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INTRODUCTION GENERALE

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Le choix du régime de change est très important capitale pour le développement économique de tout pays. Ce choix a été depuis plusieurs décennies au centre des débats de politique économique. En outre, il fut au coeur de la macroéconomie internationale suite aux travaux devenus célèbres de Friedman (1953) et de Mundell (1960). En effet, pour Friedman (1953), le taux de change fixe est générateur de crises spéculatives et d’instabilité économique, tandis que les travaux de Mundell (1960) sont allés au-delà en soulignant le caractère important de la mobilité du capital. Pour ces auteurs, en cas de mobilité du capital, le système idéal est celui du taux de change fixe. Par contre, si le capital est immobile, il est préférable d’opter pour un régime de change flexible. En théorie, le type de régime de change n’a pas d’impact sur les valeurs d’équilibre à long terme des variables réelles, mais il est susceptible d’agir sur le processus d’ajustement de l’économie. Mundell (1963) a souligné que le taux de change réel devrait revenir à sa valeur d’équilibre de long terme après un choc économique, quel que soit le régime de change. Cependant, le processus dynamique de transition sera différent selon que le taux de change est fixe ou flexible.

Ainsi, les économistes s’interrogent sur la pertinence de chacun de ces régimes de change dans l’atteinte d’une croissance économique soutenue. Sur le plan empirique, l’impact du régime de change sur la croissance a fait l’objet de nombreuses études. Une importante contribution, à cet effet, est celle de Levy-Yeyati et Sturzenegger (2003). Ces derniers, à partir de données annuelles de 183 pays sur la période 1974-2000, ont montré que les pays à régimes de change flottant ont enregistré un taux de croissance annuel plus élevé de 0,78% par rapport aux autres pays. Lorsqu’on écarte les pays avancés, cette différence de croissance atteint même 1 %. D’autres travaux, par contre, révèlent que le régime de change n’affecte pas significativement la croissance. Ghosh et al. (1995) affinent et modifient la classification officielle des régimes de change pour évaluer les liens entre la politique de change et la croissance. Ils ne parviennent à isoler aucun impact systématique, substantiel et robuste du régime de change sur le taux de croissance moyen du PIB réel (Yougbaré, 2009).

Sur le plan international, la plupart des pays ont eu le choix d’adopter le régime de change le mieux adapté à leur besoin sur la base de critères qui leur sont propres. En ce qui concerne les pays de l’Afrique de l’Ouest, ils l’ont hérité de la colonisation et beaucoup d’entre eux l’ont maintenu jusqu’à présent, tel est le cas des pays de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine, membres de la zone Franc. Considérant la CEDEAO(1) en particulier, la différence
de performance selon les régimes est bien perceptible. En effet, cette zone est constituée des trois grandes catégories de régime de change, le fixe, le flexible et l’intermédiaire. La coexistence de ces différents régimes de change sur un espace réduit comme la CEDEAO ne favorise pas les échanges commerciaux entre les pays. Le volume des échanges intracommunautaires se caractérise depuis toujours par sa faiblesse extrême. En effet, sur la période 2002-2008, le commerce intra-communautaire n’a représenté qu’environ 10 % du commerce total avec les pays-tiers (AMAO, 2010)(2). La part moyenne des exportations intracommunautaires était de 8,84 % des exportations totales tandis que celle des importations intra-communautaires était de 9,27 % des importations totales. Cette contre performance au niveau des échanges entre pays membres s’explique par la structure des économies, mais aussi par la mosaïque de monnaies dont disposent les pays : Naira du Nigéria, Cedi du Ghana, Léone de la Sierra Léone, dollar libérien, Dalasi de la Gambie, Escudo Cap verdien, Franc Guinéen, du FCFA des huit (08) pays de l’UEMOA. En dehors du FCFA et de l’Escudo Cap Verdien arrimés à l’Euro, ce ne sont là que des monnaies limitées aux seules transactions domestiques, ce qui n’est pas de nature à faciliter les échanges commerciaux à l’intérieur de la sous-région. Les fluctuations des taux de change de ces dernières peuvent réduire les marges bénéficiaires en l’espace de quelques heures. Ce risque de change est souvent combiné avec un manque de transparence des prix car les vendeurs et les acheteurs échangent habituellement dans des monnaies différentes, ce qui augmente les coûts de transaction.

Dans la CEDEAO, en plus de ces différentes monnaies et régimes de change, on constate une instabilité du taux de croissance économique. En effet, le taux de croissance économique de la zone, qui était de 3,7 % en 2002, atteint 5,7 % en 2005 avant de baisser à 4,9 % en 2009 (AMAO, 2010). L’espace a réalisé un taux de croissance moyen de l’ordre de 5% au cours de la dernière décennie. Les pays comme le Ghana, la Sierra Léone et le Nigeria ont les forts taux de croissance moyens dans la zone qui avoisinent les 7 % tandis que ceux de l’UEMOA ont enregistré un taux de croissance moyen inferieur à 7 % (CEDEAO, 2010), ce qui ne permet pas d’atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Le fait que les échanges de la région soient majoritairement hors zone CEDEAO entraine la vulnérabilité de l’économie aux chocs exogènes. Au regard de ce constat, l’impact des régimes de change sur la croissance économique de la CEDEAO apparaît comme un problème majeur du développement économique de la zone.

L’une des sources importantes du déséquilibre macroéconomique dans les différents pays de la CEDEAO est due au désalignement du taux de change réel qui montre une appréciation ces dernières années, ce qui pourrait entraîner une baisse de l’efficience économique, une mauvaise allocation des ressources, une sous-utilisation du capital et une perte de compétitivité-prix. Sur le plan empirique, on peut citer Coudert et Coharde (2008) qui, ont procédé à des tests de comparaison des moyennes du mésalignement entre régimes de change de facto dans un échantillon de pays émergents et en développement de 1974 à 2004. Ils trouvent que le taux de change réel est relativement plus surévalué dans les systèmes de change fixes. À l’inverse, une forte sous-évaluation apparaît dans les régimes de change flexibles (Yougbaré, 2009). En outre, dans leur étude de la compétitivité manufacturière des pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, Nabli et al (2004) relèvent que de 1974 à 1999, les cas de surévaluation réelle atteignent 88% des observations dans les systèmes de change fixes et 76 % dans les systèmes plus flexibles. Ces travaux montrent que le degré de mésalignement du taux de change réel diffère selon les systèmes de change. Dans ce contexte, selon Kiema et al (2011), le taux de change de la zone UEMOA est surévalué de 0,7 à 9 % en 2009. Pour ces auteurs, à terme, le véritable défi ne réside pas dans les options d’ajustement externe mais plutôt dans l’optimalité du régime de change.

Ces constats montrent l’importance du choix du régime de change et de la création d’une monnaie unique par les pays de la zone, dont l’effet compétitif du marché unique sera considérablement renforcé, au grand profit de l’ensemble de la communauté car les prix des marchandises et des services seront exprimés dans une seule et même monnaie. Déjà, les pays de l’UEMOA partagent une monnaie unique depuis près de 60 années. Les autres pays de la CEDEAO se sont engagés à harmoniser leurs politiques monétaires et de change durant une période dite de transition grâce à la mise en œuvre du Programme de Coopération Monétaire.

Pour cette raison, ils se sont regroupés au sein d’une même entité appelée la Zone Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (ZMAO). Ensuite, à partir de 2020, la ZMAO et l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) devraient fusionner leurs deux zones monétaires en vue de former une zone monétaire unique à l’échelle de la CEDEAO avec l’adoption d’une nouvelle monnaie. En attendant la création de cette union monétaire, la prise en compte de l’impact des régimes de change sur la croissance économique de la CEDEAO apparaît primordiale dans cette dynamique d’intégration. Il est dès lors important de se poser la question suivante : quel est l’impact des régimes de change adoptés par les pays de la CEDEAO sur leur croissance économique ?

L’importance de cette étude part du fait que le taux de change constitue un instrument d’échange important entre un pays et le reste du monde tant sur le marché des biens et services que sur celui des actifs financiers. Ainsi, une politique de change non appropriée risque de compromettre la croissance économique. Le choix du régime de change doit être réalisé avec beaucoup de précaution en tenant compte de certaines caractéristiques macroéconomiques et financières.

Plus spécifiquement, on peut se poser les questions suivantes : Quel régime de change a un effet plus important sur la croissance dans les pays de la CEDEAO ? Quel est l’impact du mésalignement du taux de change réel sur la croissance économique des pays de la CEDEAO ?

Il existe une littérature riche consacrée à l’étude de la future monnaie unique dans la zone CEDEAO. Les études se sont intéressés notamment : aux bénéfices tirés de la monnaie unique au regard des critères d’une zone monétaire ; au commerce et à l’intégration financière ; à la nature des chocs (régionaux ou idiosyncratiques) qui frappent les pays membres (Bénassy-Quéré et Coupet, 2005) ; à la coordination des politiques macroéconomiques au regard d’éventuels comportements individualistes (passager clandestin, aléa moral) de certains États et à la convergence nominale. La présente étude, quant à elle, s’intéresse à la contribution des différents régimes à la croissance économique.

L’objectif général de l’étude est d’analyser les impacts du choix du régime de change sur la croissance économique de la CEDEAO. Plus spécifiquement, il s’agit d’analyser l’impact des différents régimes de change sur la croissance économique des pays de la CEDEAO et d’analyser l’impact du désalignement du taux de change réel sur la croissance économique de la CEDEAO. Pour la réalisation de ces objectifs, les hypothèses suivantes sont testées :

– L’effet positif du régime de change fixe sur la croissance surpasse celui du régime de change flexible dans la zone CEDEAO.
– Le degré de désalignement affecte négativement la croissance économique de la CEDEAO.

La suite de l’étude est structurée en quatre chapitres. Le premier chapitre expose la revue de littérature sur la typologie des régimes de change et leur impact sur la croissance économique. Le second chapitre fait une présentation générale de l’économie de la CEDEAO. Dans le troisième chapitre il est question de l’approche méthodologique ayant conduit au choix du modèle. Le dernier chapitre porte sur l’analyse empirique des effets des régimes de change sur la croissance économique de la CEDEAO.

1 La CEDEAO est constituée de 15 pays dont le Bénin, le Burkina Faso, le Cap Vert, la Côte d’Ivoire, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée Bissau, le Liberia, le Mali, le Niger, le Nigeria, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo
2 Agence Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (www.amao.org)

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