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5.1 Effets statiques de la privatisation sur la rentabilité des entreprises

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Les premiers résultats de calcul des moyennes trois années avant et cinq années après la privatisation des ratios de rentabilité de chaque entreprise ainsi que les représentations graphiques de l’évolution du ROS et des tests effectués sur les trois indicateurs de rentabilité sont illustrés dans les paragraphes suivants.

Tableau 6: Comparaison de la rentabilité des entreprises publiques trois ans avant et cinq ans après leur privatisation (t = -3 à +5, variante 1)

Comparaison de la rentabilité des entreprises publiques trois ans avant et cinq ans après leur privatisation

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

Légende

ROS : Return On Sales ou rentabilité commerciale (= Résultat net / Chiffre d’affaires)
ROE : Return On Equity ou rentabilité financière (= Résultat net / Capitaux propres)
ROA : Return On Assets ou rentabilité globale (= Résultat net / Actif total)
MOYa : moyenne « after privatization », après privatisation
MOYb : moyenne « before privatization », avant privatisation

L’observation de ce tableau, nous montre que la privatisation a été source d’amélioration de la rentabilité pour chacune des entreprises de notre échantillon. Ceci vient corroborer les allégations théoriques de Yarrow (1986) et Boyko et al. (1996) qui stipulent que la rentabilité des entreprises nouvellement privatisées (anciennement publiques) devrait augmenter pour plusieurs raisons. D’abord, les nouveaux actionnaires vont chercher à augmenter leurs profits et les nouveaux dirigeants vont devoir se conformer à cet objectif. La privatisation transférant les droits de contrôle aux actionnaires privés, les dirigeants vont devoir s’intéresser au compte d’exploitation de l’entreprise plutôt que de se conformer aux directives du gouvernement qui cherche, entre autres, à protéger l’emploi ou, plus généralement, à atteindre ses propres objectifs plutôt que la rentabilité de l’entreprise.

Ces résultats viennent également en conformité avec les allégations de Ehrlich, Gallais-Hammond et Lutter (1990) selon lesquelles l’entreprise privatisée est plus rentable que l’entreprise publique parce que le propriétaire privé, pouvant facilement vendre ou échanger ses droits de propriété, se préoccupe davantage d’augmenter la qualité et la rentabilité de son bien.

Prenons le cas de la SONEL et de la REGIFERCAM pour essayer de comprendre ces résultats. En effet, pour ce qui est de la SONEL, nous constatons que la moyenne du taux de marge nette est passée de -0,099 (trois années avant la privatisation) à 0,127 (cinq années après la privatisation) ce qui traduit une augmentation des bénéfices réalisés par l’entreprise suite à une augmentation du volume d’activité ; de même nous pouvons noter une amélioration de la rentabilité des capitaux propres (ROE) de -0,263 (trois années avant la privatisation) à 0,312 (cinq années après la privatisation) traduisant ainsi une incidence positive des fonds propres dégagés par les nouveaux actionnaires suite à l’ouverture du capital. On peut aussi remarquer une amélioration de la rentabilité des actifs (ROA) qui est passée de -0,067 (trois années avant la privatisation) à 0,136 (cinq années après la privatisation) traduisant une amélioration significative de l’ensemble des actifs utilisés par la SONEL après sa privatisation. Cette amélioration de la rentabilité de l’entreprise n’est que la résultante d’un ensemble d’aménagements effectués au sein de la société lors de sa privatisation.

En effet, la production d’énergie électrique de la SONEL est passée de 2417 Gwh en 1988 à 3536 Gwh l’année de sa privatisation c’est-à-dire en 2001 ceci étant dû à une augmentation de la puissance installée qui est passée de 757 Méga watt (Mw) en 1988 à 843,5 Mw en 2001. En outre, la SONEL exploitait jusqu’en 1994, 480 km de lignes 225 kilovolt (kv), 100 km de lignes 110 kv, 1064 km de lignes 90 kv et en 2001, la longueur des lignes 110 kv est passée à 337 km, les autres étant restées inchangées. Le segment de distribution comprenait quant à lui en 1988, 7918 km de lignes répartis de la manière suivante : 3864 km de lignes moyenne tension à 33, 30, 15, 10 et 5,5 kv ; 4064 km de lignes basse tension et 3299 postes de transformation. Les aménagements effectués dans ce segment lors de la privatisation ont permis l’augmentation des lignes et des postes de transformation d’où en 2001, on recensait 19033 km de lignes et 6444 postes de transformation.

Grâce à ses aménagements, le chiffre d’affaire d’AES- SONEL passe de 67 milliards de FCFA en 1995/96 à 90 milliards de FCFA au cours de l’exercice 2001, soit une croissance de 34% au cours de la période ou 6,8% par an pour l’entreprise publique. De son coté, l’entreprise privée fait passer son chiffre d’affaires de 90 à 203 milliards en 2007, soit une croissance de 125% et donc 20,8% par an (Touna Mama, 1996). La progression de l’activité sous la gestion privée est ainsi trois (3) fois plus rapide que sous la gestion publique résultant certainement d’une approche plus dynamique et plus volontariste dans le but de maximiser le profit au contraire de l’entreprise publique.

Il en va de même en ce qui concerne la REGIFERCAM, le chiffre d’affaire de celle-ci atteint un plafond de 31,5 milliards de FCFA au cours de l’exercice 1984/85 ; puis il chute à 21,5 milliards en 1987/88 avant de remonter et de se stabiliser à 29,7 milliards de francs CFA à partir de l’exercice 1994/95, soit une baisse de 6% au cours de la période publique. Sous la gestion de l’opérateur privé CAMRAIL le chiffre d’affaire atteint un pic de 46,2 milliards dès l’exercice 2002 avant de connaitre un léger repli pour se situer à 44,4 milliards, l’exercice suivant soit une croissance de près de 50% (Touna Mama, 1996). Ce qui traduit une approche plus dynamique de la part de l’operateur privé au contraire du gestionnaire public.

Tous ces aménagements effectués au sein de l’entreprise SONEL suite à sa privatisation peuvent expliquer l’amélioration de sa rentabilité. Il en est de même pour les autres entreprises de notre échantillon qui doivent l’amélioration de leur rentabilité aux différentes restructurations mais aussi aux changements d’objectifs qui ont suivi leur privatisation.

5.1.1 Présentation graphique des évolutions du Return On Sales (ROS) et tableaux des tests

Pour l’indicateur ROS, nous faisons au préalable une analyse graphique de l’évolution de ce ratio sur une période de neuf ans pour chacune des huit entreprises privatisées de notre échantillon. Ensuite, pour tester la significativité de nos résultats, nous parcourons les étapes du test non paramétrique de Wilcoxon pour les trois mesures de rentabilité retenues dans cette étude (Return On Sales, Return On Equity et Return On Assets).

« Pour des raisons sociales les noms des entreprises ont été retirés »

Présentation graphique des évolutions du Return On Sales (ROS) et tableaux des tests

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

Les graphiques ci-dessus présentent l’évolution du taux de marge nette de chacune des huit entreprises de notre échantillon sur une période de neuf ans. Afin de mieux visualiser l’effet de la privatisation, nous avons introduit une courbe de tendance linéaire.

Ainsi pour ce qui est de cet indicateur, nous pouvons constater que la privatisation a eu un effet positif considérable sur la performance. En effet, le taux de marge nette passe de la zone des résultats négatifs pour quatre (4) entreprises (AES-SONEL, CAMRAIL, CDC et HEVECAM) avant la privatisation à la zone de résultats positifs après la privatisation. Les quatre (4) autres entreprises (CHOCOCAM, SEPBC, SOCAMAC et SOCAPALM) connaissant une chute ou de faibles ratios avant la privatisation et un redressement ou une amélioration après la privatisation.

En définitive, nous pouvons confirmer à travers ces graphiques l’hypothèse d’accroissement du taux de marge nette synonyme d’amélioration de la rentabilité commerciale après la privatisation.

– Présentation du test du Return On Sales (ROS)

Il s’agit de recourir aux cinq étapes du test non paramétrique de Wilcoxon afin de confirmer ou infirmer la significativité de nos résultats obtenus sur le ratio ROS.

Tableau 7 : Test du ROS

Test du ROS

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

Pour les huit entreprises concernées par le calcul de cet indicateur, toutes ont des rangs positifs. La somme de ces rangs nous donne 36 (8+7+5+2+6+4+1+3) soit T+) du TABLEAU 7 ; les rangs négatifs quant à eux donnent une somme de 0 soit T-) du même tableau. Pour prendre une décision, nous retenons la valeur de T la plus petite soit T= 0.

– Présentation du test du Return On Equity (ROE)

Il s’agit de recourir aux cinq étapes du test non paramétrique de Wilcoxon afin de confirmer ou infirmer la significativité de nos résultats obtenus sur le ratio ROE.

Tableau 8 : Test du ROE

Test du ROE

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

Pour les huit entreprises concernées par le calcul de cet indicateur, toutes ont des rangs positifs. La somme de ces rangs nous donne 36 (8+7+5+2+4+6+3+1) soit T+) du TABLEAU 8 ; les rangs négatifs quant à eux donnent une somme de 0 soit T-) du même tableau. Pour prendre une décision, nous retenons la valeur de T la plus petite soit T= 0.

– Présentation du test du Return On Assets (ROA)

Il s’agit de recourir aux cinq étapes du test non paramétrique de Wilcoxon afin de confirmer ou infirmer la significativité de nos résultats obtenus sur le ratio ROA.

Tableau 9 : Test du ROA

Test du ROA

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

Pour les huit entreprises concernées par le calcul de cet indicateur, toutes ont des rangs positifs. La somme de ces rangs nous donne 36 (8+3+6+1+4+7+2+5) soit T+) du TABLEAU 9 ; les rangs négatifs quant à eux donnent une somme de 0 soit T-) du même tableau. Pour prendre une décision, nous retenons la valeur de T la plus petite soit T= 0

Les tests ainsi effectués sur les trois indicateurs de rentabilité, il convient maintenant de présenter une synthèse des résultats. Le tableau ci-dessous récapitule cette situation. Nous pouvons ainsi cerner globalement les effets statiques de la privatisation sur la rentabilité des (8) huit entreprises privatisées de cette étude.

Tableau 10 : Synthèse des Résultats

Synthèse des Résultats

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

*** Test rejetant l’hypothèse nulle d’absence de différence de médiane au seuil de 1%.

Le Tableau 10 nous donne les résultats du modèle. La première colonne rappelle juste les indicateurs utilisés. La deuxième donne le nombre d’entreprises finalement concernées par le calcul de cet indicateur. Les colonnes 3 et 4 montrent respectivement les moyennes et médianes avant et après la privatisation ; la colonne 5 fait apparaître les variations des valeurs moyenne/médianes des indicateurs alors que la colonne 6 présente les résultats du test de Wilcoxon. La dernière colonne du tableau donne le pourcentage de firmes ayant évoluées selon nos prévisions.

La rentabilité des entreprises privatisées dans le cadre de cette recherche a été examinée en fonction de trois indicateurs de performance : le taux de marge nette (ROS), la rentabilité des capitaux propres (ROE) et la rentabilité globale (ROA). Les résultats de notre analyse nous indiquent que de façon globale, les huit (8) entreprises faisant partie de notre échantillon ont pu améliorer leur performance en termes de rentabilité car nous observons une augmentation significative des moyennes et médianes de ces ratios de rentabilité trois années avant et cinq années après leurs privatisations (tableau 10).

Par exemple, le taux de marge nette (ROS) passe en moyenne de -3,7 % (3 ans avant) à 7,3 % (5 ans après). Les résultats issus du test statistique Z de Wilcoxon (grâce notamment au test de significativité) indiquent que l’augmentation de la performance des (8) huit entreprises privatisées en termes de rentabilité est significative. Enfin, la proportion d’entreprises ayant le signe d’évolution attendu (i.e. amélioration de la rentabilité) est de 100 %.

Cependant, cette analyse, présente deux limites. Tout d’abord, les tests sont effectués sur des moyennes de trois ans avant et cinq ans après la privatisation, ce qui a pour effet de lisser l’effet de la privatisation. Ensuite, il ne permet pas de savoir si la variation de l’indicateur est antérieure à la privatisation (préparation ou effet d’habillage) ou postérieure à cette dernière (effet réel de la gestion privée).

Une approche supplémentaire est alors utilisée. Elle consiste à découper en deux sous-périodes l’analyse et de comparer les différences de moyennes et de médianes des ratios des entreprises privatisées pour les périodes avant les privatisations (t = -3 à 0) et après les privatisations (t = 0 à +5). L’application du test aux années – 3, 0 et + 5 permet de mieux identifier les effets temporels (tableau 11 et 12). Toutefois, pour pouvoir attribuer l’évolution constatée à la privatisation, il faut que le ratio soit significatif sur la période 0/+ 5.

5.1.2 Analyse de l’effet de la privatisation sur les différents indicateurs de rentabilité (t = 3 à 0 et t = 0 à +5)

Il s’agit maintenant de tester l’effet de la privatisation sur nos trois indicateurs de rentabilité sur une période de neuf ans découpées en deux sous-périodes (t = -3 à 0 et t = 0 à +5). Ceci dans le but de savoir si l’effet de la privatisation a été plus forte et significative dans la période post privatisation et de conclure sur une amélioration de la rentabilité attribuée à la gestion privée.

Tableau 11 : Comparaison de la rentabilité des entreprises publiques trois ans avant et au moment de leur privatisation (t = -3 à 0, variante 2)

Comparaison de la rentabilité des entreprises publiques trois ans avant  et au moment de leur privatisation

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

Tableau 12 : Comparaison de la rentabilité des entreprises publiques au moment de leur privatisation et cinq ans après leur privatisation (t = 0 à +5, variante 2)

Comparaison de la rentabilité des entreprises publiques au moment de   leur privatisation et cinq ans après leur privatisation

Source : l’auteur à partir des données de l’ARSEL, la CTR, l’INS et la SNI

*** Test rejetant l’hypothèse nulle d’absence de différence de médiane au seuil de 1%.

En comparant les ratios calculés trois ans avant la privatisation avec ceux de l’année de l’évènement (tableau 11), nous trouvons une hausse dans les moyennes ainsi que dans les médianes des ratios de rentabilité. On observe les mêmes tendances (tableau 12), lorsqu’on compare les ratios calculés l’année de la privatisation avec ceux calculés cinq ans après. Ces résultats sont conformes aux résultats obtenus lors de la comparaison des mêmes ratios trois ans avant et cinq ans après la privatisation. L’examen des tableaux (11) et (12) montre que l’amélioration des indicateurs de performance est plus forte et significative pour la période postérieure à la privatisation (t = 0 à +5). Cela confirme l’idée que les entreprises publiques sont plus endettées et confortent ainsi les théories justifiant la meilleure performance économique et financière de la gestion privée par rapport à celle du public.

Ce test, même s’il conduit à percevoir plus clairement les effets de la privatisation, ne donne cependant qu’une vision grossière de sa dynamique (Alexandre et Charreaux, 2004). De plus, appliqué à une firme médiane fictive, il ne permet pas d’obtenir des résultats individuels, entreprise par entreprise. Pour cette raison, l’étude a été prolongée par une analyse dynamique.

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