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1. La règle dans sa théorie

ADIAL

a) L’article L.312-1-2 du Code Monétaire et Financier : un doute persistant quant à l’indissociabilité des assurances liées aux crédits immobiliers

Au cours des travaux préparatoires de la loi Murcef, les représentants de la profession bancaire ont exprimé leurs inquiétudes au sujet du caractère indissociable des assurances dont le bénéfice est souvent délégué aux établissements de crédit en remboursement de certains prêts.
Pour les banquiers ces assurances doivent être qualifiées de produits indissociables du crédit d’autant plus qu’elles en assurent la bonne fin. Le caractère indissociable de ces assurances permettrait aux banquiers de continuer à coupler les crédits et des garanties d’assurances adaptées qui leur permettent de parer à toute insolvabilité de leur débiteur.
Pour autant, peut-on légitimement soutenir l’existence d’un lien indissociable entre le service financier que constituent le prêt et l’assurance ?

En outre, l’octroi du crédit et l’obligation pour le client d’adhérer à l’assurance de groupe constituent selon moi une vente groupée puisque le client peut tout à fait souscrire une police d’assurance individuelle qui serait indépendante et qui présenterait pour le banquier les mêmes garanties que son assurance de groupe.
Dans cette hypothèse, le banquier pourrait exiger non pas l’adhésion à son assurance de groupe (vente liée), mais la fourniture par celui-ci d’un produit assurance équivalent comme condition sine qua non de l’octroi du crédit.
Cette solution qui aurait l’avantage de laisser tout le choix de son assureur par l’emprunteur présente malheureusement un double inconvénient pour le banquier.
D’une part, cela le contraindrait à devoir vérifier les polices souscrites de façon indépendantes par les emprunteurs notamment en termes de garanties et de veiller à leur validité dans le temps notamment en s’assurant que l’emprunteur paie effectivement les primes afférentes.
D’autre part, les liens capitalistiques qui unissent les banques et leurs filiales d’assurances ou des sociétés d’assurances partenaires sont autant d’acquis qu’il serait regrettable de remettre en cause en soumettant les assurances de groupe en matière de crédit à la prohibition des ventes liées.

La sauvegarde des avantages que je viens rapidement de décrire aurait poussé Monsieur Ch. COURSON à faire une proposition d’amendement au texte qui depuis est devenu l’article L.312-1-2 du Code Monétaire et Financier devant la Commission des Finances de l’Assemblée Nationale.
Cette proposition d’amendement avait pour objet d’insérer dans l’article précité la reconnaissance expresse du lien indissociable entre le prêt et l’assurance.
Bien qu’ayant reconnu le bien fondé de l’existence d’un lien indissociable entre le crédit et l’assurance, les parlementaires n’ont pour autant pas procédé à la réécriture du texte prohibant les offres groupées.
Madame N. BRICQ avait en effet fait observer, et emportant par la même l’approbation des membres de la Commission, que cet amendement était inutile en ce sens que l’article L.312-9 du Code de la Consommation prévoyait déjà la possibilité pour le prêteur de subordonner l’octroi du prêt à l’adhésion à une assurance de groupe .
Cette position a même été étayée par Madame F. PARLY (secrétaire d’Etat au budget de l’époque) selon laquelle les dispositions de l’article 6 relatives à l’interdiction des ventes liées dans le secteur bancaire n’ont pas vocation à remettre en cause les articles du Code de la Consommation existant en matière de crédit immobilier, et notamment l’article L. 312-9 .

Au final, l’indissociabilité des assurances de groupe liées aux crédits immobiliers régis par le Code de la Consommation a été reconnue par les parlementaires, non sur des critères factuels, mais sur le fondement textuel de l’article L. 312-9 du Code de la Consommation.
Cette solution est seulement valable pour les assurances adossées aux crédits immobiliers soumis au Code de la Consommation.
Ainsi, il est tout à fait loisible pour l’établissement de crédit de subordonner l’octroi du crédit à l’adhésion à son assurance de groupe emprunteur, ne laissant ainsi aucun liberté de choix de son assureur à l’emprunteur.

b) L’indissociabilité expressément reconnue par l’article L.312-9 du Code de la consommation

L’article L. 312-9 du Code de la consommation issu de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 dispose : « Lorsque le prêteur offre à l’emprunteur ou exige de lui l’adhésion à un contrat d’assurance collective qu’il a souscrit en vue de garantir en cas de survenance d’un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant du prêt restant dû, soit le paiement de tout ou partie des échéances dudit prêt, les dispositions suivantes sont obligatoirement appliquées :
1° Au contrat de prêt est annexée une notice énumérant les risques garantis et précisant toutes les modalités de la mise en jeu de l’assurance ;
2° Toute modification apportée ultérieurement à la définition des risques garantis ou aux modalités de la mise en jeu de l’assurance est inopposable à l’emprunteur qui n’y a pas donné son acceptation ;
3° Lorsque l’assureur a subordonné sa garantie à l’agrément de la personne de l’assuré et que cet agrément n’est pas donné, le contrat de prêt est résolu de plein droit à la demande de l’emprunteur sans frais ni pénalité d’aucune sorte. Cette demande doit être présentée dans le délai d’un mois à compter de la notification du refus de l’agrément. »

A la lecture de ce texte, on voit mal comment l’article susvisé du Code monétaire et financier pourrait prohiber la paire crédit-assurance de groupe emprunteur imposée par le banquier pour un crédit immobilier à la consommation alors que l’article du code de la consommation impose un certain nombre de normes d’ordre public précisément dans cette hypothèse.

D’ailleurs cette solution a été récemment confortée par la modification de l’article L. 312-8 du Code de la consommation suite à l’adoption de la loi n° 2008-3 du 3janvier 2008 pour le développement et la concurrence au service des consommateurs dite loi Châtel .
A été inséré dans cet article un 4° bis qui dispose que l’offre de crédit : « Sauf si le prêteur exerce, dans les conditions fixées par l’article L. 312-9, son droit d’exiger l’adhésion à un contrat d’assurance collective qu’il a souscrit, mentionne que l’emprunteur peut souscrire auprès de l’assureur de son choix une assurance équivalente à celle proposée par le prêteur ». Cette disposition est entrée en vigueur le 1er octobre 2008.

En d’autres termes, cette loi n’a pas pour résultat d’interdire aux banques d’imposer à leurs emprunteurs l’assurance de groupe qu’elles ont souscrit.
L’article L. 312-9 du Code de la consommation, non modifié, permet toujours au prêteur d’exiger de l’emprunteur qu’il adhère à l’assurance de groupe qu’il a souscrite, et en cas de refus, peut refuser l’octroi du prêt sans que cela ne soit constitutif d’une infraction de vente subordonnée .
En conclusion, ce n’est que dans le cas où la banque ne ferait pas de l’adhésion à son assurance de groupe une condition du prêt que l’emprunteur a la faculté d’imposer à la banque l’assureur de son choix, mais à la condition que cette assurance soit au moins équivalente en termes de couverture, à l’assurance proposée par la banque.

A l’évidence, la paire crédit-assurance de groupe emprunteur est licite en vertu de l’article L.312-9 du Code de la consommation.
Ainsi, pour le crédit immobilier à la consommation, le prêteur est non seulement autorisé à imposer la souscription d’une assurance emprunteur comme condition d’octroi du crédit, mais également à imposer l’adhésion à son assurance de groupe emprunteur.
En conséquence, l’emprunteur peut ne pas avoir le choix de son assurance et de son assureur lorsqu’il veut emprunter de l’argent pour acquérir un bien immobilier.

Il convient donc maintenant de s’intéresser à la pratique des établissements de crédit en la matière.

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