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Section 2–L’intervention de la loi fédérale dans l’élaboration des systèmes

ADIAL

Sans prétendre faire une présentation exhaustive des régimes fédéraux spécifiques aux AT-MP, il est nécessaire de citer les principales organisations mises en place au niveau fédéral et d’en expliquer brièvement le fonctionnement (I et II).

Le rôle fédéral ne s’arrête en outre pas là : des actions sont régulièrement lancées sur l’ensemble du territoire, visant la prévention des risques au travail (III).

I. Le « FELA » de 1908 : cas des employeurs fédéraux

Le « Federal Employers Liability Act »(32) est une loi américaine qui fut adoptée par le Gouvernement fédéral en 1908.

C’est donc corrélativement à la mise en place des premiers fonds d’indemnisation étatiques que ce régime a lui aussi vu le jour.

A la différence de ce que les Etats mettront par la suite en oeuvre dans le cadre de la « Workers’Compensation », c’est ici un système basé sur l’existence d’une faute.

Tant les salariés visés que les conditions d’application diffèrent d’une assurance WC. Cette loi ne touche que les employés fédéraux de chemins de fer (« railroaders », soit les « cheminots »). Ce sont les AT-MP propres à leur métier qui sont concernés.

Cette démarche a été instaurée suite à la hausse significative des décès de travailleurs de ce milieu au début du XXe siècle. Avec le développement des machines à vapeur, des voies de chemin de fer et face aux faibles connaissances et précautions à prendre en la matière à cette époque, cette activité spécifique entraina de nombreux sinistres aux conséquences souvent très lourdes.

Une fois encore, qui dit dommages spécifiques, dit régime spécifique.

Le principe de réparation forfaitaire automatique n’est donc ici pas de rigueur : la preuve d’une faute est un préalable incontournable.

Les cheminots accidentés doivent démontrer que leur employeur a commis une négligence et que celle-ci est à l’origine de leur dommage.

Ils se trouvent donc dans une situation moins favorable que celle des salariés « de droit commun ». Néanmoins, et fort heureusement, sans quoi nous pourrions tous crier à l’injustice, en échange de cette « défaveur », les indemnités susceptibles d’être octroyées sont alors bien supérieures à ce qu’offre une Workers’ Compensation « habituelle ».

Les cheminots ne sont pas les seuls à avoir fait l’objet d’un tel traitement. Quelques années plus tard, ce fut au tour des travailleurs en mer d’être la cible d’un régime similaire.

II. Le « Merchant Marine Act » ou « Jones Act » (33) de 1920.

Bien que l’appellation de « Jones Act » ne soit pas d’une clarté absolue, sont ici visés les « marins » (« seaman » en anglais).

Cet acte fut adopté par le Congrès Américain au début du mois de Juin 1920.

Il ne présente que peu de spécificités : il se « contente » d’étendre le principe mis en place pour les cheminots à l’égard des matelots. La législation du FELA (voir supra) leur est dès lors également applicable par extension.

Les « marins » sont ainsi recevables à formuler des réclamations à l’encontre de leur employeur en cas de négligence commise par le Capitaine du navire ou un quelconque autre membre de l’équipage.

Encore faut-il savoir précisément ce que recouvre la qualification de « marin », ou « sea-man ». Aucune définition précise n’en fut donnée dans le cadre de cet Acte de 1920.

Ce n’est qu’en 1995 que la Cour Suprême des Etats-Unis établit une définition de référence par un arrêt CHANDRIS, Inc v/ LATSIS(34). La Cour instaure ici une définition « a contrario » que l’on peut traduire comme suit : « tout travailleur qui passe moins de 30% de son temps au service d’un navire sur des eaux navigables est présumé ne pas être un marin soumis au Jones Act » (35).

La situation de ces deux catégories d’employés, amenés à traverser les « frontières » entre Etats américains de par la nature même de leurs missions, peut donc être considérée comme similaire.

C’est une dérogation au mécanisme de la Workers’ Compensation applicable à l’ensemble des salariés n’appartenant pas à une catégorie dite « spécifique ».

Pour faire court, tout ce qui n’est pas expressément visé par les actes adoptés au niveau fédéral est géré au niveau de chaque Etat fédéré.

Aucune présomption n’étant accordée à ce corps de métier. Le travailleur doit donc faire la preuve lui-même qu’une personne a commis un manquement à l’origine du dommage subi. Il sera alors fondé à recevoir une réparation intégrale de ses préjudices.

La situation de ces employés est donc bien différente de ceux de « droit commun du droit spécial » : responsabilité pour faute et réparation intégrale, contre responsabilité sans faute et réparation forfaitaire.

Dans une telle situation, l’employeur doit donc souscrire une garantie adaptée. Il peut d’ailleurs tout à fait obtenir une couverture par le biais d’une police Workers’Compensation « standard » en achetant en supplément une couverture maritime (ou ferroviaire) par avenant, afin que son contrat soit adapté à sa situation professionnelle (personne embauchant des cheminots ou des marins).

Même si en France, certaines catégories spécifiques détiennent une organisation propre (personnel auxiliaire de la SNCF ou encore agent EDF-GDF), l’indemnisation est la même que pour les autres salariés : ils sont couverts de la même manière et sur le même fondement. Seule la caisse amenée à verser la prestation sera différente et portera un autre nom.

Nous ne trouvons donc pas en France de systèmes comparables, où certaines catégories de salariés (cheminots / SNCF) seraient soumises à un système d’indemnisation différent.

Pour en revenir aux mécanismes américains, ces deux systèmes (FELA et Jones Act) ne sont pas les seuls à avoir été mis en place, mais ce sont toutefois les principaux.

On peut tout de même citer pour information un exemple récent.

En 2010, notamment suite à l’accident minier de MASSEY ENERGY(36), un acte fut adopté en juillet de la même année : le Dodd-Franck Act.

Sans instituer un régime spécifique pour les travailleurs miniers, il missionne cependant la SEC (Securities and Exchange Commission) pour effectuer une enquête sur la sécurité des mines et le nombre d’accidents de travail liés à une telle activité.

À l’avenir, une telle activité causant des sinistres spécifiques pourrait elle aussi faire l’objet d’un régime particulier, appelant une réparation particulière.

Cette décision laisse apparaitre l’autre mission essentielle du gouvernement fédéral : veiller à la prévention des risques, en incitant chaque employeur à être le plus diligent possible.

III.L’Occupationnal Safety and Health Act de 1970 (OSHA)

A ne pas confondre avec notre « OSHA européenne », l’Occupationnal Safety and Health Administration(37) américaine fut créée par l’Acte éponyme adopté en 1970 (OSH Act).

Son objectif principal était, et est toujours, d’assurer la sécurité et la salubrité dans les conditions de travail des employés, notamment par la mise en place de règles standards plus ou moins contraignantes (parfois absolument obligatoires, parfois vivement recommandées, parfois érigeant de simples conseils) et en offrant des formations, une assistance,… On cherche ainsi à sensibiliser l’employeur mais également son personnel aux risques inhérents à telle activité professionnelle et aux moyens envisageables pour les éviter(38).

L’OSHA fait partie intégrante du Département du Travail des USA (« United States Department of Labor »).

Elle concerne la plupart des employeurs du secteur privé et leurs salariés, auxquels s’ajoutent quelques employeurs du secteur public, dans les 50 Etats américains, et même dans quelques territoires et juridictions soumis à l’autorité fédérale. C’est le cas de Puerto Rico ou encore des Iles Vierges.

Son site internet(39) recense notamment l’ensemble des normes édictées, tant dans les domaines de l’industrie en général, du maritime, de la construction ou encore les domaines agricoles.

L’objectif est vraiment d’instaurer une relation en toute transparence tant à l’égard des employeurs que des employés. Les salariés sont notamment en mesure de lui adresser une réclamation s’ils reprochent à leur employeur de ne pas se conformer aux réglementations.

On pourrait ainsi comparer une telle institution à une « sorte » d’Inspection du Travail à l’américaine.

En outre, même si le Gouvernement fédéral s’occupe d’un versant de cette tâche d’indemnisation des victimes des AT-MP, le plus gros du travail est laissé à la discrétion de chaque Etat.

Selon l’histoire, les convenances, les principes culturels propres à chacun, le mécanisme mis en place ne recouvrira pas exactement les mêmes hypothèses, faisant de la législation relative aux accidents du travail et maladies professionnelles une réalité « segmentée », variable selon les régions, mais dont l’uniformité commence aujourd’hui à se dessiner (II).

32 Federal Employers Liability Act, 22 avril 1908, texte reproduit au titre 45 US Code (« RAILROADS »), § 51 et suivants.
33 Texte du Jones Act, disponible sur ce lien : www.upa.pdx.edu/IMS/currentprojects/TAHv3/Content/PDFs/Jones_Act_1920.pdf
34 Supreme.justia.com/cases/federal/us/515/347/
35 « a worker who spends less than about 30 percent of his time in the service of a vessel in navigation should not qualify as a seaman under the Jones Act », page 371 – 515 U.S 347 (1995).
36 MASSEY ENERGY : entreprise américaine d’extraction et de production de charbon.
37 www.osha.gov/
38 « Under the OSH Act, employers are responsible for providing a safe healthful workplace. OSHA’s mission is to assure safe healthful workplaces by setting and enforcing standards and by providing training, outreach, education and assistance”, Osha.gov, US department of Labor.
39 www.osha.gov/law-regs

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