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Section 3. Les fraudes boursières, fiscales et les comportements anti-concurrentiels

ADIAL

Les fraudes boursières, les fraudes fiscales ainsi que les comportements anti-concurrentiels sont des évènements dont l’ordre public interdit la couverture. Le caractère amoral de ces évènements explique sans aucun doute cette exclusion. Celles-ci ont la particularité de n’être exclues qu’en cas de faute intentionnelle avérée du dirigeant.

S’agissant des fraudes boursières, les tribunaux chercheront toujours à localiser la faute intentionnelle afin de savoir si la RCMS ou la D&O fonctionne dans une telle situation. Dans le cas des Etats-Unis, les tribunaux californiens ont, à maintes reprises, reconnu que « la section 533 du code des assurances de Californie n’interdisait pas la couverture par la police D&O de la violation des sections 10b du Securities and Exchange Act et de la Securities and Exchange Commission Rule (Fraude boursière). Le seul moyen de rendre ces faits inassurables est de prouver que l’assuré dirigeant a effectué de manière délibérée, consciente et surtout, intentionnelle de fausses déclarations ».(48) Dans un arrêt de la Cour suprême de New York, les assureurs ont invoqué, en faveur de la non-garantie, le fait que l’entreprise elle-même avait participé à la fraude avec l’aide de leurs employés. La Cour a déclaré que la responsabilité de l’assuré dans cette fraude ne résultait manifestement pas que de la seule responsabilité du fait de ses salariés. Mais qu’en l’espèce, l’assuré avait bel et bien personnellement profité de cette fraude. La Cour suprême a tout simplement appliqué le droit New-Yorkais en vertu duquel « personne ne devrait être autorisé tirer profit de sa propre fraude ».(49) La faute intentionnelle du dirigeant est également requise dans le cas de fraude fiscale.

En effet, dans le cadre de la fraude fiscale, nous pouvons constater que les juges sont plus enclins à n’exclure que les responsables directs de la fraude fiscale de la garantie RCMS ou encore, D&O. A titre d’exemple, les juges américains et particulièrement, ceux de l’Ohio ont en conséquence, en 1994, affirmé lors d’un procès relatif à la fraude fiscale d’un dirigeant et conformément aux dispositions légales de l’Ohio, que l’assurance de responsabilité civile des dirigeants n’était pas interdite pour les autres dirigeants qui n’étaient pas directement responsables du paiement des taxes et impôts de la société car « la responsabilité d’un dirigeant de société pour défaut de paiement de l’impôt n’est pas inassurable au sens de la loi tant qu’il n’est pas avéré qu’elle résulte ou provient de la conduite intentionnelle de ce même dirigeant ».(50)

En effet, dans ce cas, un seul des dirigeants de la société était en charge du paiement de l’impôt. Ce dernier s’est donc vu exclure de la garantie et a donc dû payer personnellement l’administration fiscale sans aucune aide ou prise en charge par son assureur D&O. Il en va de même pour les autres juridictions des Etats –Unis dont le Minnesota où la Cour d’appel a déclaré que la loi de l’Etat interdisait de plein droit l’assurabilité de la responsabilité du dirigeant résultant de son obligation personnelle à payer l’impôt de la société.(51) La tax liability ou la fraude fiscale est donc une infraction dont on ne peut attendre aucune prise en charge ce qui s’explique par son caractère moral et surtout, personnel. Les comportements anticoncurrentiels revêtent également ces deux caractéristiques et se voient, par conséquent, exclure de cette garantie.

Pour ce qui est des comportements anticoncurrentiels, aucune police ne le mentionne expressément. Néanmoins, l’article L 464-2 du code de commerce interdit formellement toute conduite anticoncurrentielle sous peine de sanction. Toute dérogation à cette règle de droit relève de l’infraction dont le principal instrument pour le punir demeure l’amende basée sur quatre critères distincts : la gravité de la pratique, l’importance du dommage causé à l’économie, la situation individuelle de chaque entreprise et l’éventuelle réitération. Ainsi, bien que nous n’ayons aucune précision de la part des polices françaises, nous pouvons cependant déduire sans trop de risques qu’eu égard à l’inassurabilité des amendes en France, la responsabilité des dirigeants résultant de pratiques anticoncurrentielles ne peut trouver garantie auprès de l’assureur RCMS. Il en va de même pour les américains dont les tribunaux précisent d’une part, que « prendre en charge la perte résultant de la consciente et intentionnelle conspiration cherchant à restreindre le marché et à maintenir son monopole sur le commerce est le type d’actes délictueux et néfastes dont la politique gouvernementale de Pennsylvanie interdit formellement toute prise en charge par un quelconque assureur » (52) et d’autre part, que « l’assureur ne doit pas défendre ses assurés dans le cadre de leurs procès civils relatifs à des actes de calomnie, à une ingérence dans les relations d’affaires et à la violation des lois fédérales sur l’antitrust et la concurrence ». (53) L’ordre public est ainsi de manière flagrante l’un des obstacles principaux à une totale déresponsabilisation des dirigeants par l’assurance. Il demeurera et constituera toujours un contrepoids non négligeable à un tel phénomène. Les exclusions conventionnelles constituent également un important contrepoids.

48 Raychem Corp. v Federal Insurance Co, 853 F Supp 1170 (N. D. Cal 1994) et California Amplifier Inc v RLI Insurance Co 113 Cal. Rptr. 2d 915 (Cal Ct App 2001)
49 Drexel Burnham Lambert Group Inc v. Vigilant Insurance Co, 595 N Y S 2d 999 (NY Sup Ct 1993)
50 International Surplus Lines Insurance Co v. Princehorn No 16463 1994 WL 175672 (Ohio Ct App May 11, 1994)
51 St Paul Fire & Marine Insurance Co v. Briggs 464 N W 2d 535 (Minn. Ct App 1990)
52 USX Corp v. Adriatic Insurance Co, 99 F Supp 2d 593 (W D Pa 2000)
53 St Paul Insurance Cos v. Talladega Nursing Home Inc 606 F 2d 631 (5th Cir 1979)

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