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SECTION 1 : LE BENEFICE DE L’ASSURANCE-VIE SOUSCRITE AU BENEFICE DU CONJOINT

ADIAL

La question de la qualification du bénéfice de l’assurance-vie souscrite au profit du conjoint
étant réglée par l’article L. 132-16 du Code des assurances, il est nécessaire dans un premier temps
de déterminer son champ d’application par rapport aux nombreuses figures contractuelles de ce
qu’on appelle génériquement les assurances-vie.

La doctrine considère que le terme « assurance » de l’article L. 132-16 du Code des
assurances comprend plusieurs typologies de contrats. Rentrent ainsi dans le champ d’application
de cette disposition l’assurance en cas de décès souscrite par un époux sur sa tête au profit de son
conjoint ainsi que l’assurance en cas de vie souscrite par un conjoint au profit de son époux. Elle
comprend également le cas de l’assurance mixte, lorsque l’assuré décède avant l’échéance du
contrat, et les assurances réciproques ou sur deux têtes(8).

L’article L. 132-16 du Code des assurances applicable à ces variétés d’assurance pose le
principe du caractère propre du bénéfice (1) en laissant un droit à récompense à la communauté
en cas de primes manifestement exagérées (2).

1. LE CARACTERE PROPRE DU BENEFICE

La qualification de bien propre du bénéfice d’une assurance-vie au profit du conjoint est une
consécration législative de la jurisprudence antérieure. Cette dernière avait très tôt qualifié de bien
propre le bénéfice du contrat d’assurance-vie souscrit au profit du conjoint(9).
Pour Picard et Besson, «on essaya de la justifier par l’idée de libéralité, ce qui laissait la
femme exposée aux réclamations des héritiers et des créanciers de son mari ». Par ailleurs, « on
invoqua surtout l’ancien article 1401, 1° du code civil, qui permettait au donateur de décider que les
biens donnés ne tomberont pas en communauté, et ainsi le capital assuré était considéré comme
propre à la femme en vertu de la volonté présumée du mari(10) ».

La jurisprudence suivant cette argumentation assimilant l’assurance-vie à une donation,
justifiait également l’absence de récompenses par l’intention libérale du souscripteur(11). La seule
limite était que ces primes soient prélevées sur les revenus normaux du ménage et donc qu’elles
soient modiques et raisonnables(12).

2. UN DROIT A RECOMPENSE LIMITE AUX SEULES PRIMES MANIFESTEMENT EXAGEREES

La justification de la mise à l’écart des règles successorales la plus convaincante est à trouver
dans une mise en perspective avec la valeur du contrat d’assurance-vie. Pour Michel Grimaldi,
l’assurance-décès « n’est pas un instrument de transmission des richesses, mais un instrument de
protection contre la perte d’un soutien financier, effectif ou simplement virtuel(13) ». La loi spéciale du
Code des assurances s’explique par la prise en compte de l’objectif de prévoyance que poursuit
l’assurance-vie.

Ceci explique également la limite du deuxième alinéa de l’article L. 132-16, par renvoi à l’article
L. 132-13, qui prévoit une récompense à la communauté lorsque les primes ont été manifestement
excessives eu égard aux facultés du contractant. Dans ce cas, un objectif de transmission de
richesse se substitue à celui de protection du conjoint.

La jurisprudence a eu l’occasion de rappeler à l’occasion d’un arrêt de la première chambre
civile du 8 mars 2005 que l’application des dispositions relatives aux récompenses du Code civil
(art. 1437) et du Code des assurances (L. 132-16 al. 2) étaient alternative. Un pourvoi soutenait en
substance que « le premier justifierait qu’une récompense soit mise à la charge du souscripteur qui a
financé une dépense propre au moyen de deniers communs, tandis que le second fonderait
l’imputation d’une récompense à la charge du bénéficiaire en cas de primes excessives(14) ». La Cour de
cassation en rejetant le pourvoi consacre ici le particularisme et l’autonomie du droit des
assurances.

En cas d’excès manifeste la récompense doit être de l’intégralité des primes et non de la
portion de prime excessive. Comme le souligne Bernard Vareille, « une fois franchie la mesure
légale, c’est l’ensemble de l’opération qui change de nature ; de ce fait, la totalité de la dépense faite
doit être récompensée(15 )». Le caractère excessif doit s’apprécier au jour du versement des primes
eu égard aux facultés, l’âge et les situations patrimoniales et familiales du souscripteur.(16)
Selon certains auteurs, l’époux souscripteur aurait la faculté de dispenser son conjoint à
récompense des primes excessives sous réserve de consentement de l’autre conjoint(17).

La solution du droit positif qualifiant le bénéfice d’un contrat d’assurance-vie au profit du
conjoint de bien propre non soumis à récompense s’explique donc par la préservation de l’objectif
de prévoyance de la convention. Vue sous cet angle, la qualification du bénéfice au profit du
conjoint souscripteur est plus délicate, dès que le risque est d’aboutir à « des situations inéquitables
où l’un des conjoints viderait l’actif commun pour se constituer en toute impunité un actif propre,
spoliant les intérêts de son conjoint(18)(2.) ».

8 H. Leroy, L’assurance et le droit pécuniaire de la famille, L.G.D.J., 1985, n° 175
9 Cass. Civ., 23 mars 1877, D. 1877, 1, p. 241 ; Cass. Civ., 22 fév. 1893, D. 1893, 1, p. 401 ; CA Paris, 30 juin
1926, DP. 1927, 2, p.36
10 M. Picard et A. Besson, Les assurances terrestres, t. I, Le contrat d’assurance, L.G.D.J., 1982, n°524
11 Selon certains auteurs, l’intention libérale écarterait les récompenses . Cette analyse présuppose que
l’assurance-vie constitue une donation indirecte mais cela reste discutée. Sur cette question, L. Mayaux, Les
grandes questions du droit des assurances, L.G.D.J. 2011, q. n° 12, L’assurance-vie réalise-t-elle une libéralité ?
12 CA Paris, 8 mars 1911, DP 1912, 2, p. 322
13 M. Grimaldi, Réflexions sur l’assurance-vie et le droit patrimonial de la famille, Defrénois 1994, art. 35841, n°
22, p. 752
14 M. Robineau, Régime des récompenses dues par les époux dont l’un a souscrit un contrat d’assurance vie au
profit de l’autre, J.C.P.N. n° 1, 6 Janvier 2006, 1008
15 B. Vareille, v° Communauté légale (liquidation et partage), Souscription d’une assurance vie sur fonds
communs au bénéfice d’un tiers ou d’un époux lorsque les primes sont manifestement excessives, n° 343,
Répertoire de droit civil, Dalloz, 2011
16 Pour une analyse approfondie de l’appréciation de l’excès, supra part. 2, t. 1, ch. 1, sec. 1, 2., p.
17 J. Kullmann (dir.), Lamy assurances, éd. Lamy, n° 3989, p. 1834
18 J. Bigot, Clair-obscur sur l’assurance-vie ; De l’arrêt Pelletier à l’arrêt Praslicka, J.C.P.G. 1993, I, n° 3718, n° 18,

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