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Section 2. Des devoirs spécifiques

ADIAL

Les obligations spécifiques du dirigeant sont très nombreuses. Celles-ci peuvent être d’ordre légal, administratif, économique ou financier telle que l’obligation de respecter les conditions de constitution d’une société (§1), les dispositions législatives et règlementaires (§2), la règlementation d’une autorité administrative indépendante (§3), la législation fiscale (§4), la violation des statuts (§5) et la faute de gestion (§6).

§1. La constitution de la société

La constitution d’une société est soumise à certaines conditions de fond et de forme que le dirigeant se doit de respecter telle que les mentions obligatoires (forme de la société, la durée de celle-ci, sa dénomination sociale…), la signature des statuts par chaque associé, l’immatriculation au RCS ou encore, l’insertion d’un avis dans un journal d’annonces légales et au BODACC.

Dans le cas du non-respect de ces règles, c’est en général la responsabilité des fondateurs et des dirigeants qui sera engagée, ceux-ci étant responsables du préjudice causé aux tiers du fait de l’annulation ou encore, de l’irrégularité entachant la constitution de la société.

Ainsi dans le cas de non-respect des conditions de fond, le préjudice opposé par les victimes peut aller du défaut de validité des souscriptions à une « surévaluation manifeste des apports en nature entraînant la présence d’apports fictifs »(12) et entraine généralement l’engagement de la responsabilité solidaire des personnes ayant agi au nom de la société qui, du fait de cette irrégularité, n’a pu être constituée. Dans le cas de l’inobservation de règles de forme et de publicité, le préjudice que l’on pourrait opposer en tant que victime est le non-accomplissement des formalités d’immatriculation par exemple ou l’oubli de mention obligatoire.

Dans ce cas, seuls les fondateurs de la société et les premiers dirigeants pourront voir leur responsabilité être engagée solidairement, ceux-ci s’étant montrés négligents lors de la constitution de la société. Une infraction aux dispositions législatives et règlementaires commise par le dirigeant social peut également entraîner le déclenchement d’une action en responsabilité à son encontre.

§2. Infractions aux dispositions législatives et règlementaires

Les infractions que nous allons traiter peuvent concerner divers domaines : le droit des sociétés (A), le droit du travail (B), l’environnement (C) ou encore, le domaine de l’économie (D).

A. Les infractions au droit des sociétés

Le droit et le fonctionnement des sociétés doivent être respectés et engage la responsabilité de celui qui s’y soustrait. Dans le cas du dirigeant, les infractions envisageables sont très nombreuses, touchant tous les domaines possibles et pouvant consister, par exemple, en la violation des règles de tenue des assemblées, l’abus de pouvoirs et des voix ou la distribution de dividendes fictifs qui, quant à elles, pourront entraîner la poursuite du dirigeant sur le fondement du non-respect des règles pénales spécifiques au droit des sociétés. Il n’est pas rare de rencontrer l’hypothèse dans laquelle le dirigeant engage par la commission d’une seule et même infraction sa responsabilité tant pénale que civile dès lors que l’infraction cause par la même occasion un préjudice à la société ou à des tiers. Dans ce cas, les tiers victimes ou la société pourront dans le but de poursuivre le dirigeant soit se constituer partie civile au procès pénal du dirigeant soit agir seuls devant une juridiction civile afin de demander réparation.

Le dirigeant peut également se rendre coupable d’infractions au droit fiscal, au droit des procédures collectives, au droit des transports ou encore, au droit du travail.

B. Les infractions au droit du travail

La responsabilité civile et pénale du dirigeant ou celle de la société elle-même peuvent être recherchées en cas de non-respect des dispositions du droit social tel que les infractions à la règlementation sur les conditions de travail, à la législation sociale, au droit syndical ou encore, aux règles de sécurité sociale.

C. Les infractions en matière d’environnement

L’environnement est une question très importante laissant progressivement place à de nombreux textes de loi sur la question (Loi du 1er août 2008 sur la responsabilité environnementale, réforme du code pénal en 1992 dans le sens de la protection de l’environnement…). Ainsi, il n’est pas rare de voir la responsabilité du dirigeant être engagée en matière d’atteinte à l’environnement malgré l’existence de l’article 121-2 du code pénal permettant pourtant d’engager la responsabilité pénale des personnes morales seules. Le dirigeant d’entreprise engage aussi sa responsabilité s’il commet des infractions d’ordre économique.

D. Les infractions d’ordre économique

Par infractions économiques, nous visons des infractions telles que les ententes frauduleuses ou abus de position dominantes que l’ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la libération des prix et de la concurrence. La loi Châtel du 3 janvier 2008 interdit, quant à elle, les pratiques commerciales trompeuses et autorise toute poursuite contre les dirigeants sociaux se rendant coupables de tels actes.

Les infractions au droit bancaire et boursier son également des infractions économiques. Celles-ci peuvent revêtir deux formes. Elles peuvent consister en la méconnaissance de la règlementation mise en place par l’Autorité des Marchés Financiers dans le domaine bancaire ou boursier (délit d’initié, par exemple) ou en une erreur dans la gestion de comptes bancaires, dans l’utilisation de services ou d’opérations de caisse. Le dirigeant a d’autre part une responsabilité disciplinaire à l’égard des autorités administratives indépendantes.

§3. L’existence d’une responsabilité disciplinaire

Les dirigeants peuvent voir prononcer à leur encontre une sanction disciplinaire par une autorité administrative indépendante telle que l’AMF, la CNIL, la commission d’accès aux documents administratifs (CADA) ou encore, l’autorité de concurrence dès lors qu’ils ne respectent pas la règlementation que celles-ci ont émises ou dont elles sont garantes.(13)

Les sanctions susceptibles d’être prononcées par les AAI sont très nombreuses et variées du fait de leur pouvoir de sanction assez étendu. Ainsi, les sanctions peuvent aller du simple avertissement au retrait de la licence professionnelle. Il convient de préciser que la plus fréquente reste l’amende civile. Ces sanctions ont certes un caractère administratif mais elles en demeurent pas moins répressives.

Il peut y avoir engagement de la responsabilité personnelle du dirigeant dès lors que ce dernier enfreint une obligation mise en particulier à sa charge par le règlement ou la loi de l’AAI dont la méconnaissance est de nature à porter atteinte. La fonction de dirigeant demeure une fonction engendrant de très hautes responsabilités dont une en matière fiscale.

§4. Une responsabilité en matière fiscale

Conformément à l’article L 267 du livre des procédures fiscales, « lorsqu’un dirigeant d’une société, est responsable des manoeuvres frauduleuses ou de l’inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, ce dirigeant peut, s’il n’est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d’une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance ».

A la lecture de cet article, la réunion de deux conditions est nécessaire afin de condamner le dirigeant au paiement solidaire de l’impôt dû par la société. Tout d’abord, il faut des manoeuvres du dirigeant constituant des inobservations graves et répétées des obligations fiscales puis il faut prouver que ces manoeuvres (par exemple, une dissimulation des recettes taxables)(14) ont causé l’impossibilité de recouvrer l’impôt dû par la société.

La responsabilité pénale du dirigeant peut être engagée par la même occasion. Ainsi, la jurisprudence a en 2008 retenu le délit de fraude fiscale contre un gérant de fait.(15) Le dirigeant social engage aussi sa responsabilité lorsque celui-ci viole les statuts.

§5. La violation des statuts

Conformément aux articles 1850 du code civil, L 223-22 (SARL) et L 225-251 (SA) du code du commerce, le dirigeant engage sa responsabilité s’il viole les statuts (par exemple, le dépassement de l’objet social, une obligation d’information non respectée…). La violation d’une disposition statutaire ne peut entraîner la responsabilité du dirigeant à l’égard de la société ou des associés que dans le cas où l’acte accompli est opposable à la société ou aux associés. Sans cela, aucun préjudice n’a pu être subi et la responsabilité du dirigeant ne peut être recherchée. Ainsi, la preuve par le dirigeant ou la société elle-même que le tiers avait eu connaissance de la violation des statuts constituera une cause d’exonération de responsabilité pour le dirigeant, l’acte du fait de la mauvaise foi du tiers n’étant plus opposable à la société. A contrario, la société sera engagée envers les tiers de bonne foi mais pourra se retourner contre le dirigeant. Il est important de rappeler que le dirigeant social est responsable de toute faute qu’il commet dans l’exercice de sa fonction de gestionnaire de la société.

§6. La faute de gestion

La faute de gestion est le fondement le plus utilisé pour engager la responsabilité du dirigeant. Le dirigeant social se doit donc de gérer la société qu’il représente de la meilleure manière possible c’est-à-dire dans l’intérêt de la société. Il a ainsi une obligation non pas de résultat mais de moyen. Le dirigeant doit être prudent, diligent et actif et doit en quelque sorte se comporter en « bon père de famille », en bon dirigeant consciencieux, respectueux et soucieux de l’intérêt de la société. Il doit respecter les règles normales de gestion d’une société. En conséquence, il apparaît logique que le dirigeant réponde de tous les actes qu’il effectue et qui se révèlent être contraires à l’intérêt de la société.

La jurisprudence retient pour son appréciation de la faute de gestion, la notion d’intérêt social qui est « une notion à contenu variable s’entendant comme l’intérêt supérieur du groupement qui ne se confond pas avec l’intérêt commun des actionnaires ».(16) Chaque acte de gestion du dirigeant se doit de respecter cet intérêt social et à défaut, sera qualifié de faute de gestion. Ainsi, a été considéré comme étant une faute de gestion, l’imprudence ou imprévoyance dans la gestion du patrimoine social(17) ou encore, l’utilisation des fonctions à des fins personnelles traduisant un abus de biens sociaux(18). La faute doit être commise personnellement par le dirigeant et peut résulter tant d’une action que d’une omission.

Les dirigeants Américains ont, quant à eux, également tout un panel de devoirs et de responsabilités appelés les « fiduciary duties ».

12 Lamy assurances, La responsabilité du dirigeant social, édition 2012
13 Cass. Com 31 décembre 2004, n° 03- 14. 991, Bull. civ IV, n°65
14 Cass. Com, 21 janvier 2004, n° 00-16.089, RJF 5/04, n°546
15 Cass. Com, 19 novembre 2008, n° 08-81.194, Bull crim, n° 237, RTD com 2009, p 472, note Bouloc B
16 Lamy assurances, La responsabilité du dirigeant social, édition 2012
17 Cass. Com, 12 mai 1975, n° 74-10.169, Bull civ IV, n° 130
18 Cass crim, 13 septembre 2006, n° 05-85.083

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