Cette problématique comprend la justification du sujet, les hypothèses de travail et les objectifs de recherche.
1-3-1 Justification du sujet
Soumise à un contrôle relativement rigoureux tant sous l’administration coloniale après les premières années d’indépendance, la liberté de circulation a connu de grands progrès. En effet, les dispositions législatives se sont assouplies au fil des années sous l’effet des acquis démocratiques et de la conformation à la législation internationale (Goundiam 1986 cité par Fall, 2004).
La migration est devenue une question majeure des politiques étrangères et des politiques nationales. Au niveau de la politique étrangère, la migration a gagné en visibilité en devenant l’une des questions clefs dans les négociations bilatérales et multilatérales (Amadi, 2008). La migration internationale est un phénomène important, mais difficile à cerner. Important, car l’une des caractéristiques fondamentales des êtres humains est qu’ils se déplacent. Le droit de circuler a été reconnu au niveau mondial il y a plus d’un demi-siècle lors de l’adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et des peuples. Il y est écrit que “Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un État” et que “Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays” (Gendreau et Merabet, 2007).
Les mouvements migratoires depuis l’Afrique sont très anciens. Les recherches scientifiques ont montrés que c’est à partir de l’Afrique que l’homo sapiens s’est répandu dans le monde entier et en premier lieu, en Europe. C’est aussi la migration qui a répandu les connaissances technologiques et fait le succès de toutes les grandes Nations et civilisations. Il n’y a pas de développement humain en vase clos (UE, 2006).
La population varie, non seulement par l’accroissement naturel mais aussi par des mouvements migratoires. Chaque jour il y a des naissances et de changement de domicile à la recherche d’un bien-être. Pour contourner les difficultés auxquelles elles sont confrontées, les personnes naissantes choisissent les migrations comme étant une solution salutaire (Jeuda 2001 cité par Agodo, 2009). « La migration leur apparaît comme la seule stratégie possible d’autonomisation » (Daum cité par Agodo, 2009). La décision de départ ne résulte pas d’un simple calcul coûts/avantages individuel mais d’un projet construit socialement. La migration doit être comprise comme un réseau complexe d’interactions entre le milieu de départ, le migrant et le milieu d’accueil. Si le projet migratoire est accepté par la communauté de départ (la famille, la communauté villageoise, les amis, etc.), celle-ci s’impliquera non seulement financièrement mais mettra aussi à disposition du migrant l’ensemble de son réseau pour faciliter l’insertion dans le milieu d’accueil. (Merabet et Gendreau, 2007).
La principale raison des départs de ces migrants est non seulement l’espoir de trouver de meilleures conditions de vie pour eux-mêmes mais également pour leurs familles restées au pays et/ou au village car, dans de très nombreux cas, ils continueront de soutenir financièrement ces dernières (Adepoju, 2002). Les migrations des populations sont restées un phénomène dynamique dans l’étude des déplacements des populations. L’étude des déplacements dans le monde est un long processus historique à partir duquel plusieurs communautés humaines de la planète se sont constituées (Igué 1988 cité par Houndji, 2008). Avec la mondialisation, le nombre de personnes qui vivent en dehors de leurs pays d’origine a fortement augmenté au cours des dernières décennies (Bavi, 1996).
La commission mondiale sur les migrations internationales a estimé qu’il y a sur la planète près de 200 millions de migrants en 2005, soit 3% de la population mondiale. La trajectoire migratoire a souvent pour origine les pays du Sud et comme destination les pays du Nord d’une part, entre les pays du sud d’autre part (PNUD 1998 cité par Dossia, 2010). En ce qui concerne l’Afrique, il a été déclaré que « le nombre de travailleurs migrants en Afrique aujourd’hui constitue un cinquième du total mondial et que, avant 2025, un Africain sur dix vivra et travaillera en dehors de son pays d’origine » (OIT, 2002).
Au regard des rencontres internationales et débats suscités par les questions de migrations, l’année 2006 a été déclarée par les Nations Unies celle de la migration. Des organisations régionales comme la CEDEAO ont certes adopté des mesures destinées à faciliter les mouvements de personnes (Adepoju, 2001) ; mais l’étude des migrations dans les zones frontalières permet de mieux apprécier les différentes formes de relations socio-économiques qui se tissent dans les zones frontalières : relations de familles, de travail et d’affaires. Les différentes relations socio-économiques confèrent à ce phénomène une certaine intensité qui se traduit par la complexité de cette mobilité de populations (Igué 1988, cité par Houndji 2008).
L’importance des études sur les migrations transfrontalières semble dépendre de leur rôle dans le développement des échanges commerciaux trans-Etatiques le plus souvent liés aux préoccupations d’intégration économiques. Ces déplacements trans-Etatiques soulèvent de nouveaux problèmes qui leurs confèrent une certaine originalité : la recherche d’une paix durable en Afrique favorable au développement économique et social. Cette préoccupation a entraîné les expériences de coopération transfrontalière telle que le Nigeria a eu à l’expérimenter avec ses voisins (Igué 1988, cité par Houndji 2008). En effet, le Bénin est devenu depuis quelques années un pays d’immigration après avoir été un pays d’émigration par excellence. L’instauration d’un régime politique libéral depuis la Conférence des Forces Vives de la Nation de février 1990 et surtout la stabilité politique dont le pays bénéficie ont créé des conditions favorables au phénomène de migration.
Selon les données du Recensement Général de la population et de l’Habitation de 2002, le nombre d’immigrants est passé de 77904 en 1992 à 156748 en 2002 soit un accroissement de plus de 100% en dix ans. La proportion d’immigrants en 2002 représentait 2% de la population totale et 5% de la population active. Ils sont pour la plupart d’origine africaine et particulièrement d’Afrique de l’Ouest.
Le Recensement Général de la population et de l’Habitation de 2002 montre que les communautés les plus importantes sont les Nigériens (34,8%), les Togolais (22,1%), les Nigérians (20,5%), les Burkinabais (4,6%). Les ressortissants du reste de l’Afrique faisait 3,7%, les Français 0,8% et les ressortissants du reste de l’Europe faisait 0,5% (INSAE 2002).
La majorité des étrangers résidant au Bénin sont des ressortissants de la sous-région Ouest-Africaine. Les ressortissants nigérians s’identifient dans les activités commerciales de tout genre (commerce général, vente de matériels électroniques, pièces détachées et pneumatiques, téléphones portables). Les activités des Nigérians au Bénin ont pris de l’ampleur ces dernières années.
Dans la commune de Pobè, le constat est édifiant. Elles affectent d’une part, le développement économique de la commune mais d’autre part, influencent la vie sociale des populations autochtones. Face à ce constat plusieurs questions se posent :
– Quels sont les motifs qui justifient l’immigration des Nigérians vers la commune de Pobè ?
– Quels sont les types d’activités que mènent les immigrants nigérians ?
– Quelles sont les incidences socio-économiques des activités que mènent les immigrants nigérians sur le développement de la commune de Pobè?
Les réponses à ces différentes interrogations permettront de contribuer à une meilleure connaissance de l’apport de ces immigrants au développement socioéconomique de la commune de Pobè. A cet effet, plusieurs hypothèses sont émises.
1-3-2 Hypothèses de travail
Les hypothèses qui sous-tendent la présente étude sont les suivantes :
– plusieurs motifs justifient l’immigration des Nigérians dans la commune de Pobè ;
– les Nigérians résidant dans la commune de Pobè exercent des activités essentiellement commerciales;
– les activités menées par les Nigérians contribuent au développement socio-économique de la commune de Pobè.
Pour vérifier ces hypothèses, des objectifs ont été fixés.
1-3-3 Objectifs de recherche
L’objectif global de cette étude est de contribuer à une meilleure connaissance de l’apport des immigrants nigérians au développement socio-économique de la commune de Pobè.
De façon spécifique, il s’agit de :
– identifier les principaux motifs d’immigration des Nigérians vers la commune de Pobè ;
– étudier les principales activités menées par les immigrants nigérians dans la commune de Pobè ;
– analyser les effets socio-économiques des activités des Nigérians dans la commune de Pobè.
Pour atteindre ces objectifs une démarche méthodologique a été adoptée.
Page suivante : 1-4 Méthodologie de recherche
Retour au menu : ENJEUX SOCIO-ECONOMIQUES DE L’IMMIGRATION DES NIGERIANS DANS LA COMMUNE DE POBE