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Section 1 : L’étendue de la garantie

ADIAL

L’étendue de la garantie s’apprécie tant au regard des dommages garantis (§1) que des exclusions et déchéances (§2).

§1) Une garantie limitée aux seuls dommages matériels

Selon l’article L 243-8 du Code des assurances, tout contrat souscrit par une personne assujettie à une obligation d’assurance, doit comporter des garanties équivalentes à celles des clauses types. La clause type applicable en matière d’assurance de responsabilité décennale est située à l’article A 243-1 du même code, plus précisément à l’annexe 1(182).

Les conditions générales de la SMABTP (« ALPHA-BAT Fabricants/Négociants »), du groupe CAMACTE (« Responsabilité professionnelle des fabricants et négociants de matériaux de construction ») et de l’Auxiliaire (« Responsabilité professionnelle des négociants et fabricants en matériaux de construction ») reprennent sensiblement tous la même formulation dans leur garantie responsabilité civile décennale. Dans le contrat du groupe CAMACTE cette garantie est dénommée « responsabilité professionnelle des fabricants et négociants de matériaux de construction, responsabilité du fait des composants incorporés à des ouvrages de bâtiment » ; dans celui de la SMABTP elle est dénommée « garantie spécifique des dommages matériels aux travaux de construction lorsque votre responsabilité est recherchée en vertu de l’article 1792-4 du Code civil » et est incluse dans le chapitre relatif à l’assurance de responsabilité civile professionnelle.

L’article A 243-1 annexe 1 du Code des assurances dispose que « le contrat garantit le paiement des travaux de réparation de l’ouvrage à la réalisation duquel l’assuré a contribué ainsi que des ouvrages existants, totalement incorporés dans l’ouvrage neuf et qui en deviennent techniquement indivisibles, au sens du II de l’article L 243-1-1 du présent code, lorsque la responsabilité de l’assuré est engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil à propos de travaux de construction, et dans les limites de cette responsabilité. Les travaux de réparation, notamment en cas de remplacement des ouvrages, comprennent également les travaux de démolition, déblaiement, dépose ou démontage éventuellement nécessaires ».

Les seuls dommages garantis sont donc les dommages matériels dont sont responsables les locateurs d’ouvrages (dommages à l’ouvrage ou aux existants). A ce titre, ces dommages doivent compromettre la solidité de l’ouvrage ou le rendre impropre à sa destination (ceci s’apprécie au regard de l’ensemble de l’ouvrage), ou encore affecter la solidité d’un élément d’équipement indissociable et apparaître au maximum dix ans après la réception(183). Sont également pris en compte les dommages évolutifs : il s’agit des dommages faisant suite aux dommages d’origine qui étaient de nature décennale, et qui apparaissent plus de dix ans à compter de la réception de l’ouvrage. Il est toutefois nécessaire que la réparation des dommages initiaux ait été demandée. La réparation des dommages futurs est également admise : il s’agit de ceux constatés dans les dix ans à compter de la réception, qui n’étaient pas de nature décennale à ce moment donné, et qui le deviendront avant la fin du délai de prescription décennal. Toutefois, les dommages ayant fait l’objet de réserves à la réception ne sont pas garantis.

Ensuite, les dommages immatériels consécutifs (par exemple des frais supplémentaires) aux dommages matériels garantis ne sont pas pris en charge(184). Ceci ressort indirectement de l’article 1792 du Code civil. Cette solution a été rappelée et précisée par la jurisprudence(185). Si l’assuré souhaite que les dommages immatériels soient couverts, il devra souscrire une garantie complémentaire (voir infra). Sont également exclus du domaine de la garantie les dommages au mobilier.

Enfin, se pose la question des dommages intermédiaires. Il s’agit de dommages « affectant les gros ouvrages ou ceux d’ossature, de clos et de couvert, survenus après réception et pendant dix ans, sans effet sur la solidité de l’immeuble ni le rendant impropre à destination, dus à une faute du constructeur(186) ». La responsabilité des fabricants d’EPERS pour de tels dommages est admise sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun. Toutefois, les contrats d’assurance ne les couvrent pas au titre de la garantie de base.

Après avoir étudié les dommages garantis, il convient de s’intéresser aux exclusions et déchéances.

§2) Des exclusions et déchéances limitativement énumérées

Il est nécessaire de se référer une fois encore à la clause type de l’article A 243-1 annexe 1 du Code des assurances concernant les exclusions et déchéances. Cet article prévoit trois exclusions de garantie lesquelles doivent impérativement être reprises par les assureurs de responsabilité civile décennale(187). Sont alors cités le fait intentionnel ou le dol du souscripteur ou de l’assuré, les effets de l’usure normale, du défaut d’entretien ou de l’usage anormal, et enfin la cause étrangère. Ces exclusions sont bien présentes dans les conditions générales précitées de la SMABTP, du groupe CAMACTE et de l’Auxiliaire.

Cette liste constitue un maximum au-delà duquel l’assureur ne peut aller en prévoyant d’autres exclusions et, à ce titre, l’article A 243-1 du Code des assurances précise que « toute autre clause du contrat ne peut avoir pour effet d’altérer d’une quelconque manière le contenu ou la portée de ces clauses ».

Il convient alors de s’interroger sur la licéité ou non de certaines clauses. Concernant la limitation de la garantie aux activités déclarées par l’assuré, en l’espèce le fabricant d’EPERS, celle-ci est tout à fait valable. En effet, il ne s’agit pas vraiment d’une exclusion de garantie mais plus d’une délimitation de l’objet de la garantie(188). Toutes les exclusions allant au-delà de celles énumérées dans les clauses types sont illicites. Il en est ainsi de l’exclusion relative aux procédés non traditionnels. De même, la clause ayant pour but d’exclure de la garantie les travaux de technique non courante n’est pas valable(189).

Enfin, une déchéance est prévue dans la clause type précitée. Cette dernière ayant force de loi, la déchéance doit apparaître impérativement dans les contrats d’assurance de responsabilité civile décennale. Elle vise l’inobservation inexcusable des règles de l’art. Par exemple, dans les conditions générales de la SMABTP précitées, elle est rédigée comme suit : « En outre, vous êtes déchu de tout droit à garantie, en cas d’inobservation inexcusable, par vous-même ou par les représentants légaux ou dûment mandatés par votre entreprise, des règles de l’art, telles qu’elles sont définies par la règlementation en vigueur, les documents techniques unifiés ou les normes établis par les organismes compétent à caractère officiel ou dans le marché concerné. Cette déchéance n’est pas opposable aux bénéficiaires des indemnités ». Elle sera alors applicable notamment lorsque le fabricant d’EPERS déroge en toute connaissance de cause aux règles de l’art.

182 KARILA (L.) et CHARBONNEAU (C.), Droit de la construction : responsabilités et assurances, 2è ed. Lexis Nexis, 2011, p. 568
183 KULLMANN (J.), Lamy assurances, Editions Lamy, 2012, n°3544
184 KARILA (L.) et CHARBONNEAU (C.), Droit de la construction : responsabilités et assurances, 2è ed. Lexis Nexis, 2011, p. 569 ; MALINVAUD (P.), Droit de la construction, Dalloz action, 2010, p. 54
185 Cass. 1è civ., 28 avr. 1993, n° 90-17.727, RGAT 1993, p. 828 note Bigot J.
186 FERRAIS (C.), Cours magistral d’assurance construction, Institut des Assurances de Lyon, 2011-2012
187 ELIASHBERG (C.), Risques et assurances de responsabilité civile, 5è ed, L’Argus de l’assurance, 2006, p. 249 ; PERIER (M.), Risques et assurances construction, L’Argus de l’assurance, 2012, p.335 ; KARILA (L.) et CHARBONNEAU (C.), Droit de la construction : responsabilités et assurances, 2è ed. Lexis Nexis, 2011, p. 570
188 Cass. 1è civ., 29 avri. 1997, n° 95-10.187, Bull. civ. I, n° 131, Gaz. Pal. 1997, II, p. 644 note Lesage F., RCA 1997, comm. n°238; GROUTEL (H.), L’objet de la garantie de l’assureur décennal, RCA 1998, chr. n° 4
189 Cass. 1è civ., 7 juill. 1993, n° 91-10.071, Bull. civ. 1993, I, n° 247, RGDA 1994, p. 172, note Bigot J.

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