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2) La Distribution

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La fonction de distribution a pour objet d’organiser la rencontre entre l’œuvre et son public.

Certes distribuer un service culturel c’est avant tout permettre au public d’avoir accès à une expérience de consommation dans un lieu dédié. Ainsi, dans un premier temps, avoir accès au service culturel nécessite généralement, dans un premier temps, d’acheter ou de réserver un ticket d’entrée donnant droit à un usage du service. Dès lors, et nous n’épiloguerons pas sur ce point car il ne concerne pas le caractère détonnant dans le concept de l’identité d’un projet, il existe une diversification quant aux systèmes de distribution des tickets d’entrée : dans les grandes surfaces spécialisées (FNAC, Virgin…), et, de plus en plus et essentiellement sur Internet via des agences intermédiaires (Ticketmaster, Digitick…) ou sur les interfaces des sites des organisations elles-mêmes.

Néanmoins, outre la problématique de la réservation des billets, le « P » de Distribution concerne également directement la gestion du lieu culturel lui-même, puisque c’est là que l’expérience est finalement délivrée au public. L’organisation de la distribution du service culturel repose alors à la fois sur la gestion de l’environnement du service, sur la gestion de la disponibilité temporelle du service et sur la gestion du personnel en contact, lequel participe en premier chef à la livraison de l’expérience culturelle.

I. Gestion du site

Le lieu, pour sa part, est un facteur à prendre en compte pour faire d’un Festival un projet culturel détonnant. Sur un site classé au patrimoine, sur une plage, sur une île (à Dziget), en ville (Bourges), à la campagne (Eurockéennes), dans une station balnéaire (Leucate) ou de sports d’hiver (Tignes), à chaque Festival son cadre naturel d’organisation, sa « mise en scène ». Le cadre représente un facteur qui fait varier l’ambiance règnant sur le site et créera une atmosphère particulière. Et à chaque site ses caractéristiques qu’il convient de mettre en avant. La campagne de Carhaix permet un certain retour aux sources, une atmosphère camping, vacances, rappelant le cadre de Woodstock. La nature et la position géographique est déterminante dans la mesure où elle détermine l’aménagement du site et les possibilités de modifications de celui-ci au fil des éditions.

Carhaix, en pleine campagne possède du même coup les atouts de proximité par rapport aux grandes villes et aux transports mais également un grand potentiel de « superficie » du site. En une journée le site de Kerampuilh, site des concerts, accueille autant de spectateurs que le champ de foire en trois jours : 60 000 personnes. Ce chiffre représente la jauge idéale pour laisser au public un certain confort, une volonté du festival, alors que 10 à 20 000 billets supplémentaires pourraient aisément être vendus chaque année. Nous retrouvons sur le site une scène principale mais également 2 scènes plus petites permettant au public de vivre les concerts plus proche des groupes, un espace ouvert aux arts de la rue et un vaste chapiteau pour accueillir les musiques bretonnes.

En 2010, plus de 18.000m² de terrain supplémentaire seront ouverts au public, l’objectif étant d’améliorer l’accueil et le confort des spectateurs. Parmi ces 18 000m2 ouverts au public en 2010, 600 m2 de terrain seront par exemple alloués pour proposer, derrière la scène principale, une plage de sable fin et des transats. Ce Carhaix-plage sera installé derrière une des 2 scènes plus petites et une quatrième scène, très proche du public, y sera montée, et accueillera des groupes promus par la Fédération internationale de festivals « De concert ». De plus, les arts de la rue seront accueillis sur un nouvel espace, dans une ambiance circassienne et un espace art urbain sera ajouté avec la réalisation de tags en direct. Pour les petits creux, 150 vastes tables supplémentaires seront disséminées sur le site, abritées par des toiles tendues de 2.000m² (pour se protéger du soleil). Autres nouveautés : la création de quatre nouvelles plateformes pour personnes à mobilité réduite, d’une fontaine à eau, ou encore de 54 toilettes assises supplémentaires et 30 ha. de terrains supplémentaires réquisitionnés pour la fête (10 pour les trois scènes et l’enceinte publique et 20 pour les campings et parkings).

De plus, comme évoqué dans les lignes ci-dessus, les 30 ha. de camping font partie intègre de l’expérience du festivalier : avec ce retour à la verdure et le développement d’un camping gratuit, un nouveau rituel s’instaure, à la joie de venir faire la fête entre amis s’ajoute le plaisir de pouvoir rester plongés dans l’univers du festival 3 jours durant, sans avoir à quitter le site.

Enfin, depuis maintenant deux ans des Espaces Détente ont été aménagés à l’entrée du site et dans l’espace Garenne – accolé aux sites des concerts -, sur lesquels les festivaliers peuvent se reposer et s’extraire des lieux de concerts. Sur ces espaces, ils retrouvent les offres de produits issus du commerce équitable et de l’agriculture biologique, des lieux de repos avec des tables et des bancs, l’espace prévention des risques toxicologiques.

II. Gestion de la temporalité du produit

La date de l’évènement est également un facteur à prendre en compte pour faire d’un Festival un projet original. Eté, automne, hiver, printemps, chaque évènement se positionne dans le calendrier pour faire sa place parmi les centaines d’évènements culturels organisés en France et en Europe chaque année. Le fait que 8 Festivals sur 10 aient lieu de mai à septembre n’est pas un hasard et est la résultante de plusieurs facteurs dont principalement le mode de vie des populations et le climat. En effet, les organisateurs s’adaptent au mode de vie des populations et a fortiori le calendrier des vacances. Le Festival, est en effet, pour les ¾ des Festivaliers (jeunes de 20 à 35 ans pour la majorité), un séjour inscrit à leur calendrier annuel et nombreux sont ceux qui prennent congés ou profitent de leurs vacances pour participer au Festival qui dure en général 3-4 jours. De plus, sachant qu’un Festival se déroule en général à l’extérieur, la date choisie n’est pas aléatoire car fonction des conditions météorologiques. Néanmoins certains Festivals font le pari d’organiser leur Festival dans de grandes salles ou dans des structures culturelles existantes. L’ambiance s’en retrouve transformée, charge alors à l’organisateur de miser sur d’autres « services périphériques » et « expériences » à ses festivaliers. De même, Les représentations des groupes s’organisant dès lors sur le mode tournée de festivals en été et concerts pour les 3 autres saisons de l’année, il apparaît pertinent de constater qu’il est peut-être plus aisé de faire venir un groupe en dehors de l’été au regard du nombre impressionnant de Festivals ayant lieu durant l’été.

Le Festival de Carhaix, initialement organisé sur 3 jours et malgré une unique édition en 2009 qui dura 6 jours, a ajouté depuis 2008 le jeudi soir à sa programmation. Le Festival dure désormais 4 jours et permet de proposer une programmation plus riche, plus ouverte sur le public et le fait que l’évènement dure un grand week-end favorise la prise de congés et le déplacement inédit pour les Festivaliers qui en font un évènement d’autant plus inscrit sur leur calendrier de festivités ou de vacances.

Pour ce qui est des horaires, les concerts du Festival débutent à 17H le jeudi, 16H le vendredi, 15H les samedis et dimanche pour terminer à 00H le jeudi soir, 3H les vendredis et samedi soir et 02H le dimanche. Ces horaires maximisent le temps des festivaliers qui restent sur place les 3 ou 4 jours. En effet, résidant pour la majorité dans les campings gratuits, le temps en dehors du site facilite la vie entre les groupes et les rencontres sans oublier le repos. Le

Festival représente pour les campeurs des petites vacances au camping avec ses divertissements sociaux et avec pour activité principale le spectacle musical. Le site disposant de 3 scènes, les concerts sont, parfois en chevauchement ou parfois uniquement sur une seule scène à la fois (les groupes les plus populaires). Les horaires sont également adapté aux horaires de travail pour celles et ceux qui font le déplacement à la dernière minute : c’est le cas le jeudi et le vendredi. Jean-Philippe Quignon, co-programmateur des Vieilles Charrues explique le passage de tête d’affiche en fin de soirée car : « On essaie de construire les journées pour qu’il y ait une montée en puissance progressive. Pour que le public garde de l’énergie jusqu’à la fin. ».

III. Gestion du personnel en contact

Dans certains cas, l’association du public, comme « co-producteur », peut représenter une condition nécessaire de satisfaction. D’une façon générale, il est possible de favoriser une appropriation d’une manifestation culturelle par le public quand celui-ci est libre de construire lui-même son offre. A Carhaix, le public peut choisir de prendre soit le Pass « 4 jours », soit le Pass « 3 jours » ou alors le Pass « journée ». Ainsi, les Festivaliers visionnent la programmation en amont de l’évènement et réalisent leur choix suivant les concerts auxquels ils désirent « participer » suivant leur disponibilité et leurs goûts musicaux.

De même, comme évoqué précédemment pour l’investissement et la mobilisation de tous les acteurs locaux, dans ce festival, quelques 5 000 bénévoles sont présents sur le site et sont au courant de la programmation et du déroulement du festival. Comme il a été évoqué précédemment, une légion de bénévoles sont fidèles au poste : buvettes, restauration, consignes, billetterie, campings, nettoyage, accueil artistes. Ainsi, pour l’accueil des festivaliers, des Points « Information » sont également disposés sur le site de Kerampuilh tout comme à l’extérieur du site pour guider le festivalier. Ces « laboureurs » de la première heure, d’années en années, sont passés d’une centaine à 5 000, avec un mot d’ordre inchangé : “faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux ». Et impossible d’envisager le festival sans eux et la relation se prolonge même au-delà de l’été. En effet, l’hiver venu, tout fini toujours par un banquet, la fête des bénévoles. Mais ce qui est à mettre en avant est que c’est toute un village qui vit « pour » et « au rythme » du Festival des Vieilles Charrues le temps d’une semaine tout comme le reste de l’année. Les habitants sont fiers de « leur » projet culturel et se mettent tous en 4 pour qu’il soit une réussite à chaque édition. En effet, en plus des acteurs économiques locaux, certains carhaisiens n’hésitent pas à transformer leur jardin en minicamping ou en chambres d’hôtes pour l’occasion afin d’accueillir des festivaliers.

Pour maximiser cette appropriation du service – concerts – par les festivaliers, nous pouvons citer la présence des écrans géants, placés sur le côté de chaque scène ainsi qu’à l’arrière de la foule – de la scène principale – afin de permettre une expérience des plus intenses et des plus proches pour le public. L’appropriation de l’évènement par les participants peut également se traduite par la diffusion de vidéos ou d’articles sur le site internet et même, pour certains festivals tels qu’Art Rock à Saint-Brieuc, par la diffusion d’un magazine quotidien qui paraît chacun des 4 jours du festival afin d’immerger le festivalier dans le projet.

Enfin, en petit clin d’œil du P de « Promotion », il est d’évoquer que le site Internet du Festival des Vieilles Charrues se transforme en véritable média durant le Festival : retransmission des captations vidéo des différentes scènes, photos, comptes-rendus de concert et anecdotes en direct des coulisses. Le but est en effet de faire vivre aux internautes le festival de l’intérieur, à la fois pour ceux qui n’ont pas pu venir et pour ceux qui veulent repartir avec un souvenir.

De même, sont mis en place des outils internet sous la forme de forum, d’espaces de discussion en ligne sur le site permettant une implication et une participation du public au projet. Ce point est à souligner car ces forums permettent de créer, en ligne, des stratégies d’interaction plus efficaces « avec » et « entre » les publics. En effet, l’étude du comportement et des motivations des consommateurs d’œuvres artistiques, dialoguant en ligne, apporte un éclairage sur leurs besoins et leur comportement de façon plus générale. Néanmoins, ces actions, certes détonnantes par l’implication du public, ne seront pas développées car ne sont pas l’objet de la problématique dont le sujet porte sur la définition de la création d’un projet culturel détonnant.

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