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INTRODUCTION

ADIAL

« La responsabilité civile des mandataires sociaux est de plus en plus fréquemment mise en cause par les actionnaires minoritaires. Importée des Etats-Unis, une assurance pallie ce type de risques ».(1)

En effet, la fonction de dirigeant de société engendre de très nombreuses responsabilités, exposant de ce fait les dirigeants à des risques considérables et d’une particulière importance. Ainsi, afin de permettre un exercice de la profession plus efficace et dans de bonnes conditions, une assurance dite « de responsabilité civile des mandataires sociaux » (RCMS) a vu le jour en France dans les années 70, fortement influencée par les systèmes Anglo-Saxons notamment Américain.

Gérard Cornu définit le dirigeant comme « la personne qui dirige, qui assure effectivement la direction d’une entreprise (dirigeant de société) en droit et parfois, seulement en fait (dirigeant de fait) ; terme générique d’évocation qui renvoie, en droit, à une fonction de haute responsabilité, en fait (sociologiquement) à une position dominante dans la société »(2).

La notion de dirigeant et surtout, la personne désignée comme telle varie selon le type de société.

Ainsi, dans une société anonyme classique, les dirigeants que nous visons sont les « administrateurs, le président du conseil d’administration, le directeur général, les directeurs généraux délégués, le président directeur général et les représentants légaux ».

Dans une SA à directoire, sont considérés comme dirigeants, « le président du directoire, les membres du directoire et les membres du Conseil de surveillance ». Dans une société à responsabilité limitée ou dans une société en nom collectif, « le dirigeant est toute personne qui exerce la fonction de gérant salarié ou non salarié ».

Dans une société par action simplifiée, « il s’agit du président et des dirigeants désignés par les statuts et au sein d’une association, il s’agira du président, du trésorier, du secrétaire général ou encore, des membres du conseil d’administration ».(3)

Le dirigeant social peut également être défini de manière plus juridique comme « la personne investie de pouvoirs de représentation légale de la société et qui détient donc le pouvoir de représenter et d’engager la société à l’égard des tiers ». (4)

L’exercice de la fonction de dirigeant que l’on peut ainsi décrire comme une fonction de haute responsabilité entraine logiquement l’apparition de risques corrélatifs qu’il faut assurer.

L’assurance, du latin « assecuratio » composé de «securus » : sûr, est « l’opération par laquelle une partie, l’assuré, se fait promettre, moyennant une rémunération, la prime (ou cotisation), pour lui ou pour un tiers, en cas de réalisation d’un risque, d’une prestation (pécuniaire) par une autre partie, l’assureur (société d’assurance), qui, prenant en charge un ensemble de risques, les compense conformément aux lois de la statistique ». (5) L’assurance de responsabilité civile des mandataires sociaux est une assurance ayant pour objet de garantir l’assuré contre les recours exercés contre lui par la société, les associés ou encore, des tiers à raison du préjudice qu’ils ont pu causer et qui engage leur responsabilité. Cette police d’assurance RCMS est, plus communément, qualifiée de police Directors and Officers’ liability (D&O).

Le sujet du mémoire traitant de l’assurance de responsabilité civile du dirigeant, nous ne traiterons ainsi pas de la responsabilité du chef d’entreprise pouvant être engagée en tant qu’employeur notamment de la responsabilité qu’il engage lorsqu’il est, par exemple, face à une maladie et un accident professionnels. Il convient également d’exclure du corps du mémoire tout ce qui concerne la responsabilité de l’entreprise elle-même exceptés les cas où la responsabilité des dirigeants est recherchée en même temps que celle de l’entreprise. Il est, enfin, important de préciser que l’appellation « assurance D&O » qui sera utilisée dans le mémoire désigne plus généralement l’assurance RCMS tant américaine que française. Cette appellation a été choisie car la pratique l’utilise très souvent (même en France) pour désigner la police RCMS.

L’assurance de responsabilité civile des mandataires sociaux dite « directors and officers’ liability » est apparue pour la première fois en Angleterre et plus précisément à Londres sur le marché du Lloyds après le krach boursier de 1929. Les très nombreuses crises financières, sociales, économiques ou encore, morales subies par le monde des affaires expliquent une telle volonté de créer une assurance garantissant la responsabilité personnelle des dirigeants.

L’apparition de ce nouveau type d’assurance à cette époque fait également écho à l’évolution progressive des fondements permettant de poursuivre le dirigeant social sur son propre patrimoine. En effet, au fil des évolutions législatives et règlementaires, nous assistons progressivement à un renforcement de la règlementation tant en matières de gouvernement d’entreprise que de cas de mise en cause de la responsabilité des dirigeants.

Ainsi, suite à des scandales boursiers tels que Enron ou encore, Worldcom, les Etats-Unis ont décidé de mettre en place, le 30 juillet 2002, une loi dite « Sarbanes-Oxley » sur la réforme de la comptabilité des sociétés cotées et la protection des investisseurs permettant une information financière plus fiable ainsi que la lutte contre les comportements déviants et frauduleux des entreprises.

Quant au droit français, il y a clairement une tendance à augmenter l’exposition des dirigeants aux actions en responsabilité tant de la part du législateur que des tribunaux. La mise en cause des dirigeants d’entreprise étant de plus en plus fréquente et entraînant d’importantes conséquences financières, la France n’a pas eu d’autres choix que de s’inspirer des pays anglo-saxons et d’instaurer sur le marché français de l’assurance des contrats d’assurance qui sont certes similaires mais absolument pas identiques.

C’est ainsi qu’ont vu le jour, en France dans les années 70, les contrats d’assurance « responsabilité des dirigeants » ayant pour but de couvrir les mandataires sociaux contre les conséquences financières que pourrait entraîner l’engagement de leur responsabilité ou encore, les condamnations en justice significatives qu’ils pourraient subir. Il convient de préciser que ces contrats ont pour objet non pas d’éviter tout engagement de la responsabilité des dirigeants mais d’en limiter les conséquences pécuniaires qui en découlent.

De leur côté, les Américains avaient décelé le filon depuis le début des années 60. En effet, ces derniers, forts de leurs constatations, ont décidé d’intégrer dans leur système assurantiel une police D&O afin de faire face à la multiplication des recours à l’encontre des dirigeants.

Il convient de rappeler que tous les ans, plus de 2 000 dirigeants sont condamnés civilement à payer des dommages et intérêts suite à l’engagement de leur responsabilité personnelle. Ainsi, si l’existence voire la légitimité de l’assurance de responsabilité civile des mandataires sociaux demeure constamment critiquée et remise en question, celle-ci ne cesse de prouver chaque jour son utilité. Elle est même devenue au fil du temps une police d’assurance indispensable à toute personne ayant un mandat social et susceptible de voir sa responsabilité civile propre et personnelle être engagée, les condamnations prononcées pouvant entraîner pour les dirigeants ou encore, leurs proches le paiement de sommes significatives voire une faillite personnelle.

Le marché de la RCMS est en constante évolution et gagne progressivement du terrain. Les assureurs sont de plus en plus nombreux à en proposer. En effet, après une percée dans le domaine de la RCMS par les assureurs dits « de première ligne » comme AIG, Liberty, Ace et XL, d’autres assureurs de tous horizons, qui ont également décelé le filon, ont commencé à s’intéresser de très près à ce marché fructueux comme Axa, Chubb, HCC Global, Zurich ou dernièrement en 2012, la filiale française de l’assureur australien, QBE proposant « un produit lisible et très complet dénommé CQFD ».(6) Les courtiers d’assurance sont également de plus en plus nombreux dans cette spécialité dont Gras Savoye, Marsh, Aon ou encore, Diot qui, à eux seuls, comptabilisaient en 2008 la RCMS de Bouygues Télécom, Christian Dior, l’Oréal, EDF, GDF, Shell ou encore, Renault.(7)

Le marché de la RCMS tant en Europe qu’en outre atlantique est un marché hautement rentable et ce, malgré la survenance de quelques célèbres sinistres passés ayant entraîné des indemnisations records comme par exemple, Vivendi en 2008 qui s’est vu imposer par les juridictions New-yorkaises le versement de 51 milliards de dollars à ses actionnaires lésés ou encore, l’affaire touchant les opérateurs de téléphonie mobile Bouygues Télécom, Orange et SFR qui se sont vus condamner au versement de la somme de 534 milliards d’euros pour entente illicite. Le domaine de l’assurance D&O tant américaine que française est en constante mutation, les garanties se diversifient tout en laissant place par la même occasion à des exclusions tout aussi variées. Le produit d’assurance RCMS voit son champ de distribution s’agrandir, celui-ci est semble-t-il entré dans les moeurs ce qui en fait un sujet intéressant à traiter.

En effet, si Isabelle Mandraud dans son article datant de 1994 déclarait que la responsabilité civile des mandataires sociaux n’avait de cesse d’être engagée et mise en cause, il semble que cela soit encore et plus que jamais le cas dorénavant. La position de dirigeant est caractérisée par la prise de risque que cela implique et le dirigeant qui voit sa responsabilité être mise en cause encourt d’énormes conséquences notamment financières qu’il faut couvrir. Ainsi, la France sous l’influence des Etats-Unis ainsi que de l’Angleterre s’est dotée de polices de responsabilité des mandataires sociaux permettant aux dirigeants d’exercer leur profession dans de bonnes conditions. Il convient également de préciser que si la RCMS existe depuis maintenant de nombreuses années, celle-ci reste un sujet particulièrement riche faisant encore l’objet d’interrogations et de débats, expliquant ainsi les nombreuses conférences sur ce point notamment aux rencontres de l’AMRAE.

L’existence et la mise en oeuvre d’une telle assurance ne risquerait-elle pas d’engendrer un phénomène de déresponsabilisation des dirigeants qui en bénéficient ? L’ordre public n’en est-il pas plus atteint ?

Il apparaît que l’assurance de responsabilité civile des dirigeants offre un large choix de garanties très diverses et ainsi, procure aux dirigeants une couverture assez large de leur responsabilité (Partie 1). Cependant, il est évident que la prise en charge par l’assureur D&O n’est pas totale, la mise en oeuvre de la garantie étant, malgré tout, strictement encadrée (Partie 2).

1 Isabelle MANDRAUD, L’assurance parapluie contre la faute ou la négligence, Les Echos n° 16578 du 08 février 1994, page 2
2 Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, édition Quadrige, 2011
3 Ourida ATTIA, Responsabilité civile des mandataires sociaux et l’international, Institut des assurances de Lyon, mémoire soutenu en septembre 2009
4 Lamy assurances, La responsabilité du dirigeant social, éditions 2012
5 Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, édition Quadrige, 2011
6 Thomas BAUME, QBE se lance dans la RC des dirigeants, Argus de l’assurance, 21 septembre 2012
7 Par C.D, Une douceur pour quelques privilégiés, Argus de l’assurance, 18 janvier 2008

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