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Introduction

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Migrer est un phénomène social complexe autant pour les causes que pour les
conséquences que cela implique. Les migrations ont formé et transformé les sociétés
contemporaines en les rendant plurielles, c’est-à-dire qu’actuellement de nombreux espaces
urbains sont composés d’habitants originaires de pays différents.

L’Espagne a été pendant longtemps un pays d’émigration. Mais depuis plus de vingt
ans, il est devenu un pays d’immigration. Ce changement relativement récent s’est accru suite
aux différentes vagues migratoires et n’a pas permis aux administrations publiques de se
préparer à accueillir et intégrer les immigrés.

Deux particularités propres à ce pays nous intéressent car elles divergent de la
situation française. Tout d’abord, l’Espagne est un pays de propriétaires, cela concerne plus de
80% de sa population. Ensuite, comme nous venons de le souligner, c’est un territoire
d’immigration relativement nouveau. En effet, en 2000, les immigrés représentaient 2,1% de
la population totale alors qu’en 2010 ils étaient 12,2% selon l’Institut Nationale de Statistique
(INE).

Notre étude traite des conséquences de la multiculturalité dans une ville, ici Séville.
Ayant eu diverses expériences en Espagne et particulièrement à Séville (études, emploi,
loisirs), le choix de cette ville pour aborder notre sujet s’est rapidement imposé à nous.

Par ailleurs, suite à de multiples lectures, recherches et au visionnage d’un reportage télévisé de la
chaîne Canal Sur : Inmigrantes en el barrio sevillano de « El Cerezo » (Immigrés dans le
quartier sévillan El Cerezo) du 29 septembre 2010 sur les problèmes de cohabitation entre
autochtones et immigrés dans le quartier El Cerezo; cet espace est apparu comme étant au
coeur de notre recherche. De là s’est confirmé l’intérêt que nous portons aux minorités et à leur
intégration dans un espace urbain, ici El Cerezo. Certaines de ses caractéristiques en font un
objet d’étude intéressant. Tout d’abord, il est situé au coeur de la Macarena, district où se
trouve le plus grand nombre d’immigrés à Séville. Ensuite, ce quartier est celui qui dénombre
le plus grand chiffre d’habitants d’origines étrangères de façon relative. Enfin, c’est la zone où
il y a le plus de commerces au mètre carré.

Se concentrer sur cet espace pour analyser la question de l’articulation ségrégationmulticulturalité
permet d’aborder les quartiers multiculturels depuis un cas concret et de se
positionner dans le processus de recomposition sociale du district de la Macarena durant les
dix dernières années.

L’étude de cas prend tout son sens par le biais de la diversité ethnique et des évolutions
récentes dans El Cerezo. “On réaffirme là le lieu comme une relation d’expériences entre le
sujet et le focus, un lieu en constante évolution, de par ses « effets multiples » et son
fonctionnement particulier, il doit rester au centre des recherches géographiques”
(ROZENHOLC, 2010, p.26).

Concrètement, l’apport de cette recherche se trouve principalement dans l’échelle
choisie, celle d’un quartier : El Cerezo, se trouvant au Nord du centre ancien de la ville. En
cela, elle se démarque des recherches effectuées récemment sur les thèmes de la ségrégation
et du “vivre ensemble” dans des espaces multiculturels tels les travaux des chercheurs et
professeurs Maria Angles Huete Garcia (tutrice de stage) et Francisco Jose Torres Gutierrez.

En effet, ces deux personnes ont effectué avec des équipes de chercheurs, des travaux sur des
thèmes similaires mais pour des destinataires différents (l’un pour la mairie de Séville et
l’autre pour la communauté autonome d’Andalousie). La première travaille dans le
département de sociologie et le second dans celui de géographie de la faculté Pablo de
Olavide à Séville. Ils ont permis de restructurer notre étude et de mettre en avant son aspect
innovant. C’est pourquoi ce sont des ressources incontournables à la rédaction de ce mémoire.

Or, leurs recherches s’inscrivent dans des échelles géographiques macroscopiques en étudiant
des phénomènes de ségrégation et de multiculturalité de manière générale et non
microscopique dans le sens d’une étude de cas en particulier comme il est question dans notre
sujet.

Comme nous le verrons, s’installer dans un quartier se fait par choix ou par contrainte,
suivant des critères personnels (coût, amis, famille, proches, situation géographique, etc.).

Une fois installée, chaque personne va s’approprier l’espace dans lequel elle vit, l’appartement,
l’immeuble, les rues et les espaces publics. Accepter « l’autre » est souvent difficile, c’est ce
que nous verrons dans le quartier El Cerezo. Afin de rendre compte de ce qui est mis en place
pour développer le “vivre ensemble” au sein de ce quartier, nous nous attacherons aux actions
et projets des acteurs qui agissent au niveau local (mairie, région, associations, etc.) en lien
avec les habitants. Nous partons ici du postulat que dans le quartier étudié, les immigrés sont
victimes de discrimination et de ségrégation. Cela nous amène à poser l’hypothèse suivante:

La mise en place de projets d’interactions multiculturelles entre autochtones et
immigrés permet de faire face aux discriminations.

En partant de ces idées préconçues, nous avons pu élaborer notre étude en nous
intéressant particulièrement aux associations humanitaires et politiques publiques. Ceci nous a
ensuite mené à un questionnement principal qui a guidé nos recherches et qui nous amènera à
valider une problématique par la suite. Cette question est:

De quelle façon les politiques publiques et les acteurs associatifs luttent-ils contre le
phénomène de ségrégation et qu’est-ce que cela implique de vivre dans un espace
multiculturel?

Nous chercherons à savoir si les immigrés sont intégrés parmi les autochtones ou s’ils
sont mis à l’écart. Voilà pourquoi cette étude a pour objectif de s’inscrire dans l’analyse des
phénomènes de ségrégation et de connaître les politiques publiques et projets associatifs qui
tentent de créer du « vivre ensemble ».

En conséquence, l’étude de terrain effectuée en mars 2011 a été le moyen de
confronter la réalité à notre hypothèse et de mettre à l’épreuve nos outils conceptuels(1).

Durant cette période, nous avons pu rencontrer les acteurs intervenant sur les questions de
cohabitation dans le quartier et pour la ville de Séville tels que Teresa Maqueda, qui est
responsable de la délégation des relations institutionnelles relatives à l’immigration ;
Mercedes, qui est coordinatrice de l’Association Commission Catholique Espagnole de
Migration (ACCEM) ou encore Ousseyma, coordinateur de la fondation Sevilla Acoge. Ces
deux Organisations Non Gouvernementales (ONG) interviennent sur les problématiques liées
au « vivre ensemble » tout comme la fondation Cepaim qui illustrera également notre
recherche.

C’est pourquoi, durant ce mois passé à Séville, nous nous sommes rendus quasiment chaque
jour dans le quartier El Cerezo pour observer ses fonctionnements et voir quelles sont les
interactions entre habitants. Cette phase d’observation fût nécessaire afin de s’immerger dans
cet espace, de prendre des habitudes et d’être visible. En l’explorant, il fût possible de se
rendre compte des pratiques sociales (convivialité, exclusion, etc.) et spatiales (ex: lieux de
regroupements, d’interactions) propres à ce quartier. Cela a permis d’élaborer une carte du
quartier où sont répertoriés les lieux de regroupements ethniques.

De surcroît, fréquenter différents commerces du quartier et y interroger les employés
fût aussi enrichissant dans le sens où cela a été l’occasion d’obtenir des témoignages sur les
évolutions du quartier, particulièrement depuis les années 2000 ainsi que de percevoir les
discriminations entre les habitants. Par ailleurs, rencontrer les gens qui vivent ou interviennent
dans ce quartier aura permis de leur proposer de répondre à notre questionnaire et parfois de
continuer avec des questions plus approfondies. Il n’en reste pas moins qu’aborder des
individus n’est pas une chose facile, nous avons été confrontés à différents refus de personnes
ne voulant pas remplir de questionnaire ni discuter de la diversité culturelle présente dans le
quartier. Les réactions furent diverses en fonction du groupe ethnique des personnes
interrogées ce qui permet d’effectuer une typologie. Nous verrons les limites de notre terrain
au cours de notre développement.

Enfin, la prise de nombreuses photographies a également permis d’illustrer les sujets
évoqués dans notre recherche. Elles apparaissent comme les révélateurs des changements et
des recompositions urbaines du quartier. Un de ces changements pourrait être l’apparition, il y
a deux ans, d’un local partagé par des membres de l’association Acoge et d’autres de la
Cepaim sur la place principale du quartier El Cerezo (place Punta Umbria). Les deux
associations ont des projets similaires, particulièrement en ce qui concerne l’immigration
(intégration, respect des droits, accès à la citoyenneté, etc.). Ce lieu est d’un grand intérêt
puisqu’il est révélateur d’un besoin en terme de médiation culturelle mais également au niveau
de l’accompagnement réalisé par les membres de ces associations auprès des habitants du
quartier (ex: aide pour constituer des papiers, trouver un travail, régler les conflits).

Il fût possible d’interroger trois membres de l’association Acoge (Gabi, Sonia et Ousseynou) et un
membre de Cepaim (Demba) ce qui nous a permis de cerner leurs actions et intentions au
niveau d’El Cerezo mais également au niveau du district de la Macarena dont il fait partie.

De plus, ayant effectué ce terrain en mars 2011, deux mois avant les élections municipales à
Séville, il a été possible d’ouvrir notre recherche à une dimension politique concernant
l’utilisation de la multiculturalité dans le discours électoral.

Nous allons à présent voir l’évolution de l’immigration à Séville, les conséquences des
arrivées récentes et les propositions des politiques publiques. Pour cela nous utiliserons
principalement les statistiques de l’INE (Instituto Nacional de Estadistica) afin de connaître la
population habitant à Séville et plus particulièrement dans le district de la Macarena (nombre,
nationalités et évolutions). Nonobstant, cela reste une source insuffisante puisque ces chiffres
ne concernent que les personnes inscrites en mairie “empadronados”.

1 Nous avons fait le choix de développer l’argumentaire théorique au fur et à mesure de notre composition.

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