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1.1. Contexte et problématique

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Nombre d’institutions internationales dont notamment l’UNESCO, le conseil de l’Europe l’OCDE et la Commission Européenne, n’ont eu de cesse de présenter depuis les années 2000, le processus de Bologne(2) comme un référentiel de bonnes pratiques susceptible d’être adopté par les pays désireux de réformer leur enseignement supérieur. Et, comme le Maroc se trouvant déjà vibré au diapason de la réforme universitaire insufflée par les recommandations de la Charte Nationale d’Education et Formation, les principes de bases du processus de Bologne tombent à point nommé. Ainsi, sous l’égide de la Commission Européenne et par le biais précisément du programme Tempus Meda(3), l’université marocaine fait siennes les textes fondateurs du processus de Bologne et enclenche sa réforme tous azimuts à partir de 2003. Du coup cette dernière se trouve ipso facto multi référentielle. La raison affichée en est de capitaliser toutes les expériences pour faire aboutir cette mouvance réformiste.

En effet, l’un des apports majeurs de cette réforme est la promulgation de la loi (01.00) portant organisation de l’enseignement supérieur. Aussi les dispositions de la loi de 1975 tombent-elles en obsolescence et sont supplantées par celles de la nouvelle dont entre autres nouveautés :

L’autonomie pédagogique, administrative et financière de l’université, l’unité de l’université, l’ouverture de l’université sur la vie active, l’ouverture de l’université sur les autres établissements supérieurs de formation des cadres et autres, l’ouverture de l’université sur le monde socio-économique, la mise au point d’une nouvelle architecture pédagogique plus efficace, la restructuration et l’établissement, la mise en place des services sociaux aux étudiants. (Lahlou, 2009)

Ainsi par la force de la loi, l’université est désormais investie de nouvelles missions, l’accréditant à aller au-devant des attentes du pays en matière de développement socioéconomique, et être de plain-pied avec les différents chantiers de réforme initiés aussi bien à l’échelle politique , économique que sociale.

S’il est bien vrai que la réforme a été dictée par les impératifs socio-économiques précédemment cités, il n’est pas moins vrai qu’elle l’a aussi été par l’avènement des technologies de l’information et de la communication pour l’éducation et l’essor vertigineux de ce qui est communément appelé la société du savoir. Ce qui fait que l’intégration des TICE, comme le met en exergue (Karsenti, 2002, p.27) :

[…] semble désormais inévitable pour favoriser la réussite éducative des élèves, rehausser le professionnalisme du personnel enseignant, encourager le leadership des gestionnaires, voire favoriser la collaboration avec l’école, la famille et le milieu.

Dans la foulée, l’université s’en est trouvée contrainte, de par le fait qu’elle est le pourvoyeur principal du pays en ressources humaines, à repenser ses formations, ses méthodes de transmission du savoir et ses stratégies de diversification des offres de formation. L’enjeu essentiel de l’implémentation des TICE dans l’ingénierie pédagogique(4) universitaire, est de permettre aux étudiants de s’ouvrir sur des approches pluridisciplinaires et acquérir des compétences transversales. La promotion de nouveaux profils beaucoup plus adaptés aux exigences de la société du savoir qu’on voit poindre n’est plus, par la force des choses, un choix.

Dans cet esprit, le projet de création du Campus Virtuel Marocain (CVM(5)) a été lancé en 2004 et concrétisé par la création des Centres de Ressources Universitaires (CRU) dans toutes les universités du royaume.

Il s’agit d’en faire des plateformes, se chargeant entre autres, de la conception d’activités pédagogiques en s’aidant des techniques, méthodes, outils et potentiels de formation que dispensent les TICE en tant que support à l’enseignement, soit-il présentiel ou distanciel. Par conséquent, les concepteurs du projet en escomptent des étudiants responsables, autonomes et acteurs de leur formation, mais aussi et surtout des étudiants motivés en contexte d’apprentissage. Tant il est aujourd’hui largement admis le rôle déterminant de la motivation sur la réussite scolaire. (Bandura et Schunk 1981 ; Bouffard-
Bouchard, Parent, et Larivee, 1991, Woolfolk, 2007) A ce sujet, (Karsenti et al., 2001, p.12) souligne que la littérature scientifique attribue l’impact positif du recours aux TICE sur la motivation à quatre éléments :

1. Le fait de travailler avec un nouveau médium (Fox, 1988) ; karsenti (1999e)) ;
2. la nature de l’enseignent plus individualisé permis par les technologies de l’information et de la communication (Relan, 1992) ;
3. la possibilité d’une grande autonomie pour l’apprenant (Williams, 1993) ; (Viens et Amélineau, 1997) ; Karsanti (1999a, 1999b)

Et enfin la possibilité d’un feed-back fréquent et rapide (Wu (1992) Karsenti (1999c)).

De leur côté, (Jefferson et Edwards, 2000), soutiennent que l’utilisation des TICE dans la salle de classe favorise l’apprentissage, en précisant toutefois que, cet apport positif dépend grandement de l’usage qui en est fait par les enseignants.

Néanmoins, force est de souligner que l’atteinte des objectifs affichés par la réforme en matière d’intégration des TICE au niveau de l’enseignement supérieur n’a pas été au rendez-vous.

Certaines déficiences demeurent persistantes. La plus importante d’entre toutes est sans doute le fait que les enseignants n’en maîtrisent que peu l’usage pédagogique.

Presque la moitié des enseignants ne les ont pas encore intégrées dans leurs enseignements malgré l’investissement énorme en matériel. (Aamili, Belmouden et Achiadli, 2008) Du coup, comme le souligne (Heer et Akkari, 2006), les résultats des différentes recherches réalisées sur l’adaptation et la formation des enseignants aux usages des TICE montrent qu’il reste énormément à faire au niveau de la formation des enseignants.

Or, comme le précise si bien (Lebrun, 2004, p. 17) :

[…] L’importance de l’information, du support technique et du soutien pédagogique aux enseignants est une priorité pour que les technologies catalysent réellement un renouveau pédagogique. Sans cela, les nouvelles technologies permettront au mieux de reproduire les anciennes pédagogies. En d’autres mots, cela convient à dire que si les enseignants ne sont pas formés à ces technologies, dans bien des cas, ils risquent tout simplement de perpétuer les méthodes traditionnelles d’enseignement en utilisant un nouveau médium.

Déjà le rapport de la (COSEF, 2005), signalait que : « L’actualisation des programmes, lorsqu’elle est réalisée, ne s’accompagne pas d’une formation adéquate et d’une remise à niveau des enseignants qui, de ce fait, ne maîtrisent pas suffisamment les nouveaux concepts introduits ».

A partir de là, il est évident que de nouveaux leviers doivent être mus pour dans un premier temps, dépasser les a priori qu’ont certains enseignants vis-à-vis des TICE, et ensuite, leur prodiguer formation et soutien institutionnels pour qu’ils soient aptes à faire l’ingénierie de cours via les TICE. La génération Internet est là. Elle entretient avec les technologies de l’information et de la communication une relation autre que celle des enseignants. (Pensky, 2001), parle même d’une rupture générationnelle entre ce qu’il appelle les « Digital natives » (Les natifs de l’ère numérique) et les « Digital immigrants » (les immigrants de l’ère numérique). Les premiers sont les jeunes qui sont nés avec les PC et ne connaissent rien de la vie d’avant. Les seconds sont entre autres, les enseignants qui ont intégré l’ère digital avec leur background préexistant. Et comme c’est très improbable, voire impossible que les premiers apprennent à l’ancienne, c’est aux seconds de s’adapter au rythme des premiers en repensant leur méthodologie et leur contenu :

[…] So unless we want to just forget about educating Digital Natives until they grow up and do it themselves, we had better confront this issue. In so doing we need to consider both our methodology and our content. (ibid., p.3)(6)

En fait, nonobstant ce déficit de taille, et en dépit de la fracture numérique qui s’observe non seulement à l’intérieur du pays mais aussi à l’intérieur même de certaines régions, les TICE marquent irrévocablement le quotidien des étudiants marocains.

L’accès de plus en plus grandissant à Internet (10, 300,000 internautes, soit 32.9 % de la population selon Internet Word Stat (2009); le Maroc se trouvant, ainsi après la Tunisie, la deuxième économie la plus développée en Afrique en matière de pénétration d’Internet (CNUCED, 2009) et l’intégration, quoique tâtonnante des technologies de l’information et de la communication dans l’enseignement supérieur, ne laissent pas d’affecter la vie des étudiants, leur rapport au savoir et leur manière d’apprendre. A cet égard, le foisonnement de l’information et son accessibilité n’engendrent pas que des effets positifs, loin s’en faut.

(Loing, 2005), pense à juste titre, que la vague Internet est comme un tsunami dont on peut peut-être commencer à apprécier les effets destructeurs comme les effets bénéfiques.

Parmi ses effets figure un phénomène qui défraie la chronique depuis plus d’une vingntaine d’années dans les campus universitaires de pas mal de pays. C’est le plagiat électronique. D’aucuns, d’ores et déjà le catégorisent parmi les premiers effets. Quand il est sciemment commis, il est assimilé à un acte de malhonnêteté intellectuelle ou de violation du code de conduite académique, condamné et condamnable. (Godlee, 2007), en l’occurrence, le décrit comme l’un des trois grands crimes, aux côté de la fabrication et la falsification, qui obèrent la recherche scientifique.

Le plagiat électronique n’est indubitablement rien moins qu’un artefact de l’explosion des autoroutes de l’information et la révolution Internet. Et, il y’a un quasi consensus quant au fait que le plagiat a toujours existé. Mais il ne s’est jamais considérablement accru qu’avec le déferlement de la culture Internet. Les étudiants glanent dans le web toutes les informations dont ils ont besoin et se les approprient tantôt intentionnellement tantôt par inadvertance. (Harris, 2004 ; Hansen, 2003 ; stebelman, 1998).

(Tichenor, 2001) vilipende vertement Internet. Selon lui, il est effectivement une source d’inspiration puisque il aide à accélérer la cadence de la recherche académique. Mais le revers de la médaille c’est qu’il est aussi source d’irritation puisqu’il facilite l’accès à de nouvelles méthodes de tricherie et de plagiat.

(Aboufirass, Aboufirass, Bennamara et Talbi 2006), pensent, à l’issue d’une enquête menée au sein de la faculté des Sciences Ben M’Sik de l’Université Hassan II, qu’au lieu de faire un bon usage de l’Internet et des outils de communication, les étudiants s’appuient plus particulièrement sur la culture du plagiat. Qui plus est, ils ont tendance à la légitimer vu la facilité d’accès et la simplicité du processus, puisqu’il suffit de cliquer et de copier-coller.

Mais, les enquêteurs précisent également que les étudiants n’arrivent pas à établir la frontière entre faire référence tout en citant les sources et faire du plagiat. Le fait est que leur littératie informationnelle(7) est d’autant plus rudimentaires que le volume horaire consacré à l’encadrement méthodologique reste très limité, voire absent.

L’experte en plagiat (Howard, 1999b), estime effectivement, qu’on aurait mieux à gagner de former et d’éduquer les étudiants quant à la manière de lire et d’écrire des textes électroniques plutôt que d’être prompt à criminaliser leur recours au plagiat, puisque de toute manière même les écrivains les plus chevronnés font ce qu’elle appelle le « patchwriting », forme controversée de plagiat.

Quoi qu’il en soit, le plagiat électronique est un mésusage des TICE. Notons avec (Dioni, 2008), qu’Internet est devenu une prothèse informationnelle fréquemment activée. Elle se positionne comme solution d’aide pour acquérir des connaissances, en complément ou en substitution de l’apport des enseignants. Mais lorsque cette prothèse informationnelle, précise, le chercheur :

[…] intervient non plus comme une simple extension du cerveau (par exemple stockage de l’information, aide à la structuration de la pensée…), mais qu’elle
permet de se dispenser de l’effort intellectuel dans une logique d’emprunt de ce travail fourni par d’autres pour le restituer comme étant le sien, elle pose certes une question déontologique majeure. (ibid., p.11)

Le plagiat électronique ou même sa suspicion peut avoir de graves conséquences pour l’étudiant plagiaire, parce que c’est une pratique honnie dans les enceintes académiques. (Goodman et Swann, 2003) Or, dans le contexte universitaire marocain, il n’en est rien, aucun code de déontologie réglementant l’usage des TICE n’est à ce jour mis en place, même si une attention toute particulière commence à se faire du côté de la propriété intellectuelle et le droit d’auteur.

De fait, le plagiat électronique est une réalité palpable dont on n’a pas encore pris la mesure de l’ampleur, du moins dans le contexte universitaire marocain. Il semblerait que sous d’autres cieux où l’on est déjà rompu à l’exercice de lutte contre ce phénomène, les efforts collectifs déployés par les institutions académiques pour s’en défaire s’avèrent être en deçà de ce qu’exige la taille du problème. (Galles, 1987). C’est peu de dire qu’aucune université au monde n’en est épargnée (Hoekema, 1994) et, l’ampleur de l’incidence du phénomène varie en fonction du sérieux avec lequel l’établissement traite le problème et les dispositions mises en place pour le circonscrire.

Si la lutte contre ce fléau est suffisamment ancrée dans les mœurs de nombreuses institutions universitaires nordiques et anglo-saxonnes principalement, et européennes dernièrement, elle n’est que sporadiquement abordée dans le contexte marocain. Que la communauté éducative et les média en parlent, bien que d’une façon épidermique, est une amorce louable dans le bon sens. Cependant, nos connaissances de la nature et de l’ampleur du fléau demeurent lacunaires.

Aussi, avons-nous jugé intéressant d’entamer une recherche de type exploratoire, où l’on étudiera l’état des lieux du plagiat électronique au niveau de l’enseignement supérieur universitaire, et les moyens à même d’être mobilisés pour le prévenir et le détecter.

Ainsi, cette problématique générale peut être ramenée à la question de recherche centrale suivante :

Quelle est la situation du plagiat électronique au niveau de l’enseignement supérieur universitaire ?

2 Le processus de Bologne : vise à converger les systèmes d’enseignement européens vers un système plus transparent à l’orée 2010. Il a pour objectif l’introduction d’un système de grade facilement lisible et comparable, un système fondé sur deux cycles principaux (cycle pré-licence et cycle post-licence), un système d’accumulation et de transfert de crédit, la promotion de la mobilité des étudiants, enseignants et chercheurs, la promotion de la coopération en matière de garantie et de qualité et la promotion de la dimension européenne de l’enseignement supérieur (multiplication des modules et filières dont le contenu, l’organisation ou l’orientation présentent une dimension européenne). (Communiqué de Prague, 2001)
3 Programme Tempus Meda : Sous l’égide de la Commission Européenne, ce programme d’aide financière, vise à promouvoir les échanges inter-iniversitaires entre l’UE et les pays du pourtour méditerranéen. Au niveau du Maroc, le projet consiste à contribuer au développement de l’enseignement supérieur en terme de restructuration (l’amélioration de la gestion et le renforcement institutionnel) et de modernisation (la mise en réseau et l’élargissement de l’offre d’éducation) et ce, en favorisant la mise en place de projets de partenariat, de mesures structurelles et complémentaires, de système de mobilité des étudiants dans les deux sens et la mise à niveau des ressources humaines.
4 Ingénierie pédagogique : c’est une méthode systémique « […] soutenant l’analyse, la conception, la réalisation et la planification de l’utilisation des systèmes d’apprentissage, intégrant les concepts, les processus et les principes du design pédagogique, du génie logiciel et de l’ingénierie cognitive » (Paquette, 2002, p.106) L’ingénierie pédagogique est aussi un processus de résolution de problèmes qui vise à développer les systèmes d’apprentissage. Elle est particulièrement adaptée au traitement de la complexité inhérente à « la conception et médiatisation de cours sous des plateformes technologique de type campus virtuel » (Henri, 2003, p. 77) Elle permet de développer des environnements d’apprentissage souples à même de s’adapter et déprendre en considération les diverses besoins des étudiants. L’appropriation d’un savoir-faire en ingénierie pédagogique est d’autant plus impérative que les enseignants seront de plus en plus appelés à médiatiser leurs cours via des plateformes informatiques de plus en plus sophistiquées. (Ibid)
5 Compus Virtuel Marocain (CVM) : Projet national initié pour soutenir les universités à moderniser leurs pratiques pédagogiques, à mettre sur pied leurs dispositifs d’intégration des TICE et d’implémenter et développer le e-learning. Il vise aussi à créer une synergie entre les établissements de formation et de les mettre au diapason des attentes de l’entreprise.
6 Nous traduisons le passage comme suit : (Alors à moins que nous voulions ignorer l’éducation des natifs de l’ère numérique jusqu’à ce qu’ils grandissent et le fassent eux-mêmes, nous ferions mieux de confronter le problème et, ce faisant, nous avons besoin de repenser nos méthodologies et nos contenus.)
7 Littératie informationnelle (information literacy) : Elle consiste à être capable de :
– Reconnaître l’information précise et complète dont on a besoin pour prendre une décision
– Reconnaître le besoin de l’information
– Formuler des questions basées sur le besoin de l’information
– Identifier les sources potentielles d’information
– Développer des stratégies adéquates de recherche
– Accéder aux sources d’information en usant de l’ordinateur et autres technologies
– Evaluer l’information
– Organiser l’information à des fins d’application pratique
– Intégrer de nouvelles informations à un corpus de connaissances existant
– Utiliser avec pensée critique l’information et dans une optique de résolution de problèmes. (Notre traduction) (Doyle, 1992, cité par Doyle, 1994, p.3

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