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I. – LE FONDEMENT DU DROIT A L’INFORMATION

ADIAL

7. – Dignité et autonomie du patient

La dignité de la personne humaine est une notion juridique complexe qui a été consacrée tardivement par le droit positif. L’article 16 du Code civil, issu des deux premières lois dites de « bioéthique » de 1994, prohibe « toute atteinte à la dignité [de la personne] ». L’article L.1110-2 du Code de la santé publique, issu de la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades, impose le respect de la dignité des personnes malades, et le Code de déontologie médicale précise que « le médecin […] exerce sa mission dans le respect de la vie et de la personne humaine ». Ainsi, l’obligation négative énoncée par le Code civil devient, dans le Code de la santé publique, une obligation positive créatrice de droits pour le patient, dans la mesure où l’activité médicale suppose l’accomplissement d’actes potentiellement invasifs sur le corps d’une personne, qui peuvent entraîner des lésions corporelles et des répercussions sur le psychisme du patient.

En vertu du principe d’autonomie personnelle, le patient jouit de la libre-disposition de son corps pour subir ou refuser de subir une atteinte corporelle à des fins médicales. Or, la dignité de la personne humaine ne saurait être invoquée pour « interdire à une personne de prendre des décisions qui ne concernent qu’elle-même ». Le patient autonome est ainsi libre de refuser de subir des actes médicaux nécessaires à sa survie, et d’arbitrer entre ses propres intérêts en fonction de ses valeurs personnelles, même si le refus de soins peut être considéré comme une décision irrationnelle. L’autonomie personnelle autorise en effet le patient à subir des actes médicaux sans intérêt thérapeutique pour lui-même.

8. – Consentement du patient

L’article 16-1 du Code civil énonce une interdiction générale de porter atteinte à l’intégrité physique du corps d’autrui. Cette disposition ne saurait interdire à la personne de disposer librement de son corps, mais lui reconnaît au contraire un droit opposable aux tiers qui lui permet d’interdire toute atteinte à son intégrité physique. Or, l’atteinte portée à l’intégrité physique d’autrui est constitutif d’une faute civile et pénale sauf fait justificatif. Ainsi, l’article 16-3 du même code admet la licéité de certaines atteintes à l’intégrité physique de la personne à des fins médicales :

« Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui.

Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir. »

La nécessité médicale ou thérapeutique de l’acte pratiqué est indissociable du consentement de la personne, et rend licite l’atteinte portée à son intégrité physique. L’exigence du consentement du patient, qui est fondée sur le principe de dignité de la personne humaine et non sur le seul contrat médical, est antérieure à la loi bioéthique de 1994 et résulte clairement de l’arrêt Teyssier rendu le 28 janvier 1941 par la Cour de cassation :

« Attendu que, comme tout chirurgien, le chirurgien d’un service hospitalier est tenu, sauf cas de force majeure, d’obtenir le consentement du malade avant de pratiquer une opération dont il apprécie, en pleine indépendance, sous sa responsabilité, l’utilité, la nature et les risques ; qu’en violant cette obligation, imposée par le respect de la personne humaine, il commet une atteinte grave aux droits du malade, un manquement à ses devoirs proprement médicaux, et qui constitue une faute personnelle, se détachant de l’exercice des fonctions que l’administration des hospices a qualité pour réglementer ».

Toutefois, il faudra attendre le nouveau de Code de déontologie médicale promulgué en 1995 pour y voir apparaître, à l’article 36, une obligation formelle à la charge du médecin : « le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas ». La loi du 4 mars 2002 a proclamé le droit du patient à consentir aux actes médicaux selon une formulation négative et impérative au terme de laquelle « aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment ».

9. – Nécessité du consentement éclairé du patient

Le consentement du patient à l’acte médical est une manifestation de la liberté de la personne de subir ou de refuser de subir une atteinte à son intégrité corporelle. Si le consentement du patient doit être systématiquement recherché, la loi prévoit des exceptions lorsque les circonstances font obstacle à l’expression de ce consentement. En premier lieu, l’état de santé du patient peut rendre impossible toute recherche de son consentement, lorsque celui-ci se trouve en état d’inconscience, ou lorsque l’urgence suppose l’accomplissement immédiat d’actes médicaux nécessaires à sa survie. En second lieu, le patient incapable mineur ou majeur est représenté dans l’exercice de son droit au consentement, dans les hypothèses d’un patient mineur ou majeur placé sous mesure de tutelle. Le consentement du patient suppose nécessairement une information sur les modalités, la nécessité et la finalité de l’acte médical qui lui est proposé. L’information détermine donc la validité du consentement qui doit être « libre et éclairé » et constitue une « liberté fondamentale » pour le patient. La recherche du consentement du patient constitue également et réciproquement un devoir déontologique pour le médecin.

10. – Autonomie de l’information et du consentement

La loi instaure également une obligation d’information personnelle du patient sur les actes médicaux envisagés. Selon un principe de parallélisme fondé sur l’exigence du consentement libre et éclairé, le créancier de l’obligation d’information est la personne qui exerce le droit au consentement aux actes médicaux. Ainsi, dans les hypothèses de représentation légale du patient dans l’exercice du droit au consentement, les créanciers de l’obligation d’information sont les représentants légaux du patient mineur ou le tuteur du patient majeur protégé. Le patient juridiquement incapable conserve toutefois un droit personnel à une information adaptée à ses capacités de compréhension et de décision et le droit de participer à la décision le concernant s’il est apte à exprimer sa volonté. Malgré le silence de la loi, le patient empêché de consentir aux actes médicaux, dans une situation d’impossibilité ou d’urgence, dispose lui aussi d’un droit à l’information lorsque l’obstacle à l’information est levé.

Ainsi, si le droit personnel du patient requiert son information préalable, le droit à l’information est autonome du droit au consentement puisque ce droit à l’information subsiste a priori et a posteriori lorsque le patient est physiquement ou légalement empêché de consentir. L’information est fondée sur la réalisation de l’acte médical qui porte atteinte à l’intégrité corporelle du patient. Le respect de la dignité de la personne et de son autonomie, suppose donc de l’informer des atteintes subies et justifiées par une nécessité médicale pour lui-même.

11. – Partage nécessaire de la décision médicale

La relation entre le patient et le professionnel de santé est caractérisée par une situation d’asymétrie dans l’information des parties. Le professionnel de santé détient l’information sur l’acte médical qu’il propose d’exécuter sur la personne du patient. À l’inverse, le patient est profane en matière médicale et doit apprécier l’opportunité de l’acte préconisé sur la base des informations délivrées par le professionnel. Par conséquent, l’information reçue doit être exhaustive et loyale pour permettre au patient d’exercer son autonomie personnelle. Or, la relation médicale est centrée sur la personne du patient, qui est une personne « particulièrement vulnérable car affaiblie par la maladie ou par un trouble qu’elle ressent comme telle ».

L’information du patient ne peut être réduite à une simple obligation de mise en garde du patient à la charge du professionnel de santé. L’article 36 du Code de déontologie médicale et l’article L.1111-4 du Code de la santé publique reconnaissent au contraire le rôle actif du patient dans ce colloque singulier et consacrent un partage de la décision médicale entre le patient et le professionnel de santé :

« Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé. Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix. »

Le processus de codécision suppose en effet de rechercher le consentement actif et non l’assentiment passif du patient. Le professionnel de santé doit exécuter son devoir d’information avec loyauté, et exclure toute démarche de persuasion et tout comportement visant à impressionner le patient. La codécision médicale ne méconnaît pas la relation singulière entre le professionnel et le patient, mais vise seulement à instaurer une égalité juridique entre les volontés des parties, nonobstant le déséquilibre fondamental de cette relation. Le droit à l’information du patient et les obligations corrélatives des professionnels de santé doivent être interprétées à la lumière de cette finalité, à savoir un nouvel équilibre dans la relation médicale.

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