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2.2.2. Définir les représentations sociales

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Si la théorie des représentations collectives de Durkeim n’a pas eu dans un premier temps le succès qu’il escomptait, c’est probablement que cette notion, trop large ou mal définie, n’a pas été acceptée dans le monde scientifique. Il en avait d’ailleurs bien conscience alors qu’il terminait son article « Représentations individuelles et représentations collectives », en parlant de la vie sociale et en rejetant une fois de plus l’analyse par la psychologie individuelle très en mode à l’époque :

« … le monde nouveau qui est ainsi ouvert à la science dépasse tous les autres en complexité; que ce n’est pas simplement une forme agrandie des règnes inférieurs, mais que des forces y jouent qui sont encore insoupçonnés et dont les lois ne peuvent être découvertes par les seuls procédés de l’analyse intérieure. » (Durkeim, 1898 : 25)

Le concept de représentation sociale rencontre les mêmes difficultés de cadrage : « … la notion de représentation sociale, par la largeur même du champ qu’elle intéresse, pose des problèmes d’appréhension » (Mannoni, 1998 : p. 52). Une certaine précaution s’impose ainsi à l’ensemble des chercheurs pour la définir. Puisqu’il faut bien un point de départ, nous retiendrons la définition qu’en fait de Denise Jodelet pour son efficacité et sa concision :

« C’est une forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social. » (Jodelet, 1999 : 53)

Nous retrouvons ici certaines caractéristiques qui nous ont permis de cerner la notion de représentation mentale et collective en début de chapitre. C’est à la fois un processus « socialement élaboré et partagé », et le produit d’un processus : « une forme de connaissance ». De plus, cette représentation participe « à la construction d’une réalité ».

Il ne s’agit donc plus de représentation individuelle, mais bien de représentation partagée, indépendante du groupe social dont elle est le produit, selon l’approche de Durkeim. De plus, ce produit est commun « à un ensemble social ». Cette formule nous rappelle aussi une autre de Durkeim :

« La matière première de toute conscience sociale est étroitement en rapport avec le nombre des éléments sociaux, la manière dont ils sont groupés et distribués » (Durkeim, 1898 : 23).

Par ailleurs, Jodelet précise le lien entre représentations sociales et groupes sociaux :

« Elles [les représentations sociales] s’étayent sur des valeurs variables selon les groupes sociaux dont elles tirent leur signification comme sur des savoirs antérieurs réactivés par une situation sociale particulière. » (Jodelet, 1999 : 52)

Mais le rapport avec les représentations collectives de Durkeim s’arrête là. L’approche de ce dernier ne dépasse pas l’étude des traditions populaires, thèmes mythiques et légendes.

« Pourquoi se limiter seulement à celles des traditions ? » se demande Moscovici (1999 : 97). Il veut également se libérer des notions spécifiques que sont les opinions, les stéréotypes, les attitudes, notions que les behavioristes (35) utilisaient en réduisant la connaissance d’un individu au modèle stimulus-réponse, ne donnant aucune place à l’individu(36), comme le rappelle Jodelet (2011 : 367). Ainsi, dans son souci de cerner la spécificité de la pensée sociale que sont les représentations sociales, Moscovici réactualise, en faveur de nos sociétés contemporaines, le concept des représentations collectives en devenant celui des représentations sociales :

« La révolution provoquée par les communications de masse, la diffusion des savoirs scientifiques et techniques transforme les modes de pensée et crée des contenus nouveaux. » (Moscovici, 1999 : 98)

La notion des représentations sociales hérita donc du concept original de Durkeim dans le domaine de la sociologie pour trouver sa théorie au croisement de la sociologie et de la psychologie : la psychosociologie. Son champ d’études en est considérablement élargi, servant d’outil théorique dans de nombreux secteurs, par exemple : la communication sociale, la diffusion et l’assimilation des connaissances, la génétique des représentations, la formation dans les groupes ou, bien sûr, le champ éducatif (Jodelet, 2011 : 372). Cette faculté à traverser de nombreuses disciplines est proportionnelle à sa difficulté d’appréhension dans un monde en changement :

« C’est parce qu’il s’agit d’un mouvement que son approche empirique ou théorique engendre des difficultés et donnera toujours du fil à retordre au chercheur » (Seca, 2010 : 21).

35 Selon le Grand dictionnaire de la psychologie Larousse (2000), le béhariorisme est « un courant de la psychologie scientifique fondé sur l’approche comportementale des activités psychologiques et se le principe d’économie explicative maximale, qui limite le recours à des entités ou variables intermédiaires entre l’entrée, ou stimulus, et la sortie, ou réponse ». 36 Nous développerons cette idée dans le paragraphe 2.2.3

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