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§ 1. Les conditions de mise en jeu de la garantie

ADIAL

Cette garantie des frais de retrait n’a vocation à jouer que dès lors que le défaut du
produit a causé ou est susceptible de causer des dommages à des tiers, risquant à ce titre
d’engager la responsabilité civile de l’assuré. Cependant, s’agissant d’une assurance purement
facultative, l’assureur est libre de délimiter celle-ci par les conditions et les exclusions qu’il
souhaite. En ce domaine, il n’existe aucune garantie type. Certaines catégories de conditions
peuvent tout de même être retirées de l’ensemble des garanties existant sur le marché. La
détermination d’un assuré est indispensable (A) tout comme la potentialité de réalisation d’un
dommage (B). Tout retrait n’est pas pour autant garantit. Il ne l’est que dès lors que son
origine correspond bien à celle décrite par le contrat (C).

A – Un assuré

Cette garantie s’adresse à toutes les personnes dont la responsabilité peut être engagée
du fait du défaut d’un produit largement diffusé dans le commerce. Elle intervient donc le
plus souvent dans le cas de grandes chaines de distribution partant du fabricant au détaillant.
Tous ces intervenants sont donc susceptibles d’être intéressés par la couverture d’un tel
risque.

Les premiers concernés sont notamment le fabricant et l’importateur du produit. En
effet, en vertu de la directive de 1985, tant le fabricant que l’importateur ou encore du
distributeur apposant sa marque(267), sont susceptibles de voir leur responsabilité engagées en
vertu d’un défaut du produit. De même, les arrêtés pris en application de la loi Lalumière(268)
stipulent tous que « les frais afférents à ces dispositions sont mis à la charge des fabricants et
importateurs ».

D’autres professionnels de cette chaîne de distribution peuvent être inquiétés par le
retrait de produits dès lors que leur intervention peut être de nature à affecter les
caractéristiques du produit.

Un simple distributeur peut également avoir un intérêt certain dans la souscription
d’une telle garantie puisque généralement ce sont eux qui effectueront toutes les opérations de
retrait. Cependant, ils pourront se faire rembourser ces frais puisque ces derniers seront
généralement engagés au titre d’un mandat ou d’une gestion d’affaire délivré par le fabricant.

Dans une telle situation, ce sera le producteur qui souscrira l’assurance frais de retrait et qui
remboursera ainsi le revendeur, grossiste, détaillant ou concessionnaire de marque grâce à son
indemnité d’assurance. L’assuré pourrait donc n’être simplement que le producteur. Dès lors
que les frais sont engagés par les tiers, ce n’est plus l’assurance « frais de retrait » qui les
couvre mais les sommes déboursées seront normalement indemnisées au titre de la
responsabilité civile du fait des produits livrés. Mais quelle poste de préjudice peut-il
invoquer ? S’agissant d’un engagement financier du tiers, ces dommages ne pourraient être
couverts que par les dommages immatériels non consécutifs puisque le plus souvent, il n’y a
eu encore aucun dommage. Cependant, d’après Jérôme Kullmann, « une telle réclamation
n’entre pas nécessairement dans le cadre de la garantie des « dommages immatériels non
consécutifs » du contrat de responsabilité civile du fabricant »(269), si ils sont garantis, car ces
derniers sont « essentiellement constitués par un manque à gagner, une absence de revenus et
non par des dépenses ou frais ». Cette affirmation doit malgré tout être nuancée puisque cela
dépend de la définition de ces dommages. Si celle-ci est large, par exemple s’il est prévu qu’il
s’agit de tout dommage autre que matériel ou corporel, ils seront couverts(270). Suivant la
rédaction de la police, les frais de retrait engagés par les tiers pourront donc être pris en
charge au titre des dommages immatériels non consécutifs. De même, la majorité des polices
circulant sur le marché étant des garantis « tous risques sauf », dès lors que les frais de retrait
engagés par les tiers ne sont pas exclus expressément, ils doivent être couverts. Or,
l’exclusion générale des frais de retrait ne mentionne souvent que les frais engagés par les
assurés.

Lorsqu’elle est annexée à la police d’assurance responsabilité civile, les assurés sont
ceux de cette dernière, c’est-à-dire, en règle générale, l’entreprise principale et ses filiales.

Concernant le simple distributeur, il est très rare qu’il soit inclus parmi les assurés
additionnels de la police d’assurance de son producteur. Ainsi, dès lors qu’il n’est pas certain
d’être reconnu comme assuré, il aura tout intérêt à souscrire sa propre assurance « frais de
retrait » afin de ne pas risquer d’engager des sommes qui ne lui seront pas remboursées ou
simplement à ne pas prendre l’initiative d’engager des frais et à attendre que le producteur
effectue lui-même la démarche.

Pour éviter cette difficulté, la police « frais de retrait » peut également stipuler que ces
frais seront garantis qu’ils soient déboursés par l’assuré ou par des tiers.

B – Un produit ayant causé ou susceptible de causer un dommage

« Cette garantie a, en général, un domaine d’application bien délimité. Elle ne porte
que sur des produits homogènes, fabriqué en grande série et en tout cas largement distribués
dans le grand public (véhicules automobiles, produits pharmaceutiques ou alimentaires »(271).
Ces produits sont nécessairement des produits livrés ou mise en circulation. « Mais la
mise en circulation d’un produit, composant, dans le cadre d’un processus de fabrication par
dessaisissement volontaire de l’assuré, pourra donner lieu à un retrait, même si la sécurité
des personnes en cause est celle des seules intervenants dans l’élaboration du produit
final »(272).

Suivant la même logique que l’assurance de responsabilité civile du fait des produits,
l’assuré ne doit faire aucune anti-sélection de ses produits. Cependant, est-il matériellement
possible d’énumérer l’intégralité des produits fabriqués par l’entreprise assurée ? Si l’assuré
commercialise tellement de produits que cette énumération est impossible, il est intéressant de
les regroupe par grandes familles et d’apprécier ainsi les risques associés à chacune d’elles.

Dès lors que cette garantie est annexée au contrat d’assurance de responsabilité civile
du fait des produits, cette énumération semble inutile puisque les produits garantis dans le
cadre des frais de retrait sont normalement ceux qui sont couverts par l’assurance de
responsabilité civile. CHUBB par exemple fait directement référence aux produits cités dans
les conditions particulières(273). La plupart de ces polices stipulent simplement que ce sont « les
produits » sans précision complémentaire(274). Dans une telle situation, il semble évident qu’il
faut se référer aux produits couverts par l’assurance responsabilité civile du fait des produits,
normalement prévus aux conditions particulières. Cependant, l’assurance des frais de retrait
est autonome et l’assureur peut donc décider d’inclure d’autres produits ou d’en exclure
certains.

Afin d’être couvert, le produit doit avoir ou être susceptible de causer un dommage.
Mais cette garantie couvre-t-elle tous les types de dommages(275) pouvant se produire ?
Les différentes législations, européennes(276) ou nationales imposant l’éventuel retrait, ne visent
que les produits présentant un défaut de sécurité. Or, « le défaut de sécurité s’apprécie au
niveau de l’intégrité corporelle d’une personne physique »(277). Les garanties minimales
devront nécessairement couvrir les produits susceptibles de causer des dommages corporels. Il
est tout de même possible de prévoir une garantie plus étendue intégrant la probabilité ou la
survenance de dommages matériels. Ces dommages matériels couverts seront exclusivement
ceux subis par les tiers et pas ceux subis par le produit garanti. Ce type de garantie peut être
très utile notamment pour les laboratoires pharmaceutiques créant des médicaments pour les
animaux(278). Malgré le fait qu’il ne s’agisse pas de sécurité des personnes, ces frais sont
généralement plus importants. De même, les motifs de retrait peuvent être beaucoup plus
discutables puisque dans une telle situation, la sécurité n’étant pas en jeu, « des
considérations relatives à l’insuffisance de performance ou à la non-conformité du produit
aux normes d’utilisation risquent d’obscurcir le débat »(279). C’est sans doute ce qui pousse
certains assureurs à refuser la garantie de ce type de dommages, ce qui est, malgré tout, de
plus en plus rare. CHUBB par exemple ne garantie que les dommages corporels : « lorsqu’en
raison des dangers de dommages corporels présentés par un produit désigné aux Conditions
Particulières que l’assuré a livré et qui demeure identifiable après sa livraison, celui-ci est
tenu de procédé à une mise en garde du public et/ou au retrait dudit produit, l’assureur
garantit à l’assuré le remboursement des frais énumérés »(280).

La question des produits causants ou susceptibles de causer des dommages
immatériels est beaucoup plus délicate. Jérôme Kullmann explique que, d’après lui, ces frais
ne devraient pas être pris en compte par une assurance des frais de retrait. « Pour ce qui est
des frais de retrait engagés pour éviter les seuls « dommages immatériels » aux tiers (au sens
de manque à gagner, conséquence de l’indisponibilité d’un bien), ils relèvent plutôt des
relations commerciales qu’entretient l’assuré avec sa clientèle et qu’il lui appartient de
régler avec celle-ci sans avoir à faire appel à la garantie d’un assureur dont l’intervention ne
trouve en principe sa justification que dans le défaut de sécurité des personnes »(281). La
compagnie d’assurance Tokio Marine par exemple ne prévoit que la couverture des retraits
engagés « lorsque le produit présente un danger de dommages corporels et/ou matériels ».

Cependant, les dommages immatériels peuvent parfois être couverts comme tel est le cas dans
les Conventions Spéciales de Gras Savoye : « Sont garantis tous les frais engagés par les
Assurés pour le retrait de produits ayant causé ou susceptibles de causer des dommages
corporels, matériels et/ou immatériels »(282).

C – Des circonstances spécifiques de retrait

Cette assurance ne couvre pas tous les retraits mais certains d’entre eux répondant à
des conditions spécifiques. Ces circonstances relatives au retrait garanti sont décidées
exclusivement par l’assureur. C’est ce dernier qui décide du type de retrait qu’il veut couvrir.

Les garanties minimales prévoient généralement que pour engager l’assureur, l’ordre
de retrait doit provenir d’une autorité compétente, administrative ou judiciaire. Il peut s’agir
notamment, d’arrêtés préfectoraux ou du ministre chargé de la Consommation et des ministres
intéressés(283), de décrets en Conseil d’Etat(284), ou d’une injonction, au sens stricte, du ministre
chargé de la Consommation et des ministres intéressés(285). Cette couverture à minima s’inspire
donc des diverses législations relatives aux obligations de prévention et surtout de retrait,
pouvant être imposées à l’entreprise assurée(286). La décision de retrait peut également être
prise par l’autorité compétente d’autres pays qui saisirait alors l’autorité compétente en
France avant d’appliquer cet ordre de retrait.

Certains polices, et désormais les plus nombreuses, prévoient également que le retrait
peut être couvert même lorsqu’il est à l’initiative de l’assuré. Dans un tel cas, des conditions
très strictes doivent être respectées afin d’éviter que l’assuré effectue des retraits intempestifs
en vertu de raisons d’ordre purement commerciales et non sécuritaires, puisque de telles
considérations relèveraient du domaine du risque d’entreprise(287). La garantie peut donc être
accordée mais seulement si la décision de retrait a été prise d’un commun accord entre
l’assureur et l’assuré. Le contrôle de l’assureur permettra ainsi d’éviter des retraits injustifiés
et le concours d’un expert sera éventuellement requis le cas échéant.

CHUBB par exemple prévoit que ces deux ordres de retrait sont couverts. « Pour
engager la présente garantie, ces frais doivent être exposés, soit en exécution d’une
injonction d’une autorité publique compétente, soit en l’absence d’une telle injonction, en
vertu d’un accord, passé avec l’assureur »(288).

Tokio Marine offrent à l’entreprise assurée une garantie plus large. Cet assureur
prévoit dans ses Conventions Spéciales que les retraits sont couverts dès lors que « ces
opérations sont entreprises : soit pour répondre à l’injonction d’une autorité compétente faite
à l’assuré, soit à l’initiative de l’assuré, ou de toute personne agissant dans l’intérêt de
l’assuré, lorsque le produit présente un danger de dommages corporels et/ou matériels ».

L’assureur sera donc tenu dès qu’il y aura un risque de dommage et cela même s’il n’a pas
donné son accord à cette opération. Cette clause est très avantageuse pour l’assuré mais est
tout autant dangereuse pour l’assureur qui se retrouve sans garde fou. Cela n’est pas
totalement vrai puisque cette convention prévoit tout de même, comme un certain nombre
d’autres polices sur le marché, une limitation temporelle à cette garantie. Il est ainsi exigé que
« la décision de mise en garde et/ou de retrait » intervienne entre la date d’effet et la date de
résiliation du contrat.

Des polices intermédiaires peuvent être prévues comme celle de Gras Savoye qui
prévoit une liste limitative de cas de mise en jeu de la garantie « La mise en jeu de la garantie
est subordonnée à une décision de retrait prise : soit à la suite de l’injonction d’une autorité
compétente, administrative ou judiciaire, soit en cas de menace de dommages avec accord de
l’Assureur ou en cas d’imminence de réalisation. Soit à dire d’expert de l’Assureur, soit par
accord entre les Assurés et l’Assureur »(289). Avec cette rédaction, l’assuré pourra, comme dans
la police de Tokio Marine, être garanti lorsqu’il prend seul la décision de retrait, mais là, la
réalisation doit être « imminent », et le danger seul ne suffit pas, cela rajoute une condition
non négligeable et essentielle afin d’éviter tout abus de l’assuré.

267 Article 1386-1 du Code civil : « le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son
produit, qu’il soit ou non lié par un contrat avec la victime. » ; Article 1386-1 du Code civil dispose des diverses
personnes qui sont assimilées au producteur et qui en tant que tel sont responsables.
268 L. n°83-660, 21 juillet 1983, JO 22 juill
269 KULLMANN J., Lamy Assurance, Editions Lamy, n°2449, 2010
270 Pour les dommages immatériels voir supra 3°. p.45
271 CHAUMET F., Les assurances de responsabilité de l’entreprise, 4ème édition, l’Argus de l’assurance, 2008,
p. 285.
272 DEBEAUNE C., Les sinistres sériels, Institut des Assurances de Lyon, promotion 2001
273 Conventions Spéciales Avantech de Chubb, Novembre 2006, p.19 (Annexe n°3)
274 Intercalaire Gras Savoye, Conventions Spéciales Assurance Responsabilité Civile Générale, 25 mai 2011,
(Annexe n°2).
275 Pour les différents dommages couverts, voir supra §2 p.42
276 Directive européenne sur la « sécurité générale des produits » du 29 juin 1992, Dir. Cons. CEE n°95/59, 29
juin 1992, JOCE 11 août, n°L.228 : les produits « ne répondant pas à la définition du produit sûr » ; Dir. Cons.
CEE n°85/374, 25 juillet 1985, JOCE 7 août, n°L.210 : les produits « n’offrant pas la sécurité à laquelle on peut
légitimement s’attendre »
277 KULLMANN J., Lamy Assurances, Editions Lamy, n°2451, 2010
278 Les animaux sont considérés comme des choses et en ce sens, les dommages qu’ils subissent relèvent des
dommages matériels. Voir supra 2°. p.44
279 KULLMANN J., Lamy Assurances, Editions Lamy, n°2452, 2010
280 Conventions Spéciales Avantech de Chubb, Novembre 2006, p.19 (Annexe n°3)
281 KULLMANN J., op. cit. note 279
282 Intercalaire Gras Savoye, Conventions Spéciales Assurance Responsabilité Civile Générale, 25 mai 2011,
(Annexe n°2).
283 KULLMANN J., Lamy Assurances, Editions Lamy, n°2436, 2010
284 KULLMANN J., Lamy Assurances, Editions Lamy, n°2434, 2010
285 KULLMANN J., Lamy Assurances, Editions Lamy, n°2435, 2010
286 Pour les frais retrait imposés voir supra §2. p.62
287 Pour le risque d’entreprise voir supra section 1 p.52
288 Conventions Spéciales Avantech de Chubb, Novembre 2006, p.19 (Annexe n°3)
289 Intercalaire Gras Savoye, Conventions Spéciales Assurance Responsabilité Civile Générale, 25 mai 2011,
(Annexe n°2).

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