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Conclusion

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Un mouvement social, bien qu’il se présente à travers ses acteurs comme un initiateur d’une action protestataire qui tend à changer la hiérarchie sociale et la culture dans une société, ne peut, lui aussi, échapper complètement à l’histoire, à la culture et à l’organisation de cette même société. Le mouvement marocain du 20 février est un cas pratique qui montre que l’histoire des acteurs sociaux comme l’histoire politique d’un pays participent à l’orientation d’une action protestataire. Loin d’un déterminisme figé, l’histoire du M20 montre que l’action des individus contribue à l’émergence d’un nouvel esprit. Cela passe par l’institution de nouveaux espaces de débat public, d’échange et de débats argumentés et rationnels. Si le M20, en créant de nouveaux espaces (les assemblées générales, des grandes manifestations dans l’ensemble du territoire national, des groupes de débat sur internet), n’a pas réussi à intégrer tous les groupes sociaux dominés –les marginaux en particulier – il a néanmoins réussi à ouvrir la voie de la participation politique sous ses différentes facettes devant une nouvelle génération de jeunes (souvent issus de familles militantes, des diplômés et personnes à capital culturel élevé). Ce sont ces derniers qui animent aujourd’hui les débats sur la sphère publique, créent des associations et dynamiques civiques, appellent à la mobilisation et aux manifestations pacifiques, critiquent ouvertement l’action monarchique et gouvernementale.

Devant un contexte régional marqué par la dynamique protestataire (et les interventions militaires des forces étrangères poussées par leurs intérêts), et devant une atonie politique illustrée par l’absence d’opposition dans une société dominée par un monopole absolu du pouvoir par le roi et un régime dualiste (institutions démocratique avec une marge limité de pouvoir et institutions traditionnelles absolue), le M20 a réussi à déstabiliser le pouvoir central et imposer un agenda de réforme constitutionnelle. Les groupes économiques et politiques qui dominent dans la société ont riposté en mobilisant la rue contre les réformes revendiquées par le mouvement. Incapable de maintenir la pression et la mobilisation ou d’entrer dans une confrontation violente (le choix de la violence a été écarté par les composantes du mouvement depuis les années 1970), le M20 s’est estompé après avoir initié une ouverture et réussi à intégrer toute une partie de la société dans le débat autour de la chose publique.

Dans cette première partie du mémoire, il était question de retracer la naissance du mouvement et son évolution tout en fixant les facteurs qui participent à orienter l’action des acteurs sociaux. Ainsi, un retour sur ma propre trajectoire de militant et activiste au sein du M20 ainsi que ma position de membre de la société marocaine est, me semble, important dans la tentative de la compréhension du mouvement. Par ailleurs, ce retour tend à critiquer l’idée stipulant qu’un mouvement social (ou l’organisation sociale en général) peut être intelligible sans pouvoir remonter dans l’histoire de ses acteurs. Finalement, la partie autobiographique essaye d’éclairer sur ma position quant à l’objet de recherche.

Enfin, l’étude des catégories socio-professionnelles, de la question éducative et linguistique (l’Ecole et la langue comme institution de socialisation et moyen de distinction sociale) et de l’histoire politique marocaine, vise à souligner les déterminismes qui encadrent et motivent l’action des acteurs sociaux. Les entretiens ethnographiques sont venus montrer à la fois la prédisposition militante chez les acteurs et le fait que les thèmes de protestations (et les revendications) ne sont pas le fruit du hasard, encore moins le fruit d’une contamination protestataire issue d’une vague régionale et mondiale appelée « Printemps arabe ».

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