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1.Le temps de la constance

Cette volonté se retrouve dès le point de départ de toute affaire : la caractérisation de la notion d’aide d’état. En effet l’une des quatre conditions (42) pour qu’une mesure de soutien soit considérée comme une aide d’état , est celle selon laquelle l’aide doit provenir des ressources de l’état, or la Commission s’est tenue à sa position historique qui consiste à apprécier la notion de « ressources de l’état » de manière large. Pour examiner ce critère, elle a systématiquement appliqué dans les cas précités, le test bien établi de l’investisseur privé selon lequel toute aide publique bénéficiant à un acteur économique constitue une aide d’état à moins qu’un investisseur privé n’ait pu accorder dans les conditions normales du marché un avantage similaire.

En l’espèce, la nature exceptionnelle des conditions du marché auxquelles faisaient face les banques, la portée des mesures de sauvetage adoptées par les États, et le degré de risque engagé (43), impliquait de facto que l’ensemble des mesures correspondaient à des aides d’état et n’échappaient donc pas à un examen approfondi.

La constance de la mise en œuvre du contrôle des aides se retrouve dans l’application des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration. La Commission a ainsi refusé dans chacune des décisions impliquées dans la première phase, d’examiner les mesures de soutien au regard de l’article 107(3)(b) TFUE, conformément à la décision fondatrice en matière d’aides au secteur bancaire : l’affaire Crédit Lyonnais (44) de 1995.

Dans cette décision, où les mesures de soutien étaient semblables à celles accordées par les États membres lors de la crise de 2007, la Commission aurait émis des « lignes directrices atypiques » (45) des aides d’État relatives aux établissements de crédits. Atypiques et exceptionnelles même, car ces lignes directrices sont issues d’une décision individuelle, dans une partie au titre évocateur : « application aux banques des règles en matière d’aides d’état. » Deux enseignements décisifs peuvent être tirés de ces indications. En premier, la Commission insiste expressément sur le fait que le secteur n’échappe pas au contrôle des aides d’état, celui-ci doit être effectué afin de s’assurer que la mesure est prise en vue de l’intérêt commun (46). Deuxièmement, et c’est ce qui nous intéresse en particulier ici, les conditions des exemptions à l’interdiction générale posée par l’article 107 TFUE sont précisées. C’est ainsi que la Commission énonce dans un paragraphe, qui aujourd’hui, treize ans après cette décision, se révèle fort éclairant pour comprendre son raisonnement:

« Dans le cas où des éléments en dehors du contrôle des banques provoquent une crise de confiance dans le système, l’État peut être amené à donner son soutien à l’ensemble des établissements de crédit pour éviter les effets négatifs d’une telle crise systémique. Par conséquent, dans le cas d’une véritable crise systémique, la dérogation prévue à l’article 92 paragraphe 3 point b [maintenant 107(3)(b) TFUE]), pourra être invoquée pour « remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État membre ». La condition à remplir pour la compatibilité est que les aides soient octroyées d’une façon neutre, du point de vue de la concurrence de l’État concerné, à l’ensemble du système bancaire et sans dépasser le strict nécessaire. (47)»

42 Voir infra la partie intitulée « définition et procédure contrôle communautaire des aides d’État ».
43 A titre d’exemple, dans la décision WestLB AG paragraphe 32, la Commission rappelle que l’attitude de l’hypothétique investisseur privé est celle d’un investisseur prudent, d’un point de vue ex ante, dont l’objectif de maximisation du profit est tempérée par le niveau de risque acceptable pour un taux de revient donné.
44 95/547/CE: Décision de la Commission, du 26 juillet 1995, portant approbation conditionnée de l’aide accordée par la France à la banque Crédit Lyonnais.
45 RODRÍGUEZ-MIGUEZ J. A., Rescue of Financial Institutions: An Overview of European Commission Frameworks and Practice on State Aids to Financial Sector in the current Global Crisis, p.8, disponible sur : http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1615324.
46 Affaire Crédit Lyonnais, point 3.1, § 20. Op. cit.
47 Affaire credit Lyonnais § 3.2 op. cit.

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