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INTRODUCTION GENERALE

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« On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on droit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ». Tels sont les termes de l’article 1384 alinéa 1er du Code civil qui consacre le principe de la responsabilité du fait d’autrui.

Il arrive en effet que, dans certaines hypothèses, une personne soit responsable des faits dommageables causés par autrui. Figure notamment au rang de ces personnes le commettant qui, en vertu de l’alinéa 5 de ce même article, est responsable des faits dommageables accomplis par ses préposés alors que ces derniers agissaient dans le cadre de la mission qui leur été impartie. En effet, il est fréquent qu’une personne soit amenée à offrir ses services à autrui dans le cadre d’une organisation sociale. Le développement considérable du salariat, qui va de paire avec le développement économique, a contribué à ce phénomène. C’est dans ce contexte que l’employeur est parfois amené à répondre des actes dommageables accomplis par ses salariés dans le cadre de cette activité, dans la mesure où ces derniers travaillent pour son propre compte. Nier une telle responsabilité reviendrait ni plus ni moins à nier l’existence même de l’entreprise.

L’idée d’une responsabilité du commettant pour les faits de ses préposés est aujourd’hui largement admise dans les systèmes juridiques issus du droit romain.
Néanmoins, l’élaboration de ce régime a été laborieuse et aujourd’hui encore, la doctrine éprouve certaines difficultés pour établir le fondement de cette responsabilité.

Ainsi, le régime initial de responsabilité du commettant pour le fait de ses préposés était profondément attaché au principe de personnalité de la responsabilité issu de l’article 1382 du Code civil, principe au titre duquel le préposé demeure le débiteur principal de l’indemnisation, la garantie du commettant intervenant seulement à titre de substitution.

Sous ce régime, seul l’abus de fonctions était de nature à exonérer le commettant de sa responsabilité. L’abus de fonctions est caractérisé lorsque le préposé a agi hors des fonctions auxquelles il est employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions. Ces trois conditions cumulatives ont été consacrées par l’Assemblée Plénière de la Cour de Cassation dans un arrêt du 19 mai 1988.

La première d’entre elles est incontestablement la plus importante : le commettant n’est exonéré que si le préposé a agi hors de ses fonctions. A contrario, le commettant demeure responsable des faits dommageables de son préposé commis dans l’exercice des fonctions qui lui ont été confiées. Si cette condition présente un caractère objectif, à savoir l’examen des fonctions confiées au préposé, une certaine subjectivité peut être relevée, le juge ayant tendance parfois à adopter une approche psychologique, en se plaçant du point de vue de la victime. Cette approche consiste à se demander si cette dernière a « pu légitiment penser » que le préposé agissait dans le cadre de ses fonctions.
Quant à la deuxième condition relative à l’absence d’autorisation du commettant, celle-ci a été érigée dans le cadre d’un arrêt relatif à l’utilisation abusive par un préposé d’un véhicule de son commettant, et donc sans son autorisation, utilisation au cours de laquelle le préposé occasionna un accident de la circulation. Pour l’appréciation de cette condition, le juge va néanmoins prendre en considération la connaissance par la victime de l’irrégularité dans laquelle se trouvait le préposé.Enfin, sur le point de savoir si le préposé a agi à des fins étrangères à ses attributions, on exige en réalité que le préposé ait agi dans son intérêt personnel.

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Cependant, l’application de ces trois conditions n’est pas chose aisée mais certains critères objectifs ont été dégagés pour aider les juridictions à caractériser l’existence d’un tel abus. Ainsi, vont être pris en considération le moment, le lieu et les instruments de production du dommage. Si le fait dommageable commis par le préposé a eu lieu pendant le temps et sur le lieu du travail et avec des instruments de travail, l’abus de fonctions pourra être retenu, sauf preuve contraire.
Néanmoins, l’abus de fonctions est rapidement apparu comme un concept manifestement inadapté et insuffisant pour fonder la responsabilité personnelle du préposé.

Ainsi, tout un courant doctrinal et jurisprudentiel s’est développé en faveur d’une plus grande protection du préposé. Des considérations d’ordre à la fois moral et économique ont animé ce mouvement qui n’a cessé de croître pour finalement donner naissance au célèbre arrêt Costedoat de l’Assemblée Plénière de la Cour de Cassation rendu en date du 25 février 2000. Cet arrêt est véritablement le point central de ce mémoire puisqu’il a consacré le principe fondamental de l’immunité civile de tout préposé qui commet une faute alors qu’il agit dans le cadre de la mission qui lui a été impartie par son commettant. Toute notre étude se raccrochera à cet arrêt ayant profondément bouleversé le régime de responsabilité du commettant pour le fait de ses préposés.
Néanmoins, et non sans surprise étant donnée l’effervescence à laquelle a donné lieu l’arrêt Costedoat, tout un courant jurisprudentiel s’est développé dans les années 2000 et a apporté des restrictions considérables au principe de l’immunité civile du préposé. Ces restrictions étant de plus en plus nombreuses, le terme d’ « immunité civil » peut paraître inapproprié.
La jurisprudence est pour le moins confuse et aujourd’hui se pose véritablement la question de savoir s’il est opportun de maintenir l’immunité civile du préposé dont les hypothèses d’application ont tendance à se restreindre à une peau de chagrin.
Ce constat nous amène nécessairement à nous poser cette question : Peut-on considérer que le principe de l’immunité du préposé, tel que consacré par l’arrêt Costedoat de l’Assemblée Plénière à la suite d’une longue et laborieuse évolution jurisprudentielle et doctrinale, et apparu alors comme légitime eu égard à l’ancien régime de responsabilité particulièrement sévère envers le préposé, conserve aujourd’hui sa pleine effectivité, la tendance jurisprudentielle et doctrinale actuelle étant à la limitation de ce principe dans son application et à la remise en cause de son opportunité ?

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