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c- Les perceptions d\’El Cerezo selon les habitants du quartier

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A présent, nous allons nous intéresser aux perceptions qu’ont les habitants d’El Cerezo
de leur quartier. En partant du fait que « l’urbanité est indissociable d’un devoir d’exposition
qui exige des compétences sociales relatives à la présentation de soi en public et à la
considération de l’autre en tant que personne humaine » (STEBE, 2010, p.109). Toute
présence dans l’espace public donne lieu à des jugements, des représentations, parfois même à
des interprétations pouvant mener aux stéréotypes.

Suite aux réponses au questionnaire(30), certaines différences des descriptions faites d’El
Cerezo apparaissent en fonction de l’origine des habitants du quartier. Bien qu’il soit
impossible de faire des généralités au vu du nombre restreint de questionnaires réalisés auprès
de la population (35), il apparaît que les Espagnols utilisent un vocabulaire majoritairement
négatif : dangereux, mal, délinquance, sale, épineux, chômage, anciennement bien,
conflictuel, éteint, etc. Bien que nombre d’entre eux ne manquent pas d’ajouter des adjectifs
positifs parfois en opposition avec les premiers tels que : propre, familiale, joyeux, bien, beau,
bien desservis, etc. Ce paradoxe est lié à différents éléments. Tout d’abord, ce quartier a gardé
un caractère familiale où des habitudes perdurent entre les autochtones qui ont grandi ici,
ensuite les changements de population ont déclenchés de nombreux stéréotypes que nous
verrons plus loin (partie B/2/). C’est pourquoi, « la crainte de se retrouver en minorité face à
un groupe étranger ou de ne pas se reconnaître dans ceux avec qui on cohabite, dans un même
immeuble voire dans le même couloir, affecte de manière concrète et génère des tensions dans
les relations sociales et dans les contacts au quotidien » (ESEVERRI MAYER, 2010, p.490).

Cela peut se retrouver dans le vocabulaire utilisé.

Concernant les Latino-américains, ils utilisent des qualificatifs disparates : bruyant,
désordonné, bien, sale, concurrence, interculturel, méfiance, problématique, racisme de la
part des personnes âgées, tranquille, actif, bruyant, intéressant, tranquille, industriel. En
conséquent, nous ne pouvons pas en tirer de conclusion exhaustive. Bien que cela indique un
intérêt particulier pour ce quartier, ces personnes semblent attentives aussi bien aux aspects
positifs que négatifs. Cela peut montrer une volonté d’améliorer les conditions de vie dans cet
espace en améliorant le “vivre ensemble”.

Quant aux habitants d’origine Sub-saharienne interrogés, ils décrivent le quartier de manière
enthousiaste : parfait, bonne ambiance, calme, multiculturel, harmonieux, bien, etc. tandis
que les Maghrébins sont plus sceptiques : stressant, pauvre, quartier d’immigrés, populaire,
conflictuel, instable. Les descriptions faites sont à mettre en relation avec la culture de chaque
personnes interrogées, à l’année d’arrivée dans ce quartier mais également du fait qu’elles ont
été questionnées dans le but d’aider un étudiant Français à réaliser sa recherche. Cela peut
remettre en cause l’objectivité des réponses puisqu’elles ont pu être influencées par les
différents éléments que nous venons de citer.

Néanmoins, l’utilisation de certains mots tels que : délinquance, bruyant, conflictuel ou
encore racisme, nous permet de mettre en évidence qu’il existe des conflits entre les habitants
du quartier. Ces termes agissent comme les révélateurs d’une certaine ambiance. “Dire qu’il
n’y a pas de problème c’est nier l’évidence” (Andres, espagnol), “maintenant je suis devenu
raciste” (Christina, espagnole), “les personnes âgées sont plus fermées à l’immigration surtout
avec la race nègre” (Alain, camerounais). « La peur que suscite la différence ethnique, et
surtout la méconnaissance de celle ci, est la véritable nouveauté (…) ce qui veut dire
qu’aujourd’hui, au malaise que produisent les différents modes de vie, les us et coutumes,
s’ajoutent la peur et la méfiance » (ESEVERRI MAYER, 2010, p.490).

Toutefois, nous ne pouvons pas désavouer l’aspect convivial d’El Cerezo dans les descriptions
faites : actif, intéressant, harmonieux, etc. ” C’est calme, on peut goûter et connaître de
nouvelles choses” (Angelines, espagnole), “je n’ai pas de problème dans le quartier. Ici les
espagnols se sont habitués aux immigrés même si certains sont un peu racistes” (Carlos,
vénézuélien), “il y a une bonne ambiance” (Betty , équatorienne). Nous retrouvons donc des
opinions qui divergent dans la qualification de cet espace urbain. Cela dépend du vécu et
ressenti de chacun. L’expérience de vie des habitants dans le quartier d’El Cerezo est à mettre
en relation avec les géosymboles(31) qui donnent à chaque individu une dimension personnelle
d’un espace en perpétuel mouvement. Les géosymboles peuvent permettre de s’identifier à un
espace ainsi que de se l’approprier par des lieux de culte, des épiceries, des restaurants ou
encore des tags.

C’est pourquoi, suite aux changements urbains du quartier, les lieux d’identification ont
changé tels les commerces ou encore les lieux de regroupements, c’est en cela que les
descriptions peuvent diverger. De plus, en fonction du ressenti des habitants, s’ils se sentent
intégrer ou non et s’ils portent de l’intérêt pour d’autres cultures, leurs représentations peuvent
changer et évoluer. Pour cela la médiation interculturelle menée par les associations citées
auparavant est essentielle. Malgré tout, un communautarisme subsiste, c’est ce que nous allons
voir maintenant.

30 Cf: Le questionnaire est disponible en annexe, p.114
31 “Un géosymbole peut se définir comme un lieu, un itinéraire, une étendue qui, pour des raisons religieuses,
politiques ou culturelles prend aux yeux de certains peuples et groupes ethniques, une dimension symbolique
qui les conforte dans leur identité” extrait du résumé de l’ouvrage Voyage autour du territoire de
Bonnemaison, 1981.

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