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DEUXIEME PARTIE : LES FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE.

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II.1. LES GENERALITES

II.1.1. L’origine des chocs exterieurs.

Les bouleversements de l’économie mondiale des années soixante-dix (1970) et quatre-vingt (1980) ont été à l’origine des déficits budgétaires auxquels ont été confrontés les pays en développement.

Nombreux auteurs estiment que la principale source de l’instabilité économique, mondiale reste le choc pétrolier des années soixante-dix (1970) avec la récession économique qu’il a provoquée.

En effet, suite au conflit armé Israélo-Arabe dit “La guerre du KIPPOUR” (Octobre 1973ii), les pays arabes ont décidé de décréter un embargo de leurs exportations vers un certain nombre de pays jugés amis d’Israël.

Depuis lors, les craintes de pénuries se sont vite généralisées et ont contribué à diminuer le climat de confiance qui régnait chez les chefs d’entreprises importateurs de pétrole et chez les décideurs économiques de la plupart des pays non pétroliers.

Par la suite, cette décision improvisée a entraîné la fragilité de leurs économies ainsi que celle de leurs budgets, compte tenu de leur degré de dépendance aux approvisionnements extérieurs en produits énergétiques en général et en produits pétroliers en particulier.

Plus graves ont été les effets de la décision prise par les pays de l’OPEP d’augmenter le prix du pétrole(5). Comme celui-ci avait quadruplé, les termes de l’échange de la plupart des pays non membres de l’OPEP se sont détériorés et le protectionnisme est monté de façon à réduire leurs débouchés extérieurs et à gonfler leur service de la dette publique extérieure suite à la hausse du taux d’intérêt.

Ces difficultés qu’ont connu les pays non pétroliers se sont vite répercutées sur leurs balances de payements, sur leurs activités économiques en général, sur leurs niveaux généraux de prix et sur la stabilité de leurs budgets.

Leurs recettes publiques ont beaucoup fluctué à la suite de l’instabilité des impôts sur les échanges internationaux et leurs dépenses publiques ne faisaient que croître continuellement. En plus, il était difficile, voire impossible de réduire les dépenses publiques au moment où les recettes baissaient, et le budget était chroniquement déséquilibré jusqu’à nos jours.

Dans les lignes qui suivent, nous allons essayer de développer ces derniers effets cas par cas.

II.1.2. LES EFFETS DES CHOCS EXTÉRIEURS

II.1.2.1. Les effets des chocs extérieurs sur la balance des payements

Les économistes ne s’entendent pas facilement lorsqu’il s’agit d’identifier quels sont les chocs extérieurs qui ont le plus pesé sur la balance des payements des pays non pétroliers.

Selon certains, la récession mondiale de 1974-1975, la lenteur de la reprise qui a suivi et les pressions protectionnistes des pays développés auraient exercé des effets négatifs plus importants que ceux du renchérissement du pétrole. Selon d’autres, c’est l’inverse qui se serait produit.

Dans une étude du centre de développement de l’O.C.D.E., Bela BALASSAiii montre que pour la quasi totalité des P.V.D. non pétroliers, les dommages causés par la détérioration des termes de l’échange (due principalement à la hausse des prix des produits manufacturés importés), ont été plus graves que les effets du ralentissement des exportations des pays du Tiers-Monde vers les pays développés.

En effet selon l’auteur, le quadruplement des prix du pétrole a eu une incidence négative sur la balance des payements de la plupart des P.V.D. non membres de l’OPEP. Dans certains pays, cet effet a été accentué par la détérioration des termes de l’échange des produits non pétroliers, alors que dans d’autres, il a été atténué par les améliorations de ces mêmes termes.

C’est ainsi que plusieurs pays non pétroliers, en particulier ceux qui exportent du Cacao et du Café ont ultérieurement enregistré une nette amélioration de leurs termes de l’échange.

En plus de l’effet négatif du quadruplement du prix du pétrole, l’auteur estime que le ralentissement de la demande extérieure des produits d’exportations des pays non membres de l’OPEP, qu’il soit imputable au fléchissement des taux de croissance économique ou à un protectionnisme accrue, a également eu des effets négatifs sur la balance des payements de ces pays et qu’il variait selon les pays et en fonction de la composition de leurs exportations.

Avant Bela BALASSA, d’autres auteurs avaient tenté d’analyser les effets des chocs extérieurs sur les économies des pays non pétroliers. Sous un thème intitulé, “La crise pétrolière et le nouveau contexte conjoncturel”, Eriane MOSSE(6) avait essayé de quantifier les conséquences des chocs extérieurs sur la balance des payements courants des différents pays dans un tableau suivant :

Tableau I : La crise pétrolière et les grands déséquilibres extérieurs (Balance commerciale en milliards de dollars américains), 1973 – 1977.

Tableau 1 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : OCDE, Perspectives économiques, n 21 juillet 1977. Reproduit dans “Eliane Mossé”, Op-cit, p. 189.

Comme il ressort du tableau ci-dessus, les PVD non membres de l’OPEP ont connu une forte dégradation de leur situation commerciale après la crise pétrolière : leur solde courant est passé de -6 en 1973 à -23 milliards de dollars américains en 1975.

En effet, il est visible que ce qui était une perte pour les PVD non pétroliers paraissait comme un gain pour les pays membres de l’OPEP dont le solde commercial est passé de 19 milliards de dollars à + 78 milliards de dollars américains dans deux ans seulement.

Les sommes des excédents accumulés par ces derniers sont fantastiques : plus de 250 milliards de dollars américains en quatres ans ! Les P.V.D. non pétroliers quant à eux, ont été les principales victimes des effets des chocs extérieurs avec un déficit cumulé de 94,5 milliards de dollars américains.

Selon Bela Balassa(7) Les PVD ne devaient pas se taire devant une situation aussi critique pour leur balance des payements. Ainsi, ils se sont efforcés de chercher des mesures susceptibles d’atténuer les effets négatifs des chocs. Les pays dans lesquels les effets conjugués des variations des termes de l’échange et du ralentissement de la demande extérieure ont provoqué une dégradation de la balance des payements, ont agi par un recours au financement extérieur, à la promotion des exportations, à la substitution de productions nationales aux importations ainsi qu’à des mesures macroéconomiques affectant directement les exportations et les importations.

Certains autres pays ont également mis en oeuvre un ensemble de mesures dont quelques unes ont eu des effets positifs et d’autres des effets négatifs. C’est dans une telle optique qu’ils se sont efforcés d’accélérer leur croissance économique en empruntant à l’étranger et en favorisant un mouvement de substitution de productions nationales aux importations, dans le but de protéger leur balance des payements. Tels est le cas des P.V.D. non pétroliers qui subissent le deuxième choc pétrolier en 1979.

En effet, ils ont recouru à un accroissement de l’emprunt extérieur pour amortir l’incidence négative des chocs extérieurs sur leur balance des payements et ont vu leur coefficient du service de la dette et l’endettement extérieur s’accroître considérablement. Le tableau qui suit nous éclaire là-dessus.

Tableau II : Incidence des chocs extérieurs sur la balance des payements et les mesures prises pour les atténuer : Quelques cas représentatifs dans 9 pays en développement non membres de l’OPEP, 1974 – 1979.

Tableau 2 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Tableau 2' ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : Bela BALASSA, Op-cit, p. 19

Bref, tant que l’ajustement intérieur retarde, le recours au financement extérieur peut donc être à l’origine de difficultés futures de la balance des payements; à moins que les prêts n’engendrent des gains ou des économies de devises suffisantes pour rembourser le principal et les intérêts. Sinon, le niveau élevé des taux d’intérêt accentue encore les problèmes de liquidité et augmente le coût à supporter pour investir les fonds empruntés.(8)

II.1.2.2. Les chocs extérieurs et l’accentuation de l’inflation

Concernant les évolutions économiques internes, la conséquence la plus immédiatement prévisible des chocs extérieurs est l’impact inflationniste.
Cet effet a été double après la crise pétrolière(iv). En effet, la hausse des prix du pétrole a eu un impact sur les coûts de production (qui se sont traduits en hausse de prix). Elle a eu également des effets indirects sur l’ inflation, à cause des problèmes de répartition de revenu qui étaient provoqués par le transfert pétrolier. La perte globale du pouvoir d’ achat que les pays développés ont subie du fait de la crise pétrolière, s’est traduite par une aggravation des tensions sur le partage de la valeur ajoutée et a provoqué une situation conjoncturelle, caractérisée par des phénomènes de surchauffe et d’ accentuation des pressions inflationnistes.

Eriane MOSSE(9) essaye de quantifier cet impact dans le tableau qui suit.

Tableau III : La crise financière et l’inflation en 1974 (*) La hausse de prix des matières premières, la hausse de prix du pétrole et l’inflation (en pourcentage)

Tableau 3 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

(*) L’année 1974, qui a suivi le premier choc pétrolier, a été l’année de plus forte inflation de la décennie 1970.

(1) Prix de la demande intérieure (consommation, investissement, stocks)
(2) Prévisions effectuées en octobre 1973

Source : Eriane MOSSE, op-cit, p.191.

Selon l’auteur, la crise pétrolière s’est greffée sur une situation conjoncturelle de vive expansion, caractérisée par des phénomènes de surchauffe et d’accentuation des pressions inflationnistes(10). Cette accélération étant non seulement imputable à l’état généralisé de surchauffe (le PNB de l’ensemble des pays développés s’étant accru de 6,3 % en 1973 contre 4,6 % pour la moyenne des cinq années précédentes), mais également à la flambée des prix des matières premières qui s’était manifestée dans le courant de 1973.

En outre, l’analyse du tableau ci-dessus montre que la hausse de prix observée en 1974-1975 a été beaucoup plus forte à cause de la hausse des prix du pétrole et d’un certain nombre d’éléments qui ont exercé un rôle amplificateur sur l’inflation. Parmi ces éléments, l’auteur évoque la poursuite de la hausse des coûts de salaire et l’explosion salariale dans certains pays.

La hausse de prix des produits de base et le phénomène spéculatif d’achats anticipés renforcent également l’impact des chocs extérieurs sur les niveaux généraux des prix à l’intérieur d’un pays considéré. Autant de preuves qui démontrent l’impact négatif des chocs extérieurs sur les niveaux généraux de prix.

II.1.2.3. Les chocs extérieurs et la récession de l’activité économique.

D’autres auteurs ont également développé une thèse selon laquelle les chocs extérieurs provoquent une dépression économique dans les pays industrialisés ainsi que dans les P.V.D. non membres de l’OPEP. Selon certains, les chocs extérieurs engendrent une diminution de la demande exogène des produits exportés et par ce fait, dépriment l’activité économique d’un pays exportateur.

C’est dans cet ordre d’idée que H.BOURGUINATv, nous rappelle que cette thèse a profondément marqué la politique de la France dans les années 1974-76 et a conduit à une politique d’endettement extérieur accrue, destinée à soutenir la demande.

En plus de cette thèse, d’autres travaux empiriques ont tenté de chiffrer cet effet dépressif. Dans l’ensemble, les travaux tiennent compte des interdépendances multinationales dont les effets cumulatifs ont été mis en évidence par SCHWARTZ, A.N.(11) qui, à l’aide de ces derniers travaux, n’a pas pu atteindre l’équilibre économique international à cause des chocs extérieurs. A l’opposé, on peut retrouver une vision macromondiale dans une étude de BURNS,T et DICKS, G.R.(12).

Pour évaluer les effets des chocs extérieurs, les deux auteurs ont construit un modèle global de l’économie mondiale, conçue comme une seule et même économie fermée. L’équilibre économique international n’est alors rien d’autre que l’équilibre de cette économie fermée et varie selon les effets des chocs extérieurs sous plusieurs formes.

Mais qu’elles soient directes ou indirectes, les conséquences des chocs extérieurs sont, soit négatives soit positives sur l’activité économique d’un pays prix isolément.

D’après Eriane MOSSE(13) les effets d’amplification ont pu s’exercer après le choc pétrolier du fait qu’un processus cumulatif s’est engagé à travers les différents canaux. Considérant les pays de l’OCDE et un ensemble des P.V.D. non pétroliers, l’auteur a pu trouver que :

i) Les niveaux des échanges qu’ils effectuaient les uns avec les autres s’étaient fortement réduits (les échanges à l’intérieur de la zone OCDE s’étaient réduits de 12 % en volume entre le premier semestre de 1974 et le premier semestre de 1975);

ii) Les entreprises, craignant de nouvelles manifestations de types embargo ou augmentation de prix du pétrole, avaient préféré liquider leurs stocks de produits finis pour répondre à la demande plutôt que d’accroître leur production;

iii) Les investissements s’étaient dans la plupart des pays effondrés;

iv) Les ménages, face à la montée du chômage, avaient eu un comportement prudent et le taux d’épargne s’était généralement accrue;

v) Enfin, on a assisté (en 1974 et au début de l’année 1975) aux effets provoqués par des mesures restrictives prises au second semestre 1973 (dans la plupart des pays de l’OCDE et dans la zone des autres pays non pétroliers) pour lutter contre l’inflation.

Dans l’ensemble, les chocs extérieurs, par leurs effets indirects ou induits, par leur rôle de révélateur de difficultés économiques pré-existantes, affectent profondément l’activité économique de la plupart des pays en général et des P.V.D. en particulier.

II.1.2.4. Les chocs extérieurs et les difficultés budgétaires

Dans les années 50 et 60, le budget avait joué un rôle conjoncturel important : il s’agit en premier lieu de la hausse des impôts et le freinage des dépenses publiques pour lutter contre l’inflation et en second lieu, de l’allégement de la fiscalité ainsi que de l’augmentation des prestations pour lutter contre la récession.

Depuis la crise pétrolière des années 1970, ce rôle d’importance primordiale est devenu beaucoup plus difficile à exercer dans la mesure où les marges de manoeuvre de la politique budgétaire ce sont réduites. KE-YOUNG CHU éclaire cette affirmationvi. En effet, la stagnation (ou du moins le freinage de la croissance économique) a limité le développement des recettes publiques. Par ailleurs, le Développement des dépenses publiques s’est accéléré pour trois raisons :

i) Le développement des transferts sociaux lié à l’augmentation du chômage;

ii) La poursuite de la hausse des salaires dans le secteur publics;

iii) Le Développement des dépenses d’investissements et d’autres dépenses visant à compenser certains aspects négatifs de la croissance (La protection des couches sociales vulnérables, les dépenses à l’éducation, ….)

Face à des recettes en moindre progression, (et qu’il est difficile d’accroître compte tenu du climat social peut favorable à un accroissement de la pression fiscale), on a donc trouvé les dépenses publiques en accélération.

C’est pourquoi, à cause des effets négatifs qu’exercent les chocs extérieurs sur les recettes publiques dont la principale composante (les impôts indirects sur les relations internationales) subi sans merci les fluctuations inattendues; le déficit du secteur public se développe très fortement dans la plupart des PVD non membres de l’OPEP.

Dans le chapitre qui suit, nous allons analyser plus profondément l’incidence des chocs extérieurs sur l’ajustement budgétaire des PVD exportateurs des produits de base.

II.2. LES CHOCS EXTÉRIEURS ET L’AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE

Si les pays industrialisés se sont dotés de la gestion budgétaire moderne et adoptée à leur conjoncture économique et sociale, la plupart des PVD ont fait preuve dans cette matière, d’un conservatisme très marquévii.

Leurs recettes publiques sont trop axées sur les échanges internationaux et sont par ce fait, exposées aux contrecoups des chocs extérieurs qui, en faisant fluctuer les recettes d’exportations, font également fluctuer le volume des recettes fiscales y relatives. Dans de telles conditions, ces recettes se trouvent dans l’incapacité de pourvoir aux simples dépenses de fonctionnement.

Au cours de l’analyse qui suit, nous allons considérer séparément l’impact des chocs extérieurs sur les recettes publiques et sur les dépenses publiques. Nous allons enfin, faire la synthèse des implications sur la gestion budgétaire en général.

II.2.1. LES CHOCS EXTÉRIEURS ET L’AJUSTEMENT DES RECETTES PUBLIQUES

II.2.1.1. La prépondérance des impôts indirects dans les recettes fiscales

La lecture des budgets de certains pays en développement permet de constater un déséquilibre entre les recettes publiques à l’intérieur desquelles les droits de douane, les taxes à l’importation et les droits de sortie occupent une part prédominante.

Les recettes directes sur les biens et les personnes se situent généralement dans un éventail représentant un pourcentage relativement petit des recettes fiscales totales comme le témoigne le tableau ci-après.

Tableau IV : Pourcentage des impôts directs et indirects par rapport aux recettes fiscales totales de quelques P.V.D.

Tableau 4 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : République Française, “Fiscalité et Développement des pays du Tiers-Monde, 1974, Réproduit dans H.NONORGUES, op-cit, p.15.

Visiblement le rendement des impôts directs augmente plus lentement que celui des impôts indirects dans la plupart des P.V.D. Ce qui implique une diminution de la part que les impôts directs occupent dans le budget ordinaire.

Plutôt que de développer l’assiette interne des recettes publiques, la plupart des P.V.D. continuent de favoriser la place des impôts indirects sur les relations internationales dans leur budget pour des raisons qui sont analysées dans le paragraphe suivantviii.

II.2.1.2. Intérêt de la taxation des exportations

Antérieure à l’imposition des importations mais abandonnée par quelques pays industrialisés, la taxation des exportations ne subsiste beaucoup plus que dans les P.V.D. Elle est liée aux difficultés financières que connaissent ces derniers et plus particulièrement à la facilité dans la collecte.
Rendue possible par la conjoncture économique mondiale, la taxation des exportations présente un double intérêt : Intérêt fiscal et économique. Nous les analyserons séparément.

A. Intérêt fiscal de la taxation des exportations

La taxation des exportations est un complément indispensable à l’imposition du revenu.

En effet, comme le gros des exportations provenant des PVD non membres de l’OPEP est essentiellement constitué des produits du secteur primaire et que les bénéficiaires des revenus d’exportations (les producteurs ruraux pour la plupart) échappent en masse à l’impôt sur les revenus; les droits de sortie résorbent dans ce cas une partie de leurs profits et les font contribuer ainsi aux recettes publiques.

La faiblesse d’une imposition appropriée à cette catégorie de contribuables et à leurs revenus dans le système fiscal interne à certains PVD, justifie donc le maintien et le développement de la taxation des exportations.

Celle-ci, quant elle est bien aménagée, permet d’atteindre les bénéfices exceptionnels que réalisent les exportateurs en cas de hausse des prix des produits exportés et de compense ainsi l’inefficacité de l’impôt sur les revenus à toucher de tels bénéfices.

La taxation des exportations est également appréciée pour son administration très aisée et pour son acceptation politiqueix. Sur le plan administratif, nous admettons avec KALINIJABO Charles que la méthode d’établissement et de recouvrement des droits de sortie est très expéditive.

En plus, un personnel peu nombreux peut pourvoir à l’administration des taxes et la fraude peut être réduit à des dimensions minimales.(14) En fin, les coûts des opérations d’imposition sont extrêmement réduits.

Au point de vue politiques, l’admiration pour les droits de sortie s’explique par le peu d’aversion qu’elles suscitent de la part de ceux qui les subissent.

Dans le cas de la taxation des produits du secteur primaire (café, cacao,….) par exemple, les prix payés aux producteurs agricoles par les intermédiaires commerciaux sont généralement ajustés par un organisme public qui tient compte des cours en vigueur sur les marchés d’exportations et des droits de sortie.

Les taxes sont perçues au moment de la sortie de la marchandise et acquittées par l’exportateur, dernier intermédiaire qui se charge de l’écoulement du produit sur les marchés extérieurs. Dans ces conditions, les producteurs ignorent généralement la taxe qui grève leur revenu. Le montant de celle-ci leur est indifférent tant qu’il ne se traduit pas par une baisse des prix par rapport à ceux pratiqués l’année précédente.

B. Intérêt économique de la taxation des exportations

A côté des objectifs d’ordre fiscal, les droits de sortie peuvent théoriquement avoir des effets économiques favorables, notamment pour l’amélioration des recettes budgétaires.

En effet, pour autant que le montant de la taxe frappant un produit exporté peut être répercuté entièrement ou partiellement sur le consommateur étranger, on obtiendrait un accroissement net du revenu réel, qui contribuerait à réduire l’échange inégal en soutenant les importations toujours croissantes dans les pays en développement. En réalité, ces cas où les droits de sortie seraient transférables aux consommateurs étrangers sont quasi inexistants pour deux raisons :

i) Les P.V.D. ne participent pas à la fixation des prix des produits essentiels qu’ils exportent;

ii) Les cours sont fixés à l’étranger de façon que les produits participent très faiblement au revenu global des exportations au niveau mondial.

Dans cet ordre d’idée, le P.V.D. ne peuvent pas prétendre occuper une position monopolistique sur les marchés extérieurs leur permettant d’influencer favorablement les prix. Dans un tel état de choses, les droits de sortie se répercutent sur les producteurs des pays en développement et influent significativement sur la stabilité des recettes fiscales en général.

Bref, l’impossibilité de reporter la charge fiscale sur les consommateurs étrangers explique la problématique des exportations en tant qu’assiette fiscale.

II.2.1.3. La problématique des exportations en tant qu’assiette de l’impôt.

En raison de leur importance fiscale dans un environnement où les besoins des recettes publiques sont importants, les droits de sortie sont en quelque sorte un mal nécessaire et inévitable dans l’état actuel des budgets de la plupart des pays en développement.

Ils n’en sont pas moins critiquables, non seulement parce que leur assiette est trop étroite et difficilement extensible, mais encore parce qu’ils dépendent fortement de l’extérieur et par ce fait, renforcent l’instabilité budgétaire des P.V.D.

A. L’assiette trop étroite des droits de sortie

L’étroitesse de l’assiette des droits de sortie est imputable à la gamme restreinte des produits exportés et taxables ainsi qu’à la faiblesse du volume des exportations.

En effet, on admet avec Antoine BASILEx que le commerce extérieur des P.V.D. se trouve concentré en moins de produits que ne l’est le commerce des pays développés à l’économie diversifiée. Cette concentration entraîne une plus grande instabilité des recettes d’exportations et par ce fait, les recettes fiscales qui en découlent sont instables à cause de l’instabilité des prix sur les marchés internationaux(15).

La concentration en question est pour la plupart des PVD dominée par les produits de base qui accusent d’année en année d’amples variations. Très souvent d’ailleurs, stipule André Vanhaeverbeke,(16) les effets-prix et quantité se cumulent pour déstabiliser les recettes d’exportation, si bien qu’en moyenne pour l’ensemble des P.V.D., les variations cycliques des recettes d’exportations ne sont pas négligeables entre la période de haute conjoncture et la période de basse conjoncture.

Selon le même auteur, la première et la plus grâve conséquence de cette instabilité des recettes réside dans la vulnébilité financière et monétaire c’est-à-dire, l’inflation. En effet, en haute conjoncture, lorsque les recettes fiscales y afférentes augmentent, on a tendance à dépense davantage et, comme la production intérieure est rigide; les prix montent.

En basse conjoncture, le gouvernement cherche à maintenir les recettes et à éviter une déflation politiquement difficile en pratiquant l’impasse budgétaire également cause d’inflation.

De surcroît, cette instabilité des recettes d’exportations, et en parallèle des recettes fiscales y afférentes, rend la planification extrêmement difficile, car si on a prévue un certain montant d’investissements, mais que la baisse des prix des produits exportés provoque la baisse des recettes budgétaires, la réalisation des projets de développement et surtout leur coordination seront compromises.

Bref, le caractère mono-exportateur des PVD, fait que dans la plupart des cas, un ou deux produits d’exportation supporte (nt) la quasi totalité des droits de sortie de façon que la structure des recettes fiscales en est largement influencée et par ce fait, la structure des recettes budgétaires est également influencée.

Cette situation montre clairement à quel degré l’assiette des droits de sortie est rigide. On ne peut guère compter sur la possibilité de son élargissement, car la production des biens exportables reste très faible, peu diversifiée et subit les fluctuations des prix sur les marchés internationaux.

B. La forte dépendance des droits de sortie vis-à-vis de l’extérieur

Généralement pour accroître le rendement d’un impôt donné, la technique fiscale utilise deux procédés : L’élargissement de l’assiette et/ou l’accroissement des taux d’imposition. Dans certains cas, ces deux procédés peuvent être appliqués cumulativement ou séparément.

Relativement aux droits de sortie, la technique de l’élargissement de l’assiette est mise en échec par des raisons qui viennent d’être examinées. Le relèvement des taux d’imposition reste le seul recours dont il convient d’examiner les conditions d’application.

En effet, selon charles KALINIJABO(17), le relèvement des taux de droits de sortie ne se conçoit logiquement que dans le cas d’une conjoncture strictement favorable aux produits exportés imposables. En vertu de la sensibilité aux chocs extérieurs propre aux impôts indirects, le producteur ne ressent pas la charge de l’impôt qui grève son profit lorsque son produit a bénéficié d’une hausse de prix sur les marchés extérieurs.

Pour lui, c’est l’accroissement nominal de son revenu qui l’intéresse et il ignore généralement le sacrifice qu’il consent en supportant un impôt qu’il ne paye pas lui-même.

Bref, les fluctuations des prix des produits d’exportations se répercutent sur la structure des recettes fiscales et déterminent le législateur dans le choix des taux d’imposition. Il en résulte ainsi une forte dépendance des droits de sortie par rapport à la situation des produits exportés sur les marchés d’exportations.

II.2.1.4. L’instabilité des droits de douane et difficultés de planification

Le terme “instabilité” désigne les variations qui se produisent par rapport à une valeur tendancielle au cours d’une période donnée. Il englobe les insuffisances (les pénuries) et les excédents des droits de douane. Ces manques à gagner et ces excédents ont tous les deux certains effets sur l’ajustement budgétaire des pays dont la fiscalité repose essentiellement sur le commerce extérieur. C’est pourquoi ces effets doivent être examinés.

Selon certains auteurs, il y a une différence fondamentale entre l’instabilité due à la demande et l’instabilité due à l’offre lorsqu’il s’agit de la transmission des effets de l’instabilité de ces impôts indirects sur le budget.

A. L’instabilité due à la demande des exportations

L’instabilité imputable à la demande s’amorce à l’extérieur de l’économie et principalement sous la forme d’une instabilité de prix des exportations et des termes de l’échange qui provoquent les fluctuations parallèles au niveau des dépenses internes.(xi)

Selon Lindert et Kindleberger(18), la variabilité de la demande étrangère des biens d’exportations est pour la plupart des PVD une chose commune des chocs extérieurs. En effet, cette variabilité est particulièrement aiguë pour les pays qui se spécialisent dans l’exportation d’une gamme étroite de produits dont la demande est très sensible au cycle d’affaires des pays importateurs. En plus, elle cause du tort aux pays exportateurs des matières premières dont le budget dépend essentiellement des impôts indirects.

B. L’instabilité due à l’offre des importations

L’ajustement budgétaire devient plus compliqué en face de chocs dus à l’offre d’importations. En effet, nous acceptons avec Lindert et Kindleberger que les résultats de cet ajustement dépendent principalement des effets initiaux du choc sur les recettes publiques et le pouvoir d’achat national.

L’auteur donne cependant le résultat d’un exemple dépourvu d’ambiguïté, en se limitant au type le plus probable et le plus dangereux de choc extérieur dû à l’offre d’importations, c’est-à-dire, le choc pétrolier.

En réalité, “une réduction soudaine de l’offre étrangère, diminue le pouvoir d’achat national (puisque le prix a augmente) et augmente la valeur totale des importations et la dépense totale. Cela se produit si les entreprises étrangères, les guerres, les blocus, les grèves ou les mauvaises récoltes privaient l’approvisionnement des importations occupant une large place dans la dépense nationale et dont la demande d’importation nationale soit très inélastique”.

Dans ces conditions le budget national, dont les recettes totales accussent d’amples variations, connaît des difficultés d’ajustement du fait de la hausse des dépenses résultant de l’instabilité de l’offre d’importation.

C. Les chocs extérieurs et les difficultés de planification

A travers l’argumentation supra, on remarque que la mise en place d’un plan de développement économique dont le financement reposerait sur les recettes fiscales issues du secteur d’import-export, devient plus difficile en raison du caractère incertain de celles-ci(19).

Selon Wallich, H.C.(20), même si les gouvernements disposent de quelque contrôle sur les investissements domestiques et sur les dépenses publiques en général, ils n’en ont pratiquement pas sur les exportations dont la fluctuation influe sur les impôts indirects qui en découlent.

La difficulté pour les PVD d’établir les plans prévisionnels est particulièrement mise en évidence par DELMAS, W.C.(21) qui, s’inspirant des expériences de la Jamaïque, souligne l’importance pour ces pays de connaître en avance les fluctuations de recettes fiscales issues du commerce extérieur.

L’instabilité des recettes issues du commerce extérieur entraîne également l’instabilité au niveau sectoriel. Voyons les experts de la CNUCED à ce sujet(22) :

“Au niveau macroéconomique, il y a des arguments théoriques fort valables en faveur de l’hypothèse selon laquelle; l’instabilité des recettes fiscales sur le commerce extérieur a un effet négatif. Selon ces arguments, l’instabilité entrave le développement par l’intermédiaire des variables telles que l’investissement, les recettes publiques etc… Elle engendre un climat incertain qui gêne la planification, l’investissement et la stabilité au niveau sectoriel”.

Bref, l’instabilité qui caractérise les prix des principaux produits d’exportation ne fait que renforcer l’incertitude qui entoure les droits de sortie en tant qu’instrument de politique fiscale fiable et de plus, elle renforce l’instabilité des recettes publiques en général et génère les difficultés de planification en particulier.

II.2.2. LES CHOCS EXTÉRIEURS ET LA STABILITÉ DES DÉPENSES PUBLIQUES : PROBLÈME STRUCTUREL RELATIF AUX DÉPENSES

Après avoir relevé les effets des chocs extérieurs sur les recettes publiques, il est question dans le présent paragraphe de relever les effets des chocs extérieurs sur les dépenses publiquesxii qui, d’après nous se présentent sous deux formes :

i) Les dépenses publiques fluctuent en fonction des cours mondiaux des principaux produits d’exportations.

ii) Les dépenses augmentent plus vite que les recettes.

Nous optons pour une analyse détaillée de ces deux effets.

II.2.2.1. La fluctuation des dépenses publiques en fonction des cours mondiaux

Si l’on considère son incidence budgétaire, ce problème revêt deux aspects :

i) Une baisse des cours mondiaux n’entraîne pas seulement une baisse des recettes de l’Etat, mais également une augmentation correspondante au niveau des dépenses de transferts aux ménages.

ii) Une hausse des cours mondiaux et par la suite des recettes publiques, incite l’Etat à accroître les dépenses sans tenir compte du caractère temporaire de ce phénomène. Cette manière de faire est susceptible d’aggraver l’état des finances publiques à long terme, puisque il n’est pas toujours possible de comprimer les dépenses au degré nécessaire pour éviter un gonflement du déficit budgétaire quand les cours mondiaux descendent.

Selon Ezriel et Grillixiii, la réaction de l’Etat quant aux problèmes liés aux fluctuations des cours mondiaux s’analyse comme suit : Du fait qu’il est difficile de comprimer les “traitements et les salaires” à court terme; et qu’il n’est pas pratiquement facile de changer le prix de garantie des principaux produits exportés au moment où les finances publiques souffrent des baisses de leurs cours mondiaux;

L’Etat diminue les dépenses destinées aux achats des biens et services et les dépenses en capital financées sur les fonds internes. La réaction de l’Etat aux problèmes cités ci-dessus suit donc les cycles conjoncturels.

Par contre, une gestion macroéconomique qui profiterait des instruments de la politique conjoncturelle essayerait de modérer les fluctuations plutôt que de les accentuer.

II.2.2.2. Les dépenses publiques augmentent plus vite que les recettes publiques

Les raisons de la variation relative de la proportion entre les dépenses courantes et les recettes sont essentiellement les suivantesxiv :

i) L’augmentation des salaires et traitements;

ii) L’augmentation des dépenses pour l’achat de biens et services;

iii) L’accroissement des versements d’intérêts sur la dette publique;

iv) La croissance des transferts aux ménages à cause d’une chute des cours mondiaux des produits exportés et d’un relèvement du prix accordé aux producteurs de ces derniers.

En effet, on remarque que dans la plupart des P.V.D., les dépenses de fonctionnement ne créent pas de revenus directs au profit de l’Etat et entraînent par conséquent les effets indirects et les effets temporairement limités qui ne sont pas susceptibles d’assurer une couverture de ces dépenses.

En réalité, les dépenses courantes devraient au moins être couvertes par les recettes courantes, mais cela n’est pas le cas chez les PVD. Concernant les investissements, ils sont théoriquement susceptibles de produire directement des recettes au profit de l’Etat; recettes qui couvriraient les charges récurrentes et le service de la dette lié aux investissements.

Pratiquement, ces investissements ne sont pas souvent rentables pour de multiples raisons : mauvaise gestion, politique restrictive envers les entreprises, changements de conditions économiques, etc… Et d’ailleurs les investissements qui ne sont pas directement productifs (investissements d’infrastructure ou à caractère social), peuvent rarement apporter les recettes susceptibles de couvrir le service de la dette.

Quant aux effets indirects sur le budget, “on suppose théoriquement que les investissements démarrent une croissance économique et fournissent donc des recettes publiques à long terme qui participeraient au remboursement de la dette souvent contractée pour leur financement”.

Cependant la réalité a démontré que pour de multiples raisons, la croissance suscitée par des investissements publics est rarement stable et persistante. Par ailleurs, faute d’un système fiscal et d’une administration fiscale efficace, considérant également l’instabilité des recettes fiscales sur les relations internationales; la croissance économique ne se traduit pas automatiquement par une augmentation proportionnelle du prélèvement fiscal qui pourrait produire des recettes suffisantes pour couvrir les dépenses publiques.

Bref, dans beaucoup de PVD, les rentrées fiscales ne parviennent plus à financer les coûts de fonctionnement et le service de la dette. Il en résulte par conséquent un endettement public croissant qui est devenu le problème le plus menaçant pour les économies du Tiers-Monde(23).

II.2.3. L’IMPACT DES CHOCS EXTÉRIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE

Dans de nombreux pays en développement, les chocs extérieurs exercent un impact non négligeable sur l’ajustement budgétaire.

En effet, les chocs extérieurs déstabilisent les recettes publiques, car ces dernières sont en grande partie alimentées par les impôts sur les échanges internationaux. La simple instabilité de ces échanges influe directement sur la stabilité des recettes fiscales en général et sur l’équilibre budgétaire en particulier.

Leur mouvement à la hausse entraîne une hausse parallèle des dépenses publiques; mais celui à la baisse est toujours suivi par un maintien des postes de dépenses publiques élevées.

Ainsi, il en découle un déficit budgétaire chronique vue le caractère incertain des recettes publiques et l’hésitation de baisser les dépenses au cas où les recettes baissent.

En plus de ces effets qui s’amorcent de l’extérieur, la facilité et l’ampleur des impôts prélevés sur le commerce extérieur démobilisent la fiscalité interne et poussent l’administrateur à négliger l’impôt direct tout en dépendant davantage des impôts indirects en général et des recettes sur le commerce extérieur en particulier. Il en résulte que dans la plupart des P.V.D., ces types d’impôts représentent une part considérable des recettes budgétaires et traduisent le degré d’instabilité de la fiscalité. Dans un tel cas, ils aggravent l’incertitude dans les prévisions budgétaires.

Bref, vu que les effets des chocs extérieur sur l’ajustement budgétaire différent d’un pays à l’autre, nous espérons embrasser les aspects essentiels de cet impact dans une analyse empirique.

II.3. LES CAS EMPIRIQUES

Dans les chapitres précédents, nous venons de montrer que les origines des difficultés budgétaires croissantes de la plupart des P.V.D. se trouvent d’une part dans la vulnérabilité structurelle de leurs économies et d’autres part dans les facteurs exogènes et endogènes.

Parmi les facteurs endogènes, nous venons de montrer qu’un système de recettes fiscales reposant largement sur les produits d’exportations entraîne l’instabilité budgétaire. Et comme facteurs externes, nous venons de relever la problématique du marché mondial qui, à travers les fluctuations de prix et de la demande, influe directement et fortement sur le volume des recettes fiscales.

En plus, l’encouragement des dépenses publiques en période de forte augmentation des recettes fiscales constitue un autre facteur qui explique l’instabilité budgétaire.

Dans le chapitre qui suit, nous nous proposons de prouver l’impact des chocs extérieurs sur l’ajustement budgétaire à l’aide de quelques cas empiriques. Dans le but de bien mesurer cet impact, nous avons choisi un échantillon constitué de quatre pays en développement qui ont le plus subi les contre-coups des chocs extérieurs : deux pays africains à savoir le GHANA et le MAROC et deux pays asiatiques, la MALAISIE et L’INDONÉSIE.

Pour chaque pays groupe de pays, nous allons analyser la situation budgétaire avant le choc extérieur; décrire la situation budgétaire pendant que le choc extérieur est en cours et en fin; relever les mesures d’ajustement budgétaire qui auraient été prises pour résorber le déficit budgétaire en vue de faire face aux chocs extérieurs. En dernier ressort, nous allons considérer tous les résultats afin de déceler les implications pratiques.

II.3.1. L’IMPACT DES CHOCS EXTÉRIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE AU MAROC

II.3.1.1. Les chocs extérieurs et le déficit budgétaire

Le MAROC conjugue plusieurs caractéristiques qui en font un exemple digne d’intérêt si l’on étudie l’impact des chocs extérieurs sur l’ajustement budgétaire.
Victime de la crise financière provoquée par le boom du prix des matières premières, en l’occurrence un triplement du prix de phosphate en 1974, le MAROC a connu à partir de 1976 des déficits budgétaires de plus en plus gravesxv tel que le montre le tableau suivant :

Tableau V : Déficit budgétaire marocain (1972-1983) en milliards de Dirham (Dh) (*)

Tableau 5 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA
(*) Le Dirham : Unité monétaire principale des Emirats arabes unis et du Maroc

Source : Christian Morrisson, op-cit p. 130.

Selon l’auteur, l’origine de cette accumulation de déficits budgétaires est simple. En effet, comme le prix du phosphate avait triplé entre 1973 et 1974, l’Etat avait bénéficié de surplus de recettes fiscales et avait engagé un programme de dépenses considérables qu’il était difficile de réduire vu que le boom du phosphate n’a duré que deux ans seulement (1974 et 1975).

Ensuite, dès que les recettes procurées par le phosphate ont diminué, le déficit budgétaire s’est gonflé dangereusement du fait que l’Etat ne pouvait pas interrompre les investissements en cours. En plus, il était politiquement difficile de réduire les salaires et les subventions.

Comme on le remarque sur le tableau ci-haut, l’année 1976 où le prix du phosphate a chuté (de 47 % par rapport à 1975) est celle où le déficit budgétaire a plus que doublé. A partir de cette année, les dépenses courantes de l’Etat et ses recettes sont approximativement égales. Ainsi, tout se passe comme si les dépenses d’investissements publics étaient financés par l’extérieur.

C’est cette situation précaire qui a conduit le MAROC à engager un programme de stabilisation en 1978. Ce programme visait la diminution des dépenses d’investissements, l’augmentation des recettes fiscales tournées sur l’activité économique intérieur et le blocage des salaires des fonctionnaires.
Plusieurs chocs extérieurs ont empêché l’entrée en application de ce programme en 1979. Écoutons les propos de MORRISSON :

“De mauvaises récoltes dues à la sécheresse, le second choc pétrolier et lisibilité des prix des matières premières; ont tous contribué à redéstabiliser l’ajustement budgétaire jusqu’en 1983, année au cours de laquelle le vrai ajustement a été mis en place avec l’aide du F.M.I.”

II.3.1.2. L’ajustement budgétaire au MAROC

L’ajustement budgétaire Marocain comprenait deux volets :

D’une part, il visait la réduction des dépenses publiques et la baisse du déficit budgétaire, d’autres part, il avait pour objectif d’accroître les recettes par le biais de la réforme fiscale.

Dans chaque cas, les mesures qui ont été mises en place avaient pour but de faire face aux chocs extérieurs et de préserver l’équilibre budgétaire. Nous allons les analyser séparément.

A. Les mesures relatives à la stabilisation des dépenses publiques

Imposées par le FMI (dans l’accord de septembre 1983), les mesures destinées à réduire les dépenses publiques étaient de trois sortes. Il s’agissait :

i) d’augmenter les prix de détail pour réduire les subventions;

ii) de réduire le déficit budgétaire en diminuant les investissements publiques;

iii) de réduire ou de limiter l’embauche des fonctionnaires.

C’est dans cette optique que la réduction des dépenses publiques a touché tous les postes : Les dépenses de fonctionnement, les subventions et les dépenses d’investissements. L’expansion des dépenses de fonctionnement a été freinée par un blocage des salaires et par une réduction de la croissance des effectifs.

Les dépenses d’enseignement qui représentaient une part élevée des dépenses civiles ont été réduites de plusieurs manières: Le nombre de bourses a été diminué et des critères plus sélectifs ont été instaurés. En plus, le recrutement d’enseignants a été limité.

Du côté des subventions, des ajustements importants de prix ont été appliqués dans le but d’alléger le coût des subventions à caractère social.

Dans l’ensemble, les dépenses d’investissements qui avaient connu une croissance très forte depuis 1974 ont été les plus touchées. Elles sont par la suite restaurées en fonction de critères d’efficacité et de rentabilité avec une forte progression de la part des investissements directement productifs.

B. Les mesures relatives à la réforme fiscale

Dans la mesure du possible, la fiscalité intérieure a été améliorée et les impôts sur les revenus et sur les personnes ont été révisés. Malgré cet effort, la part des impôts directs n’a pas été satisfaisante. On remarque dans le tableau qui suit que la fiscalité tournée sur les activités d’import-export a toujours occupée une place importante malgré la réforme.

Tableau VI : Le déficit budgétaire et la structure des recettes au MAROC (en milliards de Dh)

Tableau 6 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : Christian MORRISSON, Op-cit p. 131.

Dans l’ensemble, les objectifs que s’était fixé le programme d’ajustement budgétaire ont été partiellement atteints.

II.3.2. LES EFFETS DES CHOCS EXTÉRIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE AU GHANA

II.3.2.1. Les chocs extérieurs et le déficit budgétaire

Contrairement au cas du MAROC, le déficit budgétaire Ghanéen est le résultat de deux causes principalesxvi : Les répercussions des erreurs de politique économique et les effets négatifs des chocs extérieurs.

En effet, selon Roe-Schneider, les termes de l’échange se sont brusquement dégradés à partir de 1968. Cette situation s’est combinée aux autres catastrophes internes dont la sécheresse et les mauvaises récoltes des produits primaires exportables.

Au fur et à mesure que l’économie s’effondrait, les recettes et les dépenses de l’Etat ont aussi fondu jusqu’à tomber en dessous des moyennes des autres pays. Le déficit budgétaire devient alors chronique et le surplus budgétaire enregistré en 1986 fut le premier depuis 1971.

Comme l’auteur le montre, les déficits n’étaient pas en soi le problème essentiel comme c’est le cas dans d’autres pays qui adoptent les programmes d’ajustement et de stabilisation, car les dépenses avaient constamment régressé depuis 1978 et le déficit était donc modeste.

L’objectif d’ajustement budgétaire adopté par le Ghana visait la reconstitution des recettes et des dépenses publiques et non la réduction du déficit budgétaire.

Le gouvernement Ghanéen ne disposait guère d’option en matière de gestion des Finances Publiques, par ce que les taxes sur les échanges internationaux et les impôts indirects sur les produits nationaux formaient le gros des recettes fiscales. A la suite de l’instabilité de l’environnement économique mondial du début des années 80, ces impôts indirect ont fortement chuté.

De l’autre côté, les investissements publics ont chuté, les dépenses par habitants en matière d’éducation et de santé ont suivi. A part le problème du déclin économique généralisé qui avait entraîné l’effondrement général des finances publiques; le principal problème budgétaire en matière des dépenses était le surnombre de fonctionnaires.

L’ajustement budgétaire allait donc devoir, non seulement reconstituer le Trésor public, mais également, générer de nouvelles sources de recettes publiques destinées à couvrir les coûts de certains services.

II.3.2.2. Les mesures d’ajustement budgétaire

Face à ce problème d’ordre budgétaire lié aux effets négatifs des chocs extérieurs, l’ajustement budgétaire ghanéen s’est efforcé de rationaliser les principaux impôts et le fonctionnement de l’administration fiscale.

C’est dans cet objectif que le réajustement des prix a été accéléré à fin de réduire la charge des subventions. D’autre part, l’ajustement des dépenses a permis de recentrer les dépenses sur les activités de développement et de restauration. L’Equilibre budgétaire a finalement été redressé, suite aux importantes dévaluations et dans la mesure où elles ont permis d’augmenter les recettes fiscales liées aux taxes sur les matières premières exportées.
Concerant l’impôt direct, l’essentiel des mesures de réforme a été de réduire les exemptions et le nombre de seuils d’imposition de l’impôt sur le revenu, car ces seuils facilitaient la grande fiscale.

En matière d’impôt indirects, les droits d’accise furent levés sur un large ensemble de produits de consommation et un impôt sur les ventes fut instauré. En outre, l’ajustement budgétaire devait aussi s’orienter vers d’autres mesures visant à uniformiser les droits de douane sur les produits importés de sorte qu’ils deviennent le seul mécanisme protectionniste.

Pour ce qui est de la structure des dépenses publiques, l’accent était mis sur le recouvrement des coûts dans certains domaines. L’investissement public devait remonter rapidement et les projets prioritaires devaient être identifiés suivant des critères fiables. Le nombre des effectifs de la fonction publique devait diminuer et les seuils limitant le montant de salaires devaient être fixés.

II.3.2.3. Les performances d’ajustement

A. En matière des recettes publiques

Le rapport de la Banque Mondialexvii montre que, suite à l’ajustement budgétaire, la part des recettes fiscales dans le PIB est passée de 5,3 % en 1983 à 13,6 % en 1986.

En effet, cette amélioration des recettes fiscales s’explique par plusieurs facteurs :

i) les taux d’imposition avaient été augmentés;

ii) les exemptions à l’impôt indirect avaient été réduites de façon à uniformiser les droits d’accise sur les ventes;

iii) les mesures pour relever les plafonds de l’impôt sur le revenu avaient été adoptées et;

iv) les services payants comme la santé et l’éducation avaient également apporté une contribution modeste aux recettes publiques.

Et même si les taxes sur les produits exportés (comme le cacao) étaient devenues la principale source de recettes, cette dépendance du gouvernement vis-à-vis des impôts indirects était constamment un frein à l’amélioration des recettes fiscales(24).

En réalité, même si les recettes fiscales en provenance du cacao avaient augmenté, on peut affirmer qu’elles pouvaient inévitablement chuter en cas de fléchissement du prix du cacao.

De plus, l’amélioration des recettes publiques avait profité des recettes fiscales perçues sur le commerce du pétrole et de ses dérivés. Mais comme les prix du pétrole sont variables, cette politique donne une impression exagérée de la politique fiscale si on ne tient pas compte des chocs extérieurs et si on ne prend pas soin de soustraire les profits exceptionnel du calcul.

Dans l’ensemble, le redressement de la situation financière a été fortement lié à des facteurs tels que de fortes dévaluations, l’augmentation des recettes fiscales et les impôts indirects sur le commerce extérieur. Ces mesures fiscales ont permis au Trésor Public de fonctionner normalement à moyen terme et surtout, elles ont permis de protéger les finances publiques contre les fluctuations liées au cours du cacao.

B. En matière des dépenses publiques

D’après Roe-Schneider(25) ce qui est intéressant dans l’ajustement budgétaire ghanéen, c’est que le FMI et la Banque Mondiale n’ont pas imposé au gouvernement des lignes de conduite en matières de dépenses. On remarque en effet que les dépenses courantes et particulièrement les dépenses consacrées au développement sont en hausse dans les programmes de réforme budgétaire. Le gouvernement a réussi à protéger la part relative des dépenses sociales par rapport à l’ensemble des dépenses courantes. En plus, les dépenses sur les grands postes sociaux que sont la santé, l’éducation et la sécurité sociale ont progressé.

Bref, l’ajustement budgétaire ghanéen a été satisfaisant du fait qu’il a permis de satisfaire les besoins sociaux tout en permettant d’assurer le redressement de la gestion des finances publiques.

Cette réussite importante est à souligner parce que la part relativement élevée des recettes publiques tournées sur les activités internes a été améliorée de façon à atténuer la flexibilité des recettes publiques. En plus, la gestion de dépenses publiques a été satisfaisante.

II.3.3. LES CHOCS EXTÉRIEURS ET AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE EN MALAISIE

II.3.3.1. Les raisons du déséquilibre budgétaire

Tout comme d’autres PVD, la Malaisie a connu au cours des années 80, une situation d’instabilité dans son équilibre budgétaire. Selon David Demery et Lionel Demeryxviii, les dépenses publiques ont été nettement supérieures aux recettes publiques et cette situation a conduit aux importants déficits budgétaires pendant la grande partie des années 80.

Si on considère la période 1979-1987, on remarque que deux grands facteurs peuvent être considérés comme étant responsables de ces déficits :

Il s’agit de la récession de l’économie mondiale et de la détérioration des termes de l’Echange que celle-ci a provoqué.

Dans les lignes qui suivent, nous préférons mener une analyse détaillée de l’impact de ces différents facteurs sur l’ajustement budgétaire en Malaisie.

A. La détérioration des termes de l’echange

D’après les mêmes Demery(26), l’une des causes les plus importantes de la détérioration budgétaire en Malaisie a été la récession qui a frappé les pays de l’OCDE et les répercussions que celle-ci à eu sur les termes de l’échange. Le tableau ci-après nous donne l’évolution des termes de l’échange depuis 1979 jusqu’en 1987.

Tableau VII : Les prix et les termes de l’échange des principales matières premières exportées par la Malaisie (1979-1987).

Tableau 7 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : David Demery et Lionel Demery, op. cit., p. 45.

Partant du tableau ci-dessus, on remarque que le choc subi par les termes de l’échange est considérable. En effet, il ont chuté de 122,6 à 95,3 en quatre ans, soit une baisse de 22 % de 1978 à 1982. Malgré une reprise de l’indice en 1984, on remarque que son déclin s’est poursuivi tout au long des années 80. De plus, on assiste à un boom touchant à la fois le prix du pétrole et celui des matières premières.

B. L’expansion budgétaire

Selon les auteurs cités supra, cette hausse des prix a été la base de l’expansion budgétaire dans laquelle s’est lancé le gouvernement. Cela est dû aux variations des prix des matières premières exportées qui ont eu pour conséquence, une baisse brutale de la valeur des exportations et une réduction des impôts indirects sur celles-ci. C’est pourquoi la détérioration des termes de l’échange s’est traduite par une baisse importante des recettes fiscales tel que décrit dans le tableau qui suit.

Tableau VIII : Pertes des recettes publiques provoquées par les chocs extérieurs en Malaisie (1979-1986)

Tableau 8 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : David Demery et Lionel Demery, op-cit p. 51.

Des variations de cette ampleur ont sans doute eu des effets importants sur le budget. D’après les auteurs un supra, elles ont exigé des coupes sensibles dans les dépenses réelles, mais cette mesure a été prise ultérieurement.

En l’occurrence, le fait de retarder l’ajustement budgétaire a entraîné de sérieux problèmes. En effet, en retardant la réduction des dépenses, le pays a dû faire face à une situation budgétaire beaucoup plus difficile au milieu des années 1980 : Le boom des prix du pétrole et celui des matières premières ont entraîné l’expansion budgétaire à cause d’une augmentation des recettes publiques.

Nous allons analyser les aspects macro-économiques de cette expansion budgétaire et plus spécialement, les effets enregistrés au niveau du déficit budgétaire.

II.3.3.2. Les effets de l’expansion budgétaire sur les finances publiques.

Se fondant sur les recettes fiscales perçues sur les échanges extérieurs, le gouvernement malais s’est lancé dans une expansion budgétaire sans précédent. Le tableau suivant reproduit la situation financière au cours de la période allant de 1976-1987.

Tableau IX : La situation financière du gouvernement malais (en % du PIB 1976-1987)

Tableau 9 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : David Demery et Lionel Demery, op-cit p.47

Comme il ressort de ce dernier tableau l’augmentation du déficit budgétaire est due à un accroissement des dépenses publiques, en particulier les dépenses de développement.

En effet, bien que les recettes courantes ont presque toujours permis de couvrir les dépenses courantes, les dépenses de développement n’ont cessé d’augmenter de façon à provoquer un déficit budgétaire sans précédent.

Selon David Demery, ces déficits budgétaires du début des années 80 se sont traduits par un accroissement spectaculaire de la dette publique tel qu’il est décrit dans le tableau ci-après.

Tableau X : Financement du Déficit du gouvernement malais (1980-1987) en millions de $.

Tableau 10 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

source : David Demery et Lionel Demery, op-cit p. 48

Comme on le voit donc, le tableau ci-haut montre que la dette extérieure brute du gouvernement Fédéral a été croissante, passant de 9 % à 43 % de 1980 à 1986.

Bref, la réponse à la détérioration des termes de l’échange par le maintien de l’expansion budgétaire au moyen du financement extérieur provoque un accroissement important de la dette publique extérieure.

En effet, bien que les chocs négatifs exigent absolument des coupes importantes dans les dépenses intérieures, le gouvernement malais a, quant à lui, maintenu ses dépenses au même niveau et cela a été manifestement la cause principale de l’augmentation de déficits budgétaires enregistrés.

Par conséquent, même si l’expansion budgétaire du début des années 80 ait réussi à préserver la croissance économique de la Malaisie, il est évident que cette stratégie ne pouvait être maintenue. C’est pourquoi l’ajustement budgétaire a été vite entrepris depuis 1984.

II.3.3.3. Ajustement budgétaire face à la récession fiscale

L’impossibilité de maintenir la croissance des recettes fiscales sur le commerce extérieur enregistrées au début des années 80, a mis le gouvernement malais dans l’obligation de faire face aux réalités d’un nouvel environnement économique international.

En effet, la poursuite de la détérioration des termes de l’échange faisait qu’il était évident que le gouvernement ne pouvait plus continuer à accroître sa dette extérieure au même rythme que dans les années d’avant 1984. L’ajustement budgétaire mis en place au cours de cette année devait satisfaire à une exigence principale : “Aligner les dépenses publiques intérieures sur les recettes publiques dans le but de réduire le niveau élevé du déficit budgétaire ainsi que le recours correspondant à l’emprunt extérieur”.

Aussi, les dépenses d’investissement public qui avaient augmenté à cause de l’ambitieux programme d’investissement ont connu une diminution rapide avec l’ajustement budgétaire.

II.3.4. L’AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE EN PRÉSENCE DES CHOCS EXTÉRIEURS: L’EXPÉRIENCE DE L’INDONÉSIE

II.3.4.1. Présentation du problème

Les caractéristiques de l’économie indonésienne ont été la cause principale de la vulnérabilité budgétaire face aux chocs extérieurs.

En effet, selon Erik Thorbeckexix, entre les années 70 et 82, la gestion budgétaire indonésienne était devenue nettement tributaire de l’évolution des recettes en provenance du commerce extérieur et plus spécialement celles en provenance de l’exportation du pétrole et de ses dérivées. Pendant cette période, les impôts indirects sur les exportations du Paddy27 étaient devenus trop importants et avaient entraîné une expansion des dépenses publiques au delà même des dépenses planifiées.

Cette situation s’est répercutée de façon que, juste au début de la crise financière de 1983, l’Indonésie souffre d’une dépendance extrême à l’égard des exportations des ressources non renouvelables qui représentaient approximativement les 3/4 de la valeur des exportations totales. D’après Erik Thorbecke, les origines du déficit budgétaire de l’Indonésie sont claires et directes :

Premièrement, la récession mondiale du début des années 80 a affecté les prix et la demande des exportations traditionnelles du pays (essentiellement les produits agricoles).

Deuxièmement, et c’est là un facteur plus important, les recettes en provenance des exportations de pétrole sont tombées de 18,8 milliards de dollars entre les années 1981-1982 à 14,7 milliards de dollars entre les années 1982-1983. Le tableau suivant est souffisamment édifiant à ce sujet.

Tableau XI : Balance des exportations indonésiennes en milliards de dollars (1981-1989).

Tableau 11 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : Balance des payements de l’Indonésie in Erik Thorbecke, op-cit, p. 180.

L’effondrement des cours du pétrole a continué jusqu’en 1988. Le prix à l’exportation du pétrole brut indonésien, après avoir culminé à 34 dollars le baril entre les années 1981-1982 est tombé à 25 dollars entre les années 1985-1986 et s’est effondré en 1986/87, le cours moyen passant à 13 dollars de baril.

Cette dépendance croissante à l’égard du commerce extérieur dont l’évolution dépend de la fluctuation de l’environnement économique international, et le rôle considérable des exportations de ressources non renouvelables, rendaient le budget indonésien potentiellement vulnérable aux chocs extérieurs.

Deux autres facteurs expliquent le lien direct qui existe entre le budget de l’Etat d’une part, et les cours du pétrole et les recettes pétrolières de l’autre part. Le premier de ces facteurs est la part prédominante de l’impôt indirect sur les activités tournées vers l’extérieur dans les recettes publiques. Le second facteur est la tendance naturelle de l’Etat à accroître les dépenses publiques en cas de hausse des cours du pétrole et celle des recettes pétrolières et inversement, son hésitation naturelle à amputer les programmes prévus en cas de baisse des recettes.

Le programme d’ajustement budgétaire devait donc pallier à ces problèmes, tout en protégeant le budget contre les effets négatifs des chocs extérieurs.

II.3.4.2. L’ajustement budgétaire face aux chocs extérieurs

A. La stabilisation des dépenses publiques

Pour faire face aux effets négatifs des chocs extérieurs sur le budget, le gouvernement indonésien a entrepris un vaste effort de compression budgétaire. L’ampleur de cet effort ressort d’une comparaison du ratio entre le montant total des dépenses réalisées et les dépenses prévues, tel que c’est décrit dans le tableau suivant :

Tableau XII. LES DEPENSES TOTALES REALISEES ET LES DEPENSES PLANIFIEES (1979-1989) en milliards de Rupiahs au prix constant de 1980

Tableau 12 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : Statistiques Keuning et Thorbecke, 1992, p. 178

Ce tableau permet de constater qu’en moyenne pendant la période 1984-1989 (période d’ajustement budgétaire) le ratio entre le montant total des dépenses réalisées et les dépenses prévues a été de 0,80. Autrement dit, le montant des dépenses faites a été inférieur de 20 % à celui des dépenses prévues.

On remarque que l’effort de compression budgétaire s’est intensifié avec chaque exercice car le ratio entre les dépenses réalisées et les dépenses prévues n’a cessé de diminuer tombant de 0,90 en 1984/85 à 0,69 en 1988/1989. Mais les dépenses courantes d’éducation et de santé ont été beaucoup moins réduites que les subventions et les dépenses d’équipement consacrées aux projets d’investissement dans les différentes secteurs. C’est pour ces différentes raisons que, pendant la période d’ajustement budgétaire, le total des dépenses publiques a fluctué d’une année à l’autre.

On remarque en outre que, en moyenne, ces mêmes dépenses sont demeurées inférieures à ce qu’elles avaient été avant l’ajustement budgétaire, et qu’elles ont continué à croître lentement.

D’après Erik Thorbecke, cette expansion lente tient en majeure partie à un très net relèvement des salaires dans le secteur public, à un alourdissement du service de la dette et à un accroissement des dépenses de développement dans les secteurs de l’industrie, de l’électricité, de l’éducation et de santé; secteurs qui sont privilégiés vue leur importance et leur priorité quant à la protection des couches sociales vulnérables (essentiellement les secteurs santé et éducation).

L’effondrement des cours du pétrole (en 1986) a immédiatement conduit le gouvernement à reprendre une politique d’austérité et le montant total des dépenses publiques a été réduit. Les dépenses salariales ont légèrement diminué par suite d’un gel des salaires nominaux des agents du secteur public et les subventions ont été réduites dans des proportions drastiques. Les dépenses d’équipement et d’investissement publics ont été également comprimées par rapport aux années précédentes. Les dépenses courantes d’éducation et de santé n’ont diminué que très légèrement et les investissements dans l’agriculture ont augmenté très nettement.

D’une façon générale, les compressions des dépenses publiques ont réussi à stabiliser le budget indonésien, tout en mettant à l’abri les groupes socio-économiques vulnérables à la suite de coupes budgétaires.

B. Ajustement des recettes publiques

L’impôt sur le commerce extérieur des produits pétroliers et agricoles avait toujours occupé une place prédominante dans les recettes de l’administration publique. Juste avant l’ajustement budgétaire, cet impôt procurait 68 % du total des recettes intérieures.

Pendant la période d’ajustement, le gouvernement s’est efforcé de réduire la part de l’impôt indirect sur le commerce international et a entrepris un régime favorisant la croissance des recettes intérieures autres que celles prélevées sur le secteur d’exportation.

Cette volonté d’accroître l’impôt à l’intérieur du pays à fin de faire face à l’assèchement rapide de sa principale source de recettes publiques, a été privilégiée dans le programme de réforme fiscale.

Selon Erik Thorbecke, l’ensemble de mesures de réforme fiscale adoptées a marqué un progrès et à réussi à apporter les recettes fiscales hors pétrole de 13,5 % du total des recettes intérieures entre 1980 et 1983 à 21,3 % entre 1985 et 1988. Et bien que le montant des impôts perçus sur le commerce ait nettement augmenté pendant la période d’ajustement budgétaire, il ne représentait qu’une source de recettes publiques d’importance mineure.

II.3.4.3. Les effets de l’ajustement sur les Finances publiques

Une caractéristique notable du système indonésien des finances publiques est que le gouvernement est tenu de maintenir le budget en équilibre. Par conséquent, lorsque les dépenses publiques dépassent les recettes publiques intérieures, l’excédent doit être financé par le secteur extérieur, presque intégralement au moyen de l’assistance technique allouée au titre des projets.

Bien que cette assistance technique a été à l’origine du gonflement de la dette extérieure de l’Indonésie, l’ajustement budgétaire a suscité des performances au niveau des recettes et des dépenses publiques en général et au niveau de l’équilibre budgétaire en particulier. Le tableau suivant retrace l’évolution du budget du gouvernement central pendant la période d’ajustement.

Tableau XIII : Budget de l’Etat Indonésien en milliards de Rupiahs (1982-1989)

Tableau 13 ANALYSE DE L’IMPACT DES CHOCS EXTERIEURS SUR L’AJUSTEMENT BUDGETAIRE AU RWANDA

Source : Erik Thorbecke, op-cit, p.181.

Ce tableau fait apparaître clairement la part croissante représentée par les impôts autres que ceux qui sont perçus sur le pétrole; résultat satisfaisant qui a été atteint à la suite de la réforme fiscale.

Il ressort également que l’augmentation des dépenses d’équipement par rapport aux dépenses courantes a été limitée. La preuve est que la part du solde global (qui représente l’excédent des dépenses totales par rapport aux recettes intérieures) a été maintenu à moins de 3 % entre 1987 et 1988 contre à peu près de 4 % entre 1986 et 1987.

Somme toute, la caractéristique la plus notable de la politique d’ajustement budgétaire adoptée et réussie par l’Indonésie, et qu’elle a été entrepris volontairement, en temps opportun et de façon équilibrée.

Grâce à des politiques d’ajustement budgétaire essentiellement prudentes en période tant d’expansion que de récession, l’Indonésie a pu éviter que les déséquilibres extérieurs et intérieurs n’atteignent une ampleur telle qu’elle aurait forcé le pays à se soumettre aux conditions imposées par le FMI et par la Banque Mondiale pour obtenir des prêts à la stabilisation et à l’ajustement budgétaire.

L’Indonésie a choisi d’adopter, de son propre chef, une série de mesures budgétaires restrictives du type de celles que doivent habituellement mettre en oeuvre les pays soumis aux conditions du FMI.

A la différence de la grande majorité des pays en développement qui n’ont pu obtenir de prêts d’urgence qu’en contrepartie de mesures de stabilisation et d’ajustement structurel imposées par le FMI et la Banque Mondiale, l’Indonésie a d’emblée décidé de suivre de façon indépendante sa propre stratégie.

Le gouvernement ne s’est jamais trouvé dans une situation telle qu’il puisse être forcé d’appliquer des politiques et des mesures impopulaires conçues par ces institutions de Breton Woods dans une atmosphère de crise dont la cause est essentiellement le choc extérieur difficilement contrôlable.

II.3.5. LES IMPLICATIONS DES RÉSULTATS DE L’ANALYSE EMPIRIQUE

Les cas empiriques que nous venons d’analyser nous auront permis de constater que les chocs extérieurs qui ont secoué les budgets des PVD sont nombreux :

Il s’agit d’abord d’un renversement des termes de l’échange et d’une fluctuation de la demande extérieure;

Il s’agit ensuite de la chute des cours des principales matières premières exportées.

L’évolution du marché international du capital est le troisième facteur extérieur qui explique la crise budgétaire dans la plupart des pays de notre échantillon, si elle ne s’était pas cumulée à une situation initiale fragile. Il est évident en effet que le fort endettement extérieur qui a marqué les années 70 et qui s’est répercuté juste au début des années 80 dans la presque totalité des pays analysés, a été lourd de conséquences.

Parmi les causes de la crise budgétaire, nous avons également relevé les facteurs ou erreurs politiques intérieurs.

En première lieu, il faut mentionner les anticipations (à posteriori erronées) issues du boom sur les cours mondiaux des principales matières premières de la fin des années 1970.

S’agissant des pays de notre échantillon, ce boom a eu lieu sur le pétrole (Indonésie, Malaisie), sur le café et le cacao (Au Ghana), sur le caoutchouc (en Malaisie) et sur le phosphate (au Maroc). Dans l’ensemble, ce boom a été anticipé comme une amélioration permanente des termes de l’échange et par ce fait, comme une amélioration des recettes fiscales. Il était alors naturel d’en accélérer l’utilisation en augmentant les dépenses publiques et spécialement les dépenses d’investissement. C’est pourquoi les politiques correspondantes des dépenses ont été décidées, avec une erreur de politique économique dont les conséquences ont été extrêmement lourdes, vu que dans certains pays de notre échantillon, d’autres distorsions ont suivi.

En particulier, les autorités économiques ont été lentes à réagir aux symptômes de la crise. Il en a résulté une allocution des ressources qui s’est révélée inadéquate au moment du reflux des termes de l’échange.

En fin, dans plusieurs pays, il semble que de grands projets d’investissements entrepris dans le boom des années 70 se soient en outre révélés inefficaces ou de faible productivité.

Bref, l’analyse empirique nous aura permis de remarque que dans la majeure partie des pays de notre échantillon, la crise budgétaire est surtout liée aux chocs extérieurs et aux fausses anticipations auxquelles il ont donné lieu : Les termes de l’échange et crédits internationaux favorables durant les années 70, puis le renversement brutal des tendances et la crise de liquidités internationales du début des années 80.

Les erreurs de politique économique liées à l’allocation et à la productivité des investissements publics, sont d’une certaine façon aussi liées à ces chocs extérieurs. Dans les lignes qui suivent, nous allons faire une analyse quant à l’efficacité des mesures adoptées pour faire face aux différents chocs.

II.3.6. LES MESURES D’AJUSTEMENT BUDGÉTAIRE : LA STABILISATION BUDGÉTAIRE ET AJUSTEMENT FISCALE.

Le terme ajustement évoque une image simple dans les média, celle d'”un pays en crise financière qui doit accepter les conditions du FMI et de la Banque Mondiale pour réduire son déficit extérieur afin de bénéficier de nouveaux prêts”xx. Mais cette image cache une réalité plus complexe.

D’abord, le terme ajustement correspond à deux catégories différentes de mesures : les unes pour diminuer la demande globale; les autres pour stimuler l’offre. Pour éviter toute confusion, nous avons réservé le terme de stabilisation aux mesures concernant la demande et celui de l’ajustement aux politiques de l’offre.

Les programmes de stabilisation répondent à la crise financière par des mesures conjoncturelles d’urgence, qui doivent avoir des effets à court terme. A l’opposé, un programme d’ajustement porte sur le moyen et le long terme et comprend des mesures pouvant augmenter l’offre. Et lorsque ces mesures ont un coût, la banque mondiale accorde parfois de prêts pour le financement.

Au cours de notre analyse, si la stabilisation budgétaire et ajustement fiscale ont été distingués, c’est qu’en effet les déséquilibres qui ont conduit à la crise financière tiennent en partie à une insuffisance. Et une fois que les déséquilibres sont résorbés par la stabilisation de dépenses, le meilleur moyen d’éviter un nouveau dérapage consiste à accroître la fiscalité intérieure par un ajustement qui consiste en une réforme en profondeur.

II.3.6.1. La stabilisation budgétaire

De part l’analyse empirique que nous venons de faire sur base d’un échantillon précis, le traitement de chocs que représente tout programme de stabilisation comporte les mêmes mesures. Dans l’ensemble, les coupures budgétaires touchent toujours les dépenses d’Investissement que les dépenses de fonctionnement. En effet, plusieurs facteurs expliquent cette différence :

D’abord, nous avons remarqué que dans la période d’expansion des recettes fiscales, ce sont les investissements qui augmentent le plus vite. Ensuite, comme la contrainte du Déficit extérieur est déterminante, on diminue beaucoup plus les importations en réduisant les investissements au lieu des dépenses de fonctionnement. Enfin, l’opinion public est moins sensible à cette mesure qu’à la baisse du budget de fonctionnement.

En réalité, comme les dépenses domestiques pour l’investissement concernent principalement les travaux publics, il est vrai qu’en les réduisant, on touche une population dispersée de petits entrepreneurs et d’ouvriers peu qualifiés qui ne sont pas généralement organisés pour former de groupes de pression. Tandis que une baisse des dépenses de fonctionnement touche les groupes susceptibles de réagir. Il s’agit des fonctionnaires si on les licencie ou les étudiants si on diminue leurs bourses.

Certes, la chute des investissements a des effets négatifs (infrastructures dégradées,…..) mais ces effets ne se manifestent qu’après des délais plus ou moins longs et n’entraînent pas immédiatement de réactions politiques dangereuses pour le gouvernement ni d’effets économiques trop visibles.

L’autre poste budgétaire sur lequel le programme de stabilisation a le plus touché est celui des dépenses de fonctionnement. En réalité, même si ce poste de dépense s’avère assez rigide, certes, le programme de stabilisation peut le toucher très peu. Généralement, les dépenses de fonctionnement prises dans leurs ensemble paraissent assez stables, les programmes de stabilisation arrêtent leur croissance mais elles ne sont jamais amputées sévèrement.

Toutefois, pour les stabiliser ou les réduire légèrement, des mesures délicates doivent être prises en raison de leur impact politique. En effet, elles comprennent les salaires qui constituent toujours la principale dépense, et les subventions qui représentent souvent une rubrique importante parmi les dépenses.

Selon Bourguignon et Morrisson (xxi) les gouvernements qui stabilisent les dépenses de fonctionnement doivent donc diminuer ou arrêter la croissance des salaires réels des fonctionnaires et/ou les subventions. L’autre mesure qui permet de stabiliser ou de diminuer la croissance de la masse salariale consiste à freiner le recrutement.

Excepté le Ghana, tous les gouvernements de notre échantillon ont tenté de stabiliser la croissance de la masse salariale, en évitant les mesures brutales comme le licenciement et la baisse des salaires nominaux, en raison du poids politique des fonctionnaires.

Les subventions font également l’objet de mesures restrictives. Dans les pays de notre échantillon, les subventions directs aux consommateurs ont été réduites et les tarifs aux entreprises publiques ont été revu dans le but de supprimer les subventions que l’Etat leur verse.

II.3.6.2. L’ajustement fiscal

Alors que la stabilisation a un seul et même objectif poursuivi par l’ensemble de mesures à savoir, la “réduction des dépenses publiques”; l’ajustement fiscal présente des aspects diversifiés, mais son objectif principal est “d’accroître l’efficacité de la fiscalité”.

Parmi les mesures d’ajustement fiscal prises par les pays de notre échantillon; celles des gouvernements indonésien et Ghanéen sont riches de promesses et permettraient aux autres gouvernements (une fois adoptées), de faire face aux différents chocs extérieurs tout en réduisant les incertitudes sur les recettes en provenance du commerce extérieur.

Rappellons que du moins, ces derniers gouvernements ont été prudents et ont préféré développer la fiscalité tournée sur l’activité intérieure, plutôt que se fier sur les recettes indirectes basées sur le commerce extérieur dont la vulnérabilité influe grandement sur les finances publiques.

Les mesures qu’ils ont pris sont à encourager, vu le caractère aléatoire des recettes fiscales issues des échanges extérieurs et la vulnérabilité budgétaire de la plupart des P.V.D., dont la principale source de recettes reste les impôts indirects sur le commerce extérieur.

Dans la partie qui suit, nous allons tenter de mettre en évidence la relation qu’il y aurait entre le budget et les chocs extérieurs dans le cadre de l’économie rwandaise et proposer des mesures pouvant permettre aux pouvoirs publics de mieux maîtriser le budget face à un environnement économique international défavorable.

5 A la fin de 1974, le prix du pétrole avait quadruplé par rapport au prix de janvier 1973. Le prix du baril avait passé de 3,1 à 11 dollars américains et le prix de l’ordre de 12 dollars allait être atteint au premier trimestre de l’année 1974.
6 Eliane MOSSE, “Comprendre la politique économique” Editions du Seuil, Paris, 1978, p. 188
7 Bela Balassa, Op-cit, p. 7
8 Parvez HASAN, Ajustement aux chocs extérieurs : Réussite économique durable en Asie de l’Est in “Finances et Développement”, Décembre 1984/Volume 21/Numéro 4, p. 14
9 Eliane MOSSE, Op-cit p. 191
10 Pour l’ensemble des pays de l’OCDE, la hausse annuelle des prix (indices des prix à la consommation des ménages) est passée de 2,7 % pour la première moitié des années soixante, à 3,7 % pour la période 1966-1973. En 1973, la hausse des prix a atteint 7,9 %.
11 SCHWARTZ, A.N., “The effect of the rise in the oil prices on the economy of industrialized countries : a methodological and quantitative investigation” central planning Bureau (Netherlands), Monograph n 17, 1974, 25 pp
12 BURNS,T. et G.R., Dicks “The effect of oil price shocks on world out put and inflation” London, Busness School, 1980, 17 pp
13 Eriane MOSSE, op-cit, p. 193
14 J.K. ROTHWELL, Taxes on export in under-developping countries, In Public Finance – Finances Publiques n 3-4, 1963, p.311 cité par KALINIJABO Charles, op-cit p. 146.
15 Ezriel M.BROOK et Enzo R.Grilli, La stabilisation des prix des produits de base et le monde en développement : Les choix qui s’offrent aux pays en développement. In “Finances et développement”, Volume 14/Numéro 1, Mars 1977, p. 26.
16 André Vanhaeverbeke, ” Les problèmes économiques des P.V.D.”, Edition ACCD (Boîte 57) Boîte du champs de Mars, Bruxelles 1982, p.44
17 KALINIJABO Charles, op-cit p. 152.
18 Peter H. Lindert et Charles P.Kindleberger, “Economie Internationale” Tendences actuelles, 7e édition, 1983, pp.444-447.
19 R.Gendarme, “La coordination entre les organes de planification et les organes financiers dans les P.V.D.” Travaux de colloque de l’OCAM, Bordeaux, 1967, p.180.
20 H.C. WALLICH, Underdevelopment countries and the international mecanism in “money, trade and economic growth”, New York, Mc Millan, 1951, pp. 15-32
21 DELAMAS, W.C., “The economics of development of small countries with special reference to the carebbean”, Montréal, M.Gill univ. Press 1965
22 Nations Unies, ” Le financement compensatoires des déficits d’exportations”, New York, 1985, p.6
23 Nations Unies, “La planification et le contrôle des dépenses ordinaires de l’Etat : Leçons tirées d’expériences nationales”, New York, 1987, p.26
24 GREEN, R.H, “Stabilisation and adjustment policies and programs”, country study 1 Ghana, wider publication, Mars 1987
25 Alan Roe et Hartmust Schneider, op-cit chap. III
26 Idem
27 Paddy : Riz non décortiqué exporté par l’Indonésie

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