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1.1.2. La nouvelle phase dans l’histoire du mouvement humanitaire.

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Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, deux événements de nature très différente ouvrent une nouvelle phase dans l‘histoire du mouvement humanitaire. Le premier est l‘adoption, le 10 décembre 1948, par les Nations unies de la Déclaration universelle des droits de l‘Homme(12). L‘acte de 1948, bien que s‘‘inspirant des précédents des révolutions française et américaine, représente dans la vie internationale une véritable novation : la société internationale, cette dernière qui ne connaissait traditionnellement comme sujets de droit que des entités collectives – les États-nations -, admet désormais l‘existence des individus, dont l‘identité ne se réduit plus à leur seule nationalité. Il y a maintenant dans l‘ordre international, dominé par le droit positif des nations, des droits individuels relevant du droit naturel et du simple fait d‘être homme. Les droits de l‘homme viennent ainsi renforcer l‘assise juridique du mouvement humanitaire au moment même où certains observateurs s‘interrogent sur son statut et sens propre. Le second événement est la guerre froide.

En contraignant chacun à choisir son camp, elle introduit la politique dans une action humanitaire dont les finalités – aider, soigner, sauver- se situent en dehors des enjeux du pouvoir. Dans le contexte de la guerre froide et de la décolonisation, le mouvement humanitaire est ainsi amené à relever simultanément deux défis : l‘élargissement de son champ d‘action et la définition de ses rapports avec les États. Les interventions humanitaires se déroulaient, au XIX° siècle et dans la première moitié du XX°, sur la toile de fond des grands conflits interétatiques et sur une scène qui était le plus souvent européenne.

Après 1945, le paysage change : à l‘ombre de la dissuasion atomique, l‘Europe connaît une paix tempérée par l‘affrontement idéologique, tandis que, à la périphérie, se multiplient les conflits régionaux, plus ou moins contrôlés et alimentés par les deux camps en présence et qui feront, entre 1945 et 1990, près de quarante millions de victimes. Guerres de décolonisation et de libération, guérillas révolutionnaires, affrontements religieux ou tribaux échappent aux catégories du conflit classique comme aux règles du droit humanitaire. Le mouvement humanitaire se voit ainsi sollicité par une demande de plus en plus dispersée sur le plan géographique et variée, dans les modalités d‘intervention qu‘elle suppose. Mais, surtout, héritier des valeurs occidentales que sont la charité chrétienne et la philanthropie des lumières, il se trouve désormais, en se donnant le monde pour théâtre, confronté à la diversité des cultures.

A ces besoins accrus d‘assistance et de protection des populations fragilisées par les crises de tout genre, l‘Etat et la société civile apportent alors des réponses divergentes. Les États voient dans l‘action humanitaire au mieux une arme de propagande dans le conflit idéologique (chacun dénonce les violations commises par l‘adversaire tout en s‘employant à couvrir celles auxquelles pourraient se livrer ses partenaires), au pire un élément propre de déstabilisation et de conduite de politiques étrangères En contraste avec les réticences des Etats, les années cinquante et soixante sont celles d‘un engagement de plus en plus marqué de la société civile en faveur des causes humanitaires. Depuis lors, on assiste à une floraison d‘organisations non gouvernementales. Ces O.N.G. auxquelles les Nations unies reconnaissent un statut consultatif qui révèle l‘étendue des besoins que ni les Etats ni les institutions du système onusien tels que le Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), le Programme Alimentaire Mondial (PAM), le Fonds des Nations Unies pour l‘Enfance (UNICEF), la F.A.O., l‘Organisation Mondiale de la Sante (O.M.S.) etc. ne sont en mesure de satisfaire.

D‘inspiration religieuse comme le Caritas International, le « Church World Service », le « Catholic Relief Service », le Comité catholique contre la faim et pour le développement, la Commission Internationale Catholique pour les Migrations(CICM), etc., ou relevant de l‘initiative individuelle comme l‘américain « Cooperative American Remitance Everywhere (C.A.R.E.) », le « Deutsche Welthungerhilfe » allemand, « l‟Oxford Committee for Famine Relief (Oxfam) » britannique, « Amnesty International », etc…, des centaines d‘organisations voient le jour, constituées en dehors des États sinon contre leur gré. Elles témoignent, à travers un éventail de motivations qui vont de la charité la plus traditionnelle au tiers-mondisme le plus actif, de la naissance d‘une opinion publique mondiale dont le poids sur les décisions des gouvernements, insignifiant tant que règnent les contraintes de la guerre froide, se révélera souvent décisif dès que cette dernière aura pris fin.

12 Voir la déclaration universelle des droits de l‘homme sur le lien : http://www.un.org/fr/documents/udhr/

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