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1) Le commissariat aux affaires militaires

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En plus du théoricien révolutionnaire, Trotski est connu pour le haut poste qu’il occupe cinq années durant à la tête du Commissariat aux affaires militaires, organe suprême du commandement militaire des bolcheviks, duquel il prend part à la conduite de la guerre contre les armées blanches de Denikine. C’est bien Trotski qui organise et commande l’Armée rouge : « En qualité de commissaire du peuple à la Guerre et à la Marine, j’ai consacré environ cinq années à l’organisation de l’armée rouge et à la reconstitution de la flotte rouge »157. D’après ses propres termes, Trotski ne désire pas, de prime abord, quitter le Commissariat aux affaires étrangères, à la tête duquel il négocie le traité de Brest-Litovsk. C’est Lénine qui, à force d’insister, notamment face au danger imminent que représente la création d’armées régulières par les monarchistes russes, finit par convaincre Trotski d’accepter le poste de Commissaire aux affaires militaires, sorte de ministre de la Défense dans nos sociétés occidentales contemporaines : « Comme l’ennemi intérieur, renonçant aux conspirations, en était arrivé à créer des armées et des fronts, Lénine voulait que je prisse la tête des affaires militaires »158. Parallèlement à l’acceptation du poste, Trotski créé, de sa propre initiative, un conseil supérieur de l’armée, dont il prend aussitôt les commandes : « C’est seulement le 13 mars que la presse annonça ma sortie des Affaires étrangères et ma nomination de commissaire à la Guerre ; en même temps, j’étais nommé président d’un conseil supérieur de l’armée qui avait été créé récemment, sur mon initiative »159. Trotski, de son propre aveu, est un parfait autodidacte, ne connaissant rien à la pratique du commandement et à la technique militaire. Son rôle, il l’assume donc au fur et à mesure, en commençant par placer les bonnes personnes aux bons postes, à savoir les commissaires politiques, et sans jamais différencier idéologie et militarisme, c’est-à-dire le parti des bolcheviks et la « guerre révolutionnaire » : « Les affaires de la guerre me prenaient la plus grande partie de mon temps et même 66

de plus en plus, car j’en étais moi-même à apprendre l’abc du métier. Du point de vue de la technique et des opérations, j’estimais que ma tâche était, avant tout, de mettre les hommes qu’il fallait à la place qu’il fallait, et de leur donner la possibilité de faire leurs preuves. Mon travail politique et organisateur dans la création de l’armée se confondait entièrement avec le travail du parti. C’est seulement dans cette voie que le succès était possible »160. C’est le constat qu’établit Robert Service. En effet, ce qui semble importer au Commissaire aux affaires militaires, c’est la compétence de ses éléments, et non les critères d’une appartenance plus ou moins longue à l’idéologie et au parti des bolcheviks : « Le commissaire aux Affaires militaires sélectionnait ses assistants selon des critères de compétence, sans tenir compte de leur ancienneté en tant qu’adhérent au bolchevisme »161. Cependant, le complot des « épigones », ainsi que sont désignés Staline et ses fidèles, marque un coup d’arrêt à la détention du pouvoir de Trotski, et la mise en minorité de ce dernier ainsi que de révolutionnaires, tardivement alliés, il est vrai, Lev Kamenev et Grigori Evseïevitch Zinoviev. Par un complot magistralement mené dont lui seul a le secret, Staline réussit à s’emparer du pouvoir, et à démettre Trotski de ses fonctions et autres distinctions au début de l’année 1925, un an après la mort de Lénine : « En janvier 1925, je fus relevé de mes fonctions de commissaire du peuple à la Guerre. Cette décision avait été soigneusement préparée par la lutte qui avait précédé. Redoutant les traditions d’Octobre, les épigones craignaient surtout de laisser subsister les traditions de la guerre civile et de ma liaison avec l’armée »162. Ma vie retrace la lutte qui oppose Staline à Trotski. De prime abord, un triumvirat est constitué par Staline, Kamenev et Zinoviev, dans le but d’éliminer politiquement Trotski (l’élimination physique ne sera décidée que plus tard). Puis, Kamenev et Zinoviev, prenant finalement conscience du danger que représente Staline, s’engagent aux côtés de Trotski, dans une lutte qui les oppose tous les trois à Staline et Nicolaï Boukharine, célèbre figure de l’aile droite du parti des bolcheviks. La suite est connue : Staline ayant finalement pris le dessus, Kamenev et Zinoviev se doivent d’émettre leur autocritique, tandis que Trotski est exilé de force avec sa femme et ses deux fils vers le Kazakhstan, en 1929. Cet épisode est présenté comme la définitive défaite de la fameuse « Opposition de gauche » en URSS qui laisse le 67

champ libre à Staline pour assoir son pouvoir totalitaire et, progressivement, instaurer un culte de la personnalité indiscutablement divinisant163.

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