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§1) L’instauration de plus de contraintes dans le fonctionnement des dispositifs

ADIAL

Tous les nouveaux produits d’épargne retraite créés en 2003, qu’ils soient collectifs (Perco et Pere) ou individuel (Perp), ont un fonctionnement peu contraignant dans la mesure où ils sont largement facultatifs, tout du moins en ce qui concerne leur mise en place. Conscient des limites du volontariat, les lois qui ont succédées à celle de 2003, notamment la dernière réforme des retraites, ont essayé d’instaurer un peu plus de contrainte, de manière à « forcer » l’instauration de ces régimes dans l’entreprise (A). La loi organise également une orientation de l’épargne du salarié vers le Perco (B).

A/ De nouvelles obligations pour l’entreprise dans la mise place de ces dispositifs

La loi du 9 novembre 2010(65) a édicté une obligation générale de négociation dans l’entreprise d’un dispositif d’épargne retraite (1). La loi impose également une contrainte plus spécifique de mise en place d’un régime de retraite collectif, dans la continuité de mesures précédentes (2).

1. Une obligation à caractère général de négocier un dispositif d’épargne retraite

Le bilan de l’épargne retraite est variable selon la taille de l’entreprise. Il apparait que les grandes entreprises se sont penchées très tôt sur cette problématique et sont nombreuses à proposer un dispositif à leurs salariés. Selon une enquête réalisée début 2010 par l’institut d’étude CSA, 19 % des entreprises de 10 salariés et plus proposaient un régime à cotisations définies à leurs salariés, ce taux atteignant 38 % dans les sociétés de 200 salariés et plus. Autre chiffre qui illustre bien cette différence d’équipement en dispositifs d’épargne retraite, selon la taille de l’entreprise, seulement 4 % des TPE – PME proposent un Perco à leurs salariés(66), soit plus de trois fois moins que les grandes entreprises. Enfin, pour en terminer avec les statistiques sur l’épargne retraite, 27 % des entreprises interrogées par l’institut d’étude CSA, étaient équipées en 2010 d’un dispositif de retraite supplémentaire quel qu’il soit, soit le même taux qu’en 2004 !

Cette évolution peu rapide de la diffusion des mécanismes de retraite supplémentaire dans les entreprises, s’explique en grande partie par le taux d’équipement très faible des petites et moyennes entreprises, alors même qu’elles emploient aujourd’hui plus de 75 % de la population active. Combattre l’inégalité dans l’accès à l’épargne retraite est l’un des grands objectifs que se sont fixés les gouvernements successifs, depuis 2003.

Le législateur de 2010, à travers la loi du 9 novembre portant réforme des retraites, a édicté un principe de négociation de branche pour la mise en place de certains dispositifs d’épargne retraite. C’est l’article 32 quater de la loi, ajouté par l’assemblée nationale, qui en donne la substance. Ce texte assigne aux partenaires sociaux l’objectif d’engager au plus tard le 31 décembre 2012, des négociations de branche en vue de la mise en place de Perco, de Pere auxquels l’affiliation est obligatoire ou bien de groupement d’épargne populaire. A défaut d’initiative patronale à cette date, la négociation s’engagera dans les quinze jours suivant la demande d’une organisation syndicale représentative. Selon nous, cette initiative va dans le bon sens dans la mesure où le caractère facultatif des dispositifs mis en place en 2003 a montré ces limites. Cette contrainte devrait permettre d’accélérer l’équipement des entreprises en produits retraite, notamment les TPE – PME. En effet, la négociation à l’échelle de la branche d’activité, épargnera aux petites entreprises de mener elles-mêmes des discussions avec les partenaires sociaux, ce qui n’est pas toujours simple pour des structures qui ne pratiquent pas ou peu la négociation collective. Par ailleurs le développement de Peri ou de Percoi va permettre de mutualiser les coûts inhérents à la rédaction et à la mise en place des accords collectifs.

Enfin, dernier point à souligner, la loi de 2010 portant réforme des retraites a permis l’assouplissement d’une règle qui avait été mise en place par le législateur de 2003. La mise en place d’un Perco était conditionnée jusqu’en 2010 à la mise en place préalable d’un PEE ou d’un PEI au sein de l’entreprise. Hors, quand nous savons que seulement 23 % des TPE – PME proposent ce dispositif à leur personnel, il n’apparait pas étonnant de voir les difficultés rencontrées dans la diffusion du Perco au sein des petites structures. La loi de 2010 a assouplie cette obligation de mise en place préalable d’un PEE ou PEI, en ne l’appliquant plus aux entreprises ayant adhérées à un Percoi.

Toujours en relation à la diffusion de l’épargne retraite, la loi de 2010 instaure une obligation plus spécifique, qui suit la même logique qu’une mesure prise en 2006.

2. De nouvelles contraintes pour les entreprises déjà équipées d’un « article 39 » ou d’un PEE/PEI

Autre inégalité combattu par le législateur de 2010, après celle de l’accès à un dispositif d’épargne retraite entre petites et grandes entreprises, est celle de l’accès entre les différentes catégories de salariés au sein d’une même entreprise. En effet, nous avons déjà vu que les contrats à prestations définies ne bénéficient que peu souvent à l’ensemble du personnel et encore plus rarement uniquement aux salariés non cadres. Dans la pratique, ce type de dispositif plus risqué et plus coûteux pour l’entreprise, est généralement un avantage réservé aux collaborateurs de premier plan, à savoir les cadres et les cadres dirigeants.

Dans son article 32 quinquies, la réforme des retraites de 2010 a mis en place une nouvelle obligation pour les entreprises qui proposaient ce type de régime supplémentaire à une catégorie de leurs salariés. En effet, le paragraphe 1 de cet article, subordonne désormais la mise en place de ces régimes « chapeau », s’ils sont réservés à certaines personnes au sein de l’entreprise, à l’ouverture pour l’ensemble des salariés d’un dispositif d’épargne retraite (Perco, Pere ou régime classique à cotisations définies).

S’agissant des entreprises qui disposaient déjà d’un régime « article 39 », celles-ci devront se conformer à la nouvelle obligation avant le 31 décembre 2012, à l’exception de celle n’enregistrant plus de nouvelles adhésions.

Nous comprenons que cette nouvelle obligation vise à éviter la situation dans laquelle seul le chef d’entreprise dispose d’un complément de retraite (article 39), alors même que ses salariés n’ont accès à aucun dispositif. Il est vrai que ce schéma se retrouve assez fréquemment notamment dans les petites structures. Cependant, plusieurs raisons nous permettent de douter de l’efficacité de cette mesure. D’une part, la mise en place d’un dispositif d’épargne retraite ouvert à tous les salariés de l’entreprise, risque fort d’aboutir à la création d’un Perco minimum, c’est-à-dire sans abondement et donc avec un intérêt beaucoup plus limité pour les salariés. D’autre part, de nouvelles réglementations sont venues modifiées le régime fiscal des régimes à prestations définies. Sans entrer dans les détails de ces mesures, la fiscalité a été fortement alourdie tant pour les bénéficiaires que pour les entreprises qui financent ces régimes. Le risque de cette nouvelle taxation est de rendre improductive l’obligation faite aux entreprises d’offrir à tout leur personnel d’un dispositif d’épargne retraite. Certains employeurs devraient ainsi renoncer à mettre en place un contrat à prestations définies et l’objectif de diffusion de l’épargne retraite dans les entreprises ne sera pas atteint.

La loi de 2010 portant réforme des retraites, a donc contraint les entreprises proposant un régime à prestations définies à une catégorie de leurs salariés, à proposer à tous un régime collectif d’épargne retraite. Ce n’est pas la premières fois que le législateur oblige les entreprises à proposer un produit retraite à leurs employés.

En effet, la loi « pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié » du 30 décembre 2006, avait déjà prévu l’obligation pour les entreprises proposant un PEE depuis plus de cinq ans, d’ouvrir une négociation en vue de la mise en place d’un Perco, d’un Pere ou tout autre régime de retraite à affiliation obligatoire pour les salariés. La loi du 3 décembre 2008 « en faveur des revenus du travail » a abaissé le délai de cinq ans à trois ans. Depuis 2008, les entreprises qui sont équipées d’un PEE ou PEI depuis plus de trois ans, doivent obligatoirement entamer une négociation en vue de mettre en place un dispositif de retraite. Notons tout de même le degré franchit dans la contrainte de « mise en place », par la loi du 9 novembre 2010. Celle-ci oblige les entreprises qui financent un régime à prestations définies à fournir à tous leurs salariés un dispositif d’épargne retraite, alors que les lois de 2006 et 2008 n’obligeaient les employeurs qu’à négocier leur mise en place, laquelle pouvait ne jamais aboutir.

Les nouvelles obligations de mise en place d’un régime collectif de retraite supplémentaire que nous venons d’étudier, concernent les entreprises. Afin de favoriser la constitution d’une épargne en vue de la retraite, les législateurs de 2008 et de 2010 ont également prévus de nouvelles contraintes pour les salariés.

B/ De nouvelles mesures en faveur du Perco laissant moins de liberté aux salariés

A la différence de leurs employeurs, les salariés ne sont pas exposés à proprement parler à de nouvelles obligations, mais plutôt à de nouvelles contraintes relatives à l’adhésion au Perco (1) et à l’orientation de la participation en direction de ce dispositif (2).

1. La possibilité d’une adhésion par défaut des salariés

Comme le PEE ou le PEI, le Perco est accessible à tous les salariés de l’entreprise sous réserve de remplir la condition d’ancienneté si celle-ci est présente. Cependant, si l’accès au Perco résulte en principe d’une adhésion volontaire, le règlement du plan peut prévoir depuis la loi du 3 décembre 2008, l’adhésion par défaut des salariés de l’entreprise. Lors de la mise en place du Perco, l’employeur peut donc contraindre ses salariés à adhérer au plan, sauf avis contraire de ces derniers. L’entreprise qui opte pour l’adhésion obligatoire devra en informer chaque salarié, suivant les modalités prévues par le règlement du plan. Le salarié disposera de 15 jours à compter de cette communication pour renoncer de manière expresse à cette adhésion(67).

Nous pouvons nous interroger sur l’efficacité d’une telle mesure qui, selon nous, n’atteint pas véritablement l’objectif que s’est fixé le législateur, à savoir que tous les salariés de l’entreprise bénéficient du Perco. Cette mesure illustre bien le rapprochement opéré entre épargne salariale et régimes de retraite supplémentaire, que nous avons étudié dans le chapitre précédent. En effet, à l’image de ce qui se pratique dans les contrats à prestations définies et dans les contrats à cotisations définies lorsque l’employeur finance entièrement le régime, le législateur tend à faire du Perco un support d’épargne salariale à adhésion obligatoire. Cependant, d’une part, il semblerait que les refus d’adhésion des salariés soient plutôt rares, l’employeur assurant le plus souvent les frais de fonctionnement, de telle sorte qu’en l’absence d’obligation de versement le refus d’adhésion du salarié ne se justifie pas. D’autre part, il nous semble qu’il aurait été plus judicieux de rendre l’adhésion complètement obligatoire sans laisser la possibilité au salarié d’exprimer son refus. Enfin, bien que nous en doutions, si cette mesure tend à augmenter le nombre de bénéficiaires du Perco, elle n’accroit en rien les sommes épargnées sur ce dispositif, puisqu’aucun texte n’oblige le salarié ou l’entreprise à alimenter le plan.

C’est peut être pour cette dernière raison que le législateur de 2010 a instauré ce que nous pourrions appeler un « fléchage » de la participation, en faveur du Perco.

2. Le « fléchage » de la participation vers le Perco

L’un des axes d’amélioration du Perco est l’alimentation du dispositif. Nous y reviendrons un peu plus loin dans notre paragraphe consacré aux nouvelles sources d’approvisionnement du dispositif, introduites depuis 2003. Mais avant, évoquons la nouvelle affectation de la participation prévue par la loi de 2010.
La problématique que rencontre le législateur est la suivante : comment faire en sorte que le salarié qui dispose d’un Perco épargne sur ce support ?
Nous l’avons vu, le Perco dispose de plusieurs qualités, notamment celles d’offrir un nouvel horizon d’épargne aux salariés et de bénéficier s’ils le désirent à chacun d’entre eux. Cependant, le dispositif tel qu’il a été conçu présente selon nous, un certain nombre de lacunes. La plus frappante d’entre elles est certainement sa trop grande ressemblance avec le PEE, à qui il emprunte sa fiscalité et ses sources d’alimentation. Dans ces circonstances, nous sommes en droit de nous demander quel intérêt aurait le salarié à épargner sur un plan qui ne lui offre pas d’attrait supplémentaire, voir même qui présente l’inconvénient de bloquer ses droits jusqu’à l’âge de la retraite.

Pour remédier à la relative faiblesse des versements effectués sur le Perco, le législateur de 2010 a introduit un « fléchage » de la participation vers ce dispositif. Dans un premier temps, le législateur a commencé par instaurer l’obligation d’envisager dans l’accord de participation l’affectation des sommes à un PEE/PEI ou à un Perco, lorsque ces plans existent au sein de l’entreprise. Dans un second temps, le législateur a édicté un autre principe qui va plus loin et qui tend à orienter de manière automatique 50 % de la réserve spéciale de participation vers un Perco, lorsque celui-ci existe et à défaut d’avis contraire du salarié. Ce dernier peut toujours opter pour la perception immédiate de la participation ou bien choisir de la verser sur un autre plan, mais s’il ne se prononce pas, la participation sera affectée automatiquement pour moitié à son Perco.

Selon nouveau, ce « fléchage » est une mesure qui va dans le bon sens. Cependant, nous aurions pu aller plus loin en rendant par exemple obligatoire, la création d’un Perco dans les entreprises pratiquant la participation. Nous aurions pu également imaginer un fléchage de 100 % de la participation vers le Perco ou bien encore une mesure identique concernant l’intéressement. Ceci étant, cette dernière possibilité pose plus de problème au regard de l’historique des dispositifs d’épargne salariale. En effet, si la participation, dans sa conception première, avait vocation à être indisponible, ce n’était pas le cas de la prime d’intéressement qui avait vocation à être perçue directement.

Dans ce premier paragraphe, nous nous sommes attachés à analyser et parfois à critiquer les mesures législatives entrevues depuis 2003 et visant à améliorer l’épargne retraite. Ces différentes lois ont ajoutées des contraintes et des obligations de manière à favoriser, pour ne pas dire « forcer », le développement de l’épargne retraite.

Dans le second paragraphe nous allons observer les assouplissements des régimes du Perco et des contrats à cotisations définies, ainsi que les nouvelles possibilités offertes aux salariés et aux entreprises dans leur utilisation.

65 Loi n° 2010 – 1330, du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.
66 Etude FFSA/GEMA, mai 2010.
67 C. trav., art. D. 3334-3-1

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