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INTRODUCTION GENERALE

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Les récentes mutations intervenues dans les relations économiques
internationales se sont traduites par l’émergence du courant de la mondialisation
croissante des économies et de la polarisation des blocs régionaux. Ces deux
courants sont soumis à une forte instabilité des taux de change (TC) à travers le
monde. Cette distorsion du TC se traduit par des fluctuations de long terme de
grandes amplitudes qui affectent les échanges internationaux et les performances
des économies.

Outre les effets pervers à court terme du TC qualifié de volatilité, ses
distorsions de long terme, sont souvent à l’origine des perturbations beaucoup plus
importantes pour l’économie [Stemitsiotis, (1992)]. La distorsion du TC se caractérise
ainsi par un écart soutenu et durable du taux de change réel ( TCR) courant par
rapport à son niveau d’équilibre de long terme qui, est censé garantir à la fois
l’équilibre interne et externe [Borwski et Couharde ,(2000)]. Ces déséquilibres
expriment des surévaluations ou des sous-évaluations du TCR et donc des pertes
ou des gains de compétitivité. Ces distorsions génèrent, toutes choses égales par
ailleurs, un rythme d’inflation ou de déflation supérieure à celui obtenu à TCR
constant. De ce fait, la distorsion du TCR constitue ainsi un problème important pour
les gestionnaires de politique économique, dans la gestion optimale de leur politique
de change. Ainsi, à l’heure de l’avènement des crises récurrentes du système
financier international et des débats sur la nouvelle architecture du système
monétaire international, des voix s’élèvent pour préconiser davantage de stabilité
dans les TC. Les fluctuations du TC sont souvent excessives, toutefois les stabiliser
autour d’un niveau de référence pose la question de leur niveau d’équilibre [Coudert,
(1999)]. La problématique liée aux déterminants du TCR, son évolution et sa position
par rapport à l’équilibre deviennent ainsi récurrente et occupent une place majeure
tant dans les débats académiques que politiques. Le regain d’intérêt conféré à ces
débats est dû à son pouvoir explicatif du niveau de compétitivité et surtout de son
rôle d’ajustement(1) économique [Yamb, (2007)].

En revanche, même si les opinions sur l’ampleur des déséquilibres du TCR
dans les pays de la zone franc CFA ne sont pas consensuelles, le cas de ces pays
illustre un débat récurrent et ancien dans la littérature économique [Abdib et
Tsangarides, (2006)]. Ce débat porte sur le rôle que joue le régime de change fixe
dans les déséquilibres du TCR. Catao et Solomou, (2005) montrent que les
distorsions du TCR, sont plus accentuées dans un régime de change fixe. C’est la
pertinence de ces analyses et au regard des spécificités qui caractérisent certains
pays de l’Afrique subsaharienne dans le processus de leur intégration économique,
qui nous a amené à porter la présente réflexion sur le thème « Taux de change
réel d’équilibre et évolution de ses fondamentaux dans l’UEMOA ».

Toutefois, il est à noter que le concept du taux de change réel d’équilibre
(TCRE) est sujet de controverse dans la littérature économique abordant le choix du
régime de change optimal. Alors que Frenkel (1999) refuse même l’idée de son
existence, Mundell (2000) affirme le contraire sans pour autant l’identifie avec
précision. Les tentatives de contournements du concept ont engendré deux
principales conclusions divergentes. Frenkel suppose qu’il n’existe pas un régime de
change optimal pour tous les pays et à tous les temps. Par contre, pour Williamson
(1994) et Joly (1998) ils considèrent que le régime de change optimal ne peut être
que le taux de change réel d’équilibre qui minimise la distorsion du TC (voir rendre le
mésalignement nul). Du fait de la pertinence de cette dernière approche, la
détermination du TCRE devient ainsi, le socle des mesures du mesalignement du TC
dans la littérature économique. Il est déterminé par les fondamentaux du TCR
notamment les variables macroéconomiques affectant l’équilibre interne et externe.

Par ailleurs, si la distorsion du TC devient problématique, c’est au regard de son
impact sur la compétitivité de l’économie et aussi des grands déséquilibres qu’elle
engendre au sein de celle-ci. L’incidence la plus plausible de la distorsion du TC,
c’est qu’elle génère une forte variation de la demande globale notamment la
consommation interne. En effet, lorsque la consommation devient élevée pendant
une période de surévaluation, on aboutit à des déficits de la balance commerciale. Si
la dévaluation intervient afin d’assurer le rééquilibrage (cas de la zone Franc CFA en
Janvier 1994), il se produit ainsi une contraction brusque de la consommation qui est
mal acceptée au regard des enseignements issus de la théorie du « cycle de vie » de
Modiaglini (1963). Dans ce schéma, l’économie est caractérisée par une alternance
de phases d’expansion et d’austérité. Ceci, induit de profondes mutations dans la
structure optimale de la consommation voire de la demande globale et qui affaiblit
ainsi la création de la richesse nationale.

En outre, Kaminsky et Reinhart, (1997) repèrent quatre coûts primordiaux qui
sont à mettre à l’actif du mésalignement du TCR. D’abord, une surévaluation réelle
persistante provoque une perte de compétitivité internationale, un déficit de compte
courant, un drainage des réserves de change. Une telle distorsion du TCR constitue
ainsi un indicateur d’alerte avancé pour les crises de change ; avec pour corollaire un
émoussement des performances macroéconomiques d’une économie.

Il ressort de cette analyse que, les évolutions contrastées des TCR ; dictées
par la dynamique de ses fondamentaux posent ainsi entre autres problèmes d’une
part celui des déterminants de l’instabilité des TCR et d’autre part, celui de
l’explication de la convergence à l’équilibre du TCR suite à des chocs exogènes
[Yamb, (2007)]. Il en résulte que la distorsion qu’elle soit positive ou négative reflète
une sous optimalité de la politique de change, coûteuse en termes : d’équilibre
extérieur, d’allocation de ressources productives et peut mener jusqu’à la crise (crise
asiatique des années 90).

Pour rappel, la théorie du TCR s’appréhende autour de deux approches ;
notamment l’approche de la parité du pouvoir d’achat (PPA) et celui du commerce
international. Dans la première approche, il se définit comme étant le nombre d’unité
de monnaie étrangère pour une unité de monnaie nationale ; corrigé du différentiel
entre son niveau de prix et celui de ses partenaires. Il s’apparente à un indicateur de
compétitivité externe. Par contre l’approche retenue dans le commerce international,
s’applique aux petits pays « preneurs de prix » ; notamment les pays en
développement (PED). Selon cette approche, le TCR est le rapport des prix
domestiques des biens exposés et des biens protégés. Il reflète la compétitivité
interne. Une augmentation du prix relatif des biens échangeables correspond à une
dépréciation du TCR interne. Une telle mesure est la plus appropriée et la plus
couramment utilisée dans la littérature concernant les PED [Hinkle et Montiel,
(1999)]. C’est aussi celle que nous retenons dans cette étude.

De ce fait, lorsqu’on procède à un examen des indicateurs liés aux évolutions
du TCR et de ses fondamentaux, la récurrence de la distorsion de ce taux semble se
confirmer ; ce qui affecte significativement lesdits fondamentaux. En effet, selon une
étude menée par Djoufelkit (2006, 2007), le TCR(2) de l’UEMOA s’est apprécié de
13.4% entre 1994 et 2004 (pour l’ensemble de la zone Franc CFA, son appréciation
est de 12.7%) par rapport à son niveau post dévaluation de 1994. De 2005 à 2006, il
s’est déprécié de -0.2% pour l’UEMOA (-0.6% pour la zone Franc CFA). Au total,
entre 1994 et 2006, la zone UEMOA a enregistré une appréciation du TCR
correspondant ainsi à une perte de compétitivité de l’ordre de 22% (21% pour la
zone Franc CFA). Toutefois, on note que l’UEMOA a amorcé un léger enregistrement
du gain de compétitivité en 2006, avec la dépréciation de l’Euro face au Dollar. Outre
la perte (ou le gain) de compétitivité induite à l’économie de l’UEMOA à travers ces
phases de distorsions du TCR qualifié parfois de mésalignements, l’appréciation (ou
la dépréciation) de ce taux, pourrait affecter les grands équilibres macroéconomiques
de l’union de manière significative. Ce faisant, lesdites distorsions constatées
influencent à coup sûr les fondamentaux du TCR à grandes ampleurs différenciées.

Ceci mérite d’être évalué à partir d’une estimation du TCR d’équilibre lequel
constitue le cadre théorique de cette étude. A cet égard, la problématique de cette
étude s’articule sur la question centrale suivante : quel est l’effet de l’évolution des
fondamentaux du TCR sur son niveau d’équilibre ?

Il est à noter que, la mesure de la distorsion ne peut se faire d’une part, que
par une parfaite connaissance des déterminants fondamentaux du TCR lesquels
agissent comme des forces de rappel qui ramènent ce taux vers des valeurs dites
d’équilibre et d’autre part, par l’appréhension des effets de la dynamique de ses
fondamentaux sur le mésalignement du TCR. Ce faisant, cette question de
recherche serait abordée à travers les questions spécifiques que voici :

– Quels sont les facteurs explicatifs du taux de change réel ?
– Quels sont les déterminants du taux de change réel d’équilibre?
– Quel est l’incidence de l’évolution des fondamentaux du TCR sur sa distorsion?

S’il est vrai que les études sur les déterminants du TCR au sein de la zone Franc
CFA sont relativement abondantes et riches dans la littérature économique, celles
visant à appréhender la contribution de la dynamique des fondamentaux du TCR sur
son mésalignement, demeurent par ailleurs occultées au sein de l’UEMOA. Ainsi,
les facteurs de ce mésalignement seront à analyser parmi les variables qui tendent à
dévier chacun de ses fondamentaux du trajectoire d’équilibre du TCR courant. La
présente étude vise à lever l’équivoque en la matière.

Ainsi donc, l’objectif principal de cette étude est d‘évaluer la relation empirique
entre le taux de change réel d’équilibre et l’évolution de ses fondamentaux au sein
de l’UEMOA. De façon spécifique, il est apparu nécessaire :

· d’estimer les déterminants fondamentaux du taux de change réel ;
· d’évaluer le niveau d’équilibre du taux de change réel;
· d’estimer l’incidence de la dynamique des fondamentaux du TCR sur sa
distorsion.

Les estimations qui seront faites nous permettront de mettre en exergue
lesquels des fondamentaux du TCR qui contribuent à la persistance de sa distorsion.

Par ailleurs, il sera ainsi possible de vérifier à ce niveau et dans une certaine
mesure, si le résultat obtenu par Hoarau (2006) selon lequel les changes fixes
seraient propices à la surévaluation réelle alors que les changes flexibles
favoriseraient plutôt la sous-évaluation réelle, même si dans un cas comme dans
l’autre, les désajustements restent modérés ; peut être validé dans l’UEMOA. En
outre, cette étude essayera de focaliser l’attention des décideurs de politique
économique au sein de l’UEMOA sur :

- la nécessité de constituer une batterie d’indicateur d’alerte avancé pour les
crises de change ;
- les variables macroéconomiques pertinentes qui accentuent la distorsion du
TCR ; ceci permettra d’asseoir les bases d’un renforcement de la compétitivité
des économies.

En terme méthodologique, nous avons adopté une approche économétrique
à cette fin. Le modèle du taux de change réel naturel (NATREX) et la méthode de
filtre d’ Hodrick-Prescott ont été retenus pour l’objectif de cette étude. Pour mener
cette analyse, les estimations sont réalisées aux moyens des estimateurs
« between » et « within » sur données de panel pour les différents modèles.

Eu égard à tout ce qui précède, le présent mémoire est subdivisé en trois
chapitres. La théorie du taux de change réel d’équilibre est explicitée dans le premier
chapitre. Par contre, dans le second chapitre, nous avons procédé à un examen de
la politique de fixité du taux de change dans l’UEMOA. Enfin, l’évaluation empirique
du taux de change réel d’équilibre et de l’évolution de ses fondamentaux à travers
l’estimation économétrique a été l’objet du troisième chapitre.

1 L’estimation du niveau d’équilibre du TCR permet de déterminer la dévaluation nécessaire pour
qu’un pays qui connaît une crise de la balance des paiements, retrouve un niveau de son solde de la
balance courante soutenable.
2 Cette étude a considéré le taux de change effectif réel qui se définit comme le TCN corrigé ou
pondéré par la structure du commerce extérieur d’un pays. Pour les raisons de simplification, nous
nous en tenons au TCR par rapport du dollar USA. Les raisons du choix de cet indicateur seront
présentées dans la partie méthodologique (confère chapitre3).

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