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A-Le choix entre valeur déclarée ou valeur agréée :

ADIAL

Le code des assurances évoque « la valeur de la chose à assurer ». Une formulation qui
semble vouloir dire que l’assurance ne considère pas le bien couvert, mais uniquement la
valeur qui s’y rattache. La conséquence est la prise en compte d’une multitude de valeurs qui
s’adapteront aux caractéristiques et aux usages de l’objet assuré.

La valeur peut ainsi être vénale, de remplacement, à neuf, dans la limite du principe
indemnitaire. Dans le domaine des oeuvres d’art, on retient essentiellement deux types de
valeurs distinctes. En partant du principe de la non fongibilité d’une oeuvre d’art, dans le sens
où chaque oeuvre est unique et ne peut pas être remplacé à l’identique, nous nous
concentrerons sur la distinction entre la valeur déclarée et la valeur agréée.

1-La valeur déclarée :

La valeur déclarée, repose sur la déclaration faite par l’assuré à son assureur. Sa
détermination intervient théoriquement au moment de la souscription. Cette solution fait
reposer sur les épaules du souscripteur la gestion du risque. Il peut tout à fait déclarer une
valeur moindre que la valeur réelle de son bien, dans le but de minimiser le montant de la
prime à payer. Il se trouvera alors en situation de sous-assurance, qui lui permettra de payer
une cotisation réduite, mais qui l’exposera à un risque d’indemnisation partielle. Dans le cas
contraire il peut arriver que l’assuré déclare un montant supérieur. Il se retrouve alors en
situation de sur-assurance, ce qui aura aussi des répercutions lors de l’indemnisation du
dommage.

En cas de sinistre, c’est l’assuré qui devra apporter les éléments de preuve confirmant la
valeur de l’oeuvre endommagée. Il pourra alors se référer aux montants des ventes d’oeuvres
équivalentes en ventes aux enchères. Mais dans tous les cas le montant de l’indemnisation ne
pourra pas être supérieur à la valeur déclarée lors de la souscription. S’il se trouvait en
situation de sous-assurance, c’est-à-dire que la valeur de l’oeuvre au jour du sinistre est
supérieure à la valeur déclarée lors de la souscription, les conséquences devront être assumées
personnellement par l’assuré. L’assureur pourra lui opposer les dispositions de l’article L 121-
5 du code des assurances, qui dispose que « s’il résulte des estimations que la valeur de la
chose assurée excède au jour du sinistre la somme garantie, l’assuré est considéré comme
restant son propre assureur pour l’excédent et supporte en conséquence une part
proportionnelle de dommage, sauf convention contraire ». En cas de sinistre inférieur à la
valeur déclarée, l’assureur pourra lui opposer la règle proportionnelle des capitaux, qui veut
que l’indemnité versée sera égale à :

(Montant du dommage X Valeur assurée) / Valeur réelle

Cette règle n’est pas impérative et elle pourra être écartée du contrat, en contre-partie d’une
surprime. De même en cas de sur-assurance, l’assuré ne pourra pas prétendre au
remboursement du trop-perçu des primes versées au titre d’une valeur supérieure à la valeur
réelle de l’oeuvre. Le fait que la charge de la preuve repose sur les épaules de l’assuré, peut
être une source de conflit avec l’assureur. Pour éviter ce type de situation, il est possible
d’opter pour le système de la valeur agréée.

Le choix de la valeur déclarée, peut s’avérer intéressant pour les oeuvres de jeunes artistes
contemporains qui peuvent voir leur côte évoluer au fil des années. L’assuré peut ainsi
moduler sa déclaration lors du renouvellement de son contrat et ainsi suivre l’évolution de la
côte de l’artiste. C’est ce que semble confirmer Anne Claire Bisch, souscriptrice chez
Hiscox : « Par exemple un collectionneur qui achetait de l’Anish Kapoor il y a dix ans avait
intérêt à prendre de la valeur déclarée. Cette oeuvre achetée 100 et assurée en valeur
déclarée, le jour du sinistre cinq ans après, vaudra peut-être 300 (28)». Il faut considérer que
c’est l’assuré qui est le mieux placé pour suivre l’évolution de la valeur des oeuvres dont il est
propriétaire.

2-La valeur agréée :

La valeur agréée est une solution qui permet d’anticiper les problèmes d’appréciation de la
valeur entre l’assuré et l’assureur, grâce à l’intervention d’un tiers : L’expert. L’expert évalue
la valeur de l’oeuvre au moment de la souscription du contrat en se basant sur différents
éléments (cf Section 2-I). L’avantage principal de cette méthode est de permettre un accord
préalable entre l’assuré et l’assureur sur le montant assuré. Pour l’assureur le choix de la
valeur agréée s’avère plus sûr, car il connaît le montant maximal de son engagement au jour
de la souscription ou lors du renouvellement avec une nouvelle expertise.

En pratique, l’estimation des oeuvres figure dans une annexe du contrat où figure leur valeur
agréée. Ces estimations n’étant pas indexées, elles doivent être régulièrement révisées. En
moyenne et selon les contrats, elles le sont tous les deux ou trois ans. Cependant compte tenu
de la volatilité du marché, ces estimations peuvent s’avérer supérieures à la valeur de l’oeuvre
au jour du sinistre. Dans ce cas on se fondera sur l’article L-121 alinéa 1 du code des
assurances, qui dispose que le montant que doit verser l’assureur, ne peut pas être supérieur à
la valeur du bien au jour du sinistre. Mais il appartient alors à l’assureur d’apporter la preuve
que l’oeuvre assurée a subi une perte de valeur depuis sa dernière estimation. Ce
renversement de la charge de la preuve opère en fait une double présomption puisque elle
fait présumer d’une part que la valeur fixée lors de la souscription était exacte et qu’elle est
demeurée la même jusqu’au jour du sinistre(29).

Conséquence majeure de la valeur agréée, est l’abrogation de la règle proportionnelle de
capitaux, compte tenu de l’accord trouvé entre l’assuré et l’assureur sur les modalités du
contrat (valeur assurée, cotisations…etc.).

Le rôle de l’expert est déterminant dans le sens où il fixe le montant des engagements de
l’assureur. Une compagnie comme Axa Art, disposait en son sein, de ses propres experts,
appelés « délégués artistiques ». Si cette organisation s’expliquait par une réactivité et une
efficacité accrues, elle posait néanmoins certaines questions d’un point de vue déontologique
et technique. Techniquement, comme dans toutes disciplines, l’art est très diversifié. Il est
impossible qu’une personne soit experte à la fois en mobilier XVIIIe et en art contemporain.
Il peut en résulter des erreurs d’appréciation qui peuvent être préjudiciables aux deux parties.

Déontologiquement, un expert intégré à une compagnie ne présente pas une image
d’indépendance qui devrait accompagner la notion de valeur agréée. Être juge et partie n’a
jamais fait bon ménage avec la notion d’objectivité. Depuis début juillet, Axa Art n’a plus
recours à ces délégués artistiques. Cela se traduit pour les assurés par un transfert de leurs
contrats en valeur agréée par ces délégués, en contrat en valeur déclarée, ainsi qu’à un report
de la charge de la preuve sur les épaules des assurés.

28 Nelson La Forêt, Thèse « le marché de l’assurance des oeuvres d’art, vitrine de l’assurance sans avenir ou
niche à exploiter », p 24
29 Lamy Assurances, édition 2012, p 658

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