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4 .2.5 La résolution du conseil de sécurité de l’ONU et la neutralité de la Russie et de la Chine

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Le 07 décembre 2010, la Russie avait fait obstacle à l’adoption d’une déclaration du conseil de sécurité de l’ONU reconnaissant la victoire d’Alassane Ouattara à l’élection présidentielle ivoirienne, avait-on appris de sources diplomatiques. Après cinq heures de discussions à huis clos, la séance avait été levée pour la journée et les représentants russes avaient demandé à consulter leur gouvernement, avait-on précisé(189).

Contrairement au tergiversement de la Russie, le représentant spécial des Nations Unies en Côte d’Ivoire, Y.J. Choi, avait reconnu la victoire d’Alassane Ouattara. « La Russie s’interroge sur la proclamation du vainqueur par les Nations unies », avait précisé un diplomate. Dans les chancelleries occidentales, on jugeait que l’émissaire de l’ONU était à même de certifier les résultats en vertu des accords de paix de 2005.

« C’est une situation singulière », avait déploré Susan Rice, ambassadrice américaine à l’ONU, s’adressant à la presse. « J’ignore pourquoi la Russie tergiverse avec des résolutions qu’elle a elle-même votées », avait-elle poursuivi, ajoutant que Choi « n’a pas désigné le vainqueur, mais seulement certifié les résultats de la commission électorale indépendante ». Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon avait lui aussi apporté son soutien à Ouattara.

L’attitude de Moscou était primordiale dans la mesure où les déclarations du conseil de sécurité de l‘ONU étaient adoptées à l’unanimité. « À l’exception d’un État membre, personne au Conseil n’a aucun doute quant à la légitimité des conclusions et des actes » de Choi, avait poursuivi Susan Rice.Quelques heures plus tôt, le diplomate sud-coréen s’était brièvement adressé aux membres du Conseil par visioconférence, pour dire que le résultat du scrutin était « très clair ».
« Il n’y a qu’un vainqueur avec une marge claire », avait-il déclaré d’Abuja, où il assistait à une réunion de la communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). « Le moment est venu pour nous de préserver le résultat. Ignorer la volonté populaire à ce stade reviendrait à abandonner le peuple (ivoirien) et à la perte des moyens importants mobilisés ces huit dernières années par la communauté internationale », avait-il ajouté.

. Le blocage de la Russie et de la Chine retarde la déclaration du conseil de sécurité de l’ONU(190) : « Nous continuons de discuter sur les contours d`une possible réponse »après des discussions une bonne partie de la journée, avait souligné l`ambassadrice américaine à l`ONU, Susan Rice, qui assurait la présidence du Conseil de sécurité pour le mois de décembre 2010. « Nous continuerons demain », avait-elle encore indiqué. « La plupart des délégations sont impatientes de parler d`une seule voix” mais “d`autres ne sont pas encore prêtes pour le faire », avait-elle dit.

« Il est temps de parler et de parler clairement dans le cadre d`un effort international unifié pour soutenir le peuple de Côte d`Ivoire », avait-elle dit. Un peu plus tôt, avant le début des discussions de l`après-midi, Mme Rice avait accusé la Russie de “pinailler”.

La Russie avait bloqué une déclaration des quinze pays du conseil de sécurité de l‘ONU en estimant que celui-ci outrepassait son mandat en déclarant Alassane Ouattara vainqueur de l`élection présidentielle, selon des diplomates. Mme Rice avait cependant insisté sur le fait que l`envoyé spécial des Nations Unies en Côte d`Ivoire, Choi Young-Jin, avait agi strictement selon le mandat donné par le conseil de sécurité en reconnaissant la victoire de M. Ouattara face au président sortant Laurent Gbagbo. « Je ne sais pas pourquoi la Russie pinaille à propos de résolutions qu`elle a elle-même votées », avait dit Mme Rice à la presse entre deux séances de négociations tendues.

« Les consultations de l`après-midi ont eu lieu », avait-elle dit à la lumière du communiqué de l`organisation régionale ouest-africaine, la CEDEAO, qui avait demandé au président sortant Laurent Gbagbo de « rendre le pouvoir sans délai » et qui reconnaissait Alassane Ouattara comme le gagnant de l`élection présidentielle. « Il appartient au président sortant Gbagbo de reconnaître pacifiquement et de façon responsable le résultat et de s`incliner », avait-elle ajouté, reconnaissant toutefois “des vues différentes au sein du Conseil”.

La Chine et la Russie, qui s‘étaient toujours opposées à toute ingérence étrangère, avaient, eux, pris leurs distances face à ce qui ressemblait à un consensus international. Tous deux membres du Conseil de sécurité des Nations Unies, leur accord était nécessaire à toute action de l‘organisation internationale. Officiellement neutre, la République populaire de Chine avait invité les parties en présence à « donner la priorité aux intérêts nationaux et publics, rester calme et régler les différents par des procédures juridiques et par le dialogue politique, afin de maintenir la stabilité nationale et la solidarité ». Si la Russie n‘avait, elle, pas encore fait de déclaration officielle, elle se serait opposée à l‘idée que le Conseil de Sécurité soutenait un candidat, empêchant ainsi toute déclaration du Conseil visant à soutenir Alassane Ouattara. Un mutisme suivi par l‘Afrique du sud, qui aurait choisi d‘attendre le prochain sommet de l‘Union Africaine qui devrait se tenir ultérieurement pour officialiser sa position. Un comportement dénoncé par l‘Alliance démocrate qui avait critiqué l‘attentisme de l‘administration Zuma.

Dès lors, Laurent Gbagbo n‘avait reçu que deux soutiens officiels, venant de l‘Angola et du Liban, tous deux représentés lors de son investiture au Palais présidentiel. « Nous sommes venus pour assister à l‟investiture du Président Laurent Gbagbo qui a été réélu au terme du second tour du scrutin présidentiel », avait déclaré à cette occasion l‘ambassadeur angolais en Côte d‘Ivoire.

Alors que l‘Union Africaine s‘était prononcée en faveur de la victoire d‘Alassane Ouattara à la présidentielle ivoirienne, Laurent Gbagbo espérait encore rallier des soutiens en Afrique. Conduite par l‘ancien ministre de l‘enseignement supérieur Sery Bally, une délégation s‘était rendue en son nom au Ghana, au Togo, au Bénin et devait faire le déplacement du Nigeria, alors que la CEDEAO se réunissait à Abuja, la capitale nigériane. Une réunion à laquelle aucun dirigeant ivoirien n‘était invité et qui avait vu la CEDEAO suspendre la Côte d‘Ivoire et reconnaître officiellement la victoire d‘Alassane Ouattara.
. Les soutiens de Gbagbo et d’Ouattara : La grande majorité des pays et organisations de la communauté internationale avait pris position en faveur d‘Alassane Ouattara, excepté la Chine et la Russie, qui bloquaient toute action du Conseil de sécurité de l‘ONU contre Laurent Gbagbo. La CEDEAO avait également décidé de suspendre la Côte d‘Ivoire et de reconnaître la victoire d‘Ouattara.

Si l‘issue du bras de fer qui l‘opposait à Laurent Gbagbo se jouait au nombre de soutiens, Alassane Ouattara aurait sûrement le dessus. Après les Nations Unis, la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l‘Union Européenne, la CEDEAO, et l‘Union Africaine, l‘Allemagne avait ajouté son nom à la liste des nombreux soutiens au candidat du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP).

L‘ONU, qui avait annoncé qu‘elle allait retirer une partie de son personnel de Côte d‘Ivoire, avait entériné la victoire d‘Alassane Ouattara. Une position que la France et les Etats-Unis avaient appuyée. Barack Obama avait mis en garde le président ivoirien sortant Laurent Gbagbo contre un « isolement accru » et avait prévenu qu‘il subirait les « conséquences de ses actes injustes » s‘il s‘accrochait au pouvoir. Nicolas Sarkozy avait, lui, ouvertement demandé à Laurent Gbagbo de céder la place au « président élu », précisant ainsi la position de la France. La situation en Côte d‘Ivoire avait toutefois crée quelques remous au sein du parti socialiste français. Certains de ses membres, comme Jack Lang ou Henri Emmanuelli, avaient tenu des propos ambigus, avant qu‘un communiqué ne vienne s‘aligner sur la position du gouvernement français. Considérant Alassane Ouattara comme « le vainqueur légitime » de l‘élection présidentielle, l‘Union européenne était allé plus loin, en évoquant un possible recours à des « sanctions » si la crise politique n‘était pas résolue.

189 Le Point – 08/12/10 : « L’organisation internationale s’apprêtait à voter une résolution reconnaissant la victoire de l’adversaire de Gbagbo ».
190 Le Monde – 08/12/10 : « Le Conseil de sécurité de l`ONU s`est séparé mardi soir sans être parvenu à une déclaration sur la Côte d`Ivoire, la Russie bloquant l`adoption d`un texte commun, alors que des négociations se poursuivent depuis vendredi, ont indiqué des diplomates ».

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