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A-Les critères objectifs de détermination du prix :

ADIAL

Une oeuvre d’art présente un caractère unique qui rend son estimation et l’évaluation de sa
valeur particulièrement complexe. Une oeuvre est par essence non fongible, c’est-à-dire
qu’elle ne peut être remplacée par une chose équivalente. Cette non fongibilité rend difficile
une estimation de sa valeur et donc de son prix. Une difficulté souvent contournée par les
experts qui préfèrent donner une fourchette de prix plutôt, qu’une estimation précise qui aurait
tôt fait d’être contestée. Dans le cadre de l’estimation d’une oeuvre, le marché utilise plusieurs
critères pour qualifier la valeur d’un bien artistique. Face à cette difficulté, le mot prix devient
presque tabou, et on trouvera de préférence les termes d’ « estimation », de « valeur de
remplacement », ou de « cote ». Pour la déterminer, il existe plusieurs critères précis qui
permettent de la circonscrire.

1-L’Artiste :

La personnalité de l’artiste reste sans doute le critère numéro un de la détermination de la
valeur d’une oeuvre d’art. La renommée acquise par un artiste reste la meilleure preuve de la
qualité d’une oeuvre artistique. Lorsqu’un nom est adoubé par les historiens comme étant
remarquable, il devient du même coup un élément fiable pour le marché. On remarquera que
les cartels de présentation d’une oeuvre place le nom de l’artiste en tête, selon une charte
universellement admise. Une nomenclature qui est d’ailleurs reprise par les maisons de ventes
aux enchères dans leurs catalogues. Pour le galeriste Jocelyn Wolff, « les cotes sont aussi le
résultat d’un réseau d’influences qui peut se construire entre quelques acteurs. ». Certains
artistes l’ont parfaitement compris et ils parviennent à jouer avec ces codes. On pense à Jeff
Koons, Damien Hirst ou encore Maurizio Cattelan. Les prix que peuvent atteindre leurs
oeuvres, pourraient laisser penser que leur cote est « manipulée » par des éléments extérieurs à
leur valeur artistique. Ce que réfute Jocelyn Wolff : « Si Valoir beaucoup d’argent ne dit rien
de l’importance d’un artiste contemporain, cela ne doit pas a contrario en nier la valeur
artistique. » Mais le marché de l’art ne reconnaît pas tous les artistes contemporains selon les
mêmes critères. Certains voient leur travail moins estimé pour des raisons inhérentes au
courant artistique auquel ils appartiennent. On pense plus particulièrement aux artistes
conceptuels comme Joseph Kosuth(35), dont les oeuvres n’ont pas, comme le décrit Jocelyn
Wolff, « de vertu décorative, « vintage », matérielle ». Aux artistes conceptuels, s’ajoutent
aussi les artistes vidéastes qui n’ont pas encore reçu l’adoubement du marché et qui peinent à
voir leur cote augmentée.

2-La Rareté :

Comme tout bien économique, plus un bien est rare, plus il est valorisé. Dans le cadre des
oeuvres d’art, il existe une sorte de double rareté. La première est qu’une oeuvre est par
définition unique et qu’elle ne peut être remplacée par un autre bien.

La deuxième, dépend directement de la production de l’artiste. Ainsi ce que l’on appelle le
Corpus d’un artiste peut varier. Le Corpus de Lubin Baugin, peintre de natures morte du
XVIIe siècle, n’est estimé qu’à une vingtaine de toiles répertoriées, ce qui confère à chacune
d’elle une valeur extrêmement forte. Concernant l’art contemporain, ce corpus n’est
généralement pas figé, puisque l’artiste est le plus souvent encore en activité. Il en résulte une
incertitude quant à sa production et donc une variation continue de la rareté de sa production.

Raymonde Moulin, ajoute aussi le facteur de retrait du marché de certaines oeuvres. Outre
leur destruction, leur incorporation à une collection publique, les rend inaliénables(36), donc
hors marché. Même si comme nous le verrons cette incorporation a des répercussions sur la
valeur économique des oeuvres présentées en vente.

3-Degré d’authenticité : Les certificats d’authenticité et le rôle des experts :

L’authenticité est le critère central d’évaluation d’une oeuvre d’art. Bien que l’art
contemporain soit moins exposé aux problèmes de faux que les oeuvres plus anciennes, il est
primordial de pouvoir prouver son authenticité. Lorsque l’artiste est encore vivant, ce
certificat ne pose guère de problèmes et il sera fourni à l’acheteur par le galeriste ou la maison
de vente aux enchères. Dans le cas contraire, un expert peut être amené à établir ce certificat
en s’appuyant sur des données scientifiques. Son rôle, contrairement à l’art ancien, n’est pas
d’attribuer l’oeuvre à un artiste, mais plutôt de la valider en tant qu’art. A titre d’exemple, en
1977, au cours d’une vente aux enchères d’art contemporain, « une action » de Fred Forest,
qui consistait en la mise en vente « d’un mètre carré artistique » avait reçu un certificat
d’authenticité de la part de Pierre Restany, fondateur du mouvement appelé Nouveau
Réalisme. C’est en qualité d’artiste et critique d’art que son avis avait été reçu. Le certificat
s’établissait comme suit : « Je soussigné, Pierre Restany, critique d’art et expert international
d’art contemporain, certifie que le mètre carré artistique de Fred Forest, constitue sur le
double plan du geste et de l’objet, une oeuvre d’art authentique conçue, présentée et vendue
comme telle.(37) »

De manière plus traditionnelle, l’expert a une double mission d’expertiser et d’estimer les
oeuvres d’art qui lui sont soumises. Selon le code de déontologie, élaboré par la chambre
nationale des experts spécialisés (CNES), « l’expert d’art est un spécialiste susceptible de
déterminer la nature, l’origine et l’époque de fabrication de l’objet d’art […] de détecter les
altérations […] et réparations éventuellement subies par l’objet, et de déterminer les valeurs
de cet objet : valeur de négociation et valeur de remplacement. » Il est intéressant de noter
qu’une distinction est faite entre la valeur de négociation et valeur de remplacement. Pour le
professeur François Duret-Robert, la valeur que l’on donne à une oeuvre d’art est fonction
de l’objectif en vue duquel l’expertise est requise. Pour lui, l’expert pourra donner un montant
de valeur différent selon l’utilisation qui en sera faite. Pour une même oeuvre, on obtiendrait
une valeur de négociation, qui correspondrait au prix que l’on pourrait obtenir pour l’oeuvre
en question dans une vente aux enchères ou lors d’une vente de gré à gré et une valeur de
remplacement qui correspondrait à la somme nécessaire pour obtenir une oeuvre équivalente
sur le marché (38).

35 Cf Annexe VI
36 Raymonde Moulin, « le marché de l’art : mondialisation et nouvelles technologies », édition Champs arts, P 15
37 Raymonde Moulin, « le marché de l’art : mondialisation et nouvelles technologies », Ed Champs arts, P 40
38 François Duret Robert, édition Dalloz, « Droit du marché de l’art », P. 182

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