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Section II : Les solutions juridiques au conflit entre la présomption d’innocence et le droit à l’information

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La loi prévoit aussi bien des solutions gracieuses ou moins contentieuses(A) que contentieuses (B) au conflit entre la présomption d’innocence et le droit à l’information.

A. Les solutions gracieuses ou moins contentieuses

Ce sont des mesures prévues par le législateur dans le but de prévenir ou de faire cesser une atteinte à la présomption d’innocence. Dans certains cas, ces mesures peuvent être mises en œuvre en l’absence de tout procès, donc sans l’intervention du juge. C’est le cas de l’exercice du droit de réponse et de rectification (1). Dans d’autres cas, c’est le juge qui ordonne les mesures et, parfois dans le cadre d’une procédure de référé la saisie du journal et le droit d’insertion d’un communiqué (2).

1. Les droits de réponse et de rectification

a. Le droit de réponse

« Le droit de réponse peut se définir comme la possibilité pour une personne mise en cause, sous un faux jour, dans un périodique ou dans l’audiovisuel de répondre dans le même organe d’information à l’auteur de l’article ou des propos la mettant en cause (39)».

Ainsi, une personne, dont l’honneur et la considération sont atteints du fait qu’elle a été présentée comme coupable d’une infraction, peut exercer le droit de réponse.

Le droit de réponse est prévu à l’article 71 et suivants de notre Code de l’information. Si en droit français, la jurisprudence admet que l’on peut répondre même à des propos élogieux, en droit burkinabè, le droit de réponse suppose que l’honorabilité de certaines personnes est atteinte. Il s’agit des personnes physiques, de personnes morales et de la personne décédée lorsque la mémoire du défunt est ternie.

Celui qui exerce le droit de réponse doit pouvoir justifier d’un intérêt ou d’un préjudice.

Au Burkina, le Code de l’information n’a pas indiqué explicitement le délai d’expiration du droit de réponse subséquent à un écrit bien déterminé. Face au mutisme de la loi, certains auteurs dont le Dr Seydou Dramé, estiment qu’il « paraît logique de dire qu’il est de trois mois, durée égale au délai de prescription des délits de presse ».

Le délai de publication de la réponse, une fois transmise au directeur de publication, est d’une semaine à compter de la réception pour les quotidiens. Pour les autres périodiques, la réponse doit être publiée dans le numéro suivant.

L’article 75 du Code de l’information fait obligation au journal ayant reçu la réponse de la publier à la même place et dans les mêmes caractères que l’article qui l’a suscitée.

En presse écrite, la longueur ne doit pas dépasser le double de l’article auquel elle réagit. Pour les médias audiovisuels, la réponse ne saurait durer plus de cinq minutes.

En cas de refus d’insertion de la réponse ou de retard non justifié, le tribunal dispose de 15 jours à compter de la plainte ou de la citation pour condamner le diffuseur. Il s’agit d’une amende variant entre 15 000 et 150 000 F CFA.

La publication de la réponse peut être refusée lorsque la réponse est de nature à porter atteinte à la sécurité et aux intérêts du pays; lorsqu’elle est contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs ou répréhensible par elle-même ; enfin lorsqu’une réponse a été déjà publiée à la demande d’une autre personne autorisée à le faire.

Outre le droit de réponse, la victime d’une atteinte à la présomption d’innocence peut exercer un droit de rectification s’il remplit certaines conditions.

b. Le droit de rectification

Le droit de rectification a été garanti par l’article 66 du Code de l’information. Ce texte dispose : « Le directeur de toute publication périodique est tenu d’insérer gratuitement toute rectification qui sera adressée par un dépositaire de l’autorité publique, c’est-à-dire au sujet des actes de sa fonction qui auront été inexactement rapportés par ladite publication ».

Peuvent exercer ce droit des personnes agissant en raison de leur fonction et non en tant qu’individu. Il s’agit des fonctionnaires et autres agents publics. Le droit de rectification est ouvert lorsque les actes mis en cause relèvent de la fonction de l’autorité publique et non de ses activités privées. Dans ce dernier cas, la personne mise en cause bénéficie du droit de réponse.

A titre d’exemple, un directeur d’une structure publique accusé de prévarication et que la presse présente déjà comme coupable peut exercer un droit de rectification.

Tout directeur de publication qui reçoit une rectification dispose d’un délai d’une semaine pour la publier dans les mêmes formes que la réponse.

Par ailleurs, il existe en dehors des droits de réponse et de rectification, des mesures que le juge ordonne pour prévenir ou faire cesser une atteinte à l’honneur ou à la considération.

2. La saisie et le droit d’insertion d’un communiqué

Le juge peut ordonner la saisie (a) ou l’insertion d’un communiqué (b) dont lui-même détermine les termes pour empêcher ou faire cesser une atteinte aux droits de la personnalité dont la présomption d’innocence. Dans certains cas, cette décision du juge intervient dans le cadre d’un référé (c). Ces mesures ordonnées par le juge n’empêche pas le plaignant d’engager un contentieux sur le fond de l’atteinte dont il se dit être victime.

a. La saisie

Le Code de l’information a prévu la saisie à l’article 90 al. 3. Ce texte dit, en partie, que « dans tous les cas, les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures telles que séquestres, saisies et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée (…) ».

Si le législateur a expressément réservé la mesure à la protection de la vie privée, il n’est pas exclu que le juge en vienne à l’étendre à la protection de la présomption d’innocence, un droit de la personnalité au même titre que le droit à l’intimité de la vie privée.

Il s’agit là d’un régime de saisie a priori destiné à éviter à la victime un préjudice intolérable.

b. L’insertion d’un communiqué

En France, Charles Debbasch et ses coauteurs de Droit des médias pensent que cette insertion judiciaire « est, sans conteste, la mesure principale qui résulte de la loi de 1993 : « dès l’instant où un organe de presse a méconnu le droit au respect de la présomption d’innocence d’un individu en le présentant, avant toute condamnation, comme coupable, il s’expose à la condamnation judiciaire de la publication d’un communiqué rectificatif (40)».

Ce communiqué rectificatif n’est pas à confondre avec le droit de réponse et le droit de rectification. En effet, alors que la réponse et la rectification sont rédigées par la personne mise en cause, c’est le juge lui-même qui précise les termes du communiqué rectificatif ainsi que les conditions matérielles de diffusion telles que l’emplacement et les caractères typographiques. Le coût de l’insertion du communiqué rectificatif est supporté par la personne physique ou morale, auteur de la méconnaissance de la présomption d’innocence.

L’insertion du communiqué rectificatif n’exclut ni l’exercice du droit de réponse ni celui du droit de rectification encore moins la mise en mouvement de l’action en diffamation.

Ce droit d’insertion d’un communiqué rectificatif ne semble pas clairement prévu en droit burkinabè. Mais l’article 90 al.3 du Code de l’information de 1993 n’a pas été exhaustif dans l’énumération des mesures que le juge peut prescrire pour mettre fin aux atteintes aux droits de la personnalité. En ayant terminé cette énumération par le mot « autres », le législateur burkinabè ouvre une brèche dans laquelle le juge burkinabè pourrait s’engouffrer et prescrire l’insertion d’un communiqué rectificatif si une victime d’une violation de la présomption d’innocence la lui demandait.

Par ailleurs, l’insertion du communiqué rectificatif ainsi que les mesures explicitement prévues à l’article 90 al.3 peuvent être ordonnées en référé.

c. Le référé

En procédure civile, le référé désigne une procédure contradictoire grâce à laquelle une partie peut, dans certains cas, obtenir d’un magistrat unique une décision rapide qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Même en présence d’une contestation sérieuse, le juge des référés peut autoriser des mesures conservatoires ou ordonner des remises en état dans le but de prévenir un dommage imminent ou de faire cesser un trouble manifestement contraire à la loi.

L’article 90 al.3 du Code de l’information dit que la séquestre, la saisie et autres peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé.

Ainsi, par son pouvoir, le juge des référés peut ordonner la destruction des exemplaires saisis, suspendre ou interdire momentanément l’organe de presse, auteur d’une atteinte à la présomption d’innocence ou de tout droit de la personnalité.

Lorsque ces solutions moins contentieuses et gracieuses ne satisfont pas la victime d’une atteinte à la présomption d’innocence, elle peut explorer les voies contentieuses pour obtenir la réparation du préjudice subi.

B. Les solutions contentieuses

Au plan pénal, les atteintes à la présomption d’innocence peuvent se décliner sous la forme d’une diffamation (lorsqu’un suspect est présenté comme coupable, il y a atteinte à l’honneur ou à la considération), d’une injure (lorsque le suspect est traité de bandit, de délinquant ou de malfrat) ou d’une atteinte au droit à l’image (lorsque le consentement du suspect n’a pas été donné alors qu’il est présenté à visage découvert).

La solution juridique de l’atteinte à la présomption d’innocence tient compte de l’infraction particulière à laquelle cette méconnaissance s’assimile.
Dans tous les cas, les solutions sont soit pénales(1), soit civiles(2).

1. Les solutions pénales

La victime d’une atteinte à la présomption d’innocence peut porter plainte pour diffamation(a), pour injure(b) ou pour atteinte au droit à l’image(c).

a. L’action en diffamation

L’article 109 du Code de l’information et l’article 361 du Code pénal ont défini la diffamation comme « toute allégation ou imputation d’un fait portant atteinte à l’honneur et à la considération d’une personne ».

Si l’honneur est la dignité morale que l’on garde pour soi-même, la considération est ce que nous sommes aux yeux des autres (41).

L’action en diffamation ne peut prospérer que si les éléments constitutifs de l’infraction sont réunie(i) et si les règles de procédures sont respectées (ii). Elle donne lieu à des sanctions qui varient en fonction de la qualité des victimes de la diffamation (iii).

i. Les éléments constitutifs de la diffamation

La diffamation est constituée par la réunion d’un élément matériel et d’un élément moral à moins que son auteur puisse se justifier en apportant la preuve de la vérité des faits diffamatoires.

L’élément matériel de la diffamation s’entend d’une allégation ou d’une imputation à autrui d’un fait déterminé portant atteinte à son honneur ou à sa considération.

L’allégation consiste à reprendre, répéter ou reproduire des propos ou des écrits attribués à des tiers et contenant des imputations diffamatoires. Il y a diffamation lorsque l’allégation reproduit des faits attribués à la rumeur publique.

L’imputation s’entend plutôt de l’affirmation personnelle d’un fait dont son auteur prend la responsabilité.

Notre Code de l’information précise que même si l’allégation ou l’imputation est faite sous forme dubitative, elle peut recevoir la qualification de diffamation. C’est dire qu’une simple insinuation ou interrogation peut être diffamante.

L’allégation doit porter sur un fait précis. Un délit que l’on impute à autrui peut être considéré comme un fait précis, si l’imputation précise la qualification ou les circonstances de la commission dudit délit (42).

Pour que l’imputation ou l’allégation d’un fait précis soit constitutive de diffamation, il faut qu’elle porte atteinte à l’honneur ou à la considération. Porter atteinte à l’honneur d’une personne, c’est toucher à ce qu’elle a de plus intime en lui imputant des manquements à la probité, à la morale, au devoir de famille ou encore des infractions ou condamnations pénales (43).

La diffamation vise une personne physique ou morale. Elle suppose également une publicité. Il n’est pas obligé que cette publicité se fasse par voie de presse. Si la condition de publicité n’est pas remplie, l’imputation diffamatoire est réprimée comme contravention d’injure non publique.

L’élément moral de la diffamation est l’intention de porter atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps désigné. En matière de diffamation, l’intention de nuire est toujours présumée. C’est à la personne poursuivie pour diffamation d’apporter la preuve de sa bonne foi.

La réunion de l’élément matériel et de l’élément moral de la diffamation n’est pas toujours synonyme de sanction. C’est le cas où la personne poursuivie parvient à apporter la preuve de la vérité du fait diffamatoire. C’est l’exceptio veritatis. Toutefois, la vérité des faits diffamatoires est exclue dans trois cas, à savoir lorsque les faits imputés relèvent de la vie privée de la personne, lorsque les faits remontent à plus de 10 ans et enfin lorsque les faits sont prescrits, amnistiés ou ont donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision.

ii. La procédure en matière de diffamation

La répression de la diffamation est soumise à une procédure particulière favorable aux auteurs et difficile à mettre en œuvre par les victimes.

D’abord, l’action en diffamation n’est recevable que si elle intervient dans un délai de trois mois à compter de la publicité des faits. Aux termes de l’article 366 du Code pénal, le délai de prescription de l’action publique est de trois mois à compter de la commission des faits ou du dernier acte de poursuite ou d’instruction. L’article 140 du Code de l’information ajoute : « L’action publique et l’action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescrivent après trois mois révolus, à compter du jours où ils ont été commis ou du jour du dernier acte de poursuite s’il en a été fait ».

Ces dispositions contraignent les victimes de la diffamation à agir promptement. Sans quoi ils perdent leur droit d’action.

Au plan purement procédural, l’action en diffamation ne peut être mise en mouvement que suite à une plainte de la victime ou de son représentant légal. Selon l’article 128 du Code de l’information, la mise en mouvement de l’action publique doit être faite par citation directe. Cette citation doit comporter la qualification des faits incriminés et la loi à eux applicable ainsi que l’élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie. La citation doit être signifiée aussi bien au prévenu qu’au ministère public. La citation directe est frappée de nullité si elle ne contient pas les éléments cités. La procédure comporte des risques de nullité qui handicapent la poursuite des auteurs de diffamation. Ce qui a fait dire à certains auteurs que dans le conflit entre le respect des droits de la personnalité (dont la présomption d’innocence) et le droit à l’information, il y a un déséquilibre en faveur de ce dernier.
Dans la même logique, le législateur a abrégé les délais de procédure qui s’ils ne sont pas respectés emportent des nullités d’ordre public.

Ainsi, selon l’article 129 du Code de l’information, entre la citation et la comparution, le délai est de vingt jours francs, outre un délai de route d’un jour tous les deux cents kilomètres. Lorsque la diffamation a été commise en période électorale à l’encontre d’un candidat, ce délai est de vingt quatre heures en sus du délai de route. Dans ce dernier cas, le jugement doit être prononcé au plus tard le jour du scrutin. Conformément à l’article 132 du Code de l’information, dans les autres cas, le tribunal correctionnel dispose d’un délai maximum d’un mois à compter de la date de la première audience. Le pourvoi en cassation peut être introduit par le prévenu dans les trois jours suivant le prononcé de la décision. Ce recours concerne exclusivement les intérêts civils du prévenu ou de la partie civile.

Jusqu’au prononcé d’une décision devenue définitive, le retrait de la plainte par la victime arrête l’action publique.

Lorsque les éléments constitutifs de la diffamation sont réunis et la procédure bien suivie, le juge prononce contre l’auteur une sanction.

iii. La répression de la diffamation

La sanction pénale en matière de diffamation est fonction de la qualité de la victime.

Lorsque la victime est un particulier, l’article 364 al. 4 fixe une peine d’emprisonnement de deux à six mois et une amende de 50.000 F CFA ou l’une des deux peines seulement.

Lorsque l’infraction a été commise sur des membres du gouvernement, des corps constitués, des personnes chargées d’un service ou d’un mandat public, les témoins et les jurés, l’auteur écope de deux à un an d’emprisonnement et une amende de 50 000 à 300 000 F CFA.

En matière de délit de presse, il y a une responsabilité en cascades prévues à l’article117 du Code de l’information. La responsabilité de la diffamation incombe à titre principal aux directeurs de publication ou éditeurs. Si le directeur de publication jouit d’une immunité, les co-directeurs deviennent les responsables principaux de l’infraction. A défaut, ce sont les auteurs qui devront en répondre; à défaut les imprimeurs.

La jurisprudence considère que « le directeur de publication ne peut se décharger de sa responsabilité sur l’auteur alors que l’imprimeur peut demander sa mise hors de cause en révélant le nom de l’auteur (44)».

Lorsque l’atteinte à la présomption d’innocence s’assimile à une injure proférée à une personne poursuivie par la Justice, l’auteur peut porter plainte en vue d’obtenir réparation.

b. L’action en réparation de l’injure

Lorsque les éléments constitutifs de l’injure sont réunis(i), le juge en prononce la peine (ii).

i. Les éléments constitutifs de l’injure

L’injure est définie à l’article 362 du Code pénal comme « toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait ».

Il est difficile de distinguer la diffamation de l’injure en se basant sur leurs définitions respectives. Du reste, on considère que « le caractère injurieux d’une expression peut résulter de sa violence ou de sa grossièreté : assassin, mouchard, bâtard… terroriste (45)».

Le docteur Seydou Dramé, en abordant la question du droit d’informer face à la présomption d’innocence, écrit : « Les médias doivent se garder de porter atteinte à ce droit en proférant des termes hostiles à la personne inculpée. La raison en est que ces termes employés dans la presse « assassins, voleurs, criminels… » sont constitutifs de délits d’injure ou de diffamation, s’ils remplissent cette qualification ».

Un même passage d’un article peut contenir des propos à la fois injurieux et diffamatoires. Il arrive que le juge décide de réprimer la diffamation (46).

L’injure comporte un élément moral : l’intention de porter atteinte à l’honneur et à la considération par des propos outrageants.

La poursuite de l’injure n’est possible que si la victime formule une plainte. La procédure est la même qu’en matière de diffamation.

ii. La répression de l’injure

La sanction de l’injure aussi varie selon que la victime est un particulier ou une autorité.

Conformément à l’article 113 du Code de l’information, l’injure contre les particuliers est sanctionnée d’une peine d’emprisonnement de cinq jours à deux mois et une amende de 5 000 à 300 000 F CFA.

Quand l’injure est proférée sur la personne du chef de l’Etat ou du chef du gouvernement, elle est qualifiée d’offense. Dans ce cas, elle est réprimée par une peine d’emprisonnement de 6 mois à un an et d’une amende d’un million, ou par l’une de ses peines seulement.

L’injure sur les diplomates et chefs de gouvernement étrangers est également réprimée.

Lorsque l’injure est commise contre un groupe de personnes dans le but d’inciter la haine entre les citoyens ou les habitants, elle est punie d’une peine maximum de six mois et ou d’une amende maximum de 500 000 F CFA.

En matière de délit de presse, la récidive n’est pas une circonstance aggravante. Le cumul des peines ne s’applique pas à ces infractions. La peine la plus lourde est retenue.

Certaines atteintes de la présomption d’innocence sont constitutives de méconnaissance au droit à l’image.

c. L’action en répression d’une atteinte au droit à l’image

Le droit à l’image est protégé par notre droit (i) qui prévoit également des sanctions contre les auteurs de sa violation.

i. La protection du droit à l’image

Ce sont les articles 371 et suivants du Code pénal et 90 du Code de l’information qui protègent le droit à l’image.

En principe, il est interdit de fixer et de reproduire l’image d’une personne sans son consentement.

Mais, certaines exceptions existent à ce principe. Ainsi, lorsqu’un individu se trouve à un lieu public, son consentement n’est pas nécessaire si la photo ne permet pas de l’identifier particulièrement. Certains auteurs considèrent qu’une personne se trouvant au centre d’une actualité peut être photographiée sans son autorisation. Cette exception sert d’argument aux journaux qui n’hésitent pas à photographier les personnes arrêtées par les forces de sécurité et à les présenter à visage découvert.

Cette pratique est décriée et elle pourrait tomber dans la qualification juridique d’atteinte au droit à l’image dont la répression est prévue par la loi.

ii. La répression de l’atteinte au droit à l’image

Les sanctions de la méconnaissance au droit à l’image sont en principe les mêmes que celles réprimant la violation du droit à l’intimité de la vie privée. Elles sont prévues aux articles 371 du Code pénal et 90 du code de l’information. Il s’agit d’un emprisonnement de deux mois à un an et d’une amende de 50 000 à 1 000 000 de francs ou de l’une de ces peines seulement.

Au titre des solutions d’ordre pénal du conflit entre la présomption d’innocence et le droit d’informer, il faut retenir que le juge répressif peut prononcer des peines complémentaires prévues aux articles 136 et 137 du Code de l’information : la confiscation des écrits ou imprimés, placards, affiches ou supports audiovisuels saisis, la suppression ou la destruction de tous les exemplaires qui seraient mis en vente, distribués ou exposés au public, la suspension du journal pour une durée de six mois au maximum.

Si l’action publique aboutit à infliger une peine à l’auteur de l’atteinte à la présomption d’innocence pour le trouble causé à l’ordre social, l’action civile permet de d’accorder une réparation pécuniaire à la victime.

2. La solution civile

Il s’agit là de l’application de l’article 1382 du Code civil selon lequel tout fait quelconque de l’homme qui cause un dommage à autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Les atteintes à la présomption d’innocence, qu’elles s’assimilent à une diffamation, à une injure ou à une violation du droit à l’image, peuvent être réparées sur le fondement de la responsabilité civile.

La loi autorise ou oblige même le journaliste à exercer sa liberté d’expression et à s’acquitter de son devoir d’informer. Mais si à cette occasion, il commet un dommage à autrui, il doit le réparer. C’est donc un pan de la solution que le droit propose au conflit entre la présomption d’innocence et le droit à l’information.

La mise en œuvre de l’article 1382 suppose réunies certaines conditions(a) qui pourraient justifier l’octroi de dommages-intérêts à la victime(b).

a. Les conditions de la mise en œuvre de l’article 1382 du Code civil

La réparation civile ne peut être accordée que s’il existe une faute(i), un dommage (ii) et un lien de causalité entre la faute et le dommage (iii).

i. La faute

La faute peut consister en une action ou en une abstention. Il peut s’agir d’une imprudence, d’une négligence ou d’un manquement à une obligation quelconque. En matière de presse, la jurisprudence a imposé au journaliste un devoir de prudence et d’objectivité dont le manquement constitue un critère déterminant dans la recherche judiciaire de la faute.

Le journaliste manque d’objectivité lorsqu’il déforme les propos ou fait montre de partialité.

Le non-respect de la règlementation ou de la déontologie est également considéré comme fautif.

Outre la faute, la mise en œuvre de l’article 1382 exige qu’un dommage soit causé à autrui.

ii. Le dommage

Le dommage désigne, dans l’acception générale, un préjudice dont une personne est victime. Le dommage peut être moral ou matériel.

En matière de droits de la personnalité dont le droit au respect de la présomption d’innocence, le dommage est essentiellement moral.

Dans ce cas, le dommage, c’est l’atteinte à l’honneur ou à la considération. Le fait de dire d’une personne poursuivie qu’elle est coupable d’une infraction alors qu’elle n’est pas encore condamnée, est de nature à porter atteinte à son honneur et à sa considération.

iii. Le lien de causalité entre la faute et le dommage

De façon générale, pour que la réparation civile soit accordée, le juge exige un lien de causalité entre la faute et le dommage.

En matière de délits de presse, certains auteurs tels que Pierre Kayser considèrent qu’il n’est pas nécessaire d’établir un lien de causalité entre la faute et le dommage. Pour eux, la victime n’a pas besoin de faire la preuve du préjudice subi mais de justifier seulement la méconnaissance d’un droit subjectif.

Une fois que ces conditions sont réunies, le juge octroie des dommages intérêts à la victime.

b. L’octroi de dommages-intérêts

La victime du dommage propose le montant des dommages-intérêts au prorata du préjudice qu’il pense avoir subi. Toutefois, le juge n’est pas lié par l’étendue de ses prétentions. Il est de son pouvoir d’apprécier le montant des dommages-intérêts et de préciser le mode de réparation du dommage.

En matière de presse, les dommages-intérêts de montants élevés pourraient faire disparaître certains titres. Mais la presse devrait se préparer à faire face à des indemnisations importantes dans la mesure où la tendance est à l’abandon du franc symbolique. Et surtout que les hommes de médias militent en faveur des peines civiles et pour la dépénalisation des délits de presse.

39 Dramé Seydou, Droit de la communication, Ouagadougou, 2011, P. 51, inédit
40 Debbasch Charles et autres, Droits des médias, Dalloz, Paris, 2002, P. 1034
41 Dramé Seydou, Droit de la communication, Ouagadougou, 2011, P.40, inédit
42 Crim. 9 juin 1934, D.H. 1934. 382, cité par Veron Michel, Droit pénal spécial, Masson, Paris, 1976, P. 166
43 Crim. 22 avril 1958, Bull.1958, n° 33, cité par Veron Michel, Droit pénal spécial, P. 167
44 Besaçon, 8 juillet 1892, Dalloz, 1893, 2, 269 et Crim., 25 mai 1894, Dalloz 1895, 1,78 cités par Tahita Jean Claude dans Diffamation et liberté de presse au Burkina Faso, paru dans RBD n° 34, 2e semestre 1998, P. 237
45 Dramé Seydou, Droit de la communication, Ouagadougou, 2011, P. 42, inédit
46 Crim. 28 juin 1926, Dalloz, 1926, P. 238

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