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1.1.2.2 Une adaptation aux activités spécifiques de l’agriculture

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Le courant de pensée de l’économie de proximité, ainsi que les concepts et outils qui en sont issus, proviennent essentiellement, on l’a vu précédemment, d’analyses de tissus industriels: districts industriels, troisième Italie, Silicon Valley et route 128, clusters, SPL. Une adaptation de ces concepts et outils au secteur agro-alimentaire ainsi que de leur mise en oeuvre, est absolument indispensable. Ce secteur a des spécificités propres qui ne permettent pas de l’assimiler mécaniquement au secteur industriel.

Une grande partie de ces particularités tient à la nature même de la production agricole. Cette production est notamment soumise à une multitude de contraintes et aléas, conjoncturels aussi bien que structurels: conditions pédo-bio-climatiques (sol, faune, climat, saisonnalité…), nécessités agronomiques (équilibre de la fertilité par rotation ou apport d’intrants, gestion de la surface disponible…), périssabilité et hétérogénéité des produits qui induisent de fortes incertitudes sur les quantités et qualités fournies. Aussi, les ressources financières sont souvent particulièrement faibles dans les pays du sud. Ces caractéristiques entraînent des risques importants et induisent des logiques paysannes très variées.

Par ailleurs, l’agriculture entretient une relation particulière avec le territoire puisqu’elle a un impact déterminant sur la gestion de l’espace et de ses ressources naturelle. L’agriculture et les produits agricoles sont ainsi naturellement porteurs de l’identité de ce territoire. Cette gestion peut fournir par ailleurs des biens et services d’intérêt général tels que la préservation de la biodiversité, protection des ressources naturelles, prévention des risques naturels, santé et sécurité alimentaire qui justifient un appui particulièrement fort des gouvernements

Il faut souligner en outre que la stratégie de spécialisation prônée dans le cas des entreprenariats des autres secteurs est, dans le contexte agricole, très risquée. L’application des APL à agro-alimentaire ne doit pas être conçue comme un processus de spécialisation qui privilégierait seulement la filière d’un produit. Les APL doivent ici constituer un moyen de structurer et de permettre la diversification des systèmes d’activité des agriculteurs à travers la valorisation de différents produits et la rencontre de nouveaux débouchés (Tonneau et al., 2009).

De même, les activités de transformation agro-alimentaire ont des caractéristiques différentes de celles des autres secteurs industriels par leur articulation particulière avec les producteurs agricoles. Les acteurs de la transformation sont souvent très liés aux acteurs de la production qui se confondent même souvent (transformation au sein de l’exploitation, coopérative de producteurs…). La transformation agro alimentaire bénéficie également d’une identité très marquée par la construction d’un savoir faire lié au territoire rural qui permet de spécifier davantage le produit par rapport à un produit agricole non transformé, par des « effets-terroirs ». Les produits agro-industriels entretiennent, de ce fait, une relation particulière avec les consommateurs selon la qualification du produit.

C’est pourquoi les Systèmes Agro-alimentaires Localisés (SYAL), forme particulière de SPL appliquée au secteur agro-alimentaire, ont été définis par un groupe de chercheurs français d’une façon très large comme « des organisations de production et de services (unités de production agricoles, entreprises agro-alimentaires, commerciales, de service, de restauration…),associées de par leurs caractéristiques et leur fonctionnement à un territoire spécifique » (Cirad-Sar, 1996). Les analyses développées par ce groupe de recherche, qui prendra la forme d’un « Groupement d’Intêret Scientifique consacré aux Systèmes Agro-alimentaires Localisés » (GIS-SYAL), abordent surtout les thèmes de la concentration des agro-industries rurales et de la qualification des produits agro-alimentaires.

Cependant, les petites agro-industries locales sont parfois très peu présentes sur les territoires ruraux des pays du Sud dans lesquelles la transformation est plutôt réalisée dans des unités de transformation collective. Cette situation est due aux coûts prohibitifs pour les producteurs locaux des appareils de transformation et surtout aux exigences sanitaires toujours plus strictes hors de portée, individuellement, de ces producteurs.

La concentration d’agriculteurs mettant en place des cultures particulières peut bénéficier d’une efficacité collective semblable à celle de l’industrie classique. Ainsi les APL sont souvent appliqués au Brésil à des concentrations d’agriculteurs mettant sur le marché les mêmes produits phares, spécifiques et structurants, générateurs de revenus et mobilisant plusieurs organisations. La littérature existante est davantage consacrée à des regroupements organisés autour d’indications géographiques ou de qualités protégées spécifique (Torre 2000; Casieri et al. 2008), valorisables sur des marchés particuliers.

Cependant, au delà de cette différenciation par les indications, le regroupement d’agriculteurs peut permettre d’acquérir une efficacité collective et de valoriser les produits destinés à la vente à travers l’innovation, la transformation collective, l’accès à des marchés spécifiques, même locaux.

Pecqueur définit le modèle « panier de biens » comme une combinaison de plusieurs biens et services qui crée une offre composite caractéristique d’un lieu. Ce modèle se distingue de la simple différenciation par la qualité ou les modèles de biens combinés, par son ancrage territorial. Sa spécificité provient des attributs structurels et environnementaux du territoire (différenciation par l’identité du produit) et d’une production qui résulte d’une association positive de biens et services, publics et privés, et qui supposent l’existence d’une stratégie publique qui peut varier d’un territoire à un autre (différenciation par la coopération) (Pecqueur 2005)

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