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I/ La licéité du refus d’assurance

ADIAL

L’article L122-1 du Code de la consommation est susceptible de s’appliquer à l’assurance
(A). Comment se justifie alors la sélection des risques se concrétisant en un refus
d’assurance ? (B).

A) Confrontation de l’article L122-1 du Code de la consommation à l’assurance

La sélection des risques conduit l’assureur à sélectionner sa clientèle et donc à refuser de
couvrir certains risques (à opposer des refus de garantie). Or, l’article L.122-1 du Code de la
consommation édicte la prohibition du refus de prestation de services. Cet article dispose en
effet qu’« il est interdit de refuser à un consommateur la vente d’un produit ou la prestation
d’un service, sauf motif légitime […] »(19).

Le refus de prestation de services à un consommateur sans motif légitime constitue une
infraction pénale et expose son auteur à l’application des peines d’amende prévues pour les
contraventions de la cinquième classe ; l’infraction pouvant être constituée pour chaque refus
de vente(20).

S’agissant d’un article du Code de la consommation, la prohibition du refus de vente ne
trouve à s’appliquer qu’en présence d’un consommateur.

Ainsi, on peut se demander si cet article ne limiterait pas la faculté de sélection de l’assureur,
au moins pour les risques dit « de masse » pour lesquels on est en présence de consommateurs.

Une immunité textuelle consacrée spécifiquement au refus d’assurance serait nécessaire pour
que celui-ci ne soit pas réprimé au titre de la prohibition du refus de vente et de prestation de
services.

Or, il n’existe pas à notre connaissance de texte consacrant une dérogation expresse au
bénéfice du refus d’assurance. De plus, le texte du Code de la consommation n’écarte pas de
son champ d’application le secteur de l’assurance, ce qu’il fait pour le secteur bancaire. Le
législateur n’a en effet pas ajouté à la dérogation dont bénéficie le secteur bancaire une
dérogation identique pour le secteur de l’assurance, laquelle aurait permis de fonder in fine
tout refus sur une base légale. Au regard de cet article, seul le cas où la sélection se traduit par
un refus d’assurance est concerné. Autrement dit, la segmentation n’est pas visée par cet
article. La sélection des risques lorsqu’elle se manifeste par un refus d’assurance peut donc
poser problème au regard de l’article L.122-1 du Code de la consommation.
Qu’en est-il de son application à l’assurance ? (2)

B) Inapplication de la prohibition du refus de prestation de services au refus
d’assurance en raison des caractéristiques originales du mécanisme
assurantiel

Juridiquement, ce n’est pas l’assureur qui formule l’offre d’assurance, mais le proposant qui
la fournit. L’assureur l’étudie, l’accepte ou la refuse. L’assureur n’est pas en position d’offre
permanente. Ainsi, n’étant pas en situation d’offre au public, l’assureur ne peut pas se voir
appliquer les peines du refus de prestation de services.

L’article L. 112-2 du Code des assurances énonce que : « […] la proposition d’assurance
n’engage ni l’assureur ni l’assuré […] »

Ainsi, l’assureur n’étant pas engagé par la proposition d’assurance, la liberté de refuser ou de
consentir à l’assurance est donc consacrée au profit de l’assureur.

Pour certains auteurs, cet article accrédite cette thèse. Ainsi, selon Picard et Besson, en
l’absence de cette précision légale, la société d’assurance aurait été considérée en état d’offre
permanente ; dès lors, la signature de la proposition d’assurance par l’assuré ne s’analyserait
plus comme une pollicitation mais comme une acceptation de celle de l’assureur ; le contrat
serait alors formé dès cet instant.(21)

En revanche, d’autres auteurs, notamment Georges DURRY, estime qu’ « il serait […]
vraiment trop facile de s’abriter derrière cette disposition, dont le seul objet est de permettre
à l’assureur de ne pas se trouver engagé à la légère – c’est-à-dire sans avoir eu le temps
d’examiner la qualité du risque qu’il lui est demandé de couvrir – pour dispenser, par
principe, l’assureur de respecter l’article L. 122-1 du Code de la consommation. A ce compte,
il suffirait à tout prestataire de services de prévoir, par exemple dans ses documents
publicitaires, qu’il se réserve le droit de ne pas conclure le contrat après examen du dossier
pour échapper à toute incrimination pour refus de prestation de services ». Pour cet auteur,
c’est l’analyse concrète de la situation qui devrait prévaloir sur « une sorte d’astuce juridique ».

Or, la réalité est que l’assureur qui finalement n’accepte pas d’assurer a refusé une prestation
de services.

L’argument de licéité que l’on peut tirer de ce texte doit donc être nuancé, d’autant plus que
le législateur a mis en place d’autres mécanismes spécifiques dans le Code des assurances
pour modérer les conséquences de l’article L112-2. Cet article ne doit en aucun cas conduire à
considérer qu’un refus n’emporte aucune conséquence en matière d’assurance obligatoire
(assortie d’une obligation d’assurer), de refus discriminatoire d’assurance ou de refus opposé
individuellement à l’adhérent d’un contrat groupe obligatoire.

Force est de constater que les dispositions de l’article L. 112-2 visent uniquement à permettre
à l’assureur de se réserver le droit d’agréer le risque qu’il prend à sa charge. On peut donc
affirmer que le refus d’assurance n’est, aux termes de cet article, autorisé qu’au motif de
sélection des risques. Dès lors, en l’absence de ce motif, l’existence de cette disposition du
Code des assurances ne devrait pas selon nous exclure à elle seule l’application du droit de la
consommation.

Abstraction faite de cet argument controversé, des motifs légitimes peuvent justifier un refus
d’assurance (II).

19 Article L 122-1 du Code de la consommation
20 Art. L. 122-1, R. 113-1 et R. 121-13 du Code de la consommation
21 Picard et Besson, Le contrat d’assurance, 5e éd., 1982, p. 78.

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