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Section 2 : Catastrophes technologiques et nucléaires

ADIAL

Une catastrophe technologique peut s’entendre au sens large « comme comprenant les risques liés à la technologie moderne et donc pouvant regrouper la catastrophe industrielle, la catastrophe nucléaire, accidents causés par des produits industriels, les pollutions de grande ampleur, les accidents collectifs du transport ».(55)

Cependant, la loi retient une définition beaucoup plus restreinte. Au sens de l’article L. 128-1 du Code des assurances, il s’agit d’un « accident non nucléaire survenant dans une installation classée comme dangereuse au sens du code de l’environnement et endommageant un grand nombre de biens immobiliers.

Ces installations liées à l’industrie peuvent être indistinctement des usines, ateliers, dépôts, chantiers, exploitations de carrière ou toute autre installation. Les accidents dus au transport de matières dangereuses (par train, camion, bateau, avion, etc.) peuvent être considérés comme des catastrophes technologiques ».(56) Dans cette partie, nous nous intéresserons uniquement aux catastrophes technologiques (§1) et aux catastrophes nucléaires (§2).

§1-Catastrophe technologique et régime d’indemnisation

Suite à l’explosion de l’usine AZF à Toulouse en 2001 le législateur est enfin intervenu, par une loi du 30 juillet 2003, pour mettre en place un régime d’indemnisation des victimes de catastrophes technologiques. Ainsi, toute personne physique qui, en dehors de son activité professionnelle, a souscrit une assurance de biens (pour l’habitation, le mobilier, les véhicules) est couvert lorsque ces biens sont endommagés suite à une catastrophe technologique. Pour que la garantie soit mise en oeuvre, deux conditions doivent être remplies : l’accident doit survenir d’une installation classée au titre de la protection de l’environnement et l’accident doit avoir rendu inhabitables plus de 500 logements.

Le régime fonctionne comme celui des catastrophes naturelles, c’est-à-dire qu’un arrêté doit constater l’état de catastrophe technologique, l’indemnité est versée aux assurés sinistrés dans les trois mois suivant la remise de l’état estimatif des pertes ou de la date de publication de l’arrêté, si la publication est postérieure. De plus, l’assureur qui indemnise la victime sera subrogé dans les droits et actions de celle-ci afin d’agir, en remboursement des sommes, contre l’exploitant du site responsable de l’accident.

Cependant, ce régime d’indemnisation ne concerne que les particuliers, c’est pourquoi nous n’allons pas nous étendre davantage sur ce point. D’ailleurs, la plupart des contrats d’assurance de choses, souscrits par une personne morale ou une personne physique pour l’exercice d’une activité professionnelle, exclue les dommages résultant d’une catastrophe technologique ou catastrophe naturelle. L’entreprise n’est soumise à aucune obligation légale de s’assurer contre les risques de catastrophe technologique. Cependant, au vue des conséquences qu’une telle catastrophe peut entrainer, celle-ci aurait tout intérêt à se protéger contre un tel risque. Les assureurs peuvent donc proposer aux entreprises qui le souhaitent des contrats « sur mesure ». Cette garantie peut également être incluse dans certains contrats et pour des cas spécifiques.

Une catastrophe nucléaire, comme celle qui a eu lieu il y a peu de temps, entraine des conséquences considérables, pour les victimes, pour l’exploitant mais également pour le pays, c’est ce que nous allons voir par la suite.

§2-Importance et cout d’une catastrophe nucléaire

L’accident de la centrale Fukushima survenu le 11 mars 2011 suite à un séisme et un tsunami, dans lequel quatre réacteurs sur six ont été endommagés et ont entrainé une contamination radioactive de l’air, a eu un retentissement considérable dans le monde entier notamment dans les pays exploitant des usines nucléaires où de nombreuses questions ont été soulevées. Dans le domaine du nucléaire, la sureté doit être la priorité absolue.

Suite à cette catastrophe, a été réalisé en Europe, plusieurs tests de résistance, dans le but de vérifier la conformité des installations notamment en cas de sinistres simultanés (séisme, inondation, perte totale d’alimentation électrique ou de source froide) et également, une amélioration de la solidité des installations. De plus, en France la FARN (Force d’Action Rapide Nucléaire) a été mis en place pour permettre de développer par voie aérienne sur le site sinistré, les moyens humains et matériels pour le rétablissement dans les 24 heures des alimentations électriques et d’eau. La probabilité qu’un tel événement se réalise en France parait plutôt faible.

Cependant, selon une étude de l’Institut de Radioprotection et de Sécurité Nucléaire, en cas de survenance d’un évènement aussi important que Tchernobyl ou Fukushima (niveau 7), cela engendrerait, pour la France, un coût de 430 milliards d’euros. Somme beaucoup plus importante que les conséquences financières de l’explosion d’AZF ou du naufrage de l’Erika évaluées autour de 2 milliards d’euros. L’évaluation des conséquences financières d’un accident nucléaire majeur représenterait 6% du PIB soit « trois à six années de croissance », sans parler des contaminations de la population et des conséquences sur la santé des personnes touchées par les rejets radioactifs(57). C’est pourquoi, il apparait impératif de contrôler et maitriser ces risques. Le monde a évolué et on a beaucoup retenue de la catastrophe de Tchernobyl de 1986, ainsi, l’incident nucléaire de Fukushima a été en grande partie maitrisé sans faire de victime (les 20 000 victimes étant celles du tsunami), alors qu’il s’agissait d’un accident aussi important que celui de Tchernobyl.

Malgré les progrès qui ont été fait, il reste encore des efforts à faire quand à la sureté de ces sites nucléaires afin d’éviter qu’un incident tel que celui-ci ne se reproduise. Ces enseignements des catastrophes nucléaires sont également valables pour l’ensemble des risques technologiques. L’association mondiale des exploitants nucléaires(58) a décidé, après Fukushima, d’agir au niveau international et d’intervenir auprès de ses membres en exerçant des contrôles systématiques afin de détecter et remédier à toute faille dans la sureté de l’installation. Pour l’ensemble des risques technologiques, les sites industriels a risque ont intérêt à développer par le biais d’associations professionnelles des coopérations et des moyens afin d’assurer un maintien de haut niveau de la sureté(59).

Les contrats d’assurance de responsabilité civile générale comportent tous une clause d’exclusion des dommages de nature nucléaire. Mais en cas de catastrophe nucléaire, la responsabilité de l’exploitant de l’installation en cause sera de plein droit mise en cause, c’est pourquoi ils ont l’obligation de souscrire une assurance de responsabilité civile nucléaire. C’est la Convention de Paris du 29 juillet 1960 sur la responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire et la Convention complémentaire de Bruxelles du 31 janvier 1963 ont instauré ce régime spécial de responsabilité civile de l’exploitant d’installations nucléaires.

Face au coût élevé des catastrophes nucléaires, se pose la question de l’indemnisation. Qui indemnise les conséquences d’une telle catastrophe ? Les conventions internationales(60) ont prévu une indemnisation en trois tranches, c’est-à-dire, qu’en cas de catastrophe nucléaire, l’exploitant responsable serait tenu d’indemniser jusqu’à 91,5 millions d’euros (alors qu’en Allemagne la responsabilité de l’exploitant est illimitée), pour la deuxième tranche, ce serait l’Etat où se situe l’installation sinistrée qui devra indemniser jusqu’à 109,8 millions d’euros, et enfin, les Etats signataires pour une tranche de 143,7 millions d’euros. Ces montants d’indemnisation sont donc très limités. Le système assurantiel des centrales nucléaires est trop insuffisant(61), les assureurs ne pouvant, seuls, supporter les conséquences d’une catastrophe nucléaire se réunissent en pools et augmentent leur capacité grâce à la réassurance (Assuratome en France).

Il semblerait que soit apportée en 2013 une modification de ces plafonds, la responsabilité civile de l’exploitant étant jugée trop faible. Selon Philippe MONGIN, directeur au CNRS et spécialiste du nucléaire, « les exploitants devraient payer le prix de l’assurance correspondant à leur risque ». Ainsi, la responsabilité de l’exploitant en cas de catastrophe nucléaire pourrait passer de 91,5 à 700 millions d’euros, la deuxième tranche assumée par l’Etat national serait portée à 500 millions d’euros et le pools des Etats signataires apporteront 300 millions d’euros supplémentaires, ce qui augmente ainsi la capacité d’indemnisation jusqu’à 1,5 milliards d’euros, une augmentation considérable par rapport aux engagements précédents. Le surplus serait pris en charge par l’Etat national. L’autre mesure qui pourrait changer serait le délai de l’action en réparation des victimes de dommages corporels qui passerait de dix ans à trente ans. Par ailleurs, il serait envisageable que le fait qu’une catastrophe naturelle soit à l’origine d’une catastrophe nucléaire (Natech)(62) ne serait plus une cause d’exonération de responsabilité pour l’exploitant.

Même si la probabilité de survenue d’une catastrophe majeure est faible, le risque zéro n’existe pas. La responsabilité de l’exploitant pour les dommages causés aux tiers en raison de son installation nucléaire est assurée par un régime spécial, mais quand est-il des dommages aux installations et aux biens situés sur le site nucléaire et appartenant à l’exploitant. Il ne faut pas oublier l’importance pour l’exploitant de bénéficier d’une couverture de ses installations et de ses biens mobiliers situés sur le site. En cas de dommage aux biens, mobiliers ou immobiliers, situés sur un site nucléaire, on a un retour au droit commun. Ainsi, ce type de dommages peut être couvert par un contrat d’assurance dommages garantissant les risques classiques tels que l’incendie, le bris de machine, les pertes d’exploitation…

55 http://riseo.fr/Installations-dangereuses)
56 http://www.conso.net/bases/5_vos_droits/1_conseils/conseil_724_fj238-assurance_des_catastrophes_industrielles.pdf
57 http://www.lesechos.fr/06/02/2013/lesechos.fr/0202550379350_le-cout-d-un-accident-nucleaire-en-france—plus-de-400-milliards-d-euros.htm
58 “World Association of Nucléar Operators” créée après Tchernobyl
59 J.GUERINOT, M.LLORY, « Fukushima, les analyses de deux experts », revue Préventique, n°125, septembre-octobre 2012.
60 Convention de Paris du 29 juillet 1960 relative à la responsabilité civile du nucléaire, la Convention complémentaire de Bruxelles du 31 janvier 1963 et la Convention de Viennes du 21 mai 1963
61 http://www.slate.fr/story/51679/assurance-centrales-nucleaires-cout-accident
62 Accident technologique induit par une catastrophe naturelle qui génère une situation de chaos sur le site industriel en question et sur l’ensemble du territoire

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