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II.2 Efficacité du contrôle des relations Actionnaires-Dirigeants.

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La théorie de l’agence (TA) permet de comprendre dans une certaine mesure le recours aux privatisations. Celle-ci se propose en effet de décrire les relations entre les principaux actionnaires de la firme privatisée et leurs mandataires dans un contexte d’asymétrie d’information. Selon cette théorie, les divergences d’intérêts et l’asymétrie d’information existant entre ces deux acteurs (c’est-à-dire le mandant et le mandataire) engendrent bien souvent des coûts (qualifiés de coûts d’agence) comme ceux liés aux dépenses de surveillance et d’incitation etc.

La relation d’agence peut être définie comme un contrat par lequel une (ou plusieurs) personne (le principal) engage une autre personne (l’agent) pour exécuter en son nom une tâche quelconque qui implique une délégation d’un certain pouvoir de décision à l’agent (11).

Dans le cas des entreprises publiques, les gestionnaires jouent un rôle qui leur a été mandaté par l’Etat considéré comme le propriétaire et l’actionnaire principal de l’entreprise publique. Mais puisque ce sont les gestionnaires qui y prennent les décisions pertinentes, ce dernier (l’Etat) n’a pas le contrôle de l’entreprise. Dans cette relation, les intérêts du mandataire (gestionnaires) et ceux du mandant (l’Etat) ne concordent pas, ce qui engendre inévitablement des coûts de surveillance (monitoring costs) qui résultent de la surveillance du comportement du mandataire (on pourrait citer par exemple les coûts engendrés par les vérifications comptables et les coûts d’établissement des états financiers).

Ces pertes résiduelles, engendrées par ces divers coûts, sont supportées par l’Etat et causées par des gestionnaires publiques qui agissent dans leurs propres intérêts. En réalité, l’argumentation de Jensen et Meckling (1976) suppose implicitement que la séparation de la structure de propriété, des fonctions managériales engendre inéluctablement des conflits d’intérêts entre propriétaires (actionnaires) et dirigeants, et donne lieu à des coûts d’agence. C’est donc dire que ce conflit entre actionnaires et dirigeants peut se retrouver autant au niveau des entreprises publiques que des entreprises privatisées du moins pour celles où ce n’est pas le principal actionnaire qui est le dirigeant. Les coûts d’agence sont peut-être moins importants dans le cas des firmes privatisées que des firmes publiques mais ils existent quand même dans ces firmes privatisées et, si le contrôle des relations entre actionnaires et dirigeants des firmes privatisées n’est pas efficace, les coûts qui en résulteraient pourraient inhiber la rentabilité de ces firmes.

Ainsi, les auteurs de la TA et ceux du gouvernement d’entreprise (Charreaux 1997 ; Shleifer et Vishny, 1997) supposent que la structure de propriété peut être un moyen de contrôle efficace de la gestion des dirigeants, car elle permet de réunir, lorsque certaines conditions sont présentes, les bases d’un système de contrôle efficient à savoir une incitation des contrôleurs à remplir leur fonction, ainsi qu’un moindre coût du contrôle. La TA présume ainsi que la performance des firmes est le fruit de leurs choix organisationnels. La firme est selon elle représentée par un nœud de contrats dont les dirigeants et les actionnaires sont les acteurs principaux.

L’organisation générale de ces contrats et la gestion des conflits entre les différents partenaires déterminent l’efficacité de la firme et sa capacité à produire de la richesse. Une mauvaise gestion des relations entre les partenaires, notamment les actionnaires et les dirigeants, peut être à l’origine de l’inefficience de la firme même si celle-ci est privatisée. Les conflits entre les différents acteurs peuvent ainsi conduire à des choix inadaptés et favoriser l’un des partenaires au détriment des autres. Berle et Means (1932) supposent que les dirigeants peuvent choisir de minimiser leurs consommations (avantages en nature, développement des réseaux informels avec certains partenaires). Ces comportements sont nuisibles à la création des richesses et peuvent compromettre la pérennité de la firme privatisée.

Il est important de noter que, dans ce cadre théorique, les mauvaises performances ou alors la faible rentabilité des firmes privatisées résulteraient essentiellement de raisons internes c’est-à-dire des comportements des acteurs ou de leurs choix stratégiques ou organisationnels. Les choix des dirigeants et leurs incitations à bien gérer l’entreprise conditionnent les résultats de cette dernière et donc l’efficacité de la privatisation.

Il apparaît ainsi que les dirigeants sont au cœur de toutes les attentions car ils constituent les principaux centres de décision. Leurs engagements stratégiques, organisationnels ou financiers sont à l’origine de la création ou de la destruction de valeur pour les actionnaires. Plusieurs éléments, tels que la motivation des dirigeants, leurs incitations à la performance, leur intégrité etc. sont soumis à la vigilance des actionnaires des entreprises privatisées. Les systèmes de contrôle et de sanction doivent permettre de détecter et d’éliminer les comportements les plus opportunistes des managers à un moindre coût.

L’efficacité de ces systèmes de contrôle dépend fortement de l’incitation des contrôleurs à accomplir leur tâche. Cependant, une interrogation demeure : qui contrôle les contrôleurs ou encore quelles sont les incitations des contrôleurs à remplir leur fonction ? La réponse à cette question réside dans les incitations que trouveront les organes de contrôle à fonctionner. La TA (Franks et Mayer, 1997 ; Denis et al. 1997. Gagnon et Saint-Pierre, 1995 ; Craven et Marston, 1997 ; Bethel et Liebeskind, 1993) postule que la structure de propriété constitue un système de contrôle efficace de la gestion des dirigeants lorsque certaines conditions sont réunies. La concentration du capital et la nature de certains actionnaires peuvent répondre au problème d’incitations des contrôleurs et contribuer à l’augmentation des performances de la firme.

11 Jensen, M.C et Meckling, W.H. (1976). « Theory of the Firm : Managerial Behavior, Agency Costs and Ownership Structure » Journal of Financial Economics, (3) October, p.48

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