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I. Les conventions : faire étalage de sa condition de « fan » ?

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Avant de nous intéresser aux résultats de l’enquête menée pendant la convention de fans de Supernatural, il semble important de s’arrêter sur cet événement qui rassemble les admirateurs d’une oeuvre le temps de rencontres et d’échanges divers. Commençons tout d’abord, avec une définition de ce qu’est une convention :

Il s’agit d’un événement qui rassemble des fans d’un film, d’une série télévisée ou d’une oeuvre littéraire, autour de rencontre avec des acteurs, des membres de l’équipe techniques et divers autres experts. Les conventions sont généralement organisées par des fans, et sont plus largement organisées autour d’oeuvres de science-fiction. L’organisation comprend des panels de questions/réponses avec chacun des invités, puis avec plusieurs d’entre eux réunis. Il y a aussi des séances de photoshoots et d’autographes. Enfin, différentes activités sont proposées entre fans, pour combler les temps morts, comme : la présence de stands commerciaux pour acheter des produits dérivés, se faire maquiller… Ou bien des concours : de cosplay (il s’agit de concours de déguisement autour de l’univers propre à l’oeuvre dont la convention s’inspire) ou de fanarts. Une convention rassemble des fans qui paient pour participer à l’événement, qui s’étale en général, sur un week-end. Elle a lieu dans un hôtel ou un centre des congrès où des salles sont disponibles pour accueillir l’ensemble des quelques 500 fans (en moyenne) venus participer.

Les conventions forment, parce qu’elles réunissent des centaines de fans d’une même oeuvre, une instance de légitimation. En effet, comme nous l’avons vu lorsque nous parlions des communautés d’intérêt, chaque espace communautaire forme une petite « société virtuelle » au sein de laquelle existe une hiérarchie propre. Ces codes apparaissent d’autant plus clairement lorsque les fans se retrouvent en présence les uns des autres. Ne trouve de la légitimité au sein d’une convention, qu’un individu qui est lui-même fan. Ainsi, on observe que la situation est inversée par rapports aux stigmatisations qui entoure généralement le fan lorsqu’il est seul. S’il apparaît comme déviant parce que son attachement prend des proportions peu communes, au sein d’une convention de fans, ce sont les téléspectateurs traditionnels qui sortent du lot. Le processus de légitimation est tel, que lorsque des fans vêtus normalement croisent d’autres fans habillés de costumes ou portant un accessoire lié à la série, ils ne se retournent pas : ils sont en effet dans la confidence, savent ce que ces accessoires signifient (la préférence pour tel ou tel personnage, par exemple). Pendant la passation des questionnaires de l’enquête qui nous a intéressé, il a donc été important de montrer nos compétences de fans, pour recevoir une coopération pleine des interrogés. En effet, enquêter des fans dans un événement qui ne comprend que des admirateurs de la série, aurait été compliqué, du fait que les fans auraient peut-être cherché à légitimer l’oeuvre en se montrant « trop » positifs, et par conséquent, ils auraient pu fausser les résultats.

Du fait même que les fans sont en présence de semblables, ils « osent » plus facilement se présenter comme fans. Pendant les conventions, on observe souvent les discussions sur les éléments de la série (sur un épisode, un personnage…) où chaque individu essaie de montrer son implication, essayant par là-même, de montrer qu’il est « plus » fan que les autres. Les conventions sont très intéressantes à analyser, car elles donnent à voir une sous-société, où les membres assument et revendiquent leur image de fan. Cette identité qu’il faut préserver, si ce n’est cacher dans la vie quotidienne, est ici mise en avant.

La convention Supernatural a servi de base à ces réflexions, puisque pendant la passation des questionnaires, il nous a été donné d’observer comment se déroulaient les interactions, et comment réagissaient les fans, les uns avec les autres. Il s’agit d’abord de remarquer qu’au début de la première journée, les fans restaient en petits groupes : chacun restait avec ceux ou celles qu’il connaissait. A la fin cependant, les conversations fusaient entre fans qui ne se connaissaient pas. Elles avaient toutes le point commun d’être centré sur la série. Il s’agit en effet du point commun qui les rassemble. Plus encore, il s’agit d’un sujet de discussion qui peut les introduire à des individus susceptibles de rejoindre leur réseau, et ainsi de glisser sur de nouveaux sujets de conversations.

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