Gagne de la cryptomonnaie GRATUITE en 5 clics et aide institut numérique à propager la connaissance universitaire >> CLIQUEZ ICI <<

4.4.5 L’offensive militaire généralisée

Non classé

Le camp d‘Alassane Dramane Ouattara en avait marre des tentatives jusque-là infructueuses de résoudre la crise ivoirienne de manière diplomatique et apaisée. Fort d‘on ne savait quoi, le président reconnu par la communauté internationale semblait décidé à en finir avec cette crise, au plus vite. C‘était ainsi qu‘après avoir récusé José Brito que l‘Union Africaine avait désigné comme son haut représentant en Côte d‘Ivoire, l‘ancien premier ministre de Félix Houphouët Boigny venait de lancer, par le biais de forces dites républicaines (ex-forces nouvelles) des attaques simultanées sur la ligne de front qui séparaient le pays depuis la rébellion de 2002(208).

Ces attaques qui avaient commencé lundi 28 mars 2011 avaient eu lieu à Duékoué, dans l‘ouest du pays, à Daloa, au centre-ouest et à Bondoukou, à l‘est, près de la frontière avec le Ghana. Ces attaques simultanées donnaient l‘impression que le camp d‘Alassane Ouattara avait pris la résolution de résoudre la crise par les armes. En soi, c‘était un échec de la diplomatie africaine et internationale. Qui était incapable après quatre mois d‘éteindre le feu qui couvait dans ce pays depuis la tenue du second tour des élections présidentielles, le 28 novembre 2010.

Carte XV: Offensive militaire généralisées des forces républicaines pour renverser Laurent Gbagbo

Carte Les enjeux de la transition politique et humanitaire le cas de la crise politico-militaire et postélectorale en Côte d’Ivoire 15

Source : http://2.bp.blogspot.com

Cependant, cette offensive, si les partisans de l‘ancien premier ministre, semblaient s‘en réjouir, il fallait préciser que ce n‘était pas la meilleure solution pour ce pays et son peuple. D‘abord parce que quelques soient les précautions et la prudence dont les protagonistes s‘entouraient, d‘innocentes victimes allaient tomber sous les balles. Ensuite, l‘effet d‘annonce qui avait suivi la nouvelle du lancement de ces attaques ne signifiait nullement que les troupes hostiles à Laurent Gbagbo allaient réussir à chasser ce dernier. Une armée régulière, ce n‘était pas facile à vaincre. Surtout par une rébellion. Laurent Kabila peut avoir été une exception.

Mais surtout, même quand Alassane Dramane Ouattara et les troupes qui disaient le soutenir auraient eu raison de Laurent Gbagbo, rien ne garantissait que ce soit fini avec la crise. Il était possible que l‘amère défaite des Forces de Défense et de Sécurité allait entraine des rébellions internes à la Côte d‘Ivoire, installant le pays dans une longue période d’ingouvernabilité. C‘était d‘autant plus envisageable qu‘il se disait que des anciens rebelles s‘étant rendus coupables d‘horribles atrocités au Libéria seraient en action dans les deux camps.

Dans le camp de Ouattara même, on se demandait jusque quand durerait le mariage avec Guillaume Soro notamment ? Devant le pouvoir qu‘il aurait effectivement aidé à récupérer, ce dernier accepterait-il de continuer à jouer les seconds rôles ? A suivre. Que dire des troupes des forces nouvelles qui pourraient être subdivisées en plusieurs factions ?

Finalement, comme on le voyait, les hommes politiques ivoiriens semblaient avoir oeuvré et réussi à créer toutes les conditions pour la déstabilisation durable de ce pays. Ils auraient été aidés par l‘incompétence de la communauté internationale. Malgré toutes les déclarations tonitruantes de certains grands acteurs de cette instance supra nationale, le pays s‘enfonçait peu à peu dans une longue crise politique, dont personne n‘était en mesure de prédire ni l‘issue, ni la durée.

Les ivoiriens qui le pouvaient et qui avaient encore la chance de respirer étaient contraints à devenir des réfugiés. Ils y affronteraient pour, on ne sait combien de temps, les affres de la faim, de la maladie, de la fatigue, etc. Situation totalement inimaginable il y avait encore une vingtaine d‘années, quand ce pays symbolisait la parfaite relation franco-africaine. Illusion ?

Laurent Gbagbo était pris à son propre jeu : il avait voulu de la guerre et de la violence, il avait fini par récolter ce qu‘il avait lui-même semé. Mais pas de la façon dont il l‘espérait. Le cessez-le-feu avait volé en éclats et les FRCI (Forces républicaines de Côte d‘Ivoire pro-Ouattara), composées essentiellement de soldats des Forces nouvelles, progressaient vers le sud du pays. Les forces soutenant le président ivoirien élu par le peuple et reconnu par la communauté internationale, Alassane Dramane Ouattara, avaient lancé leur plus grande attaque au lendemain de la crise postélectorale(209).

Selon le camp du président Gbagbo lui-même, cette « offensive généralisée » s‘étendait sur toute la ligne de front qui coupait le pays depuis 2002. L‘on constatait que cette fois, il n‘y avait eu aucune force d‘interposition. Dans l‘attente de recevoir leurs adversaires à Abidjan, les fameuses forces de défense et de sécurité du camp présidentiel continuaient de tirer des obus à l‘aveuglette sur les populations civiles d‘Abobo, quartier majoritairement favorable à Alassane Ouattara. Mais que feraient-elles lorsqu‘elles se trouveraient nez à nez avec des adversaires très résolus, les Forces nouvelles étant devenues Forces républicaines ? Une déroute sans doute.

Surtout que le « commando invisible » dirigé par le fameux IB (entendez Ibrahim Coulibaly) avait repris du service aux côtés des troupes de Guillaume Soro pour défendre la même cause et atteindre la cible commune : le dictateur Laurent Gbagbo qu‘ils entendaient bien chasser du palais de Cocody. La guerre qui se généralisait apparaissait ainsi comme l‘unique solution à la crise voulue et entretenue par le président autoproclamé Laurent Koudou Gbagbo. Gbagbo, le boulanger de la lagune Ebrié, était devenu très amer pour avoir été défait aux élections. Son masque avait fini par tomber, l‘individu s‘étant métamorphosé en boucher du peuple ivoirien. L‘impasse diplomatique étant devenue une réalité, le « commando invisible » avait fini par trancher en imposant la lutte armée, devenue incontournable, ne serait-ce que pour mettre fin à la boucherie à laquelle Gbagbo et ses partisans s‘étaient livrés jusque-là.

Sans aucune pitié, depuis des mois, ils n‘avaient fait que piller, enlever, violer et massacrer des populations civiles aux mains nues. L‘appel de Guillaume Soro invitant le peuple ivoirien à défendre ses acquis et à faire la révolution, comme en Tunisie et en Egypte, semblait donc avoir été entendu. Le peuple en armes avait décidé de se rendre justice et de défendre le choix qu‘il avait fait à travers les urnes. Voilà pourquoi l‘offensive menée par les désormais « Forces républicaines » semblait irréversible. L‘on s‘acheminait donc tranquillement mais sûrement vers la prise d‘Abidjan. Ce ne serait peut- être pas si facile, mais la démocratie a un prix et les forces qui combattent une dictature, fût-elle féroce, ne reculent jamais.

La peur avait changé de camp. Elle se trouvait désormais dans le camp de la majorité présidentielle, de jour en jour plus isolée. Gbagbo finirait donc par se faire chasser par la force des armes comme il l‘avait lui-même voulu. Mais cette fois, les choses se passeraient suivant un scénario dont il n‘aurait pas été l‘auteur, contrairement aux différents rounds de négociations qu‘il avait de façon générale presque toujours pilotés. Au plan financier, le camp présidentiel agonisait ; il avait sérieusement du mal à payer les salaires des fonctionnaires et des soldats. Economiquement étouffé, son régime aurait bien du mal à compter sur ses amis angolais et autres pour se faire aider.

La communauté internationale y veillerait. La nouvelle jonction entre combattants de Guillaume Soro et ceux de son alter ego, le légendaire IB, était comme un signe des temps. Un véritable gain au plan stratégique faisait reculer les forces pro-Gbagbo presque partout. Les tentatives désespérées de se lancer dans le recrutement de soldats « patriotes » par le camp présidentiel n‘étaient donc que la preuve d‘une déroute de la soldatesque d‘Abidjan, affaiblie et apeurée. Il était encore temps que ceux qui se trouvaient derrière Gbagbo en viennent à la raison. Il leur appartenait, en ces heures difficiles, de mettre fin à un combat qui était loin d‘être noble, pour se ranger du côté de ceux qui défendent effectivement la démocratie.

Une fois le dictateur vaincu, cette autre victoire serait commune et ses effets bénéfiques pour tous les ivoiriens. Comment l‘Union africaine (UA) allait-elle réagir face à la nouvelle tournure des événements ? Elle dont les tergiversations n‘avaient apporté qu‘amertume et regrets aux africains dans le besoin et l‘urgence. Pour l‘heure, l‘UA semblait plutôt se résoudre à préparer à vivre l‘après-Gbagbo. Officiellement, personne n‘encourage un divorce mais lorsqu‘il survient, on avoue au couple défait que la solution s‘imposait d‘elle-même.

Les houphouëtistes se voulant hommes de paix et de dialogue, l‘on comprendrait qu‘à bout de patience, les forces qui les soutenaient avaient dû reprendre les armes pour mettre fin à l‘aventure qui n‘était pas encore terminée. Personne ne leur en voudrait d‘avoir cherché à débarrasser le pays de ceux qui l‘avaient plongé des années durant dans la détresse, la honte et la misère.

208 Guineeconakry.info – 30/03/11, par Boubacar Sanso Barry
209 Le Pays – 30/03/11” L‘option militaire a finalement pris le dessus dans les tentatives de résolution de la crise ivoirienne. Et bientôt, Abidjan pourrait tomber comme l‘ont été à tour de rôle les différentes grandes villes ivoiriennes du sud, suite à l‘offensive généralisée déclenchée par les forces pro-Ouattara, désormais “Forces républicaines

Page suivante : 4.4.6 Le jour où Laurent Gbagbo est tombé

Retour au menu : Les enjeux de la transition politique et humanitaire : le cas de la crise politico-militaire et postélectorale en Côte d’Ivoire