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Section 2 – Caractère volontaire du suicide

ADIAL

Le suicide est l’action de causer volontairement sa propre mort. (25) La volonté est
« la faculté de se déterminer à certains actes et de les accomplir » pour reprendre les
termes du Petit Larousse. Elle est nécessaire pour passer à l’acte et réussir son suicide.
Elle est donc a priori une composante essentielle du suicide et inséparable de celui-ci.
Nous nous attardons sur un point qui peut paraître évident mais dont nous verrons qu’il
n’est pas anodin. L’intérêt de souligner le caractère volontaire du suicide du moins dans
la forme est qu’ainsi il se distingue d’autres actes qui n’ayant pas la finalité de base
du suicide à savoir choisir de décéder à un moment déterminé ne s’en rapprochent pas
moins en passant pour tels. C’est le cas de l’attentat-suicide, acte d’opposition et de
contestation au besoin armé dans le cas du terrorisme. Le suicide est davantage utilisé
comme moyen que comme fin, il sert à la destruction ou à la menace, pour faire valoir
des idées ou influer sur les événements, comme ce fut le cas du bonze Thich Quang Duc
le 11 juin 1963 en signe de protestation à l’égard du régime du président vietnamien Ngô
Dinh Diêm considéré comme dictatorial. D’autres décès sont bien des suicides mais il
ne feront pas l’objet de notre étude n’étant pas rattachés à des assurés ayant souscrit une
police d’assurance, c’est le cas des suicides dits « altruistes » dont des exemples sont
le suicide des personnes âgées qui sont une charge pour leur famille, ceux des Japonais
pendant la guerre ou encore ceux observés en temps de famine comme ce fut le cas au
XIXe siècle.

Nous faisons également la différence avec l’euthanasie, du grec eu, « bien » et thanatos,
« mort », définie par le Petit Larousse comme « l’ensemble des méthodes qui procurent
une mort sans souffrance, afin d’abréger une longue agonie ou une maladie très douloureuse
à l’issue fatale ». Active et passive, l’euthanasie, s’il s’agit bien du choix de
sa mort, passe dans le premier cas par l’accompagnement et l’assistance d’une autre
personne, ce qui justifie de la différencier du suicide. Nombre de cas connus de suicide
ont été dépourvus de volonté puisque c’était là le seul choix qui s’offrait aux individus
concernés, car ils étaient placés dans une situation sans issue à l’instar de Cléopâtre
représentée dans la peinture classique en compagnie d’un aspic le 15 août de l’an 30
avant Jésus-Christ.

Enfin l’homicide-suicide, fait hélas bien présent, est un cas particulier, illustré par
Max Linder qui le 1er novembre 1925 assassine sa femme et se suicide. Acte que nous
différencions du suicide « altruiste » puisqu’il renferme une connotation agressive. (26) Cet
acte se dédouble en meurtre et suicide, le premier précédant logiquement le deuxième. Le
schéma est souvent le même : un homme tue une compagne au domicile de l’un d’eux
dans un contexte de rupture sentimentale, l’homme ne supportant pas d’être quitté. Il
s’agit aussi de l’assassinat d’un « adversaire » comme l’a illustré le film « Elephant »,
récompensé par la Palme d’or au Festival de Cannes 2003 qui met en scène le massacre
par deux adolescents d’une dizaine d’élèves et d’un professeur au lycée Colombine
(Colorado) en 1999. C’est un cas typique d’homicide-suicide motivé par une pulsion
destructrice, l’auteur du crime se sent victime d’injustice commise par une personne ou
une institution.

D’autres cas d’homicide-suicide sont les filicides-suicides. Ils se décomposent en
deux catégories, selon que l’homicide est à connotation altruiste ou pas. On retrouve
l’illustration de la première hypothèse dans le film La dolce vita dans lequel Steiner,
un ami du héros Marcello Rubini interprété par Alain Cuny se suicide après avoir tué
ses deux enfants, ne leur souhaitant pas le monde qui s’offrait à eux et préférant les
supprimer plutôt que de les y exposer. C’est la volonté d’éviter à l’enfant une souffrance
ou la crainte de l’abandonner dans une situation indésirable. La seconde hypothèse est
celle du « syndrome de Médée ». Médée est un personnage de la mythologie grecque,
magicienne et parente de Circé qui après avoir aidé Jason à obtenir la Toison d’or et
lui avoir donné deux enfants, se voit rejetée par lui pendant leur exil de Iolcos. C’est
donc pour se venger de Jason qu’elle tue leurs enfants. C’est tout naturellement que
son nom est utilisé pour désigner ce genre d’homicide-suicide bien que Médée ne se
donne pas la mort. Ce syndrome s’est tristement illustré avec la mort supposée des deux
jumelles suisses portées disparues le 30 janvier 2011, enlevées par leur père qui s’suicidé
quelques temps après et dont l’épouse avait demandé le divorce. (27) Enfin un dernier cas
d’homicide-suicide connu sous le nom de syndrome de Sardanapale désigne le cas dans
lequel un individu entend entraîner ses proches avec lui dans la mort, ce qui se solde
par le massacre de la famille avec la destruction de la maison familiale avant le suicide
de l’auteur des faits. (28) Ce cas doit son nom à Sardanapale qui au dire de la légende
serait un roi qui acculé à l’ennemi en 612 avant Jésus-Christ se serait suicidé après avoir
fait incendier son palais en y assemblant ce qu’il avait de plus précieux, ses richesses,
ses concubines et ses eunuques. C’est donc pour reprendre les mots du professeur Luc
Mayaux le mobile qui est déterminant.

C’est au regard de tous les éléments que les juges du fond refusent au suicide un
caractère aléatoire.

25. L. LEVENEUR et LAMBERT-FAIVRE, Le droit des assurances, 2005, n° 401
26. Anne-Sophie CHOCARD, Approche psychopathologique du passage à l’acte homicide-suicide,
Imaginaire & Inconscient 2/2005 (no 16), p. 183-198
27. Lefigaro.fr en date du 11 février 2011
28. Anne-Sophie CHOCARD, Approche psychopathologique du passage à l’acte homicide-suicide,
Imaginaire & Inconscient 2/2005 (no 16), p. 183-198

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