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6) Dan Sperber et Deirdre Wilson

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Sperber et Wilson ont une vision cognitive du langage. Ils publient leur théorie en 1986 dans un ouvrage nommé Relevance.Communication and cognition. Pour eux, le système cognitif permet de construire une représentation du monde et de l’améliorer. Bracops (2006) explique que la théorie de Sperber et Wilson est une théorie dite vériconditionnelle car la représentation du monde d’un sujet doit être vraie. Ainsi, l’analyse du langage et de l’activité cognitive prend compte à la fois de l’accomplissement des actes de langage, l’interprétation des énoncés, ainsi que la vérité des informations qui sont communiquées.

Lorsqu’on communique, nous avons en tête plusieurs idées et si on arrive à les communiquer, alors les auditeurs auront une idée semblable de celles que nous avons voulu communiquer. Les idées viennent des états mentaux. Le modèle du code explique comment nous pouvons transmettre quelque chose qui est dans notre cerveau. En fait, ce qui nous permet de communiquer est la possession d’un code commun. Ce code permet d’associer à un sens (c’est-à-dire quelque chose de mental) une expression (c’est-à-dire quelque chose d’externe).

Les langues humaines sont des codes qui encodent tous les sens que nous voulons communiquer. Le locuteur encode, au moyen d’une expression, le sens qu’il veut communiquer et l’auditeur décode l’expression et identifie ainsi le sens. Le problème dans ce modèle est que les expressions linguistiques sont riches de sens, mais pourtant, elles ne donnent qu’une indication toujours ambiguë et incomplète du sens voulu par le locuteur.

Exemple :

L1 : « Veux-tu dîner avec moi ? »
L2 : « J’ai déjà mangé. »

Le sens de ce que veut dire L2 est qu’il a déjà mangé à un moment antérieur de l’énoncé. Mais cet énoncé est vrai même s’il a déjà mangé une fois dans sa vie ! Mais ce qu’il veut dire est qu’il a déjà mangé le soir même et qu’il refuse donc la proposition de L1. Ainsi, le sens voulu est beaucoup plus riche que ce qui est linguistiquement encodé. L’auditeur infère donc un sens linguistique de l’énoncé par rapport au contexte. L1 produit une inférence en comprenant que L2 a déjà dîné le soir même.

• Modèle inférentiel et communication ostensive-inférentielle

Le modèle inférentiel s’oppose à celui du code. Ce qui diffère dans ces deux théories est que dans le modèle du code, qui est un modèle plus ancien, c’est la communication qui permet aux humains de comprendre leurs pensées. Or dans le modèle inférentiel qui est plus récent, c’est la capacité à attribuer des états mentaux à autrui qui permet la communication. Dans ce dernier, le communicateur produirait un indice du sens voulu avec des mimiques, gestes, comportements, etc. Les humains ont la capacité de savoir qu’autrui a des croyances, désirs, et états mentaux.

Sperber et Wilson parlent de communication ostensive-inférentielle quand un individu fait connaître à un autre individu, par un acte quelconque, l’intention qu’il a de lui faire connaître une information quelconque. Il faut alors prendre compte des unités non verbales comme les gestes, mimiques, regards. Bracops (2006) démontre que les unités non verbales joignent souvent les unités verbales dans la réalisation verbale, telle qu’une salutation de la main accompagnée d’un « Bonjour ».

Pour eux, c’est dans les actes de langages indirects que le rôle du non verbal est relativement important. Par exemple, une requête exprimée oralement sous forme de question est souvent suivie d’un mouvement de la tête comme dans la requête « Peux-tu me passer le sel ? » où le locuteur tourne la tête vers le sel en même temps.

• Théorie de la pertinence

Sperber et Wilson ont créé la théorie de la pertinence après la notion de communication ostensive-inférentielle, où tout acte de communication éveille chez le destinataire l’attente de la pertinence de cet acte. Bracops (2006) développe un exemple de pertinence : avant qu’un invité approche son assiette vide près d’un plat, l’attention de la maîtresse de maison n’est pas sollicitée par l’assiette vide de l’invité, donc elle n’est pas pertinente. Par contre, une fois que l’invité réalise le geste de tendre l’assiette vide en regardant le plat, elle devient pertinente car elle est porteuse de signification. La maîtresse de maison peut ainsi comprendre que l’invité souhaite être resservi.

Tout énoncé produit suscite chez le locuteur l’attente de la pertinence de cet énoncé. Bracops (2006) explique que le principe de pertinence est « Un principe d’interprétation qui sert de base au processus inférentiel d’interprétation des énoncés et que l’interlocuteur utilise inconsciemment » (p.103).

Sperber et Wilson s’inscrivent dans la perspective de la théorie de Grice. Pour eux, être pertinent, c’est respecter le principe de coopération de Grice, c’est-à-dire respecter la maxime de relation, de quantité, de qualité et de manière. Un échange doit être le plus efficace possible.

Les auteurs de la théorie de la pertinence expliquent notamment que pour interpréter un acte de communication ostensive-inférentielle, l’interlocuteur doit accomplir un raisonnement : ce sont les notions d’effort et d’effet. L’effort demandé dépend de la longueur de l’énoncé, de sa syntaxe, de l’ambiguïté possible etc.

Ils démontrent que la conclusion d’un raisonnement inférentiel peut aboutir à trois types d’effets cognitifs : l’acquisition d’une nouvelle information, un changement de la force de conviction (renforcement ou atténuation), ou la disparition totale d’une croyance, grâce à l’apport d’une nouvelle information plus convaincante que l’ancienne.

La théorie de la pertinence explique ainsi pourquoi l’interlocuteur accepte de traiter les actes de communication ostensive-inférentielles qui lui sont adressés (Bracops, 2006), car si un interlocuteur estime qu’une information vaut la peine d’y prêter attention, c’est qu’elle est pertinente, et il fournira donc l’effort nécessaire pour en faire une interprétation.

• Interprétation des énoncés

Moeschler et Reboul (1998) expliquent que selon Sperber et Wilson, la linguistique correspond à un module périphérique spécialisé dans le traitement des données linguistiques. Lorsqu’un événement se produit (comme un son ou un énoncé), les données sont traitées dans un transducteur qui les traduit dans un format accessible. Une fois la traduction faite, c’est alors le système périphérique qui intervient. Il est spécialisé dans le traitement des données perçues par différents canaux tels que l’audition, la vision, l’olfaction, ou les données linguistiques. Quant à la pragmatique, elle s’inscrit dans le système central. Il permet de compléter la traduction avec d’autres informations déjà connues ou apportées par d’autres systèmes périphériques grâce à des processus inférentiels. Cette théorie provient du philosophe et psychologue américain Jerry Fodor.

S’inspirant de l’approche Fodorienne, ils pensent alors que le système périphérique linguistique fournit au système central une interprétation codique de l’énoncé à partir de laquelle le système central va pouvoir opérer pour livrer une interprétation complète (codique et inférentielle) de l’énoncé.
C’est le module linguistique qui permet la première interprétation d’un énoncé, qui se présente comme une forme logique, constituée par un ensemble de concepts qui correspondent aux composants linguistiques de la phrase.

Ils posent l’hypothèse que l’interprétation des énoncés se fait par des processus inférentiels qui ont pour prémisse le contexte. Le contexte regroupe les informations stockées dans la mémoire à long terme, à savoir les connaissances encyclopédiques (connaissances qu’à un individu sur le monde). Nous avons accès à ces informations grâce à des données venant de la situation ou de l’environnement physique (présentes dans la mémoire à court terme) et à des données provenant de l’interprétation des énoncés précédents (présentes dans la mémoire à moyen terme). Sperber et Wilson parlent d’environnement cognitif de l’individu. Moeschler et Reboul (1998) expliquent que l’environnement cognitif regroupe ce que l’individu sait et ce qu’il peut savoir, l’ensemble des informations auxquelles il peut avoir accès, et celles auxquelles il peut avoir accès à un moment donné.

Pour Sperber et Wilson, le contexte se construit énoncé après énoncé, faisant ainsi appel à la mémoire à long terme. Le rôle des concepts présents dans la forme logique entrent alors en jeu : l’individu va chercher les adresses de concepts présentes dans sa mémoire à long terme. Ces adresses permettent d’accéder à des informations contenues dans les concepts. Les informations peuvent se présenter sous différentes formes d’entrée : cela peut être une entrée logique (liens entre plusieurs concepts, relations logiques), une entrée encyclopédique (informations en relation avec le concept), ou une entrée lexicale correspondante à la langue naturelle de l’individu.

Moeschler et Reboul (1998) expliquent que pour constituer un contexte, le système central accède aux données du concept (données stockées dans la mémoire à long terme). Par la suite, le concept cherche des informations venant de l’entrée encyclopédique, puis il applique les processus inférentiels nécessaires pour arriver à une ou plusieurs conclusions qui viennent compléter l’interprétation de l’énoncé.

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