Gagne de la cryptomonnaie GRATUITE en 5 clics et aide institut numérique à propager la connaissance universitaire >> CLIQUEZ ICI <<

2-3) Une réalité plus nuancée :

ADIAL

Qui dit caricature dit exagération. Et concernant l’islam, il semblerait bien que cela soit ce dont les médias aient fait preuve : d’exagération.
Ne mettant l’accent que sur les potentiels risques de « communautarisme musulman », les médias ont amplifié un phénomène dont on ne sait même pas s’il mérite le qualificatif d’« ultra minoritaire » tant il semble quasi inexistant.

Alain Gresh, dans son article Islam et médias (Islamlaïcité.org) avance que cette inquiétude envers un possible communautarisme musulman est disproportionnée au regard des capacités réelles en termes de force sociale, politique et économique de la « population musulmane » française. En effet selon lui, être conscient de la « situation de faiblesse », et de la marginalisation économique et sociale dans laquelle se trouvent la plupart des musulmans français c’est aborder un élément « tout à fait décisif […] lorsque l’on parle de l’islam ».

Ainsi, il s’étonne que la France, comme le reste de l’Occident, ait une « vision de la menace islamique [aussi] éloignée de toute réalité », « comme si nous étions à la veille de l’effondrement de la civilisation occidentale. »

De plus, loin du conditionnement psychologique imaginé par l’opinion, les sondages n’ont de cesse de révéler l’émiettement des pratiques des musulmans. Tant et si bien qu’il va devenir de plus en plus difficile à l’avenir de continuer cette « catégorisation religieuse » des individus dans les médias. Aujourd’hui il apparaît, non seulement désuet, mais surtout abusif de catégoriser une partie des citoyens français sous le label « musulman » ou « membre de la communauté musulmane ». Car, faire de la religion un facteur essentiel de motivation des actes des individus c’est ne pas tenir compte de toutes les études qui démontrent que ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Le soi-disant « repli identitaire musulman » annoncé par nos médias serait donc plus le produit d’un certain sensationnalisme qu’une réalité tangible. En effet, si les musulmans sont de moins en moins « musulmans » et de plus en plus « incroyants », alors pourquoi chercheraient-ils à se replier sur un « eux-mêmes » qui n’existe plus, ou de moins en moins ?

D’ailleurs finalement, les Français se soucient peu de ce supposé « communautarisme musulman ». Leurs préoccupations semblent même à mille lieues de cela.
C’est ce que révèlent les résultats récents d’un sondage Sofres selon lequel les principales préoccupations des Français sont (dans l’ordre) le chômage, la santé, les retraites et le pouvoir d’achat ; « l’intégration et les relations entre les groupes sociaux » arrivant en toute dernière position.

Ainsi, comme se le demande Mediapart dans un article intitulé Pourquoi la France rejette-t-elle son islam ? « le battage actuel sur le péril musulman viserait-il à fonder l’idée que nous n’avons pas d’autre choix que d’accepter les politiques de stigmatisation et d’exclusion actuellement mises en oeuvre? ». « Chercherait-on à détourner l’attention des citoyens des questions qui leur tiennent à coeur ? »

De son côté, Laurent Muchielli, chercheur au CNRS, met en avant la force de l’opinion sur la perception que l’on a d’un phénomène. Concernant la délinquance par exemple, il explique que, si cette dernière n’a pas vraiment augmenté ou évolué, c’est la tolérance envers celle-ci qui a changé, générant ainsi une sorte de « focalisation » qui donne une impression (fausse) d’aggravation. Ainsi, si l’on applique ce phénomène au « communautarisme musulman » l’on se rend compte que, les médias et les politiques on pu assez facilement instaurer une inquiétude forte à propos de « replis identitaires » qui sont somme toute quasi inexistants.

Cette analyse de ce que l’on appellera « l’orientation médiatique des préoccupations » permet de relativiser les inquiétudes qui entourent la « question musulmane » et de comprendre que ce n’est pas parce qu’un phénomène est très présent médiatiquement qu’il est très présent dans la réalité.

Aussi finalement, si la France peut paraître à première vue anxieuse et crispée, elle ne l’est peut être pas autant que l’on veut bien nous le faire croire. Les médias, dont les impératifs économiques et de séduction du public poussent parfois à monter en épingle certains phénomènes, se sont peut être montrés un peu trop « zélés » sur le sujet des musulmans et de leurs prétendues « tentations communautaires ».

Page suivante : 3) Une stigmatisation médiatique qui s’ajoute à des difficultés déjà présentes :

Retour au menu : Les médias, vecteurs d’une image négative et stéréotypée des musulmans : mythe ou réalité ?