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SECTION 2 : LA REPONSE MINISTERIELLE PERRUCHOT

ADIAL

L’article 990 I prévoit un assujettissement à un prélèvement de 20% des sommes perçues à
la suite du décès de l’assuré diminuée d’un abattement de 152 500 euros. L’administration fiscale a
été interrogée sur l’interprétation qu’elle entendait donner à ce texte en présence d’un
démembrement de la clause bénéficiaire.

La réponse apportée par l’administration fiscale a d’abord été très favorable aux
contribuables. On a pu dire qu’elle conduisait à une « faille « du régime d’imposition (1.).
L’administration semble cependant avoir récemment rapporté sa doctrine fiscale en la matière (2.).

1 : LE PRINCIPE DE LA TAXATION DE L’USUFRUITIER

L’Administration a été interrogée sur l’incidence d’une clause bénéficiaire démembrée sur
les modalités de calcul du prélèvement de vingt pour cent de l’article 990 I du Code Général des
Impôts. Une réponse ministérielle « Perruchot » indique que « dans l’hypothèse d’un
démembrement de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance et de la survie de l’usufruitier à la
date de dénouement du contrat, l’assiette de prélèvement de 20 % est constituée par les droits de
l’usufruitier qui correspondent aux sommes, rentes ou valeurs dues. En effet, l’usufruitier est le seul
redevable de la taxe de 20 % dès lors qu’il est le bénéficiaire exclusif du capital décès. A ce titre, il
bénéficie de l’abattement de 152 500 euros. La circonstance que les sommes, rentes ou valeurs soient
réparties par la volonté du nu-propriétaire et de l’usufruitier n’est pas de nature à remettre en cause
cette analyse. Il est précisé que lorsque les sommes, rentes ou valeurs sont versées, lors du
dénouement du ou des contrats, à plusieurs usufruitiers désignés comme bénéficiaires, chacun d’entre
eux bénéficie d’un abattement de 152 500€(64) ». Cette solution a été confirmée par une réponse
ministérielle « Dassault » du 7 mai 2009.

Le redevable de la taxe est donc l’usufruitier. Il est également le seul à bénéficier de
l’abattement fiscal. Cette solution est à confronter avec la loi « TEPA » du 21 août 2007 en faveur
du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, qui exonère de droits de succession la part recueillie
par le conjoint survivant et le partenaire d’un PACS.

La conséquence de cette doctrine fiscale est donc l’exonération totale des droits du
bénéfice démembré accordé en usufruit au conjoint et en nue-propriété aux héritiers. La
souscription conjointe avec dénouement au premier décès, et non en souscription croisée, est
conseillée pour profiter de cet avantage fiscal(65).

S’agissant de l’appréhension des démembrements de bénéfice à l’application de l’article
757 B du Code général des Impôts, les droits sont évalués sur le barème fiscal de l’usufruit viager
de l’article 669-I de ce même code. L’abattement de 30 500 euros est alors réparti
proportionnellement. Une réponse ministérielle Tardy(66) de 2010 a expliqué cette différence
d’analyse par le fait que le prélèvement de l’article 990-I est « un prélèvement suis generis ».
Cette justification, si tant est qu’elle en soit une, n’a pas empêché récemment
l’administration d’aligner les régimes des articles 757 B et 990 I dans le sens le plus défavorable aux
contribuables en mettant fin à la doctrine de l’usufruitier bénéficiaire exclusif de la garantie (2.).

2.FFFLA FIN DE LA DOCTRINE DU QUASI-USUFRUITIER BENEFICIAIRE EXCLUSIF

L’analyse de l’administration fiscale était très favorable aux redevables. Et ce, d’une façon
peu justifiable puisque «l’usufruitier n’est pas le bénéficiaire exclusif du capital décès puisque le nupropriétaire
a une créance de restitution égale au montant du capital décès(67) ». C’est l’argument
soulevé par le sénateur Dassault dans sa question ministérielle ayant aboutie à la confirmation
provisoire de la doctrine du quasi-usufruitier bénéficiaire exclusif de la garantie.

Des auteurs ont longtemps critiqué la solution administrative parce que son « raisonnement
revient à faire purement et simplement fi du démembrement de propriété(68) ». On pourrait ajouter
que pire encore, c’est le droit viager d’usufruit qui est considéré comme seul bénéficiaire de
l’abattement au détriment du nu-propriétaire, véritable propriétaire en devenir. Frédéric Douet
proposait alors de faire supporter le prélèvement par le quasi-usufruitier et le nu-propriétaire à
concurrence de leurs droits respectifs et sous déduction de l’abattement de 152 000 euros chacun.
Le retour à l’orthodoxie juridique, au détriment des contribuables, semble être acquis
aujourd’hui par le projet de loi de finance rectificative réformant l’article 990 I du Code général des
Impôts. Lee texte remanié prévoit « qu’ en cas de démembrement de la clause bénéficiaire, le nupropriétaire
et l’usufruitier sont considérés, pour l’application du présent article, comme bénéficiaires
au prorata de la part leur revenant dans les sommes, rentes ou valeurs versées par l’organisme
d’assurance, déterminée selon le barème prévu à l’article 669. L’abattement prévu au premier alinéa
du présent article est réparti entre les personnes concernées dans les mêmes proportions ».

La différence de taille avec la précédente proposition doctrinale concerne l’abattement. Ce
dernier est réparti entre les bénéficiaires proportionnellement, solution évidemment transposée de
celle de l’article 787 B. Le rapporteur général Carrez ne s’en cache d’ailleurs pas lorsqu’il affirme
que la loi a pour objectif « d’harmoniser le traitement fiscal » de l’assurance-vie – harmonisation
synonyme ici de sur-taxation -, sauf à admettre que cet objectif non prioritaire en 2010 soit devenu
primordial en 2011.

Cette solution est cependant critiquable, et il est trop tôt pour se prononcer sur les
modalités de l’application future de cette disposition. En effet, comme le démontre un
commentateur, « la réforme crée donc une incohérence majeure entre les différents alinéas du texte
[de l’article 990 I], sans la moindre explication(69) ». L’alinéa premier de cet article pose en effet
expressément le principe d’un abattement de 152 500 euros pour chaque bénéficiaire(70), qui n’est
donc pas un abattement global. D’autres questions restent en suspens. Quand l’usufruitier, qui est
souvent le conjoint, est exonéré de droits (par exemple par la loi TEPA), on peut se demander si sa
part est ou non imputée sur l’abattement. La question n’est pas neutre et il est dommageable que
le législateur ne l’ait pas réglée dès l’origine.

Si les controverses relatives à l’impact fiscal du bénéfice sont peu nourries, il en va
autrement du traitement fiscal de l’assurance-vie non dénoué. En effet, les incohérences civiles ne
peuvent être corrigées par l’application autarcique du droit fiscal (Titre 2).

64 Instruction du 12 janv. 2006 7K-1-06, Bulletin officiel des impôts, F. Douet, Taxation des sommes versées
après le soixante-dixième anniversaire de l’assuré, R.G.D.A. octobre 2010, p. 1162
65 S. Jacquin, De l’intérêt de combiner une souscription conjointe avec dénouement au premier décès et une
clause bénéficiaire démembrée, J.C.P.N. n° 50, 11 déc. 2009, 1336
66 R.M. Tardy, n° 68794, JOAN Q du 29 juin 2010, p. 7290
67 A. Pando, Assurance-vie : Bercy confirme le traitement fiscal de la clause bénéficiaire démembrée, P.A.
19 mai 2009 n° 99, p. 3
68 F. Douet, Du prélèvement de 20% sur les contrats d’assurance-vie, Defrénois 28 février 2006, n° 4, p. 301
69 M. Leroy, Réforme de la fiscalité de la clause bénéficiaire démembrée, Gaz. Pal., 28 juillet 2011, n° 209, p. 7
70 Art. 99O I C.G.I. : « Lorsqu’elles n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 757 B, les sommes,
rentes ou valeurs quelconques dues directement ou indirectement par un ou plusieurs organismes d’assurance
et assimilés, à raison du décès de l’assuré, sont assujetties à un prélèvement à concurrence de la part revenant à
chaque bénéficiaire de ces sommes, […], diminuée d’un abattement de 152 500 euros ».

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