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4.5. Erwin Straus

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Straus était un neuropsychiatre allemand, établi aux USA suite aux persécutions nazies.

La psychologie clinique et théorique a évolué grâce à ses travaux qui ont été repris par de nombreux auteurs.

Straus se réfère aux concepts de Husserl et Heidegger et s’appuie sur les mêmes arguments que Von Weizsäcker au sujet du pathique. Dans son livre (39) « Du sens des sens » il pose les fondements d’une psychologie phénoménologique. Il s’agit d’une psychologie du mouvement, d’une théorie de la subjectivité qui s’origine dans le sentir.

Sentir et se mouvoir sont pour lui des modes d’être originaires (40). Le sentir est la réalité et qui a la fonction d’assurer la continuité de la réalité, de la métaboliser. (41)

Nous savons que pour lui, certaines réactions du penser et du sentir sont difficiles à transmettre aux autres. « Le pathique est une communication immédiatement présente intuitive, sensible, encore pré conceptuelle avec le monde » . (42)

Nous passons avec Straus du concept du pathique (Weizsäcker) à la dimension pathique. L’éprouvé de Weizsäcker est pour lui un synonyme partiel du sentir. Straus attribue le sentir au vivant et le percevoir à l’existant.

Il analyse ainsi la psychologie de l’être humain et fait une différence entre ce que l’on perçoit et ce que l’on sent. Il veut saisir le sentir. Pour lui : « L’expérience sensorielle n’est pas une connaissance » (Straus 1935 p. 17).

Le sentir est, pour Straus, un moment pathique, c’est-à-dire fait de réceptions et de participations au monde alors que la perception est un instant qui nous fait sentir les objets. E. Straus explique le moment pathique comme la communication directe avec les choses. Il a travaillé sur le sujet des perceptions. Il privilégie l’expérience qui est à différencier du percevoir et du connaître.

Pour lui, l’organisme vivant en devenir est sujet du sentir, il veut plutôt décrire l’expérience du sentir et l’ouverture de l’individu aux phénomènes. Pour nous, il s’agit des détenus qui doivent s’élargir au phénomène de la privation de liberté.

Straus veut conceptualiser un organisme vivant qu’il nomme organisme expressif.

Il a donc travaillé sur la perception mais également sur les expressions.

Il écrit à ce sujet: « Le sentir est au connaître ce que le cri est au mot » . (44)

Le percevoir renvoie au mot, le sentir au cri. Le mot est déjà une notion, comme une ouverture d’un monde. Quand un mot est prononcé, c’est une manière de s’ouvrir et de s’annoncer de façon personnelle.

Du sentir au percevoir s’ouvre un monde. Dans le percevoir, il y a une signification subtile, alors que dans le sentir (le cri) il y a une direction de sens qui se répercute vers la spatialité qui indique une appréhension de l’ordre du sensible. (45)

Ainsi, Straus pense aussi que la dimension pathique peut être appréhendée par le mouvement (dansé). Il passe ainsi dans le rapport à la danse de l’espace propre (Binswanger) à l’espace étranger par assimilation, expansion et illimitation (46).

Le mouvement orienté est doué de significations comme, par exemple, le mouvement d’évitement chez les animaux.

Le sentir est le propre du vivant, nous pouvons vivre sans penser à notre existence mais pas sans ressentir les choses. Pour lui, la vie, le sentir, sont les seules choses qui nous font avancer et vivre.

La dimension pathique permet de réaliser une rencontre réelle entre les sujets (47), une ouverture au monde et à l’être.

Lors de l’apparition d’un évènement, c’est là où nous sommes suspendus, c’est ensuite que nous apposons un sens. La surprise permet l’apparition du mode personnel, car nous sommes ouverts à notre possibilité d’y être ; et c’est en posant une signification que nous devenons cet étant-là, et qu’un monde nous apparaît. (48)

Il s’intéresse au rapport que le corps entretient à d’autres espaces que l’espace orienté, à savoir « l’espace présentiel homogène, libre de différences de direction » (49).

Par exemple, l’espace spécifique du danseur signifie ampleur, hauteur, profondeur du mouvement. Ce mouvement déploie le temps et fabrique un horizon qui se déplace par lui (Straus 1992) (50).

Ce mouvement crée un monde pour soi, un monde ouvert à l’accueil de la réalité et à l’altérité. Pour Straus, ce mouvement n’est pas une action musculaire mais est « intérieure ». Le sentir équivaut à son monde propre de mise en rythme de fragments, de formes discontinues dans la continuité existentielle et qui se forment dans la rencontre homme-monde (nommé par Heidegger, 1941, Stimmung, en français : « atmosphère », « humeur » et sentiment d’existence).

Le rythme est ainsi surgissement.

Ce qui nous amène à Maldiney qui pense que les structures spatiales et temporelles structurent le « comment » de l’existence. « (…) Elles lui donnent un style, un rythme et une direction de sens à chaque fois différent (…) » (51). La mise en place des formes discontinues s’harmonisent en se mettant en rythme. Ce qui constitue pour lui le « style présentiel » d’une personne.

39 Straus, E., Vom Sinn der Sinne (publié à Berlin en 1935, titre français : Du sens des sens, édité chez Million en 2000)
40 ESCOU BAS E., De la création Penser l’art et la folie avec Henri Maldiney (essai sur le « pathique », le « pathologique » et le « pathétique »). Récupéré le 9.04.2012 de http://culture.univ-lille1.fr/fileadmin/lna/lna59/lna59p06.pdf
41 .Leroy-Viemon B. & Mascato F. Le problème de l’espace thymique en psychologie du sport. L’espace thymique comme foyer du lien « soi-monde-autrui. Récupéré 19.01.2012, de http://www.erudit.org/revue/fili/2008/v17/n2/019427ar.html?vue=resume
42 Bernier P., L’anthropologie du pathique Récupéré le 11.07.2010 de http://www.cahiers-ed.org/ftp/cahiers9/C9_bernier.pdf
43 Pegny G., Présentation des réflexions de Erwin Straus sur la spatialité dans Les formes du spatial et dans Du sens des sens. Récupéré le 30.03.2012 de http://uparis10.academia.edu/Ga%C3%ABtanP%C3%A9gny/Papers/654614/La_spatialite_selon_Erwin_Straus
44 Maldiney H, Penser l’homme et la folie“, Straus, E., « Vom Sinn der Sinne » p. 372 Récupéré le 11.11.2009 de http://books.google.ch/books?id=iYywFRKzD0kC&pg=PA148&lpg=PA148&dq=Le+percevoir+est+au+sentir+ce+que+le+cri+est+au+mot&source=bl&ots=t_J5KDXtgJ&sig=J4Ye7k4KV14TwxcTwL97SO7yslM&hl=fr&sa=X&ei=WXGGT9XbIITrObWZlNcI&sqi=2&ved=0CCwQ6AEwAg#v=onepage&q=Le%20percevoir%20est%20au%20sentir%20ce%20que%20le%20cri%20est%20au%20mot&f=false
45 Groupe de lecture Maldiney. Carcassonne (2009) La dimension du contact au regard du vivant et de l’existant (De l’esthétique sensible à l’esthétique artistique) Compte-rendu n°8. Récupéré le 23.06.2009.de http://gestalt.nuxit.net/Gestalt/spip.php?article87
46 Binswanger, L., “Le problème de l’espace en psychopathologie”, Toulouse: Presse Universitaire du Mirail. 1998, p. 28
47 Bernier (2006) « La dimension pathique dans la prévention de la violence » Récupéré le 30 mars 2012 de http://spirale-edu-revue.fr/IMG/pdf/13_Bernier_Spirale_37.pdf
48 Bernier P., L’anthropologie du pathique Récupéré le 11.07.2010 de http://www.cahiers-ed.org/ftp/cahiers9/C9_bernier.pdf
49 Leroy-Viemon B. & Mascato F. (2008) Article Le problème de l’espace thymique en psychologie du sport. L’espace thymique comme foyer du lien « soi-monde-autrui. Récupéré le 22.01.2012 de http://www.erudit.org/revue/fili/2008/v17/n2/019427ar.html?vue=resume
50 Ibid., Leroy-Viemon B. et Mascato F.
51 Dastur, F., Texte publié dans Les Lettres de la Société de Psychanalyse Freudienne, Questions d’espace et de temps, n° 20, 2008, p. 45-55. Temps et espace dans la psychose selon Henri Maldiney. Récupéré le 2.03.2012 de http://af.bibliotherapie.free.fr/Article%20F.Dastur.htm

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