Dans une perspective de compréhension et d’analyse de l’évolution sémantique du
terme « stress », il convient tout d’abord de s’intéresser à son origine étymologique afin de
considérer les définitions et connotations qui lui incombent aujourd’hui.
Du latin « stringere », renvoyant aux verbes « étreindre », « serrer » ou encore « lier »
(Stora, 1991), le mot « stress » est employé au XVIIème siècle par la langue anglaise pour
exprimer l’épreuve, l’adversité et l’affliction, s’instituant dès lors comme stigmate de la
souffrance et de la privation d’une vie résolument éprouvante. Un siècle plus tard, le terme
« stress » se défait de cette acception émotionnelle pour s’attacher davantage à sa cause, se
caractérisant ainsi en « [une] force, [une] pression produisant une tension et à plus ou moins
long terme une déformation.» (Stora, 1991, p.6). De cette nouvelle propriété, originellement
empruntée au domaine de la métallurgie et communément associée au mot « strain »,
traduisant une tension excessive conduisant à la déformation et/ou à la rupture, s’ensuit un
raisonnement analogique conférant au stress un rôle étiologique dans l’apparition de troubles
psychologiques et somatiques chez les individus soumis à des tensions.
Traversant la Manche au XXème siècle sous sa signification mécanique avant de
rejoindre le vocabulaire médical et social, le terme « stress » s’est vulgarisé, surmédiatisé et
dénoncé par une société paradoxale, au fondement de ses propres protestations et
controverses.
Aussi, de nos jours, loin d’être réservé aux seuls discours scientifiques, cet
anglicisme est employé quotidiennement pour décrire et symboliser cette réaction
émotionnelle et corporelle, trop souvent générée par les événements et préoccupations de la
vie moderne.
Ainsi, si Le Petit Larousse répertorie le « stress » sous l’« ensemble de
perturbations biologiques et psychiques provoquées par une agression quelconque sur un
organisme », d’autres définitions, à l’instar des « multiples difficultés auxquelles l’individu a
du mal à faire face […] et les moyens dont il dispose pour gérer ces problèmes » (Doron &
Parot, 1991, p. 684), mettent en exergue le caractère polysémique de cette notion.
Au regard de cette évolution sémantique et des nombreuses connotations qui lui sont
inférées, le stress se révèle être un concept au carrefour de nombreuses disciplines telles que
la physique, la psychosociologie, la psychiatrie, la psychanalyse, la neurophysiologie, la
neurochimie, ou encore l’immunologie. Subséquemment, concept interdisciplinaire par
excellence possédant cette rare spécificité de féconder presque toutes les sciences, la notion
de « stress » s’est largement déployée dans le domaine de la psychologie, motivant ainsi
nombre de modèles conceptuels et construits théoriques.
