution « occidentalisée » de 1949, nous pouvons observer que des changements se sont opérés, bouleversant les modèles traditionnels et amenuisant la différenciation entre les mondes masculins et féminins.

De plus en plus de femmes travaillent, avec l’apparition de la « working girl » des années 1980 ; elles sont également plus nombreuses à aller à l’université et poursuivre de longues études. Même si encore 70% des parents japonais souhaitent voir leur fils aller à l’université, contre 30% pour leur fille, d’autres paramètres laissent penser que les mentalités évoluent.(37) En effet, avec l’augmentation des femmes à l’université, et l’ouverture progressive sur le marché du travail aux femmes, on peut penser que l’image du rôle différencié des sexes ira en s’affaiblissant.(38)

Le monde du travail représente l’évolution des mentalités et l’acceptation progressive de la femme dans ce monde autrefois exclusivement masculin. Les femmes, auparavant cantonnées à la place d’ « office lady », demandant peu d’heures et peu d’investissement, sont désormais de plus en plus nombreuses à occuper des postes plus élevés. Comme nous le verrons plus loin, les nouvelles lois régissant l’égalité hommes-femmes ont participé à cette évolution. En effet, selon un sondage du ministère du Travail effectué en 1995, quatre japonais sur cinq pensent que les femmes ont les mêmes chances ; 60% des femmes veulent être promues, contre 30% en 1990. Ainsi, les femmes ne se contentent plus du « métier » de mère et d’épouse que la tradition leur réservait ; elles sont de plus en plus nombreuses à souhaiter avoir une carrière, comme les hommes, et sortir du rôle familial et de la sphère intérieure qu’ont connu leurs mères et grands-mères.

Dans les années 1980, on observait déjà une nette différence d’opinion concernant la traditionnelle séparation des sphères : en 1972, 83% des femmes et 84% des hommes étaient favorables à cette distinction des sexes dans les activités quotidiennes et le statut social. En 1980, ils n’étaient plus que 17% chez les femmes et 55% chez les hommes à y être favorables.(39)

Cependant, en dépit de cette évolution des mentalités, les femmes restent toujours souvent cantonnées aux rôles subalternes, notamment dans les médias, encore majoritairement dirigés par les hommes. La valeur de leur travail et de leur éducation est encore difficilement reconnue, selon le milieu. En effet, « dans le milieu journalistique, bien que les femmes représentent une part de plus en plus importante des employés des grands quotidiens, elles sont encore majoritairement présentes dans des postes subalternes ». Comme le dit Ueno Chizuko, directrice de la revue Nouveaux Féminismes : « dans un pays où la critique littéraire est profondément liée au monde universitaire, elles sont sous-représentées dans le monde académique. Plus le niveau s’élève, plus la proportion de femmes diminue ».(40)

37 Sorifu (office of the prime minister) “Comparative international survey on women’s issues”, 1982.
38 Site officiel du Ministère du travail, de la Santé et des Affaires sociales, page consultée le 4/03/11,
39 Nuita Yoko, L’influence des médias audiovisuels sur le comportement socioculturel des femmes au Japon, in Influence des médias sur les comportements socioculturels des femmes, site de l’Unesco, 1980, page consultée le 31/03/11,
40 Desaint Nilsy, Mort du père et place de la femme, op.cit., p.169

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