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Section 1 : Le Rôle international des assureurs en matière environnementale

ADIAL

Les assureurs s’engent et s’inscrivent dans la démarche globale de reconnaissance de l’environnement au niveau des instances internationales ( A) et européennes (B)

A- Au niveau international

Les assureurs s’impliquent dans la recherche climatique et s’invitent dans le débat international sur le climat avec constance depuis le milieu des années 1990. Cela coïncide avec le début des grandes catastrophes climatiques comme les ouragans Andrew (155) et Opal(156) aux Etats-Unis, les tempêtes Daria et Vivian(157) en Europe, ou les séismes de Kobé au Japon(158) et Northbridge aux Etats-Unis(159). Alors lourdement impactés par la survenance de ces événements naturels dévastateurs, les assureurs ont souhaité prendre part aux débat et accords traitant de ces risques et comme par exemple leur intervention aux processus de négociations sur le climat que ce soit lors des sommets de Johannesburg, ou Rio, mais également dans les discussions protocolaires de Kyoto. De même, Le Llyod’s de Londres est l’un des acteurs du secteur les plus actifs(160), si bien que les assureurs estiment que réchauffement climatique est la « problématique n°1 de l’industrie assurantielle »(161).

En raison de leur grande connaissance du risque, cartographié, analysé et modélisé, les assureurs et réassureurs peuvent jouer le rôle de prescripteurs notamment dans le domaine réglementaire en droit de la construction et de l’urbanisme.162Les assureurs disposent d’informations et de connaissances suffisantes sur le sujet afin de devenir de puissants alliés pour les pouvoirs publics à l’échelle internationale.

Pour l’Association professionnelle de l’Assurance de Genève(163) le phénomène de « réchauffement climatique est irréversible » et les assureurs « doivent aider la recherche scientifique pour mieux comprendre où et quand les catastrophes liées à la météorologie vont frapper ». La réduction des risques catastrophiques d’origine naturelle et humaine fut l’un des thèmes de discussions lors du Sommet de Rio en 2012 portant sur le Développement Durable. Le G20 est à l’initiative de différents projets traitant du risque de catastrophes naturelles et proposant la mise en oeuvre d’un cadre météorologique destiné à aider les gouvernements le composant à concevoir des outils et méthodes performants visant à la réduction des risques climatiques. Un processus est engagé au niveau international afin de réduire les risques catastrophiques dans le cadre de l’action de Hyogo devant débuter en 2015(164). Ce processus vise à une meilleure gestion de l’exposition des biens et populations aux risques naturels.

Comme le rappelle l’Association Suisse de l’Assurance(165), l’ASA, l’amélioration des risques catastrophiques inhérents au réchauffement climatique induit des politiques d’urbanisation et d’aménagement du territoire, la prévention active des risques par les assureurs et assurés ainsi que par la solidarité nationale.
Dans la même lignée, le Bureau d’Assurance du Canada fait de l’adaptation aux changements climatique sa priorité et pour ce faire, il collabore au quotidien avec les gouvernements des différentes provinces du Canada. Il n’hésite pas à déclarer que l’action des assureurs doit aller de pair avec celle des pouvoirs publics, décideurs finaux(166).

Munich Ré, l’une des premières entreprises de réassurance à l’échelle mondiale s’intéresse au changement climatique depuis plus de trois décennies. Munich Ré s’est associée avec d’autres institutions financières(167) au sein du « Climate Group », think tank dont la vocation est de sensibiliser et d’engager les acteurs du monde de la Finance qu’ils soient prêteurs, Investisseurs, assureurs, réassureurs dans démarche globale de réduction des gaz à effet de serre. Le Climate Goup a, sur le sujet, une double position : il encourage la mise en place effective d’une politique de gestion de réduction de l’impact de ses membres sur le climat, ainsi qu’à la prise en considération du changement climatique dans la stratégie d’entreprise de ses membres afin qu’ils entreprennent les adaptations nécessaire au niveau opérationnel. Autrement dit, les assureurs doivent s’intéresser à un double enjeu de gouvernance interne de sous-estimation de leurs propres pertes liées au climat d’une part, tout autant que celle liées à leurs assurés d’autres part vu qu’elles leurs sont en partie transférées.

Les assureurs tentent d’un point de vue interne de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre évaluées à 12 mégatonnes de CO2 par an.(168) Ils tentent également d’inciter leurs assurés, qui sont in fine des clients à en faire de même et des pistes inédites en ce sens pourraient être mises en oeuvre.

La profession adhère au principe de pollueur-payeur édicté par l’article 16 de la Déclaration de Rio de 1992(169). Le principe impute le coût social et économique d’une pollution accidentelle voire graduelle à l’agent économique qui en est à l’origine, qu’il s’agisse d’une entreprise ou d’un particulier, même si ce dernier cas serait moins fréquent. L’assurance fonctionne sur un principe similaire qui veut que l’utilisateur soit le payeur, car le prix de l’assurance est une fonction croissante du risque. De ce principe, pourraient découler des solutions incitatives qui sont en cours de réflexion entre les pouvoirs publics et le monde de l’assurance. Il s’agirait de placer l’assureur au coeur d’un système vertueux de protection de l’environnent basé sur la mise en place de réductions tarifaires prolongées pour les entreprises ayant mis en place toutes les mesures nécessaires et disponibles afin de réduire leur empreinte sur le climat et ses évolutions. Des surprimes pourraient être appliquées aux acteurs ne respectant pas ces engagements dans la prise en compte des contraintes environnementales. Ce mécanisme serait abondé par les Etats intéressés par sa mise en oeuvre.

En attendant, les assureurs s’organisent et à l’instar de Munich Ré et du « Climate Group », les acteurs s’engagent dans la lutte contre le réchauffement climatique, au niveau international. Ainsi, la compagnie d’assurance française AXA a souscrit lors du sommet international de Rio sur le développement durable aux « Principes pour l’Assurance Responsable », programme lancé par les Nations-Unies et le PNUE afin d’intégrer les enjeux économiques dans le secteur de l’assurance. Ce qui induit qu’AXA, comme les autres signataires(170), est l’engagement à promouvoir les enjeux climatiques comme partie intégrante de la stratégie d’entreprises. Concrètement, il s’agit de traduire les engagements en actions concrètes respectant les principes du développement durable aussi bien dans l’entreprise et les gestes éco-citoyens que dans ses activités, en déployant une politique de diminution d’émission des gaz à effet de serre d’une part et en proposant des produits répondant à cette problématique d’autre part. Malheureusement, en décembre 2009, le sommet de Copenhague a repoussé les échéances principales à 2020. Mais il s’est terminé par un semi échec en aboutissant à un accord a minima et juridiquement non contraignant : il ne prolongera pas le Protocole de Kyoto. Le Sommet de Copenhague a été le théâtre des difficultés à la prise de positions communes des Etats en matière de coopération internationale et de politique climatique.

Par ailleurs, les assureurs n’hésitent plus à mettre en exergue le principe de précaution comme limité d’assurabilité, plus particulièrement quand un risque pourrait avoir des effets irréversibles sur l’environnement. Dans le domaine de la culture d’organismes génétiquement modifiés, Swiss Ré a répondu(171), en invoquant le respect du principe de précaution pour décliner une demande de couverture en matière d’OGM, le risque biotechnologique pourrait avoir des incidences non prévisibles sur l’environnement. L’anticipation de risques majeurs fait désormais partie intégrante d’un nouveau système décisionnel des assureurs qui font passer la prise de décision commerciale par l’analyse de l’impact sur l’environnement du risque. L’Union Européenne, très concernée et active sur les sujet de protection de l’environnement considère que l’invocation du principe de précaution est une décision prise (172) à la lumière des avancées scientifiques sur l’impact environnemental d’un risque. L’échelle européenne est un niveau de partenariat et de collaboration très étroite entre les assureurs et les organes politiques de l’Union.

B- Au niveau de l’Union Européenne

L’Union Européenne s’est intéressée aux risques environnementaux assez tôt(173) dans son histoire : dès le début des années 1970, elle a émis des recommandations visant à la prise en considération des problématiques environnementales au sein des pays de l’Union.

Outre la recherche climatique, l’Union européenne procède à des consultations visant à mettre en place et avec des objectifs de performance un service du suivi du changement climatique dans le cadre d’un programme européen plus large de surveillance de la Terre. Ce programme est énoncé dans le Règlement Européen n°911/2010 et du Conseil du 22 septembre 2010.

En parallèle, la Commission Européenne communique fréquemment sur le sujet de la gestion des risques catastrophiques au sein de l’Union Européenne. A ce titre, elle a émis notamment une communication très documentée et rappelle la volonté de l’Union Européenne de gérer au mieux les risques catastrophiques ainsi que de participer activement à la réduction de ces derniers dans les pays en voie de développement.

L’Union Européenne a récemment publié un Livre Vert(174) traitant du rôle des assurances contre les catastrophes d’origine naturelle et humaine, qui invite les professionnels de l’assurance à répondre et proposer leurs positions sur l’appréhension de ces risques au niveau européen. L’Association pour le Management des risques et des assurances dans l’entreprise (dite AMRAE), association française mais à dimension internationale, a apporté des précisions et propositions majeurs sur le sujet. L’AMRAE mène depuis plusieurs années des réflexions sur le sujet et a alors proposé à la Commission de classer les risques catastrophiques selon trois zones de risques sur la base des informations données, analysées et modélisées par les assureurs quant à la survenance d’évènements naturels sur l’espace géographique européen. Ces zones seraient les suivantes :

– faible intensité et forte probabilité,
– moyenne intensité, probabilité,
– zone supérieure dédiée aux catastrophes majeures

Les interactions entre assurances privées et solidarité nationale seraient liées en fonction de la typologie de la zone concernée. Par exemple, la zone basse pourrait être couverte par le seul recours à l’assurance privée et accompagnée par mesures préventives et des plans de préventions de long terme (inondations…) A l’inverse, la zone la plus exposée relèverait du niveau de compétence de l’Union Européenne sans préfinancement mais avec appels de fonds des Etats membres sur le même modèle que la Convention de Paris relative au risque nucléaire. La proposition est d’autant plus logique que les événements naturels et humains visés sont souvent transfrontaliers à l’image des tempêtes Xynthia et Klaus de 2011 et 2010 qui avaient touché principalement l’Allemagne, la Belgique et la France. La position de l’AMRAE démontre la volonté des professionnels du risk-management français et international – étant donné que la majorité de ses membres sont des groupes internationaux, de voir l’Union Européenne jouer un rôle plus actif en matière de risques majeurs. Le Comité Européen des Assurances, indique dans un rapport(175) que les acteurs du secteur peuvent offrir des pistes de réflexion ainsi que des réponses probantes en s’appuyant sur la modélisation de ces risques que les assureurs ont effectuée depuis plus de trente ans. Il serait alors intéressant de voir quelle politique centralisée au niveau européen dans le domaine de la gestion des risques climatiques pourrait être instaurée dans le respect des souverainetés nationales des Etats-membres de l’Union.

Au niveau européen comme international, le changement climatique a influencé la prise en considération de l’environnement qui tend à une reconnaissance de ce dernier comme sujet de droits, l’exemple français est pour cela très intéressant, l’environnement est légalement doté de droit et toute atteinte à ce dernier doit être réparé en raison de la loi de responsabilité environnementale de 2008, transposition en droit français d’une directive européenne du 21 avril 2004.
Avant de rentrer dans le détail de la reconnaissance de la responsabilité environnementale qui sera l’objet du prochain chapitre, il est opportun de se focaliser sur le dispositif français très innovant qui permet une meilleure indemnisation des victimes de catastrophes technologiques introduit à la suite de la catastrophe d’AZF à Toulouse le 21 Septembre 2001. (Section 2)

155 23 aout 1992
156 1er octobre 1995
157 Survenus respectivement le 25 janvier et le 25 février 1990.
158 17 janvier 1995 grand séisme de Hanshin de magnitude 7,2 sur l’échelle de Richter.
159 17 janvier 1994, magnitude de 6,6 sur l’échelle de Richter.
160 Lloyd’s, climate change, adapt or burst (360 risk project, Lloyd’s London 2006).
161 The greening of insurance 14 décembre 2012, www.sciencemag.org
162 Les assureurs ont participé au plan « digues » en France pris à la suite de la Tempête Xynthia.
163 Site www. SVV.ch
164 http://www.preventionweb.net/files/1217_HFAbrochureFrench.pdf
165 www.SVV.ch/fr/politique-et-juridique/dossiers/changement-climatique
166www.ibc.ca/fr/Natural_Disasters/ 2013.
167 Avec le Crédit Agricole, HSBC, Standard Chatered ans Swiss Ré notamment.
168 The greening of insurance 14 décembre 2012, www.sciencemag.org
169 Egalement rappelé au sein de la recommandation C(72)128 du 26 mai 1972 et dans le premier programme d’action du 22 novembre 1973 des communautés européennes. Il s’agit également d’une recommandation du Conseil des communautés européennes du 3 mars 1975
170 Comme Allianz notamment
171 De Monsanto
172 La commission des communautés européennes estime que l’invocation ou non du principe de précaution est une décision prise quant les informations scientifiques sont incomplètes, peu concluantes ou incertaines et lorsque les indices laissent à penser que les effets possibles sur la santé humaine, animale ou végétale pourraient être dangereux et incompatibles avec le niveau de protection choisi, selon le Livre Vert de la Commission Européenne d’Avril 2013.
173 Voir référence 40 sur le sujet.
174 Livre Vert de la Commission Européenne COM(2013)213 final en date du 16 avril 2013
175 Reducing the social and economic impact of climate change and natural catastrophes – insurance solutions and public private partnerships, 2007

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